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‘’… la renaissance culturelle doit être inclusive et non pas une affaire du seul Ministère en charge de la Culture’’, estime le Directeur du Musée régional de Dosso
Publié le mercredi 8 juin 2016   |  Agence Nigerienne de Presse


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© Autre presse par dr
Musée national Boubou Hama de Niamey


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Dosso - La ville de Dosso, on se rappelle, a abrité cette année, les festivités de la Journée Internationale des Musées. A cette occasion, notre Correspondant dans la Région, s’est entretenu avec le Conservateur du Musée Régional de Dosso, M Haladou Maman, sur la contribution des Musées au processus de la Renaissance Culturelle au Niger.

Question : M. le Conservateur, pouvez-vous nous entretenir sur le concept de la renaissance culturelle au Niger notamment à travers les musées ?

Réponse : Merci beaucoup de cette opportunité que vous m’offrez encore de m’exprimer sur un sujet combien important. C’est pour moi un sentiment de satisfaction et de fierté de voir que le Ministère en charge de la Culture est chapeauté par le concept de renaissance culturelle. Ceci démontre l’intérêt qu’accordent les autorités de la 7ème République au secteur de la culture longtemps relégué au second plan.

De prime abord, je dois faire un regard sur ce que c’est la renaissance ou le concept de la renaissance tel que défini dans le petit Robert comme étant un nouvel essor d’une institution, d’une société, d’une activité voire tout renouveau qui s’inscrit dans une nouvelle vision. La renaissance peut se traduire aussi comme étant un changement de comportement et de pensée.

En faisant une sorte d’historique de la renaissance, elle trouve son origine à partir du 15ème siècle en Italie, pour se répandre dans le reste de l’Europe. Elle est singulièrement marquée par un retour aux idées, à l’art, à l’architecture, aux antiquités Gréco-latines, période historique allant du 14ème au 15ème siècle jusqu’à la fin du 16ème siècle qui signifie la période du moyen-âge. La renaissance dans l’espace où elle était née a provoqué un grand mouvement des artistes et intellectuels dont des peintres très célèbres tels que Rafael, Léonard de Vinci qui ont retracé des scènes de vie par rapport à cette renaissance.

Cette vision de l’art fait aujourd’hui la beauté du Vatican ou des fresques et tableaux splendides de ces artistes dits de la renaissance décorent la Basilique Saint Pierre de Rome. Donc pour nous, si on peut se résumer, le contexte de la renaissance signifie un essor d’échanges d’idées et d’expressions nouvelles et non des gymnastiques intellectuelles stériles pour en trop parler autour de l’étymologie du mot « renaissance ». Il s’agit dans le contexte du Niger, de prendre la renaissance comme nouvel essor, un changement de comportement pour faire sortir la culture de sa torpeur. Comme on peut se rendre à l’évidence, les musées sont les opérateurs de cette renaissance depuis sa naissance en Italie.

Question : Quelles stratégies adopteraient les musées pour être de véritables opérateurs de cette renaissance et quelle serait la phase opératoire ?

Réponse : En effet dans la série de rencontres déjà entreprises par le Ministre en charge de la renaissance culturelle, des rapprochements de points de vue se sont dégagés. Des questions ont été posées par des personnes chevronnées et rompues à la tâche dans le domaine de la culture lors des discussions. Toutefois, au regard de certaines questions posées par ci, par là c’est comme s’il s’agit d’une nouvelle culture ou une nouvelle naissance de la culture. Certes, tout le monde sait que la culture nigérienne existe. Donc le problème n’est pas de naître ou de faire renaître cette culture mais plutôt adopter un comportement nouveau pour une revitalisation de ce secteur. On poserait certainement la question de savoir à quel niveau ou à quelle couche de la société faudrait-il commencer ce changement de comportement. Pour moi, ce changement de comportement serait inclusif à l’endroit de toutes les couches sociales car, lorsqu’on veut prendre un bain curatif, il doit concerner toutes les parties du corps pour une meilleure efficacité du remède prescrit.

Certes, je ne suis pas mandaté par le Ministre en charge de cette renaissance, mais en tant que cadre de la culture, c’est une obligation morale et un devoir d’aider et accompagner ce Ministre dans la démarche qu’il est en train d’insuffler pour que la culture soit un secteur beaucoup plus vivace, qu’un secteur toujours relégué au second plan. Dans notre démarche actuelle sur la renaissance culturelle au Niger, il ne s’agira pas d’une résurrection spirituelle étant donné que l’homme peut renaître plusieurs fois à chaque fois qu’il y a une manifestation de la vérité. C’est juste un changement de notre manière de faire, notre comportement dans le combat qui s’inscrit dans une nouvelle vision.

Question : Pensez-vous que la renaissance culturelle peut s’appliquer à toutes les sphères de notre société ou c’est juste une affaire des intellectuels ?

Réponse : En tant que fait sociétal, la culture est notre dénominateur commun et elle est au cœur de toute expérience humaine. Au Niger, un pays présentant actuellement un taux de scolarité qui avoisine les 70 % mais au point de vue culturel notamment identitaire et historique, beaucoup reste à faire car peu de gens accordent réellement une importance au support historique visuel. Je m’explique : nous sommes nombreux qui ne disposons pas de photos de nos trois grands pères ou même deux et pourtant la photographie est le meilleur support de notre souvenir historique familial. Comme l’a dit un spécialiste en communication, « une image égale mille mots ».

Au point de vue conservation de notre identité familiale, les supports photographiques constituent un bel exemple de changement de mentalité que chaque nigérien soucieux de son passé doit utiliser pour documenter tous ceux qui lui sont chers au risque d’être un beau jour incapable de répondre aux questions de nos petits fils qui aimeraient savoir à quoi ressemblaient nos parents. Ça serait dommage si nous ne disposons pas de photos ou autres supports visuels les concernant. Ceci étant, le meilleur changement de comportement et de mentalité doit s’opérer sur notre propre histoire pour que chacun à quelque sphère ou niveau des responsabilités commence à documenter son passé historique.

Pour moi, la renaissance culturelle doit être inclusive. Elle n’est pas l’affaire du seul ministère en charge de la renaissance mais plutôt l’affaire de tous les nigériens soucieux de l’avenir de leur passé glorieux. En prenant un autre exemple sur l’Armée qui est un corps chargé d’histoire, l’armée nigérienne étant née depuis la période coloniale doit collecter et documenter tout un appareillage dont la technologie reste évolutive tout en marquant les périodes de gloire des soldats méritants. Ceci faisant, l’armée en tant que corps de discipline et de fierté doit être une référence historique tout en créant à son sein un conservatoire de vieux outils et équipements ayant servi dans la noble mission de défense que de les transformer en épaves souvent placées à des endroits inaccessibles.

Dans le domaine de l’éducation, il s’agira d’un nouveau programme pédagogique qui doit lier l’école au musée. Cette nouvelle approche appelée muséo-pédagogie se traduira par l’utilisation du musée dans les programmes scolaires. En tant que support pratique et tangible, le musée pourrait compléter les connaissances livresques inculquées à l’école.

La culture est pour moi une vitrine ou chacun doit regarder pour s’y retrouver ; savoir d’où il vient et où il va. Le concept de renaissance culturelle est donc un domaine qui peut s’appliquer à toutes les activités liées à l’ensemble des secteurs qui constituent la société nigérienne. Il ne s’agit pas de penser qu’il faut naître une culture pour en parler d’une renaissance car tout le monde sait que notre culture existe et qu’il faille seulement la revitaliser dans nos habitudes de tous les jours.

Notre pays le Niger, est toujours considéré pour son sérieux dans la préparation des dossiers de développement mais des dossiers bien ficelés qui finissent très souvent à être récupérés et expérimentés dans les pays de la sous-région à cause de notre lenteur et indécision dans les délais requis. La renaissance est pour nous un retour aux sources pour que chacun s’intéresse avec dévouement aux actions de développement. Le concept de la renaissance ne saurait être une panachée de définitions autour des veillées dans les sites web pour prendre des mots corsés et concepts irréalistes qu’on n’arrive pas à appliquer.

Il faut se le dire que depuis la période coloniale en passant par l’indépendance jusqu’à cette ère de mondialisation tous les combats économiques du monde sont préalablement établis et guidés par les combats culturels. Autrement dit, c’est toujours l’aspect culturel qui détermine les enjeux économiques. Pour un chef d’état africain qui débarque à Paris, pour une visite de travail, la première des choses c’est de lui faire visiter le musée de Louvre et autres lieux historiques par son homologue pour découvrir la civilisation française dans tous ses aspects. Tout récemment, nous avons suivi la visite du président Issoufou Mahamadou à Singapour lors d’une visite du musée pour découvrir les merveilles historiques et progrès scientifiques de ce pays émergent pourtant resté pauvre jusqu’à la fin de la deuxième guerre mondiale.

Approche identique pour la Chine, où tout partenaire diplomatique de ce pays depuis Mao Tsé Toung doit commencer par découvrir et apprécier la civilisation du peuple chinois. En effet, la culture doit constituer un rapport basé sur le respect réciproque entre les communautés des pays qui lient des relations diplomatiques tout en respectant leurs cultures réciproques. Par conséquent, la renaissance culturelle doit se fonder sur des rapports de respect et de dignité basés sur les liens historiques dans le cadre d’une pure vérité. Comme l’a dit Nelson Mandela : « la vérité c’est la composante cardinale du bonheur ».

Question : Avez-vous des appels à l’endroit d’autres corporations pour leur participation effective dans le processus de cette renaissance culturelle ?

Réponse : Pour réitérer ce que j’ai dit plus haut, je ne suis pas mandaté par le ministère en charge de la renaissance culturelle mais je dois tout simplement préciser que la renaissance culturelle n’est pas seulement l’affaire de ce seul ministère. De surcroît, elle concerne toutes les couches sociales précisément les sociologues, les psychologues, paléontologues et tous les autres logues car il s’agit d’une œuvre de construction nationale qui se fera dans le cadre d’un dialogue franc et sincère.

Comme l’a si bien dit l’écrivain français Jean Paul Sartre, je cite : « la culture ne sauve rien ni personne, elle ne se justifie pas. Mais c’est un produit de l’homme, il s’y projette, s’y reconnaît ; seul ce miroir critique lui offre son image ».

Cela dit, il va de soi que notre nation comme toute autre nation qui se respecte a l’obligation morale de transmettre usufruitier son héritage culturel aux générations futures tel qu’elle l’a reçu de ses devancières.

Propos recueillis par Mahamane Amadou ANP /Dosso

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