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Asphyxie financière de l’Etat Plus de 22 milliards du Niger saisis dans un contentieux judiciaire
Publié le vendredi 22 juillet 2016   |  Le Courrier


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© AFP par JOHN MACDOUGALL
Visite officielle du Président de la République à Berlin
Du jeudi 16 au 17 juin 2016. Le Président de la République, Chef de l’Etat, SEM Issoufou Mahamadou, effectue une visite officielle à Berlin, en République Fédérale d’Allemagne


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La semaine dernière, une surprenante lettre de Brigi Rafini, qui a depuis lors connu des répercussions au sein de l’administration publique nigérienne, était publiée dans ces mêmes colonnes sous le titre inquiétant « L’asphyxie financière n’est pas loin ». Eh bien, on ne croyait pas si bien écrire. Des informations dignes de foi nous apprennent que l’asphyxie financière est déjà une réalité et que Mahamadou Issoufou est pratiquement pris à la gorge. Car, outre ce qui se raconte sur l’assèchement du Trésor public, confirmé par la pêche à la nasse trouée de Brigi Rafini, et tout ce que l’on sait des très nombreux prêts contractés de façon inconsidérée et dont les échéances ont commencé à courir, plus de 22 milliards du Niger viennent d’être saisis dans un contentieux judiciaire. Et croyez-nous, ça va faire mal, très mal.

AFRICARD CO LTD ? Beaucoup de Nigériens ne connaissent pas cette société qui a eu à commercer avec l’Etat du Niger sous Mahamadou Issoufou. Mais ils se souviennent sans doute d’une affaire de passeports numérisés qui a tourné court. Eh bien, c’est cette société de droit des Îles Vierges Britanniques spécialisées dans la production de passeports numérisés et dont le siège est basé à Geneva Place, Road Town, Tortola, qui poursuit l’Etat du Niger pour une obscure affaire de créances non remboursées d’un montant de 16 485 274 097 FCFA. AFRICARD allègue que, en 2011, le Niger a conclu un accord avec elle pour lui produire des passeports biométriques et électroniques. Cette même année, le Niger aurait annulé l’accord. En conséquence, AFRICARD a invoqué une disposition de l’accord qui obligeait les parties à arbitrer les différends devant l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA) en Côte d’Ivoire. Le tribunal arbitral OHADA a constaté la résiliation unilatérale du Niger de l’accord et attribué à Africard 16 62 021 396 FCFA plus les intérêts. Pour se faire payer, probablement après maintes tentatives de règlement à l’amiable comme il est de coutume dans ces genres de contentieux, AFRICARD CO LTD s’est attachée les services d’un cabinet d’avocats, SELAS ARCHIPEL, siégeant à Paris (France) et d’un groupe d’huissiers de justice associés près le Tribunal de grande instance de Nanterre, toujours en France. Le travail concerté de ces hommes de droit a abouti, le 6 décembre 2014, à une sentence arbitrale rendue par un certain Boubacar Dicko, arbitre unique. Selon une ordonnance rendue par le Tribunal de grande instance de Paris, le 26 janvier 2015 et régulièrement signifiée par voie diplomatique, la sentence de Boubacar Dicko a été revêtue de ce qu’on appelle en droit l’exequatur, une sorte d’aptitude à rendre exécutoire au plan national une décision de justice rendue au plan international. Par ces décisions de justice rendues exécutoires, y compris sur le territoire du Niger en vertu de l’article R. 211-1 du Code des procédures civiles d’exécution, le groupe d’huissiers associés a saisi le géant du nucléaire français, Areva, aux fins de procéder à une saisie conservatoire des créances qu’elle doit à l’Etat du Niger. En attendant, bien sûr, de passer à l’étape supérieure, c’est-à-dire l’attribution pure et simple à AFRICARD CO LTD des montants saisis à hauteur de ce que l’Etat du Niger s’est vu condamné à payer à son créancier. Ainsi, aux 16 485 274 097 FCFA qui constituent le principal, l’Etat nigérien doit supporter en sus les frais de procédure qui s’élèvent à 156 747 299 FCFA. Ce n’est pas tout. Il doit également payer des intérêts sur le principal au taux de 13% l’an. Sur cette base, les intérêts arrêtés au 27 juin 2016 s’élèvent à 5 585 282 396, 75 FCFA, calculés sur la somme de 15 485 274 097 FCFA du 15 avril 2013 au 5 décembre 2014 et sur la somme de 16 485 274 097 FCFA à compter du 3 septembre 2014. Il y a enfin les intérêts sur les frais de procédure, arrêtés à 7 953 505, 09 FCFA au 27 juin 2016, soit au taux légal français à compter du 3 juillet 2015, majoré de 5 points à compter du 3 septembre 2014. La totalité des sommes s’élève à 22 237 257 297,84 FCFA. Attention ! À ce montant pourraient s’ajouter les dépens et le coût du présent acte et de ses suites.
Le ministre des Mines et de l’Industrie a déjà reçu notification de la saisie des fonds
Selon les documents que Le Courrier attend d’avoir à sa disposition pour publication, le tiers saisi est personnellement tenu envers le créancier saisissant et qu’il lui est fait défense de disposer des sommes réclamées dans la limite de ce qu’il doit au débiteur. En effet, au terme des dispositions du Code des procédures civiles d’exécution, notamment en son article L. 211-2 alinéa 1 qui stipule que : « L’acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que tous les accessoires. Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation ». Il est donc clair qu’avec cette procédure, c’est le ciel qui tombe sur la tête de l’homme fort du Niger. Car, outre cette opération qui va dessaisir l’Etat d’une bonne partie de fonds utiles en ces temps de vaches maigres, il y a toutes ces échéances de la dette extérieure qui arrivent à terme. Selon LIAM DJIBO, auteur d’un article intitulé « Les prémisses d’une faillite d’Etat », des sources de l’Assemblée nationale renseignent que « plus de 300 milliards de dettes sont venus à terme, c’est-à-dire dont le Niger doit s’acquitter obligatoirement et immédiatement, et 171 milliards de dettes arriveront à terme dans les prochains mois ». Et de pointer la source du mal : « Sauf que les recettes douanières et fiscales, déjà en baisse, sont loin de couvrir le paiement de la dette extérieure des salaires et des dépenses de fonctionnement ». Une véritable quadrature du cercle pour Mahamadou Issoufou qui a passé son « printemps » à contracter, de façon inconsidérée des prêts à tous vents. L’affaire qui l’oppose aujourd’hui à AFRICARD CO LTD est une des conséquences de cette gestion opaque et hasardeuse des finances que les spécialistes ont régulièrement dénoncée. En vain ! Le 1er juillet 2016, citant en objet la saisie attribution des créances de l’Etat du Niger par AFRICARD CO LTD, Jacques Peythieu, directeur de la Business Unit Mines d’Areva, a adressé une correspondance au ministre des Mines et de l’Industrie. Dans cette correspondance, Jacques Peythieu informe Moussa Amadou Barazé, avec copie au ministre des Finances, que « le 28 juin 2016, plusieurs entités du Groupe, en France, dont Areva SA et Areva Mines SA, ont reçu notification d’une saisieattribution de créances, de la part d’une société dénommée AFRICARD CO LTD basée aux Îles Vierges Britanniques, des avoirs dont elles seraient débitrices vis-à-vis de l’Etat du Niger ». Il précise que le Groupe d’huissiers dit agir au nom de la sentence arbitrale rendue le 6 décembre 2014, revêtue de l’exequatur selon ordonnance du Tribunal de Grande Instance de Paris du 26 janvier 2015. Or, la loi fait obligation à Areva SA et Areva Mines SA, en tant que tiers saisis, de déclarer et rendre indisponibles les créances ci-après et ce, conformément aux dispositions de l’article L. 211-3 du Code des procédures civiles d’exécution. Ces créances couvrent :

le montant restant dû à date au titre de l’Accord de partenariat du 26 mai 2014 et de son Protocole d’Application n°4 sur la RTA du 29 octobre 2014 (44 277 097 500 FCFA).
Le montant restant dû à date au titre de l’avenant n°1 au Protocole d’Accord Irhazer du 29 octobre 2014 et de la convention n°002/ AREVA/NIG relative à la mise en oeuvre du Projet d’appui au développement agricole de l’Irhazer, du Tamesna et de l’Aïr, du 25 juin 2015, évalué à 8 674 500 000 FCFA.
Le montant du loyer échu de l’immeuble Sonara au titre du 3e trimestre 2016 de l’établissement Areva Mines Niger, évalué à 4 494 258 FCFA. - Le montant de la retenue sur les salaires (ITS) de juin 2016 de l’établissement Areva Mines Niger, évalué à 9 973 322 FCFA.
Le montant de la retenue TVA (5 517 806 FCFA) du mois de juin 2016 de l’établissement Areva Mines Niger.
Le montant du précompte ISB (1 576 508 FCFA) du mois de juin 2016 de l’établissement Areva Mines Niger.

La pilule est trop amère pour Mahamadou Issoufou
Pour un gouvernement qui est sur le point de tomber dans les pommes, complètement asphyxié, c’est un coup de massue supplémentaire. La pilule est trop amère pour Mahamadou Issoufou et tout laisse croire que, au regard de la réaction épidermique des autorités nigériennes, que les intérêts risquent de grossir davantage. Ajoutée à tout ce que l’on sait comme échéances des dettes contractées auxquelles il faudrait faire face, il y a plus qu’il n’en faut pour faire déborder le vase. Et pourtant, il était arrivé au pouvoir dans une période d’embellie extraordinaire. En 2010, rappelle Abdou Gado Maliki, « les comptes publics étaient excédentaires avec des arriérés intérieurs quasi nuls, le solde du compte Niger à la Bceao était créditeur alors qu’il n’y avait pas encore de pétrole. Donc en 2011, quand le Pnds et Issoufou arrivaient au pouvoir, les bases d’une économie saine étaient là du fait des autres : la dette publique de l’Etat ne représentait que 19% du PIB, soit une augmentation de 2% seulement en 7 ans. Mais deux ans après en 2013, la dette passait à 27,1% du PIB et elle sera d’environ 51% en 2016. Oui, 51% du PIB soit une augmentation de 34% en 5 années ». La faillite de l’Etat est une question de jours et les Nigériens doivent cesser de se voiler la face. Toujours dans son excellent article, Abdou Gado Maliki informe que « Jusqu’en 2009, le Niger était dans une phase d’endettement normal. Mais sur la période 2011-2015, le pays est entré dans une phase de « surendettement», c’est le terme très diplomatique utilisé dans le rapport du Fond monétaire international (FMI) en date du 15 novembre 2015 dans lequel le gouvernement nigérien, contrairement aux années 2000, quémandait une fois de plus des dérogations. Cela veut dire que la moitié des ressources produites risquent d’aller vers le service de la dette et nous sommes à nouveau dans le cycle infernal où le pays s’endette uniquement pour payer la dette et combler les déficits. Résultat des courses : les Nigériens payent et payeront… ». Un triste sort auquel Mahamadou Issoufou a livré le Niger et dont les effets commencent d’ores et déjà à se faire sentir durement. Car, en vérité, l’affaire AFRICARD n’est que la face visible de l’Iceberg. Outre les emprunts obligataires régulièrement contractés auprès des banques de l’uemoa pour financer ses déficits budgétaires, Mahamadou Issoufou a corsé l’addition en émettant des obligations régionales à un taux de 6,5%. En 2014, renseigne Abdou Gado Maliki, « ils ont emprunté 93,3 milliards, puis 120 milliards en 2015, soit sur les deux années une dette cumulée de 213 milliards de FCFA auprès des banques de l’Uemoa dont 37 milliards auprès des banques présentes au Niger. En 2016, ils comptent emprunter encore 140 milliards de plus ». Cette sale affaire qui vient de lui tomber sur les bras n’est pas pour arranger les affaires de Mahamadou Issoufou qui a dû forcer pour rester au pouvoir à la suite d’une élection pour laquelle il a maintenu son challenger en prison et qu’il n’a dû gagner, en définitive, qu’en bourrant les urnes désertées par les Nigériens. Impopulaire comme jamais un régime ne l’a été au Niger, la 7e République de Mahamadou Issoufou a du pain sur la planche. L’homme fort de Niamey est pris à la gorge et personne ne lui voit d’issue de sortie possible. Car l’asphyxie financière est déjà là. Nous y reviendrons.

Laboukoye

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