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Retarder le remaniement pour sauver l’alliance au pouvoir ?
Publié le vendredi 12 juillet 2013   |  Le Monde d'aujourd'hui


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© AFP par DR
Visite du chef de l`Etat en Allemagne : Le président Mahamadou Issoufou et et la chancelière allemande Angela Merkel anime une conférence de presse
Mercredi 08 mai 2013. Berlin - Chancellerie. Le président Mahamadou Issoufou du Niger et la chancelière allemande Angela Merkel lors d`une conférence de presse à l`issue de leur entretiens.


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« Il (ndlr : le président Issoufou) ne l’avait pas voulu, maintenant il le veut, il va le faire (ndlr : le remaniement) mais il va le faire en ayant lui seul de façon exclusive le calendrier. Ce que je sais, c’est que probablement il y aura un remaniement mais je ne connais pas la date, ça c’est le président seul qui peut vous le dire, quand il en prendra la décision, ça se saura. »

Ces propos du président par intérim du PNDS-Tarayya Bazoum Mohamed lui-même prononcés sur la radio Anfani le 16 Juin 2013 ont fini par convaincre l’opinion nationale de l’imminence du remaniement tant attendu. Aujourd’hui, près d’un mois après ces déclarations, on est toujours dans l’attente de ce balayage gouvernemental. Ceci ne peut être le fruit d’un hasard et le Monde d’aujourd’hui pense qu’il s’agit là d’une véritable stratégie politique.

Dans un premier temps, on a entendu dire que c’est l’enquête de moralité des futurs membres du gouvernement qui retarderait la formation de la nouvelle équipe. Ensuite, les déplacements d’abord du président de la République, et après, du Premier ministre sont mis en avant pour expliquer la lenteur dans la publication de la liste du nouveau gouvernement. Mais toujours rien. L’attente se poursuit sans aucune explication officielle. Seule la rumeur se charge d’étancher maladroitement la soif d’information du public nigérien.

Cette situation peut bien découler d’une stratégie politique qui ne dit pas son nom. Voyons ce que ça peut être. Vers la fin de la dernière session ordinaire de l’Assemblée nationale, on s’attendait à une recomposition politique imminente. On disait que l’ARN, Alliance pour la réconciliation nationale avec l’aide d’une partie de la MRN , la Mouvance pour la renaissance du Niger allait en finir avec le gouvernement de Brigi Rafini. Les attentats terroristes d’Agadez et Arlit le 23 Mai ont, dit-on, sauver l’alliance au pouvoir.

Cela est passé, l’Assemblée a clos sa session dans la sérénité hormis le vote du Statut du personnel du cadre des douanes qui a sonné comme les prémices de l’inéluctable rapprochement MNSD Nassara – MODEN Lumana. Pour mémoire, ce vote a provoqué une fissure au sein de la MRN avec le PNDS-Tarayya qui a voté « contre » le texte et le MODEN Lumana qui lui, a préféré le « pour » au même titre que l’ARN, opposition politique. C’est au lendemain de cette session qu’est apparu, comme par en chantement, le fameux remaniement ministériel attendu depuis 2 ans.

Mais cette fois, ça vient du sommet de l’intelligentsia du parti au pouvoir avec Bazoum Mohamed comme annonciateur. Précisons que lors de cette annonce, le diplomate peu diplomatique était non seulement président par intérim du PNDS, ministre des Affaires Etrangères mais également Premier ministre par intérim. Alors, il n’y a pas plus crédible qu’une telle source concernant l’information officielle. Question : pourquoi annonce t-on un remaniement à un si haut niveau de responsabilité alors que les préalables n’étaient même pas réglés ?

Il est bien vrai qu’on dit de Bazoum à tort ou à raison, qu’il parle avec moins de délicatesse mais qu’il donne l’assurance que le chef de l’Etat est désormais décidé à remanier le gouvernement apparaît comme une décision consensuelle au sein du pouvoir. En tout cas, on voit mal le ministre Bazoum prendre la liberté de prêter de telles intentions au président de la République sans que celui-ci ne donne son aval au préalable. Maintenant, voyons la suite. Depuis, cette annonce, il faut dire que le débat public s’est beaucoup recentré sur cet hypothétique remaniement.

Ainsi, un temps, on a oublié l’amateurisme de gouvernement actuel, la pauvreté qui ronge les citoyens, la sécheresse financière qui après les populations est en passe de gagner le trésor public avec la spectre des arriérés de salaires. Il est clair que l’annonce à un haut niveau d’un remaniement gouvernemental a quelque peu détourné l’attention du public sur l’essentiel à savoir l’incompétence de la gouvernance actuelle. Mais il n’y a pas que cela. A travers le retardement de la formation d’une nouvelle équipe, le pouvoir pourrait bien chercher à couper l’herbe sous les pieds de l’opposition.

La prochaine session ordinaire de l’Assemblée nationale étant prévue pour le mois d’Octobre prochain, le président de la République en retardant au maximum la mise en place d’un nouveau gouvernement joue la stratégie du calendrier. Qu’est-ce à dire ? Nous sommes presque à la mijuillet. Si un gouvernement est formé vers la fin du mois voire le début Août, la session parlementaire interviendra alors que le gouvernement en place ne sera âgé que de 2 mois et poussières. Alors, quel argument objectif, technique et matériel pourrait-on mettre en avant pour descendre une équipe qui n’a même pas un trimestre de travail ?

Dans ce cas, même en cas de motion de censure, le pouvoir dira que les initiateurs ne cherchent ni plus ni moins à créer une instabilité politique et institutionnelle pour revenir aux affaires. Et il n’aura pas tout à fait tort car comment jugé un ministre, u gouvernement qui n’a pas encore fini de prendre connaissance des dossiers sous sa charge ? En plus, à voir de près la campagne de désignation d’un bouc émissaire d’une éventuelle recomposition politique menée par des publications proches du pouvoir, on ne peut qu’accorder plus de crédit à cette hypothèse.

En fait, dans ce cas d’espèce, le président Issoufou ne sera pas à son premier coup d’essai. Il vous souviendra que c’est le jour même où l’opposition politique voulait déposer une motion de censure contre le gouvernement dans l’affaire Oumarou Maïnassara que le chef de l’Etat a signé le décret ayant mis fin aux fonctions de Kalla Hankouraou et Ouhoumoudou Mahamadou incriminés par l’ARN dans ladite affaire. On sait aussi que le PNDS est réputé très fort dans les coups bas et autres manigances politiques ayant d’ailleurs permis son accession à la tête de l’Etat.

Si gouverner de manière à satisfaire les légitimes aspirations du peuple est une entreprise très difficile qui nécessite une certaine expérience et expertise, les manigances politiques n’en demandent pas autant. C’est comme dans un jeu d’échec, il faut savoir profiter de l’instant de naïveté de l’adversaire pour lui assener un coup « mortel ». Et ça ce n’est pas difficile pour le parti politique qui a réussi à grandir dans l’ombre des crises politiques et institutionnelles que le Niger a connu de la Conférence nationale à aujourd’hui. Il est bien vrai que sous Baré, des Premiers ministres ont été déposés avant même de former leur gouvernement.

Mais aujourd’hui, le contexte est tel qu’il faut avoir des arguments en béton pour toucher à un gouvernement dans cet environnement précaire d’un point de vue sécuritaire. Pendant que l’ARN attend le bon moment pour jouer sa carte maîtresse, le pouvoir lui, tente d’arrêter le temps avec un intelligent jeu de calendrier. On ne peut dire que le PNDS-Tarayya tient le mauvais bout mais son seul désavantage est le mécontentement quasi-général des populations nigériennes. Un mécontentement qui pourrait jouer en faveur d’une motion de censure même si elle est déposée le lendemain de la formation du nouveau gouvernement.

Après tout, « la belle fille ne peut donner plus que ce qu’elle possède ». Et ce n’est pas tant du gouvernement que les nigériens se plaignent. C’est de la gouvernance dont ils ont assez et entre gouvernement et gouvernance, il y a nuance.

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