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Le Sahel N° du 28/1/2016

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Lettre ouverte au président de la République : Quels sont, donc, ces juges, si vous n’avez pas votre main dans l’incarcération de Hama Amadou, qui refusent d’obtempérer à un arrêt de la Cour constitutionnelle ?
Publié le samedi 30 janvier 2016   |  Le Sahel


Le
© Autre presse par DR
Le président de l’Assemblée nationale, Hama Amadou


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Je constate que malgré les dénonciations et les plaintes de vos compatriotes, vous n’avez pas encore arrêté votre campagne électorale. Vous continuez ainsi à violer la loi électorale, de la manière la plus vulgaire, liant dans la perpétration de cet acte liberticide, la plupart des membres de votre gouvernement ainsi que les diplomates étrangers en poste à Niamey. Vous battez campagne, au mépris de la loi dont vous êtes le premier garant et au mépris de vos compatriotes qui attendent de vous de servir le plus bel exemple. En violant la loi électorale, précisément l’article 21 de la loi 2014-03 du 28 mars 2014 qui interdit formellement les activités gouvernementales auxquelles vous vous adonnez, vous et votre gouvernement, vous donnez de votre pays une image regrettable et de l’extérieur, on ne peut pas ne pas penser au Gondwana de notre compatriote Maman.
Ce sont des actes liberticides qui annihilent, vous pouvez me croire, tout ce que vous donnez l’impression d’être en train de faire. D’ailleurs, pour quelqu’un qui prétend avoir si bien travaillé au point d’envisager une réélection au premier tour, il y a quelque chose de surprenant, voire de bizarre. Si tel est le cas, beaucoup de vos compatriotes relèvent que vous n’auriez pas eu besoin de violer la loi électorale comme vous le faites. Cela veut dire qu’ils comprennent parfaitement que, d’une part vous n’avez pas si bien travaillé comme vous le dites ; d’autre part que vous violez en plus la loi électorale parce que, et c’est cela qui est rebutant, vous considérez qu’il n’y a pas de moyen de trop pour gagner l’élection, y compris en franchissant toutes les lignes rouges. Avec une telle posture qui vous prend, encore une fois, en porte-à- faux avec la loi de votre pays, on ne peut que donner raison à Issoufou Bachard qui disait que vous êtes prêts à sacrifier le Niger pour garder le pouvoir. Cette violation flagrante de la loi électorale dont vous vous rendez constamment coupable ne rassure pas vos compatriotes quant à votre capacité à accepter le verdict des urnes si vous êtes battu. J’ai beau rappelé qu’à deux reprises, vous avez reconnu votre défaite face à Mamadou Tanja, ils rétorquent invariablement que les contextes ne sont pas les mêmes ; que cette fois-ci, c’est vous qui êtes au pouvoir et que vous avez montré depuis lors un autre visage. C’est à l’ouvrage que l’on reconnaît le bon ouvrier, dit-on. Vos compatriotes ont compris la leçon et ne se tromperont pas deux fois, croyez-moi. Comment voulez-vous qu’ils votent pour un président de la République qui est le premier à violer la loi qu’il a, lui-même, promulguée ? Excusez-moi la comparaison, mais c’est comme un chef de famille qui accepte de se nourrir et de se vêtir avec de l’argent sale que lui procure une de ses filles. Doit-on, parce qu’on est pauvre, accepter que sa fille se vende pour vous entretenir ? Un président de la République, chef suprême des armées et président du Haut conseil de la Magistrature, qui viole délibérément la loi, est nécessairement un candidat qui fait peur. Les Nigériens ont peur et ne cachent pas leur détermination à changer cette situation désastreuse. Comment pouvez-vous violer la loi et demander en même temps à vos compatriotes de vous faire confiance ? Pour mener le Niger vers quels rivages ?

Monsieur le Président, pour beaucoup de vos compatriotes, votre candidature n’inspire pas confiance. Elle n’inspire pas confiance pour deux raisons fondamentales : d’abord, votre gouvernance a été émaillée de scandales en tous genres comme on n’en a jamais vus dans ce pays au cours de ces 25 dernières années de démocratie multipartiste. La mise sous coupe réglée des libertés publiques, le harcèlement des adversaires politiques, l’usage de faux dans les statistiques nationales, l’enrichissement illicite, la remise en cause des intérêts stratégiques du Niger, la mise à rudes épreuves de la cohésion sociale et de l’unité nationale, sont, entre autres, les gerbes qui bordent et ornent votre parcours à la tête de l’État. Qu’avez-vous vraiment réussi qui ait apporté un changement positif dans la vie de vos concitoyens ? Ce qui vous aurait permis de le réaliser, c’était, entre autres, des projets tels que le barrage de Kandadji et la centrale thermique de Salkadamna. Ni l’un ni l’autre n’ont été réalisés. Pourtant, vos prédécesseurs, en particulier Mamadou Tanja, vous ont laissé un actif admirable. De quoi pouvez-vous réellement vous prévaloir pour demander un second mandat ? Le rail que vous évoquez si souvent est un véritable gâchis. Non seulement, ce qui a été fait a été mal fait, donc inutilisable, mais il vaut aujourd’hui au Niger un procès dans lequel nous risquons gros. Tenez, il y a un peu plus d’une semaine, un essai – le nième – a encore été effectué sur le fameux rail. Eh bien, ceux qui s’y sont aventurés ont passé trois heures et un quart (3H 15 mn) avant d’arriver...à Birni N’gaouré, à une quarantaine de kilomètres de Dosso où vous aviez promis, en vain, d’arriver en train le 18 décembre 2014. Exténués, ils ont préféré retourner à leur point de départ, à Niamey, en voiture. C’est dire que le rail reste toujours un mythe dans notre pays. Les 3N ? Une vaste mise en scène qui n’a trompé personne. Faire croire, à partir de la magie télévisuelle, que ce qui se faisait depuis des années dans le boboye est le produit des 3N comporte des risques que vous n’avez pas suffisamment mesurés avant d’engager tout le tintamarre que l’on sait sur un projet vide de substance. Des jardins et des sites potagers vieux de plusieurs décennies ont été utilisés pour faire avaler la couleuvre. Bien entendu, il a suffi de peu de temps pour que les Nigériens découvrent ce qu’un compatriote a appelé la supercherie et Amadou Alahouri n’a pas perdu son temps. Il a jeté l’éponge et est parti vers des cieux plus sérieux. Alors, lorsqu’on a échoué à nourrir son peuple pendant que le potentiel est là ; lorsqu’on a échoué à donner à son peuple son indépendance énergétique alors que vous avez eu les clés dans vos mains ; lorsqu’on a échoué à préserver les acquis de luttes héroïques alors qu’il suffisait de peu de courage et de sincérité pour y arriver ; lorsqu’on a échoué à consolider l’unité et la cohésion nationale alors que l’architecture sociale offre un terreau fertile ; lorsqu’on a échoué à donner l’exemple dans le respect strict des lois et règlements de la République ; lorsqu’on a échoué à s’élever au dessus de la mêlée en prenant ouvertement parti, je me demande de quoi l’on peut se prévaloir pour demander, à l’heure des bilans, un autre mandat. Un détail important de ces échecs multiformes : « À l’Ecole Inter-État des sciences et médecine vétérinaire (EISMV) de Dakar, nous apprend- on, c’est une certitude, si rien n’est encore fait, des étudiants et stagiaires nigériens seront exclus, sans songer aux autres étudiants et stagiaires nigériens boursiers de l’État qui sont dans les universités publiques et privées, autres instituts et grandes écoles du Sénégal. Ils se sont vus sommés, ce jeudi 20 janvier 2016, de quitter les salles de cours ainsi que le campus social de manière définitive pour non-paiement de leurs frais d’inscription (2 millions 50 milles FCFA par étudiant à multiplier par 48)». No comment, comme disent les Anglais.

Monsieur le Président, faites la balance et vous vous rendrez compte que le candidat Issoufou n’a pas de chance de poursuivre son aventure à la tête de l’État. Je ne ferais pas dans la méchanceté en parlant de répit pour vous, eu égard à toutes ces tribulations que vous avez vécues au cours de ces cinq années de pouvoir, de ces longues nuits d’insomnie, de ce stress quotidien, bref, de ce mauvais cinéma qui vous impose comme rôle strict de ne pas accepter la réalité de l’échec qui est là, grandeur nature, mais de revendiquer plutôt des chiffres que tout le monde sait faux. L’histoire rocambolesque de la moyenne de huit classes construites par jour est d’une singularité exemplaire. Même dans l’hypothèse où il s’agit de classes préfabriquées dans le style chinois, une telle performance est impossible. Excusez-moi le caractère cru de mon propos, mais je suis d’avis avec les débatteurs de l’émission Afrique presse de Assane Diop, sur Radio France internationale (RFI), le samedi 16 janvier 2016, qui soutenaient que vous n’avez pas de bilan. Échouer n’est-il pas humain ? N’est-ce pas faire preuve de grandeur d’âme que d’accepter de reconnaître humblement ses limites objectives, voire ses échecs ? C’est cela qui vous a manqué. L’humilité est un caractère fort apprécié de Dieu, contrairement à l’orgueil qui est détesté du Créateur. Seul l’orgueil peut amener un homme à refuser ses échecs pour s’inscrire dans une logique suicidaire. Laurent Gbagbo, ancien président de la Côte d’Ivoire, membre de l’Internationale socialiste comme vous, a été ruiné par son orgueil fat et inutile. Je ne vous souhaite pas un tel sort. Pas plus que je ne souhaite à mon pays, le Niger, le sort que la Côte d’Ivoire a connu, il y a quelques années. En vérité, la dernière carte à abattre pour qu’il y ait des élections inscrites dans la tradition nigérienne est entre vos mains. Libérez tous les prisonniers politiques et vous réussirez votre sortie. La Ceni a joué sa partition dans le respect de ses missions et continuera sans doute à veiller sur son indépendance ; la Cour constitutionnelle a rejeté la patate chaude en refusant de déclarer des candidats inéligibles sur des bases farfelues ; il ne reste plus que vous pour dégager le boulevard qui mène à des élections inclusives, crédibles et acceptées de tous. Si vous libérez Hama Amadou et tous les autres, vous vous seriez non seulement libéré d’un fardeau inutile, mais vous créerez en même temps les conditions de perdre dans la dignité et la grandeur. Imaginez un instant, malgré les conditions que vous lui imposez, que Hama Amadou vous dame le pion à l’issue des élections. Et ce n’est pas exclu au regard, d’une part de la côte de popularité jamais égalée de l’homme en ce moment ; d’autre part en considérant la détermination de vos compatriotes à mettre fin à l’injustice ambiante par la force de leurs suffrages. Interrogez des gens autour de vous, vous apprendrez que vos concitoyens se bousculent pour chercher leurs bulletins de vote comme s’il s’agissait de petits pains. Ils ont hâte, comme l’a presque hurlé une bonne dame, de sanctionner votre pouvoir. Croyez-moi, votre échec électoral est inévitable. Sur tous les plans, vos compatriotes se plaignent et sont pressés d’en découvre avec cette gouvernance que bon nombre d’entre eux n’hésitent pas à juger scandaleuse.

Monsieur le Président, des amis du Niger, paraît-il, sont encore dans nos murs depuis hier. Ils viennent à nouveau tenter de vous amener à de meilleurs sentiments afin que le Niger, notre pays, puisse faire ces élections de fin de mandat dans des conditions participatives, transparentes et honnêtes. Le monde entier, je l’ai déjà dit, vous observe. Vous êtes encore au pouvoir mais vous dégagez l’impression, en tout cas plus que Hama Amadou que beaucoup de visiteurs disent décontracté et serein, d’un homme qui s’est enfermé dans une prison invisible, incapable de se défendre mais refusant curieusement d’y sortir. Peut- on s’auto-flageller ainsi ? Ne continuez pas cette politique de l’autruche en refusant de regarder la réalité en face ou à vous laisser bercer par l’illusion de ces rassemblements populaires dont les Nigériens sont coutumiers. Ils accueillent le président de la République comme ils l’ont toujours fait. Cela n’exprime en rien leur adhésion et vous le savez parfaitement pour l’avoir vécu sous Ibrahim Maïnassara Baré. La seule chose honorable que vous avez à faire réellement est de libérer tous les prisonniers politiques. Je reste personnellement persuadé que malgré leur incarcération, Soumana Sanda, Oumarou Dogari, Issaka Issoufou et les autres seront élus. Alors, que feriez-vous s’ils le sont, demain ? Les empêcheriez- vous de siéger à l’Assemblée nationale ? Ce n’est pas bien, Monsieur le Président. Vous êtes en train de vous enfermer dans une sorte de souricière. Les arrêts de la Cour constitutionnelle ne s’imposent-ils pas à tous les pouvoirs publics ? Quels sont, donc, ces juges, si vous n’avez pas votre main dans l’incarcération de Hama Amadou, qui refusent d’obtempérer à un arrêt de la Cour constitutionnelle ?

Monsieur le Président, nous sommes à moins d’un mois des élections. Sachez qu’à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Et lorsqu’on perd sans péril, c’est encore pire. Aménagez-vous des voies de sortie honorables. Le Niger vous a tout donné. Votre reconnaissance, c’est de veiller à ce que rien de grave ne lui arrive. Si vous donnez raison à Issoufou Bachard, vous connaissez votre place dans l’Histoire.

Mallami Boucar

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