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M. Abdou Hamani, président de la Commission Nationale de Coordination de la Lutte contre la Drogue : « Le Niger est devenu un espace de transit de la drogue »
Publié le samedi 29 juin 2013   |  Le Sahel


Drogues
© Autre presse par DR
Drogues saisis par la police nigérienne


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Monsieur le président, la communauté internationale a célébré, le 26 juin dernier, la journée internationale de lutte contre l'abus des substances illicites et des drogues. Pouvez-vous nous rappeler l'historique de cette journée et les objectifs qui lui sont fixés ?

Comme vous le dites, la communauté internationale a célébré le 26 juin dernier, comme chaque année d'ailleurs, la journée internationale de lutte contre l'abus des substances illicites et des drogues. Cette journée a été instituée depuis 1987 par l'Assemblée Générale des Nations Unies. Le mandat de la lutte contre le problème mondial de la drogue a été confié à l'Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC) par la Commission des stupéfiants et les trois principaux traités de contrôle de la drogue (Convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988, Convention de 1971 sur les substances psychotropes, et Convention unique sur les stupéfiants de 1961).

L'ONUDC a donc pris la tête de la campagne internationale destinée à faire mieux connaître l'énorme problème que la drogue pose pour la société et surtout pour les jeunes. Cette campagne cherche à mobiliser les populations pour qu'elles réagissent face à l'abus de drogues et encourage les jeunes à penser d'abord à leur santé et à ne pas prendre de drogues.
Les adolescents et les jeunes adultes sont particulièrement exposés à l'abus des drogues. La prévalence de l'abus de drogues dans ce groupe est plus de deux fois supérieure à ce qu'elle est dans l'ensemble de la population. La pression exercée par le groupe, qui pousse à expérimenter les drogues illicites, est parfois forte, tandis que l'estime de soi est souvent faible. Par ailleurs, ceux qui se droguent sont en général soit mal informés, soit peu au fait des risques sanitaires encourus. Cette journée participe également à la sensibilisation du public sur la protection des droits de l'Homme, mais aussi à la sensibilisation des producteurs et des trafiquants sur les risques qui sont encourus dans la vente et la consommation des substances illicites et des drogues.


Une Commission Nationale de Coordination de la Lutte contre la Drogue est créée dans notre pays. Quelles sont ses attributions et quel est le bilan de ses activités de sa création à nos jours ?

La commission Nationale de Coordination de la Lutte contre la Drogue (CNCLD) a été prévue depuis la loi de 1971 sur les stupéfiants. Elle a été créée par le décret 92-277/PM/MJ du 17 août 1992. Présentement, elle est prévue par l'article 89 de l'ordonnance n°99-42 du 23 septembre 1999 relative à la lutte contre la drogue. Logée au niveau de la Direction Générale des Affaires Judiciaires et des Sceaux du Ministère de la Justice, la CNCLD est composée de représentants de plusieurs administrations et de la société civile œuvrant dans le cadre de la lutte contre la drogue. Ces membres sont nommés par arrêté du ministre en charge de la justice.
La CNCLD peut faire appel à toute personne ou structure dont elle juge la compétence ou l'expertise nécessaire pour réaliser ses objectifs. Les objectifs de la CNCLD sont d'identifier les besoins et les problèmes en matière de lutte contre la drogue à l'échelon national; de définir une stratégie dans le cadre des politiques publiques en matière de santé et de répression; de suivre et coordonner l'application de la stratégie et du programme national contre le trafic des stupéfiants et des substances psychotropes; d'entreprendre une campagne intense d'information, de sensibilisation et d'éducation du public afin de réduire la demande, l'offre, la production et le trafic de la drogue; et enfin d'élaborer des statistiques fiables sur le trafic et la consommation de la drogue au Niger.
Pour atteindre ces objectifs, la CNCLD dispose d'un Plan Directeur National, qui a été élaboré et adopté par le Gouvernement en 1999. Ce plan se fixe comme objectifs le renforcement des compétences des acteurs de la prévention par des formations destinées à plusieurs catégories de personnes, le renforcement des capacités d'intervention des structures de la société civile impliquées dans la lutte contre la drogue, la création des antennes régionales d'information, d'éducation et de communication, enfin le développement d'un dispositif national d'information et de sensibilisation. Elle dispose aussi d'un Plan National d'Action (PNA) adopté en 2000.
Je précise également que notre pays dispose d'un cadre juridique et institutionnel de lutte contre la drogue. En effet, le Niger a ratifié, aux plan international et sous-régional, la Convention Unique des Nations Unies sur les stupéfiants de 1961; la Convention des Nations Unies sur les substances psychotropes de 1971; la Convention des Nations-Unies contre le trafic illicite des stupéfiants et des substances psychotropes de 1988; la convention de la CEDEAO sur l'entraide judiciaire de 1992; la convention de la CEDEAO relative à l'extradition de 1994; et la convention de coopération et d'entraide en matière de justice entre les Etats membres du Conseil de l'Entente. Au plan national, il y a l'ordonnance n° 99-42 du 23/9/1999, relative à la lutte contre la drogue au Niger et la loi n°97-002 du 10 janvier 1997 portant législation pharmaceutique. Au titre des institutions œuvrant dans le domaine de la lutte contre la drogue, on peut noter entres autres le Centre de Coordination de Lutte contre la Drogue (CCLAD) et le Laboratoire National de Santé Publique et d'Expertise (LANSPEX).
Malgré tous ces objectifs et un cadre juridique approprié, force est de constater que le rôle de la commission se limite, faute de moyens, à la commémoration, chaque année, de la journée du 26 juin. Cette commémoration se fait à travers l'organisation des manifestations sportives et ou culturelles, des séances de sensibilisation, des conférences débats et elle procède à l'incinération des drogues saisies et jugées. Cette année également, la journée a été marquée par des manifestations sportives et culturelles, mais aussi l'animation des émissions comme ''opinions plurielles'' et ''radio réveil '' que les auditeurs ont suivi sur les antennes de la Voix du Sahel avec des invités spécialisés en santé mentale, en droit et en sensibilisation des groupes cibles et des toxicomanes.


Peut-on comprendre que notre pays est un lieu indiqué dans la production, la vente ou la consommation des drogues?


Je dois vous dire que s'il est vrai que notre pays n'est pas producteur des drogues, il n'en demeure pas moins qu'il est un espace de transit et de ce fait, il y a une grande consommation de substances illicites et des drogues. Il faut également souligner qu'il existe dans notre pays un important réseau de vente de ces substances illicites et même des drogues de toutes sortes. Pour vous convaincre, je vous rappelle que les statistiques nationales de l'année 2012, publiées par le Centre de Coordination de Lutte contre la Drogue, font état de 1.254 personnes interpellées dont 1.232 hommes et 22 femmes. Parmi ces personnes interpellées, il y a 1.172 Nigériens et le reste est constitué d'étrangers. Il faut également mentionner que parmi ces 1.254 personnes, il y a 892 personnes âgées de 18 à 29 ans. Ces chiffres concernent aussi bien la vente que la consommation de la drogue.
C'est pour vous dire que des dispositions très urgentes doivent être prises par notre pays pour prévenir et interdire non seulement la consommation, mais également la vente de toutes ces substances illicites et ces drogues qui menacent la santé et même la vie de nos populations les plus vulnérables, notamment la jeunesse.


Quelles sont les principales substances interdites qui sont fréquemment saisies au Niger ?


Les principales substances psychotropes interdites et saisies dans notre pays sont principalement le cannabis, la cocaïne, les comprimés de diazépam, d'éphédrine, d'amphétamine et bien d'autres non moins importants. Et selon les statistiques de l'année 2012, les quantités suivantes de ces substances ont été saisies par nos services de la douane, de la police et de la gendarmerie: 464,189 kg et 716 cornets de cannabis; 5,509 kg et 141 cornets de cocaïne;2. 094 771 comprimés (diazepam, phénobarbital, éphédrine) ; 4,500 kg de Métamphétamine ; et 1,572 kg de poudre d'amphétamine.
Il faut tout de même souligner que cette liste ne fait pas cas de l'utilisation du tramadol (connu sous le nom de tramol), qui est aujourd'hui un véritable fléau social. En effet, ce produit est utilisé par tous les travailleurs physiques, les taximen, les dockers et même dans les cérémonies de mariage, baptême et autres réjouissances. Ces faits viennent d'être confirmés par une mission conjointe du Ministère de la Santé Publique et celui de la Justice effectuée en juin 2013, qui a visité toutes les prisons et qui a rencontré tous lesé lus locaux de notre pays.


Quelles sont les difficultés que rencontre votre commission dans le cadre de ses activités ?


Effectivement, notre commission rencontre plusieurs sortes de difficultés dans le cadre de la mise en œuvre de ses attributions. La première et la plus grande difficulté est le manque de moyens financiers, car je dois vous dire que dans le budget du Ministère en charge de la Justice, seul un montant d'environ six millions (6.000.000) de FCFA est prévu annuellement pour la célébration de la journée internationale de lutte comme la drogue. Cela veut dire qu'après cette célébration, la commission ne dispose d'aucune ressource pour financer ses activités au cours de l'année. Pourtant, comme je l'ai mentionné plus haut, la commission dispose d'un plan directeur et d'un plan d'actions national, aux termes desquels de nombreuses missions lui sont confiées. Malheureusement, compte tenu de ce manque de moyens financiers évoqué, aucune de ces missions n'a été exécutée.


Monsieur le président, quels sont les perspectives de votre commission pour une réelle prise en compte de vos activités et l'exécution de vos attributions ?


Merci de me donner cette occasion pour vous dire que nous venons de rependre l'arrêté de nomination des membres de la commission. Ces nouveaux membres, qui connaissent parfaitement les différentes missions de la commission, veulent s'inscrire dans une nouvelle vision. En effet, une des premières actions de cette nouvelle équipe, c'est de mener des actions tendant à faire connaître la commission et son rôle au niveau des ministères dont les représentants s'y trouvent. Aussi, la commission, pour disposer de ressources nécessaires à l'accomplissement de ses activités, a créé en son sein un sous-comité de plaidoyer-mobilisation de ressources. Enfin, la commission envisage de revoir aussi bien le plan directeur qui date de 1999, que le plan national d'actions de 2000. Cette révision nous permettra de réactualiser tous les projets prévus dans le cadre du plan d'actions afin de pouvoir les réaliser.

Il faut préciser que la réalisation de ces projets permettra d'honorer les engagements que notre pays a pris par rapport à la mise en œuvre, d'une part, du plan d'actions régional sur la prévention de l'abus des drogues, le trafic illicite des drogues et les crimes organisés en Afrique de l'Ouest, adopté par les Chefs d'Etat et de gouvernement de la CEDEAO lors du 35ème Sommet ordinaire tenu à Abuja le 19 décembre 2008, et d'autre part, celle du plan d'actions de l'Union Africaine adopté à Addis-Abeba en octobre 2012.

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