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Ministère de la santé publique : Détournement de plus d’un milliard de francs CFA
Publié le samedi 2 mars 2013   |  tamtaminfo


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© Autre presse par DR
L`hopital national de Niamey


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Les choses se précisent substantiellement depuis la semaine dernière qui a enregistré des interpellations en masse des agents du Ministère de la santé publique et le début de leur comparution devant le tribunal le jeudi 21 février dernier. C’est une véritable panique qui règne sur le personnel de la santé et du côté des partenaires financiers il s’agit tout simplement d’un véritable scandale financier. 1.149.032.338 francs CFA, c’est le montant net des fonds des partenaires financiers qui a été détourné au niveau du Ministère de la santé publique.

Ce scandale financier a été révélé suite à des investigations par un auditeur indépendant. Ces investigations se sont déroulées courant de l’année 2011, mais il faut dire que c’est une évaluation de routine sur la gestion financière en janvier 2011 sur les fonds GAVI qui a très vite révélé des manquements et des anomalies, notamment des pratiques de fractionnement des marchés et des surfacturations.

L’audit général conduit par les partenaires financiers et qui va couvrir les périodes 2007, 2008, 2009 et 2010 va conclure à un détournement de plus d’un milliard de francs CFA, entièrement englouti par certains cadres du Ministère de la santé intervenant dans le domaine de l’immunisation. Le document du rapport détaillé des investigations auquel nous avons eu accès présente une situation détaillée du détournement, des tableaux récapitulatifs des opérations irrégulières, tant au niveau central du Ministère notamment la DI, Direction des Immunisations qu’au niveau des DRSP, Direction Régionale de la Santé Publique. Sur l’ensemble de la période auditée qui va de l’année 2007 à 2010, le rapport évoque 4 ordres de malversation.

Les dépenses inéligibles qui représentent à peu près 0,3% du montant global détourné et qui ont occasionné la dissipation de 3.275.800 francs CFA. Il s’agit là des dépenses effectivement réalisées mais qui ne rentrent pas dans le cadre du programme d’intervention des donateurs de GAVI. Global Alliance pour les vaccinations et les immunisations (GAVI) intervient avec l’appui de l’UNICEF sur l’introduction du vaccin DTC3, Diphtérie, Tétanos et Coqueluche. Plus tard GAVI va introduire un vaccin combiné contre l’hépatite B et l’Hémophilus Influenza. Le système vaccinal au Niger va passer ensuite en mode Penta avec l’introduction de trois nouveaux vaccins qui sont le Rotavirus, le vaccin contre la pneumonie et le HPV, Human Papilloma Virus.

Mais la direction des immunisations va orienter 3.275.800 francs CFA dans le cadre des JLV pour le ravitaillement en vaccin BCG et en vaccin Polio oral VPO dont les dépenses ne sont pas prises en charge par le programme GAVI. Le deuxième ordre de malversation concerne les fraudes et irrégularités. Ça a été le plat de résistance des cadres de la santé, 61,19% du montant détourné soit 711.615.055 FCFA. Il y a aussi les dépenses insuffisamment justifiées qui représentent une part de 178.338.849 FCFA, soit 15,5% du total et les décaissements non justifiés pour un montant net de 255.802.634 FCFA qui représentent 22,3% de la somme détournée. Le cumul total de ces différentes anomalies dans la gestion des fonds GAVI se chiffrent globalement à 1.149.032.338 FCFA.

Sur le chapitre des fraudes et irrégularités qui représente la partie la plus importante du détournement, le rapport d’investigation mentionne le recours à la production des dépenses fictives relatives à l’achat des pièces détachées, la fabrication des fausses factures pour justifier le paiement, la surfacturation et le fractionnement des commandes, l’utilisation des prête-noms pour obtenir des marchés et d’autres pratiques anti concurrentielles. Le rapport d’investigation relève des cas typiques des fraudes. Sur l’achat des pièces détachées par la division des immunisations pour la période de 2007 à 2009 pour un montant de 107.135.063 FCFA, il est apparu après consultation des fiches du garage administratif de la santé publique (Garage SERPA) que les réparations pour un montant de 85.330.680 FCFA n’ont jamais été effectuées.

Plus grave encore, pour des devis établis au nom du Garage SERPA, le chef du Garage administratif présente des factures dont l’entête porte son nom propre et le paiement de ces factures est effectué aux noms d’autres fournisseurs fictifs. Autres fractionnements et surfacturations : un marché d’achat de 60 motos a été fractionné et attribué à 11 fournisseurs par consultation restreinte. Les caractéristiques des motos présentées dans les offres des fournisseurs prévoyaient la livraison des motos de type YAMAHA DT 125 origine Japon, dont le prix unitaire est de 1.772.000 FCFA. L’investigation a révélé que au lieu des motos DT 125, ce sont des motos chinoises qui ont été livrées, à un prix unitaire moyen de 2.100.000 FCFA alors que leur prix unitaire sur le marché national et selon la mercuriale des prix, varie entre 350.000 à 400.000 FCFA.

La moyenne de la surfacturation s’élève à 517%. L’examen du dossier a aussi révélé que les documents des offres des fournisseurs présentent des similitudes identiques (contenu, caractère, police, texte, taille), et tout indique en réalité que c’est une même personne qui a obtenu les marchés sous le couvert des prêtenoms fictifs. Les décaissements d’argent et le transfert du niveau central au niveau des DRSP pour la rémunération des agents de vaccination ne sont pas aussi effectifs. Sur un échantillon de 46 acteurs interrogés dans les régions et districts sanitaires, 44 acteurs de la vaccination ont affirmé n’avoir pas reconnu leur signature, ni perçu les montants qui figuraient sur les états d’émargement des per diem.

Tout indique là aussi que c’est un montant important que les responsables de la DI et probablement des DRSP se sont mis en poche à travers la production ou la fabrication de faux états de paiement et les imitations de signatures. Une sale affaire qui éclabousse le Ministère de la santé et qui fait peser même des doutes sur l’effectivité de la couverture vaccinale, indique le rapport d’audit commandé par les partenaires de GAVI qui, pour l’instant ont demandé au gouvernement nigérien le remboursement des montants détournés qui se chiffrent à 1.149.032.338 FCFA. Saisi de cette affaire depuis 2011, le gouvernement nigérien va par la suite déclencher à son tour une inspection d’Etat dans la comptabilité du Ministère, mais aussi s’est engagé à rembourser le montant détourné.

On n’apprend à ce sujet que le Ministère de la santé a déjà effectué un remboursement de 900.000.000 de francs CFA. Des poursuites judiciaires engagées depuis jeudi ont concerné les agents de la santé. Ce sont près de 33 responsables qui ont été présentés à la justice au terme de 3 jours d’interpellation en chaîne du jeudi 21 au samedi 23 février dernier, dont 4 anciens directeurs du PEV et des hauts fonctionnaires du Ministère de la santé. Depuis jeudi, ce sont 21 personnes qui ont été écrouées alors que d’autres sont mises en liberté provisoire. Tous ont été inculpés de fraudes et de détournement des fonds publics. Mais ce qui est sûr, c’est que la procédure est loin d’être clause, et les mesures d’interpellation ne vont pas se limiter aux seuls cadres de la santé.

Elles pourraient certainement déboucher sur d’autres interpellations des opérateurs économiques fournisseurs du Ministère qui ont bénéficié des marchés publics frauduleux où qui seront coupables de complicité de détournement. Pour l’instant, la seule réaction officielle dans cette scandaleuse affaire est venue des syndicats des agents de la santé qui, dimanche 24 février dernier, dans une déclaration conjointe du SUSAS et du SYNPHAMED, ont dénoncé le caractère quelque peu expéditif de l’inspection d’Etat conduite depuis 2012. Le SUSAS et le SYNPHAMED, les deux principaux syndicats du secteur de la santé publique ont en effet dénoncé les violations évidentes de la procédure en matière de contrôle et d’inspection, notamment l’article 17 du décret 97-272/PRN qui stipule que «toute opération de contrôle ou toute enquête faite par un fonctionnaire de l’inspection d’Etat donne lieu de sa part à l’établissement d’un rapport sur lequel le responsable du service vérifié est appelé à formuler ses observations en réponse ».

L’inspection d’Etat n’a pas aussi respecté l’article 11 du même décret qui dans son alinéa 3 stipule ceci : «ils peuvent (les inspecteurs) se faire présenter tous registres, correspondances et documents administratifs même confidentiels, ou se les faire communiquer, contre reçu, à l’exception des pièces justificatives des comptes des comptables qui ne peuvent être consultés que sur place ». Dans le cadre de cette affaire, les inspecteurs ont emporté certaines pièces justificatives qu’ils gardent actuellement dans leurs locaux, relèvent le SUSAS et le SYNPHAMED. Ce qui ne permet pas aux agents de santé de produire des justificatifs dans les faits qui leur sont reprochés.

Le personnel de la santé estime plutôt qu’il a été broyé par la machine de l’Etat alors qu’il y a quelques temps encore, ils avaient même été fortement félicités pour les efforts qu’ils ont consentis dans les campagnes vaccinales qui ont porté les taux de couverture de 23% en 2002 à 95% actuellement, ce qui a fait reculer considérablement le taux de mortalité infanto-juvénile de 198 pour 1000 à 130 pour 1000 selon les chiffres de l’OMS. Les responsables syndicaux se disent aussi surpris par cette disparité sur les montants chiffrés entre la police judiciaire et au niveau du parquet.

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