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Le Sahel N° du 21/7/2016

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Analyse : Contribution pour une meilleure compréhension de la question des logements sociaux
Publié le mercredi 10 aout 2016   |  Le Sahel


Analyse
© Autre presse par DR
Analyse : Contribution pour une meilleure compréhension de la question des logements sociaux


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Bien que tout le monde s’accorde à reconnaître que le droit au logement est un droit fondamental, force est de constater que de très nombreuses personnes de par la planète n’arrivent pas à jouir convenablement de ce droit pour des raisons diverses.
La problématique du logement est donc devenue de nos jours, une source de grandes préoccupations aussi bien pour les pouvoirs publics, que pour les ménages. C’est le cas au Niger où en dépit de certains efforts réalisés par l’Etat depuis l’accession à l’indépendance, cette problématique se pose avec une acuité soutenue, tant en termes de quantité que de qualité.
Divers facteurs sont à la base d’une telle situation à savoir : un processus d’urbanisation en accélération ; une demande sans cesse accrue ; une offre insuffisante et inadaptée ; des coûts de construction élevés ; une production de logements à dominante informelle ; l’absence d’un mécanisme approprié de financement de l’habitat ; une insuffisance des investissements publics dans le secteur de l’habitat. S’ajoutent également une insuffisance des revenus d’un très grand nombre de ménages ; un cout spéculatif du foncier ; l’absence d’un cadre juridique réglementant la promotion immobilière, et des conditions de logement précaires.
Pourtant dès 1998 les autorités nigériennes avaient pris conscience de cette situation : ce qui a motivé l’élaboration et l’adoption de la loi N 98 -54 du 29 Décembre 1998 Portant adoption de la Politique Nationale en matière d’Habitat qui souligne en introduction : « l’absence d’un mécanisme de financement fiable dans le secteur et qui puisse répondre aux exigences des populations notamment celles ayant des revenus faibles ou moyens.
La question du financement est donc au centre des préoccupations, et plus que d’actualité. C’est dire que la problématique du logement en général ,du logement social en particulier , ne doit pas être appréhendée en terme d’opérations ponctuelles , mais avant tout en terme de stratégie de mobilisation de ressources suffisantes et longues devant permettre la réalisation d’une part de programmes cohérents et variés de logements tant en accession qu’en location , et d’autre part d’opérations d’amélioration de l’habitat. Cette mobilisation de ressources doit être sous- tendue par un réseau d’institutions dont les compétences et les niveaux d’intervention doivent se conjuguer dans l’objectif de rendre plus visible et plus accessible le mécanisme de financement au profit des différentes catégories de ménages. Il s’agit notamment du Fonds National de l’Habitat et de la Banque Nationale de l’Habitat qui sont prévus par la loi portant politique nationale de l’habitat.
Le Fonds National de l’Habitat
Il aura pour mission de mener des actions visant la promotion de l’habitat, et de créer les conditions favorables au financement de programmes d’opérations immobilières. Ses ressources ont été définies par la loi sur la Politique de l’Habitat.
Ses principaux partenaires seront : la Banque Nationale de l’Habitat ; les Banques Commerciales ; les Caisses et Mutuelles d’Epargne et de Crédit ; les Structures de recherche dans le domaine de la construction.
La Banque Nationale de l’Habitat
Elle aura pour mission essentielle l’octroi des crédits et la mobilisation de l’épargne individuelle. Partenaire privilégié du Fonds National de l’Habitat, elle bénéficiera d’une dotation de ce dernier en plus des autres ressources dont elle pourra disposer.

De par la diversité des produits qu’elle mettra en place (crédit à la construction – crédit à l’extension – crédit acquisition terrain – crédit acquisition logement), elle touchera toutes les catégories de ménages en général, et en particulier ceux à faibles et moyens revenus.
Ces deux institutions doivent être accompagnées par une troisième institution de mobilisation de ressources longue durée et dont la mission principale consistera à appuyer les banques et les autres établissements préteurs dans leurs activités de crédits hypothécaires et par conséquent à diminuer les risques encourus dans le domaine du financement de l’habitat.
Dans un contexte de méfiance des investisseurs privés au regard du secteur du logement, sa création pourra apaiser les inquiétudes et constituer un coup d’accélérateur à la promotion immobilière notamment à travers le Partenariat Public Privé.
Cette entrée en matière nous permet ainsi d’aborder la question des logements sociaux portée en actualité le vendredi 15 juillet 2016 à travers la cérémonie officielle de lancement du volet habitat du programme de la renaissance acte II par le Ministre des Domaines et de l’Habitat. Ce programme prévoit la construction de 25000 logements sociaux au cours de la période 2016-2021.
Mais avant d’examiner cette question, il est opportun de convenir d’une définition du logement social en ces termes : le logement social peut être considéré comme un logement aidé par les pouvoirs publics, en accession à la propriété ou en location, destiné à des ménages dont les niveaux de revenus mensuels ne dépassent pas un certain plafond qui est déterminé en fonction du contexte socio –économique de chaque pays.
Dans le cas précis du Niger, on peut l’estimer à 150 000 FCFA. Ceci signifie que le détenteur d’un tel revenu pourrait accéder à un logement en location de 50 000 FCFA de loyer mensuel. Ce montant correspond au taux d’effort maximum (1/3 du revenu). S’il doit accéder à la propriété par le biais de la location-vente, il doit verser le même montant durant une période de 10 ans, afin de pouvoir bénéficier d’un logement de deux pièces de confort moyen subventionné par l’Etat.
Sur la base de ces éléments , on peut affirmer que dans le contexte du Niger les logements sociaux ne peuvent s’apparenter qu’aux logements de petite taille et de taille moyenne , comprise entre 30 et 80 m2 et de cout réduit variant entre 8 000 000 et 15 000 000 FCFA. Ceci permet de lever la confusion avec les autres catégories de logements qu’on peut classer comme suit :
Les logements de standing
Ils se caractérisent par leur grande taille (3 à 5 pièces), leur niveau élevé de confort, leur coût élevé de construction avec un niveau plancher de 30 000 000 FCFA. Leur surface bâtie varie entre 120 et 200 m2. Ils sont répartis en grand et moyen standing. Ils ne sont accessibles qu’à une minorité de ménages disposant de revenus élevés
Les Logements économiques
Ils se caractérisent par leur niveau moyen de confort, leur coût moyen de construction (15 à 25 millions CFA). Leur surface bâtie varie entre 80 et 100 m2. Ils sont destinés aux ménages disposant de revenus intermédiaires compris entre 175 000 F et 250 000 F CFA.
La définition du logement social et la classification des autres catégories de logements permet ainsi de bien identifier les principaux groupes cibles pouvant accéder aux différents programmes de construction de logements, qu’ils soient en accession à la propriété ou en location. Au vu de tout ce qui précède, le projet de réalisation de 25000 logements suscite de notre part les observations suivantes :
1. Au plan des études
La conception des types de logements doit être guidée par les préoccupations actuelles à savoir la consommation énergétique .Ceci signifie qu’il faudra organiser un concours d’architecture devant mettre en relief l’ingéniosité des concurrents en terme d’empreinte écologique des logements et de style architectural.
2. Au plan du financement
La Banque de l’Habitat bien que créée n’est pas encore opérationnelle. Compte tenu de son caractère novateur, il est fort à parier qu’elle ne pourra réellement déployer ses activités de crédit qu’en début 2017. Ceci signifie que la première année du programme risque d’être compromise si cette banque n’est pas opérationnelle à cette date.
Quand bien même la banque deviendra opérationnelle, elle risque d’être limitée dans ses actions faute de l’appui nécessaire que doit lui apporter le Fonds de l’Habitat non encore créé et dont le rôle est essentiel dans la mobilisation des ressources par ladite Banque.
3. Au plan du foncier
La réalisation des 25000 logements nécessite l’acquisition d’environ 1000 hectares en intégrant la voirie et les divers équipements. La question est donc de savoir si les sites d’accueil des opérations sont disponibles ou pas .Au cas où ils ne le sont pas, ceci signifie qu’il faudra les acquérir pour un cout d’environ 10 000 000 000 FCFA. Les démarches relatives aux acquisitions vont donc s’étaler sur une certaine période, ce qui impactera sur le démarrage des travaux et par conséquent sur le nombre de logements prévus durant la période envisagée.
4. Au plan de l’aménagement
Par définition un terrain n’est constructible que s’il est équipé. La construction des logements nécessite donc la réalisation de la voirie et des réseaux d’eau, d’électricité et d’évacuation des eaux de ruissellement. Il s’agit d’opérations qui doivent être bien planifiées et coordonnées, qui engendrent d’importants travaux de terrassements et qui conditionnent les travaux de construction.
5. Au plan de l’organisation des chantiers
La construction de la tranche annuelle de 5000 logements nécessite la mise en place d’une structure appropriée chargée de la coordination et du suivi rigoureux des travaux .Ceci n’est pas une tâche aisée. A cette condition il faut adjoindre les risques de rupture de certains matériaux sur le marché de même que l’insuffisance de la main d’œuvre spécialisée par rapport à la demande qui sera engendrée par le volume des travaux.
6. Au plan juridique
Dans un contexte de raréfaction des ressources publiques, la tendance au recours au partenariat public privé va se renforcer. Cependant, compte tenu de leur caractère social, les logements sociaux ne pourront intéresser les opérateurs privés que si ces derniers bénéficient de certains avantages assortis de conditions spécifiques au profit des logements sociaux. Ceci signifie qu’il faut mettre en place un cadre juridique définissant la fonction de promoteur immobilier et les avantages accordés en vue de la réalisation des opérations immobilières à caractère social
En conclusion, la réalisation du programme de 25000 logements sociaux en 5 ans s’avère comme un objectif difficile à atteindre, au vu de toutes les contraintes évoquées
Il est plutôt opportun de : bien assoir le cadre institutionnel de financement ; réglementer la promotion immobilière ; réaliser les acquisitions foncières et aménager les terrains ; envisager un programme réduit susceptible d’être réalisé.

Ibro Alkassoum, Inspecteur général d’Etat

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