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Miracles et Merveilles des chasseurs de Dogon Doutchi (Dosso)
Publié le jeudi 21 juillet 2016   |  Agence Nigerienne de Presse




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Dosso - Au Niger, la chasse se pratiquait depuis la nuit des temps par une frange de la population considérée comme des guerriers au service de la chefferie traditionnelle. Cependant derrière cette pratique se cache un mystère. Dans le Département de Dogondoutchi, Région de Dosso, les chasseurs se distinguent par leurs connaissances de la géomancie et le port du cimier ou ‘’ burtu (en langue hausa) ; un masque représentant le bec du calao que le chasseur se sert pour piéger l’oiseau. Au cours d’un entretien qu’il nous a accordé, le Conservateur du Musée Régional de Dosso, M. Haladou Maman a longuement évoqué tous les mystères qui entourent la chasse et les dispositions prises par le Ministère en charge de l’Environnement et celui de la Culture pour faire d’elle une pratique culturelle et non une production de gibier au mépris des textes réglementaires.

Perçue comme une activité productrice de viande, la chasse est aussi culturelle avec tous les mythes qui l’entourent.

Dans le contexte africain, d’après M. Haladou, ’’ il existe un lien entre la chasse et la guerre. Si l’on se réfère à des royaumes beaucoup plus anciens, on retiendra que depuis le 7ème siècle, l’Empire Ouagadou, actuel Ghana, serait à l’origine de la confrérie des chasseurs mandingues. Parmi les descendants de cette confrérie, l’on peut citer Soundiata Keïta qui, avant de devenir le roi mandingue, a été un chasseur très célèbre. En Afrique du Sud, Chaka Zoulou, à travers ses exploits militaires, est considéré comme un chasseur. De ce fait, on ne peut pas séparer le contexte de chasseur de celui de guerrier. Il faut avoir accompli un bon exploit d’abord sur les animaux féroces, avant d’aller vers les hommes. En effet, en tant que membre de la grande confrérie des chasseurs mandingues, Soundiata Keïta vainquit Soumahoro roi des Sossos en 1235 rien qu’avec son expérience et ses mystères de chasseur avérés. C’est toujours l’esprit animal qui est mis en valeur comme cible, car pour être reconnu chasseur de renommée internationale, il faut avoir à son actif un exploit : tuer un lion qui menace tout un village, voire un royaume’’.

A ce niveau, le Conservateur du Musée Régional de Dosso cite des exemples :’’ ’il ne s’agit pas de la chasse en tant qu’activité pour dégrader l’environnement mais c’est surtout l’aspect occulte qu’il faut mettre en valeur. Le mystère de la chasse aussi varié et diversifié nous amène à évoquer quelques similitudes dans les pratiques de chasse en Amérique, dans le Nouveau Mexique où deux ethnies d’origine indienne et espagnole, à savoir les Cherokee et les Tésukee qui portent également le CIMIER de chasse confectionné avec d’autres espèces d’oiseaux. C’est à travers des fêtes annuelles, populaires que ces chasseurs montrent leur savoir-faire et donnent l’occasion au public de découvrir quelques survivances d’antan par rapport à la chasse comme acte de bravoure. C’est pourquoi, être chasseur n’est pas un être vulgaire mais plutôt un personnage courageux au service de la société. Au Niger, comme dans la plupart des pays africains, c’est toujours la chasse qui participe à la consolidation du pouvoir traditionnel par son implication pleine dans le système sécuritaire pour défendre l’intégrité du territoire à la manière du soldat moderne’’.

À la rencontre internationale des chasseurs de l’Afrique de l’Ouest, 2ème édition tenue du 27 au 29 Mai 2005 à Bamako, rappelle-t-il, le Niger avait rempoté le Premier prix grâce à ses chasseurs très remarqués par leurs accoutrements et mystères autour de la géomancie. Les participants avaient vivement apprécié les prestations d’un pays à un autre et l’occasion fut donnée à la délégation nigérienne de présenter deux catégories de chasseurs notamment les chasseurs de Zinder intégrés au Sultanat, et ceux de Dogondoutchi autonomes qui se caractérisent par le port du cimier ou ‘’Burtu’’( en langue hausa) qui a fait leur célébrité lors du Festival National de la Jeunesse de Niamey, où ils ont présenté leur ballet ‘’MAIDAWA ‘’ ou cérémonie de chasse au lion.

Le Conservateur du Musée Régional de Dosso, définit le ‘’burtu’’ comme un masque ou une représentation qui incarne l’esprit et le corps de l’oiseau que le chasseur porte pour chasser les outardes. Il s’agit du bec du calao un oiseau mythique ou allégorique qui vit dans les forêts tropicales d’Afrique ou d’Asie. Il est reconnu pour sa sagesse et son bon augure. Tout comme la grue couronnée, le calao est un oiseau typique dont les organes sont très recherchés par les tradi-praticiens qui confectionnent des talismans au profit des femmes à la recherche d’une meilleure fidélité de leurs maris. Le burtu ici, en tant que représentation de l’oiseau est porté par le chasseur pour tromper cet oiseau qu’il va entraîner dans une démarche cadencée à la manière de celui-ci pour se faire passer pour lui et non un homme jusqu’à le pousser dans un piège préparé à cet effet. Une fois l’oiseau pris au piège, le chasseur se retire pour enlever le masque avant de prendre l’oiseau. Cette astuce se justifie, car les oiseaux disposent aussi d’une technique de communication par télépathie ; alors si le chasseur tente de prendre l’oiseau avec le masque, ce dernier finira par connaître le secret de cette technique et rendre ainsi inefficace cette technique de chasse. C’est donc une stratégie appropriée de prendre l’oiseau sans le blesser’’.

M. Haladou Maman se rappelle aussi que cette technique de burtu, a beaucoup intéressé le Musée Boubou Hama de Niamey, qui a organisé en 2003 un prélèvement scientifique de quelques espèces pour le repeuplement de son parc avec l’autorisation du Ministère en charge de l’Environnement.

Dans une perspective de sauvegarde de cette pratique, le Musée de Dosso, dira-t-il, a collecté quelques objets ayant trait à la chasse dont un tableau de peinture de l’artiste, Tankari Naroua qui a dessiné une scène de chasse à l’outarde illustré par un cimier. Cela a permis au Musée d’ouvrir une thématique par rapport à la chasse pour mieux expliquer aux visiteurs les différents miracles et merveilles des chasseurs. Par exemple, il y a des chasseurs qui peuvent se transformer en rocher devant l’attaque d’un lion. On a vu des chasseurs une fois qu’ils entrent en incantation, l’on peut voir des oiseaux qui s’envolent de leur tête. Il y a aussi des chasseurs une fois qu’ils entrent en transe, on peut voir un écureuil sortir de leur poche. C’et surtout cet aspect miracle qui a permis à notre délégation de remporter le premier prix à la rencontre internationale des chasseurs de l’Afrique de l’Ouest tenue au Mali en 2005.

M Haladou précise par ailleurs que revaloriser la chasse en tant que pratique culturelle, n’a rien de suspect pour inquiéter le Ministère en charge de la Protection de la Faune, mais plutôt l’objectif ici visé est la revalorisation de cette pratique et tous les mythes qu’elle comporte. Tout comme les professionnels de l’environnement, ceux de la culture sont aussi inquiets de l’avenir de la faune face à une dégradation drastique de l’environnement qui met la biodiversité en mauvaise posture avec déjà comme corollaire la disparition d’un certain nombre d’espèces de faune.

Ceci étant, souligne-t-il, même l’homme en tant qu’espèce, n’est pas à l’abri de cette menace planétaire si rien de concret ne s’entreprend pour remédier ou ralentir les effets de cette dégradation. Bref, il nous revient le devoir et l’obligation morale de conserver et promouvoir notre héritage commun en vue de le transmettre usufruitier aux générations futures.

MA/AMC/ANP/JUIL 2016

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