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Ne peut-on plus organiser des concours propres au Niger ?
Publié le samedi 23 avril 2016   |  tamtaminfo


Concours
© Autre presse par DR
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Cela commence à devenir, depuis un certain temps, un serpent de mer pour la Fonction Publique qui a toutes les peines du monde à organiser des concours de recrutement corrects, transparents et propres. C’est le cas avec l’annulation des résultats du concours de recrutement de quelques 1800 agents à la Fonction Publique au titre du Ministère de la Santé Publique et qui défraie actuellement la chronique à Niamey.
Face à la confusion générale qui s’était installée dans la publication de la liste des admis qui n’en finissait plus de se rallonger, les autorités compétentes avaient décidé, carrément, d’annuler ledit concours. Quelques mois auparavant, c’était au tour du concours de recrutement de quelques 800 agents à la Fonction Publique pour le compte du Ministère de l’Intérieur de connaître le même sort. A cela était venue s’ajouter l’annulation de certaines épreuves du Bac pour avoir été postées sur Internet quelques heures avant le début des épreuves.
Avouez que c’est trop et que cela commence à être préoccupant pour la cré- dibilité des concours que l’Etat s’efforce d’organiser régulièrement pour renforcer ses capacités en ressources humaines de qualité et de quantité ! Qu’est-ce qui pourrait bien expliquer cet état de fait qui semble entrer, désormais, dans les mœurs populaires d’un pays jadis si étranger à ce genre de pratiques ? Ce sera donc autour des racines profondes de ce mal contemporain national que s’articulera l’analyse qui suivra.
Le déclin progressif de l’esprit civique au Niger
Il est désormais établi, depuis le siècle des Lumières, un lien entre la culture citoyenne d’un pays et son niveau de développement. En effet, pour Voltaire, le phare de ce siècle sublime, plus dans une société le mérite personnel l’emporte sur les titres sociaux (Aristocratie, noblesse, bourgeoisie, paysannerie), plus cette société sera vouée au progrès et à l’épanouissement dans tous les domaines. L’Angleterre de son époque illustrait à ses yeux cet idéal sociétal devant une France profondément injuste et inégalitaire dans ses fondements sociologiques et culturels.
Le socle éternel, indéracinable et inviolable de la construction et de la fortification de toute nation, réside justement dans l’esprit civique dont peuvent faire montre les membres de cette nation dans leur volonté de vivre ensemble et de réaliser leurs communes aspirations. Jusqu’à une certaine période de son évolution historique, le Niger post-indépendant, avec les moyens de bord de cette époque, avait semblé se diriger sur cette voie royale, c’est-à-dire la construction d’un Etat-nation qui garantirait à chaque citoyen le droit de mettre son talent personnel au service de la patrie.
Issues pour la plupart de la paysannerie et formées dans les écoles métropolitaines, les élites politico-administratives du Niger fraîchement indé- pendant n’avaient en vue que les seuls intérêts du pays et de son peuple. Ces élites politiques et administratives, pour la plupart des enseignants, infirmiers et autres vétérinaires de leur état, n’étaient point bardées de parchemins ronflants comme de nos jours (Professorat, doctorat, master, DESS), mais grâce à une conscience civique chevillée et une foi iné- branlable dans le génie créateur de l’homme nigérien, ils avaient réussi à sculpter ce Niger contemporain.
Cependant, et tout le paradoxe estlà, la période démocratique du pays censée constituer le point d’achèvement du volontarisme politique des Pères de l’indépendance se sera très vite révélée comme l’amorce de la phase de dé- clin de notre société dans bien de domaines. En effet, petit à petit, le multipartisme intégral, sans doute inadapté à une nation en devenir comme la nôtre, va profondé- ment éroder toute la base sociologique de notre société pour l’exposer durablement à des tensions politiques et sociales extrêmes, menaçant sérieusement le frêle et fragile équilibre indispensable à la survie de la patrie.
Les partis politiques, sans doute plus portés par l’ardent et pressant désir d’arriver au pouvoir et de s’ouvrir ainsi la voie des rentes étatiques que par le souci de former et de sensibiliser leurs militants et sympathisants sur la citoyenneté responsable, auront largement contribué au déclin progressif de l’esprit civique dans notre pays. Ainsi, par la force des choses, on ne soucie plus de ce qui sert l’intérêt, mais chacun prêchant pour sa paroisse, son clan ou son parti politique ! Les partis politiques sont ainsi devenus, comme le disait si justement le Guide libyen, Mouammar Kadhafi dans son ouvrage »Le Livre vert », les tribus des temps modernes.
Mais il n’y a pas que la conscience citoyenne qui ait été anéantie dans notre pays par les partis politiques dans leur dévoiement, il y a également la culture de l’impunité qui est devenue l’autre grand fléau de notre modernité malade.
L’impunité érigée en mode de gouvernance
Le plus grand sociologue fran- çais du début du 20ème siècle, Emile Durkheim, dans son ouvrage fondamental, »Les dix règles de la méthode sociologique », avait déjà décrit la société anarchique, sans règles précises, situation qu’il avait alors appelée anomie, semblable ou proche de l’état de nature d’un certain Thomas Hobbes dans »Le Léviathan ». Cependant, les juristes contemporains professent que toute société humaine a besoin du droit et tout droit est un produit social ( »Ibi societas, ibi jus »). Cet adage se vérifie très souvent dans le temps !
Aussi, quel que soit le niveau d’élaboration et de raffinement des règles juridiques dans une société donnée, il demeure toujours chez les hommes ce penchant naturel pour l’interdit qui les conduit souvent à la transgression de ces normes sociales. La société parfaite ne serait donc qu’un mythe, une allégorie mystificatrice et une vue de l’esprit, car tant que les hommes vivront ensemble, il y aura toujours des manquements aux normes sociales. Ainsi, la finalité dernière des normes sociales n’est pas tant d’empêcher aux hommes de les transgresser que de sanctionner cette transgression.
En effet, dans une société policée, les lois et règlements en vigueur n’ont jamais la vaine prétention d’abolir dans la société les comportements indélicats, mais bien de les punir lorsqu’ils surviennent, c’est ce que les juristes appellent la fonction sanctionnatrice de la loi. Cette fonction est souvent dévolue à la justice ou à des instances arbitrales appropriées. Les lois sont donc faites pour être respectées et appliquées, et quand elles ne le sont pas, cela expose les contrevenants à des sanctions bien précises.
Les sociétés les plus justes sont justement celles où le respect de la loi est strict et sa violation punie. Les sociétés injustes sont, par contre, celles où l’impunité est érigée en mode de gouvernance, la loi ne valant pas la même pour tous. Les inégalités sociales criardes, les ruptures d’égalité citoyenne devant les charges publiques, les emplois et autres marchés publics, les passe-droits et autres dénis de justice sont le lot quotidien de ces sociétés profondément injustes.
Le Niger contemporain épuise à lui seul cette triste réalité depuis l’avènement du multipartisme intégral dans sa version la plus caricaturale, l’appartenance partisane étant souvent devenue un parapluie pour échapper aux griffes d’une justice sélective et de plus en plus controversée, à la fois, en ce qui concerne son indé- pendance par rapport au pouvoir en place, et aussi s’agissant de l’intégrité morale des hommes et des femmes chargés de la rendre ! Or, lorsque l’impunité se généralise et se banalise dans une société, rien ne peut être en sécurité et tout le monde est en danger, car l’impunité engendre l’injustice.
Un pays a beau se doter des plus grands arsenaux de textes de lois plus sévères, tant que l’impunité y a cours et a droit de cité, cela aboutira, fatalement, à une justice à double vitesse : seuls les plus faibles payeront pour leurs forfaits et les plus forts réussiront à s’y soustraire. Pendant que les voleurs de marmites écument leurs jours derrière les barreaux durant des années dans l’attente d’un éventuel procès, les voleurs en cols blancs, recouverts seulement d’un vernis de respectabilité sociale, se la coulent douce, en toute impunité, quand ils ne narguent pas, tout simplement, les honnê- tes citoyens par l’exhibition des fruits de leurs rapines !
C’est cela qui caractérise ce Niger contemporain où la course effrénée à l’enrichissement par les moyens est devenue le sport favori national des Nigériens. On peut ainsi tout acheter au Niger aujourd’hui et aussi y vendre tout, y compris des épreuves du Bac ou des admissions à des concours de recrutement à la Fonction Publique par des fonctionnaires ou autres responsables politiques véreux, dans la mesure où l’impunité étant devenue la règle et la sanction l’exception! Cependant, l’impunité est loin d’être une fatalité en soi et son cycle n’est pas irréversible, pour peu que l’on décide de la combattre en s’attaquant aux racines de la corruption sur le terreau de laquelle elle prospère.
La HALCIA comme panacée ?
Aussitôt après la confusion générale ayant émaillé la publication de la liste des admis du concours de recrutement de près 2000 agents à la Fonction Publique pour le compte du Ministère de la Santé Publique, les plus hautes autorités du pays ont promptement réagi face à la situation. En effet, comme pour les fraudes au Bac et pour le cas du concours de recrutement de 800 agents à la Fonction Publique au titre du Ministère de l’Intérieur, la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées (HALCIA) avait été immédiatement instruite par le Président de la République pour faire toute la lumière sur cette scabreuse affaire et situer les responsabilités dans toute la chaîne décisionnelle.
D’ores et déjà, plusieurs agents de la Fonction Publique ont été interpelés par la Police Judiciaire et gardés à vue. Mais l’opinions publique nationale ne saurait se contenter de ces menus fretins, ces lampistes, pendant que les gros poissons sont hors de portée. La HALCIA, si l’on désire réellement qu’elle accomplisse bien la mission pour laquelle elle a été créée, c’est- à-dire combattre la corruption sous toutes ses formes, doit avoir les coudées franches pour aller investiguer et pêcher en haute mer afin de mettre la main sur les requins. L’impunité zéro ne doit plus avoir droit de cité dans ce Niger renaissant de la seconde mandature.
Pour cela, aucune couverture politique, aucun clientélisme politique ne doit venir obstruer la mission d’assainissement et de moralisation de la vie publique nationale pour laquelle le Président de la République, Issoufou Mahamadou, accorde une importance primordiale. Si le premier mandat avait semblé donner un goût d’inachevé par rapport à ce chantier important, le second quinquennat doit être résolument placé sous le signe de la redynamisation de la HALCIA pour faire le job en toute liberté et en toute efficacité. C’est à ce prix seulement que le Président Issoufou, à la fin de son deuxième et dernier mandat, aura joint l’acte à la parole pour laisser à ses successeurs un pays assaini et redressé.
Ainsi, les concours et autres examens frauduleux ne seront que de lointains souvenirs. Toutes les conditions pour un aggiornamento politique, administratif et économique sont réunies pour réussir ce pari : une majorité confortable à l’Assemblée, une accalmie politique et sociale, une sécurité renforcée, bref tous les ingrédients sont là pour un finish happy end. A vous de jouer monsieur le Président, la balle est dans votre camp !

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