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Pour un dialogue politique au Niger…
Publié le mercredi 26 aout 2015   |  tamtaminfo.com


SEM.
© Autre presse par DR
SEM. Issoufou Mahamadou,Président de la République du Niger


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guinéens (pouvoir et opposition) viennent de trouver un accord politique sur le processus électoral en cours dans leur pays alors que les joutes et guéguerres s’accentuent au Niger au sujet également des élections. Pourtant la crise guinéenne était très profonde et existait depuis l’élection du président Alpha Condé. Si les guinéens se délectent aujourd’hui de cet accord alors pourquoi pas au Niger ? Et le Niger en disposant d’un cadre de dialogue politique – le Conseil national de dialogue politique (CNDP) – se trouve pourtant très en avance sur certains pays en matière de dialogue.

Qu’est-ce que le dialogue politique ?
Quelles sont les conditions de possibilité de ce dialogue au Niger ? Pourquoi pouvoir et opposition au Niger doivent-ils privilégier une approche dialogique à leur différend ?

En s’appuyant sur quelques sagesses, cette modeste contribution au débat actuel en cours dans notre pays vise à rappeler quelques principes élémentaires du dialogue.
Invité à Niamey par les chrétiens pour animer une conférence sur le dialogue interreligieux, le sage Amadou Hampathé Bâ a déclaré : « Pour se comprendre mutuellement, il est bon d’oublier un moment qui l’on est et ce que l’on sait, afin d’être ouvert, disponible, et mieux écouter son interlocuteur. Un homme tout empli de lui-même, pressé d’étaler son savoir, ramenant tout à lui, ne saurait être convenablement à l’écoute de personne. Il cherche plutôt à se faire entendre qu’à écouter patiemment celui qui expose quelque chose. Même lorsqu’il se tait, il rumine déjà sa réponse et, finalement, se prive du bénéfice de l’échange et de toute chance d’apprendre davantage.

Or la vie est leçon perpétuelle et l’on a toujours quelque chose à apprendre. Mon maître Tierno Bokar avait l’habitude de dire : ‘’il y a trois vérités : ma vérité, ta vérité, et la Vérité. Cette dernière se situe à égale distance des deux premières. Pour trouver la vérité dans un échange, il faut donc que chacun des deux partenaires s’avance vers l’autre, ou ‘’s’ouvre’’ à l’autre. Cette démarche exige, au moins momentanément, un oubli de soi et de son propre savoir. Une calebasse pleine ne peut pas recevoir d’eau fraiche… » Amadou Hampathé Bâ, Jésus vu par un musulman.

Le dialogue n’est pas chose aisée en ce sens qu’il suppose une violence sur soi. Une certaine renonciation à quelque chose souvent à laquelle l’on tient tant. Le psychanalyste Jacques Lacan a dit : « Le dialogue parait en lui-même constituer une renonciation à l’agressivité ». En effet, opter pour le dialogue c’est renoncé à la violence ou d’autres voies d’expression non rationnelles.
C’est, pour ainsi dire, communiquer. Et on le sait, le but de toute communication c’est la compréhension mutuelle. Quand on parle c’est pour se faire entendre et surtout se faire comprendre. On échange, on discute mais pour qu’il y ait discussion il faut s’accorder sur quelque chose. Cet accord n’est possible que lorsque les interlocuteurs peuvent participer sans aucune contrainte extérieure.

Cela suppose également que les participants au dialogue soient de bonne foi et que leur propos ait de la véracité. D’où la nécessité d’une certaine ‘’éthique de la discussion’’. Car comme dirait l’autre : « Il ne faut pas discuter avec quelqu’un qui nie les principes ». Dans ce sens, le dialogue pourrait être envisagé comme ‘’un face à face’’, un rendez-vous du donner et du recevoir, une confrontation pouvant déboucher sur une décision, un consensus ou un accord.
Les préalables au dialogue

Traitant du dialogue en général Wikipedia nous donne la description suivante du dialogue : «… Comme toutes communications, le dialogue comprend au minimum un émetteur et un récepteur. Cependant, le dialogue se distingue dans le processus qui unit ces deux protagonistes. Alors que la donnée émise est le message, le but du message est l’objectif de la communication ; dans un dialogue véritable, le but n’est donc pas le sujet de l’énoncé, il ne s’agit pas d’avoir raison du récepteur ni de lui imposer un point de vue cognitif, une perspective ou référence. Ainsi, par un code constituant un langage qui peut être verbal ou non verbal, une parole est contenue dans le message et transmise dans la communication, afin d’être décodée et reçue par le destinataire, puis de lui signifier quelque chose qui a du sens dans sa propre existence. Le dialogue appelle donc à ce que les acteurs de la communication soient transformés dans leur être, en toute liberté ; l’écoute active, l’humilité sincère et le respect mutuel y sont donc nécessaires. »

Dans le guide du facilitateur du dialogue entre partis politiques de l’International Institute for Democracy and Electoral Assistance, on peut lire ceci : « Le dialogue n’est pas une invention moderne. À travers l’histoire et dans la plupart des sociétés, le fait de rassembler des personnes pour les aider à surmonter leurs différences et à résoudre leurs problèmes a toujours été une mission prestigieuse, généralement confiée à des individus expérimentés, à des anciens ou à des personnes respectées pour la qualité de leur jugement et leur sagesse. Certains éléments de « méthodologie du dialogue » ont été et sont encore employés dans les sociétés traditionnelles et s’appuient sur des procédures et coutumes ancestrales (par exemple, les jirgas, les shuras et les conseils de village). Leur validité est d’ailleurs reconnue dans les processus de justice de transition, de gestion des conflits et de réconciliation (IDEA international, 2008b) »

Ainsi selon les situations de crise, on observe souvent des initiatives internes où les acteurs en présence peuvent accepter de se retrouver pour discuter des problèmes au nom de l’intérêt général. Tout comme on a recours également aux médiations qu’elles soient nationales ou internationales.

En termes de préalables ou disons précaution pour un dialogue nous empruntons ici la règle de « l’éthique de la discussion » de Jürgen Habermas dont la théorie de « l’agir communicationnel » fait autorité pour les débats dans les sociétés démocratiques aujourd’hui. Cette règle se décompose donc en deux étapes :
« 1) Il faut prendre en compte les intérêts des personnes qui peuvent être affectées par la norme examinée ;
2) et tenir compte des jugements que lesdites personnes posent sur la norme. »
En d’autres termes, cela revient à dire le plus simplement du monde que les intérêts du peuple et l’opinion des citoyens doivent être les seules références, les seules guides au dialogue politique puisque c’est de cela qu’il s’agit.
C’est dire qu’il n’y a de sujet tabou dans ce dialogue que ce que le peuple souverain considère comme tel.
L’état des lieux pour un dialogue politique au Niger

A priori, on pourrait dire que présentement le contexte est difficile voire hostile au dialogue politique au Niger malgré l’existence du Conseil national de dialogue politique évoqué plus haut. Le pouvoir et l’opposition se regardent en chiens de faïence. L’opposition persiste et signe en récusant : la Cour Constitutionnelle, la Commission Electorale Nationale Indépendante, le Comité d’élaboration du fichier électoral et accuse le pouvoir de concassage des partis politiques de son obédience. Et par ricochet, elle a rejeté la main tendue du président de la République à l’occasion de son dernier message à la nation le 2 Aout dernier.

La création du Front Patriotique Républicain (FPR) par l’opposition élargie à une partie de la société civile en dit long sur le contexte non dialogique qui caractérise la situation politique dans notre pays. Au même moment, côté pouvoir, on rétorque que l’opposition joue à la mauvaise foi et joue au dilatoire du moment où elle serait impliquée sur toute la ligne dans le processus de mise en place des structures qu’elle récuse. Et à propos du concassage des partis politiques de l’opposition, le pouvoir argue que cela dénote simplement le mauvais leadership de cette opposition.

Et aussi côté majorité, la récusation de la Cour constitutionnelle, le juge électoral est une question qui fâche tant elle traduit pour la mouvance au pouvoir la mauvaise foi de l’opposition. L’argumentaire de la majorité consiste à dire que le désaveu de la Cour constitutionnelle n’a aucun fondement juridique.

De proche en proche, il s’installe résolument un dialogue de sourds entre le pouvoir et l’opposition au Niger. Et à moins de 7 mois des prochaines élections, il urge de prendre le cas du Niger très au sérieux. L’état des lieux est loin d’être propice au dialogue politique.

Peut-être que la récente visite de l’américain, le Directeur du NDI (National Democratic Institute) au président de la République viserait-elle le déclic de la situation ?
Les conditions de possibilité du dialogue politique au Niger
Il y a lieu de souligner ici pour mieux le féliciter que le CNDP a fait ses preuves dans la résolution des antagonismes politiques au Niger. La situation actuelle surprend plus d’un observateur notamment en ce qu’elle concerne les élections puisqu’on pourrait même considérer que c’est une exception que cette fois-ci la classe politique tarde à s’entendre sur l’organisation des élections générales.

Il est vrai que sous Tandja avec le tazarce, le CNDP a failli à sa mission même si par ailleurs le recours à la médiation internationale – la CEDEAO avec Aboubacar Abdoussalami – n’avait pas également arrangé les choses.

Cette situation met en évidence que le dialogue qu’il soit l’initiative national ou international, si les acteurs ne sont pas de bonne foi, s’ils sont animés des attitudes « jusqu’auboutistes », le fiasco sera toujours au rendez-vous. En son temps les partisans du tazarce étaient déterminés à faire leur salle besogne de sorte qu’ils n’étaient pas disposés au dialogue. Mais cela c’est un autre contexte. Une autre situation.

Et ironie du sort, pendant qu’on reprochait à Tandja son tort d’avoir dissout la Cour Constitutionnelle, l’opposition actuelle pousse apparemment le président Issoufou à faire le même sacrilège en ce sens que les membres de l’actuelle Cour sont inamovibles selon la loi fondamentale.

Cela pourrait constituer un véritable verrou au dialogue si tant est que l’opposition tient à récuser la CC. Nous pensons que cela pourrait être un tabou au dialogue politique en ce sens que seul un coup de force peut suspendre ou recomposer l’actuelle Cour Constitutionnelle.
Toutefois, si le pouvoir et l’opposition sont disposés à dialoguer véritablement il va falloir d’un côté, l’opposition et la société civile acquise à sa cause formule des doléances raisonnables ou du moins légales à défaut d’être réalistes. De l’autre côté, il va falloir sans tarder mettre en branle le Conseil national de dialogue politique pour s’attacher à l’examen des doléances de l’opposition.

Autrement, le pouvoir et l’opposition doivent être également disposés à commettre une médiation internationale qui donnera plus de garanties à tout le monde. Dans ce cas, les prétentions et les vérités des uns et des autres pourront s’exprimer et on sera de quel côté se situe la mauvaise foi.
Il nous semble qu’il n’est pas un luxe pour le Niger d’explorer ces pistes pour la paix dans un contexte électoral inclusif et apaisé. Encore une fois, la classe politique doit se reprendre pour simplement donner au peuple nigérien dont chacun et tous se réclament : la chance à paix et la cohésion indispensables pour tout développement.

Toute attitude contraire à l’esprit du dialogue du pouvoir ou de l’opposition serait nuisible au Niger qui a trop souffert des batailles partisanes débouchant sur des remises en cause des acquis de notre peuple.

Qui a intérêt que le Niger s’enlise aujourd’hui encore dans une crise politique ? A qui profite les guéguerres politiciennes ?
Nous osons espérer que pouvoir et opposition rééditerons l’exploit guinéen en temps réel. Il y a de quoi y tenir quand on sait que malgré les mécompréhensions entre politiciens, ce qui nous réunit au Niger est plus important que ce qui nous divise. C’est le moment de cette convergence. Le peuple nigérien y tient et il appelle à cela de tous ses vœux. Refuser cet appel c’est donner raison à Henri Lafrance lorsqu’il dit : « Peu importe le dialogue ou le monologue, les gens ne comprennent et ne saisissent que ce qui fait leur affaire. »

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