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Exploitation de l’or dans la région de TILLABÉRI: quand l’anarchie alimente la traite des enfants
Publié le jeudi 10 octobre 2013   |  Tamtaminfo


Exploitation
© Autre presse par DR
Exploitation d`or


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Les sites d'orpaillage existent un peu partout dans la région de Tillabéry, à 115km de Niamey. Ville riveraine du fleuve Niger, Tillabéri attire des touristes venant des quatre coins du monde. Mais il n'y a pas que le tourisme, car le sous sol de cette région regorge d'importantes richesses, notamment l'or.

Ce minerai est exploité depuis des décennies dans cette zone mais d'une manière traditionnelle, qui consiste à vanner le sol. Un coup d'oeil dans le rétroviseur. A Tillabéri, l'or n'était pas exploité pour des fins commerciales. En effet, à l'époque, la population Sonraï riveraine de cette région n'avait pas besoin de fournir d'efforts pour chercher de l'or. Le métal précieux était à portée des mains, on le trouvait partout, déposé à même le sol. Autrement dit, pas besoin de creuser le sol. Le témoignage d'un sage de la région : "Les gens trouvaient de l'or en caillou déposé même sur le sol. Il suffisait pour les femmes de vanner le sol. Comme l'or est plus lourd, il tombe dans des tas. Mais, au fil des années, cette pratique ancestrale, non nuisible pour l'environnement et la santé humaine, à pris une autre forme. Aujourd'hui, l'or est recherché dans cette zone de deux manières : la manière industrielle ou l'orpaillage, qui est une manière artisanale d'exploitation.

Il est vrai que l'exploitation de l'or, même industriellement est nuisible à l'environnement et à la santé de l'homme et de l'animal car elle implique l'utilisation de produits chimiques très dangereux. En plus, elle soulève sur la surface d'autres métaux lourds nuisibles pour la santé, naturellement enfouis dans le sous sol. A l'entrée de chaque site, le visiteur est tout de suite attiré par les dunes et la poussière. Sur le site de Samira où exerce la Société des Mines du Liptako (SML) détenue à 80% par Semafo, une société de droit canadien, et de 20% par l'Etat du Niger, l'or est exploité d'une manière industrielle. Pour un responsable de cette société, si l'affluent du fleuve Niger communément appelé Sirba est contaminé par le cyanure, ce n'est pas la faute de la SML, mais celle des orpailleurs. Mais l'attention du visiteur est surtout attirée par des digues en argile contenant de l'eau usée et par des fûts contenant le cyanure, un produit qu'on peut assimiler à du poison.

"Le cyanure est très dangereux. Si une goute vous tombe dessus, elle vous atteint jusqu'aux os", a déclaré un employé de la SML. "Nous n'avons pas les moyens de prouver que l'eau de surface est contaminée par le cyanure", a renchéri de son côté le chef de service du laboratoire de la Direction générale de l'Hydraulique. "Quand je suis venu ici, la première des choses que j'ai demandée à mon directeur fut le matériel pour contrôler le taux de cyanure. Il n'y a pas eu de réponse satisfaisante. Et la SML utilise le même matériel que nous». Du côté des sites d'orpaillage, ce sont des endroits insalubres avec des dunes de sable, de la poussière, des puits de 45 à 80 mètres de profondeur avec d'autres passages plus longs et plus profonds, des flaques d'eau souterraines pompées par de petites pompes qui travaillent avec l'énergie solaire, des plastiques noires attachés dans le puits.

Ces plastiques noires attachées à l'entrée du puits jusqu'à une certaine profondeur servent de système d'aération et conduisent l'oxygène pour les travailleurs, le plus souvent des jeunes, qui rentrent parfois en équipes pouvant atteindre jusqu'à 100 personnes par puits. Comme sur le site de M'banga où nous avons trouvé 65 personnes dans un puits, selon les explications fournies sur place. Difficile de vérifier. Sur place, hommes, femmes et enfants vivent dans des campements anarchiquement installés et parfois des habitations qui ne respectent aucune norme de sécurité. Le salaire, l'hygiène, l'assainissement, la sécurité sur le lieu de travail constituent un luxe que les travailleurs et leurs familles ne connaissent pas. Si quelque chose arrive, ce serait la volonté de Dieu ! Lorsqu'un puits s'effondre, on ne cherche même pas ceux qui se trouvent à l'intérieur, on referme le trou et on creuse un autre", raconte un travailleur trouvé sur le site. Ceux qui y travaillent boivent de l'eau puisée du puits.

Des ONG humanitaires font de la sensibilisation pour le traitement de l'eau de boisson en vue de minimiser les risques sanitaires. Sur certains sites, des produits de purification de l'eau comme "aquafraîche" sont vendus sur place. La paie se fait en fonction du nombre de sacs enlevés. Si un détenteur de carte de mineur exploite par jour 10 sacs de sable supposés contenir du métal précis, 10% appartient au propriétaire terrien, 1/4 aux travailleurs et aux femmes qui font la cuisine et 2/4 pour le patron, celui qui possède le puits et la carte de mineur. "Nous sommes de véritables dégradeurs de l'environnement", a reconnu le représentant du chef de canton de Tché Tchirey, une localité de Dargol, commune de la région de Tillabéri abritant un autre site. "Même si le gouvernement veut fermer ce site, il ne peut pas", a-t-il déclaré, avant d'ajouter :

"Ici, nous avons nos propres règlements, nous jugeons nous même nos affaires et si nous n'arrivons pas à gérer nos affaires d'une manière pacifique, nous faisons appel au Procureur près de la Cour d'Appel de Tillabéri". Et parfois, c'est la prison, selon le représentant du chef de canton. Sur le site d'orpaillage, il y a toujours quelqu'un qui commande tout le monde, un homme puissant, une autorité, à qui tout le monde doit obéissance et respect. En ce qui concerne l'Etat, il y a un comité de surveillance qui est sous la tutelle de la Direction régionale des mines et présidé par le Secrétaire général du gouvernorat de la région. Ce comité, composé de représentants de différents ministères et des forces de défense et de sécurité, fonctionne d'octobre à juin. Pendant la saison des pluies, les sites sont supposés être fermés. Mais certains sites échappent à ces dispositions gouvernementales. Sur ce site, on utilise aussi le même produit chimique comme le cyanure. Des gens qui n'ont aucune formation appropriée manipulent ce produit dangereux.

"Nous sommes préoccupés par l'utilisation anarchique et non contrôlée de cyanure par les orpailleurs qui sont très puissants", se plaint le Directeur régional de l'Environnement. Un autre phénomène observé sur les sites, c'est le travail des enfants. "Je ne suis jamais allé à l'école. Je travaille pour subvenir aux besoins de ma famille. Mon père nous a abandonnés, mes frères et moi-même, ainsi que ma mère. Comme je suis le plus grand, je dois aider ma mère à nourrir mes petit frères est soeurs", a confié un enfant que nous avons trouvé sur le site de M'banga. La plupart de ces enfants déclarent à qui veut les écouter : "Je ne suis jamais allé à l'école, je travaille ici depuis plusieurs années, l'argent que je gagne, j'envoie une partie à la famille et je garde une partie". Les petites filles ne sont pas en reste. Nous avons trouvé une dizaine, accompagnantes d'une vieille dame, qui dit être leur grand-mère. Nombre de ces enfants prennent des produits contre la fatigue en provenance du Nigéria.

Des produits contrefaits qui ont les mêmes effets que la cocaïne. Ces enfants travaillent sans aucune protection, alors que le Niger est signataire de plusieurs Conventions contre les pires formes de travail des enfants et s'est engagé à combattre le travail des enfants. En rappel, le Niger a ratifié depuis 1976 la Convention N° 138 de l'OIT relative à l'âge minimum d'accès au travail, et en octobre 2000 la Convention N° 182 de l'OIT sur les pires formes de travail des enfants. En attendant l'application de tous ces instruments juridiques, les enfants continuent à travailler sans aucune forme de protection sociale.

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