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Accords Niger – AREVA : faut- il s’en réjouir ou en … rougir ?
Publié le mardi 10 juin 2014   |  Le Souffle


Accord
© Autre presse par DR
Accord de partenariat stratégique entre l’Etat du Niger et AREVA
M. Omar Hamidou Tchiana, le ministre des Finances et le président du directoire d’AREVA M. Luc Oursel


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Après 18 mois de « laborieuses négociations », le Niger et le « géant mondial du nucléaire », ont enfin signé le lundi 26 mai 2014, les papiers faisant office d’accords de partenariat liant les deux parties pour une période de cinq ans. Il était grand temps, car les nigériens commençaient à en avoir ras le bol, et d’ores et déjà, de nombreuses voix s’élevaient pour réclamer la nationalisation pure et simple des mines d’uranium d’Arlit et d’Akokan.

Au sortir d’une cérémonie de signature richement pavoisée de couleurs nationales, la partie gouvernementale, par médias interposés, n’a pas hésité à sauter dans l’arène pour proclamer et savourer sa victoire. Depuis, les médias proches du pouvoir, sans modération aucune, inondent littéralement l’opinion d’un concerto ininterrompu de « youyous » et de « hourra ! ». Ce qui a pour effet de relancer vivement la polémique.

Plus que jamais, l’heure est maintenant aux interrogations. Combien vont rapporter ces fameux accords au pays de la girafe sahélienne? Ces accords sont-ils réellement « justes et équilibrés », « gagnant – gagnant » comme dirait l’autre ? Faut-il vraiment s’en réjouir ou finalement en rougir ? Les nigériens veulent davantage voir clair !

Combien le Niger va-t-il gagner sur une année fiscale ?

Question posée par les confrères de RFI et de l’ONEP à monsieur Ladan Tchana, Ministre des mines et du développement industriel du Niger, également négociateur en chef pour la partie nigérienne. Sur un ton blasé, pour ne pas dire désabusé, le ministre nigérien a livré une réponse qui a interloqué plus d’un de ses compatriotes. « Quoi ? Tous ces mois de négociations et toutes ces marches et déclarations de la société civile pour 20 milliards de CFA seulement ? », s’est offusqué un observateur de Maradi. En effet, selon les détails donnés par le ministre, la SOMAÏR qui est rentable, va générer 15 milliards de recettes fiscales supplémentaires, tandis que la COMINAK qui ne l’est pas, rapporterait moins de la moitié, soit entre 5 à 7 milliards de CFA. Au total, avec cette augmentation et si on y ajoute le 30 milliards d’avant la convention, le Niger espère engranger de son uranium, des recettes de l’ordre de 50 à 55 milliards de CFA. « Toujours que des broutilles de milliards … », note scandalisé cet autre observateur de Maradi.

AREVA a, dans une sorte de compensation, promis de contribuer à hauteur de 60 milliards de CFA pour la réalisation de la RTA (Route Tahoua – Arlit) longue de plus de 600 km. Le « géant français » dans sa générosité va aussi débourser 17 milliards pour des projets de développement dans le nord du pays dont l’aménagement de la vallée de l’Irhazer et 6.5 milliards pour la construction d’un immeuble devant abriter les sièges des sociétés filiales d’AREVA au Niger. Enfin dernière concession, les postes de DG de SOMAÏR et COMINAK vont être « nigérisés », respectivement en 2014 et 2016. Voici au total, ce que le Niger a pu « arracher » des mains d’AREVA. Concocté et agencé comme tel, beaucoup de nigériens trouvent, à l’instar de ministre Tchana, qu’il faudrait plutôt s’en réjouir, car il suffit selon lui de faire la comparaison pour voir la différence. Soit !

Qu’est-ce que le Niger a perdu ?

Aucun journaliste n’a cependant posé aux autorités nigériennes cette question gênante. Il n’ya pas de doute, le Niger a perdu gros dans cette transaction. La plus grosse perte proviendrait de l’abandon de l’exploitation du gisement d’Imouraren, désormais repoussée jusqu’en 2020 ! La situation n’a pas encore été faite, mais l’on sait surtout que beaucoup d’employés vont perdre leur gagne pain quotidien. Avec des prévisions de 5000 tonnes de production annuelle, Imouraren allait pourtant rapporter au Niger le double de ce que rapportent SOMAIR et COMINAK jumelées. Une perte sèche estimable au bas mot à 100 Milliards de CFA par an. Plus grave, AREVA maintient toujours Imouraren dans son escarcelle, alors que celle-ci devrait en principe tomber dans le domaine public. Autre perte, ou tout au moins un gros oubli, c’est le silence complet autour des dommages et déchets environnementaux causés par AREVA. Les membres de la société civile d’Arlit ont tôt fait de pointer du doigt cette nouvelle convention qui donne carte blanche à AREVA pour continuer à piller l’environnement, à vider et souiller les nappes phréatiques, exposant directement plus de 100 000 personnes et un nombre incalculable d’animaux, à des périls radioactifs certains.

Doit-on vraiment s’en réjouir ?

Non, répondent en cœur les acteurs de la société civile nigérienne. Dans un communiqué rendu public le 29 mai la coordination des organisations de la société civile d’Arlit, dénonce l’impasse des accords sur les questions environnementales et la non prise en compte des intérêts des populations environnantes dans cette convention, ainsi que le report de l’exploitation de la mine géante d’Imouraren. Déception, regret et inquiétude, ont été les mots-clés de cette déclaration. De son côté, la société civile de Niamey, regroupée au sein du collectif « Sauvons le Niger », à travers des communiqués et des conférences de presse, dénonce sans ambages des accords totalement défavorables au Niger. Bref, ces gens-là, tout comme beaucoup d’autres nigériens, ne sont pas du tout contents. Exit Ladan Tchana qui voit en leur mécontentement, un « agenda politique ».

Pourtant, un simple recours à la jugeote et à la calculette leur donne entièrement raison. Le report de la mise en valeur de la mine d’Imouraren à lui seul va couter dans les 5 ans à venir, une perte sèche de plus de 500 milliards de CFA aux caisses de l’Etat. Comparé à ce qu’AREVA vient de concéder dans les accords, pendant les 5 à venir, il n’ya pas match. Selon la nouvelle convention et dans l’hypothèse où la situation devrait stagner, le Niger récolterait en 5 ans, des recettes fiscales de l’ordre de 250 à 275 milliards de francs. Ajoutez-y les 60 milliards de la RTA, les 17 milliards de l’Irhazer, et même les 6 milliards de l’immeuble qui doit abriter le siège des sociétés filiales d’AREVA plus les salaires des DG, le géant français aurait concédé 333 milliards de CFA seulement. Comparez à ce que SOMAÏR, COMINAK et Imouraren pourraient rapporter si les prévisions du Niger étaient prises en compte. On a un trou d’au moins 150 milliards, de quoi priver au moins 150 communes rurales du Niger de leurs ressources en développement, pendant au moins 5 ans !

Revenons à ces derniers détails. 60 milliards pour construire une route de plus de 600 km de la part d’AREVA, sachant que le km bitumé se facture aujourd’hui à plus de 2 milliards, avouons que c’est à la limite insultant. Car cette somme ne pourra construire, tout au plus que 30 km ! Les salaires des DG ? Personne n’en sait grand-chose, pour l’instant. Mais selon des indiscrétions en provenance d’Arlit, au moment de « la nigérisation », le salaire des DG va passer de 12 millions de CFA par mois à 4 millions. C’est donc des « coquilles vides » qui seront concédées aux nigériens.

En définitive, mettez le tout dans la balance et observez les visages des nigériens. Ils ont de quoi en rougir, c’est incontestable. Mais comme les nègres ne rougissent pas, ils vont sans doute en … noircir !

El Kaougé Mahamane Lawaly,

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