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Présidentielle au Niger : Mohamed Bazoum contre Mahamane Ousmane, le dauphin contre l’ancien président

Publié le lundi 22 fevrier 2021  |  information.tv5monde.com
Mohammed
© Autre presse par DR
Mohammed Bazoum et Mahamane Ousmane
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La continuité ? Un ancien président ? Le second tour de l'élection présidentielle au Niger ce 21 février oppose Mohamed Bazoum et Mahamane Ousmane. Arrivé très nettement en tête le 28 décembre dernier, Bazoum est le candidat du pouvoir. Après les ralliements d'autres candidats, il fait figure de favori. Ousmane, lui, fut le premier président démocratiquement élu du Niger dans les années 90. Sécurité, démographie... Quelle que soit l'issue du scrutin, les enjeux sont énormes pour le futur président.

Mohamed Bazoum, le dauphin

"Nous avons stabilisé notre pays et avons beaucoup progressé pendant dix ans. Nous avons une expérience de l’État (...) J’ai été au cœur des grandes décisions, et je sais ce qui a fonctionné ou non". Quand, en novembre 2020, l'hebdomadaire Jeune Afrique demande à Mohamed Bazoum comment il souhaite convaincre les Nigériens de voter pour lui, sa réponse ressemble à un bilan du président sortant. Inutile pour cet homme de 60 ans de cacher son statut de dauphin de Mahamadou Issoufou.
Les deux hommes sont proches depuis trois décennies et, au cours des deux mandats d'Issoufou, Bazoum a été aux premières loges, en tant que chef de la diplomatie d'abord de 2011 à 2015 puis comme très influent ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique entre avril 2016 et juin 2020. Entre ces deux postes, il est - entre 2015 et 2016- ministre d’État à la présidence, chargé de porter la réélection de Mahamadou Issoufou.

Un trentenaire au gouvernement

Le parcours politique de Mohamed Bazoum commence dans les années 80. Né en 1960 dans la région de Diffa au sein de la tribu des Ouled Slimane, ultra minoritaire au Niger, il part étudier la philosophie à Dakar à l'aube des années 80. Rentré au pays diplôme en poche, devenu professeur, il adhère au Syndicat national des enseignants du Niger puis devient l'un des dirigeants de l’Union syndicale des travailleurs du Niger, au titre de laquelle il prend part à la Conférence nationale en 1991.

A l'époque, le Niger, comme nombre de pays du continent africain, se voit contraint de desserrer l'étau et s'ouvrir au multipartisme. Quelques mois avant la Conférence nationale, Bazoum a créé un parti, le PNDS (Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme) avec Mahamadou Issoufou. Contraint d'organiser la conférence sous la pression de la rue, le général Ali Saïbou acceptera ensuite d'ouvrir une période de transition.

Mohamed Bazoum, tout juste trentenaire, entre au gouvernement au poste de secrétaire d’État auprès du ministre des Affaires étrangères. Deux ans plus tard, le PNDS remporte les législatives. Le président Mahamane Ousmane se trouve face à une cohabitation. Mohamed Bazoum est ministre des Affaires étrangères dans un gouvernement emmené par Hama Amadou, future bête noire du régime de Mahamadou Issoufou.

Figure incontournable de la décennie Issoufou

Mais un an plus tard, le 27 janvier 1996, Mahamane Ousmane est défait par un coup d'Etat emmené par le colonel Ibrahim Baré Maïnassara, et Bazoum entre durablement dans l'opposition. D'autant qu'en 1999, après l'assassinat de Baré, Mamadou Tandja remporte la présidentielle et restera dix années au pouvoir.

Bazoum, lui, retrouvera alors les bancs de l'Assemblée nationale. C'est avec l'élection de son vieil ami Mahamadou Issoufou que Mohamed Bazoum revient au premier plan. Figure incontournable de la décennie Issoufou, son passage à la sécurité intérieure a laissé des souvenirs amers à la société civile. En 2018, une vingtaine de militants de différentes associations sont ainsi arrêtés pour avoir manifesté contre une loi de finances jugée "antisociale".

Deux ans plus tard, en mars 2020, nouvelles arrestations lors de rassemblements contre la corruption. Trois militants ne seront libérés que début octobre après plus de six mois de détention. Pour Bazoum, la société civile n'est en fait qu'une opposition déguisée.

Avantage écrasant pour Bazoum

Lors du premier tour, Mohamed Bazoum a très nettement devancé ses adversaires. Avec près de 40% des suffrages, le candidat du pouvoir comptait plus de 20 points d'avance sur le second, Mahamane Ousmane. Les candidats éliminés ne s'y sont pas trompés : Seïni Oumarou et Albabé Abouba, arrivés respectivement 3e et 4e, ont apporté leur soutien à Mohamed Bazoum, lui donnant un avantage définitif. Deux autres candidats malheureux, Mallam Alma Oumarou et Moussa Barazé Hassane, crédités respectivement de 2,47% et 2,40 % ont déjà appelé à voter pour Mohamed Bazoum.

Mahamane Ousmane a, pour sa part, reçu le soutien du général Salou Djibo (2,98%) et devait bénéficier des apports de quatre candidats du premier tour issus de la coalition Cap 20-21, ayant recueilli un peu plus de 7% à tous les quatre.

Mahamane Ousmane, l'ex-président

D'autres auraient jeté l'éponge pour moins que cela. A 70 ans, Mahamane Ousmane est une vieille figure de la politique nigérienne dont le parcours a connu tous les soubresauts de la démocratie naissante. En 1991, année de la Conférence nationale et de l'ouverture au multipartisme, il fonde son propre parti, le Congrès démocratique et social (CDS) à la tête duquel il accède à la présidence deux ans plus tard.

Premier président démocratiquement élu

L'histoire retient que Mahamane Ousmane est le premier président démocratiquement élu de l'histoire du Niger. Mais son mandat sera court et tumultueux. Rapidement, il doit faire face à une rébellion touarègue devenue protéiforme dans le nord du pays.
Il parvient pourtant à mettre tout le monde autour d'une même table et en 1995, un accord de règlement global est signé. Un accord en pleine cohabitation car, deux mois plus tôt, le CDS a perdu les élections législatives et un Premier ministre, Hama Amadou, issu du MNSD de Mamadou Tandja a été nommé.

Fragilité politique et crise économique, le contexte est difficile : en janvier 1996, Mahamane Ousmane est renversé par un coup d'Etat. A la tête de la junte, le colonel Ibrahim Baré Maïnassara qui s'accrochera solidement au pouvoir jusqu'à son assassinat en 1999. En 1996, lors d'une présidentielle entachée d'irrégularités, Mahamane Ousmane arrive en 2e position mais est arrêté et assigné à résidence.

"Faiseur de roi"

A la présidentielle de 1999, sa 3e place fera de lui un "faiseur de roi". Son soutien permet à Mamadou Tandja de remporter la présidentielle au second tour face à Mahamadou Issoufou. Soutien récompensé puisque cette même année, il est élu à la présidence de l'Assemblée nationale sans aucun adversaire. Il y restera jusqu'en 2009, se présentant néanmoins à la présidentielle de 2004 et y retrouvant son rôle de "faiseur de roi".
Sa 4e place en 2011, lors de la première présidentielle post-coup d'Etat, va fragiliser Mahamane Ousmane au sein de son parti, le CDS, dont il sera exclu quatre ans plus tard. En 2015, c'est donc sous les couleurs d'un tout jeune parti, le Mouvement des Nigériens pour le renouveau démocratique (MNRD) qu'il se présente et termine à nouveau 4e, derrière les mêmes que précédemment.
C'est donc la sixième participation de ce natif de Zinder à une présidentielle. Zinder, la 2e ville du pays où Mahamane Ousmane garde une assise électorale importante.

Les défis du futur président

Le 2 janvier 2021, au moment où étaient proclamés les résultats du premier tour de la présidentielle, des dizaines de Nigériens étaient tués dans une attaque près de la frontière malienne, dans la région de Tillabéri, dans la zone "des trois frontières" Niger-Mali-Burkina, souvent frappée par les groupes djihadistes.

Le poids de la démographie

Après dix années de présidence de Mahamadou Issoufou, le futur président hérite également de problématiques plus locales.
Concernant l'éducation, le bilan n'est pas bon : "Avec un taux de réussite de 33% au brevet et moins de 30% au baccalauréat, l'école connaît de grosses difficultés", estime le journaliste Seidik Abba, concédant toutefois que la tâche du président sortant n'a pas été facilitée par des résultats économiques fragilisées par la baisse du prix de matières premières dont regorge le Niger, l'uranium et le pétrole.

La sécurité et l'éducation seront, à n'en pas douter, parmi les principaux défis du futur président nigérien. Auxquels il faut ajouter, mais tout cela est lié, le défi démographique. Le Niger compte actuellement autour de 21 millions d'habitants, mais connaît toujours le taux de fécondité le plus élevé au monde : plus de sept enfants par femme en moyenne. A ce rythme, sa population avoisinera les 30 millions à la fin de cette décennie. "Mahamadou Issoufou n'a pas réussi davantage que ses prédécesseurs sur ce point", reconnaît Seidik Abba.

Une diplomatie plus active

Le journaliste le concède toutefois, les dix années de présidence de Mahamadou Issoufou ont été un succès sur le plan des infrastructures tout d'abord. Avec "des échangeurs, des hôtels, centres de conférences, mais aussi un aéroport international digne de ce nom et un troisième pont sur le fleuve Niger", la capitale Niamey a changé de visage.

Autre point positif, la diplomatie. Après une période de marginalisation après le coup d'Etat de février 2010, le Niger a repris une place sur la scène africaine, mais aussi internationale avec un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de l'ONU pour la période 2020-2021, mais aussi un sommet de l'Union africaine organisé en juillet 2019 dans un Palais des congrès totalement rénové. Ce sommet avait été consacré à la future Zone de libre échange africaine (ZLEC). Pour ce qui est de la diplomatie, "il y a un bilan", concède Seidik Abba.


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