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Sauver la paix par les paroles saintes (Reportage)
Publié le jeudi 20 avril 2017   |  Agence Nigerienne de Presse


Prêche:
© Autre presse par DR
Prêche: sauver la paix par les paroles saintes
Les leaders religieux du Niger, de tous les courants de pensées, convergent sur la nécessité de lutter contre cette idéologie obscurantiste et de cultiver la tolérance religieuse au niveau des différentes communautés confessionnelles du pays.


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Niamey - Depuis quelques années, la sécurité au Niger, est menacée par la présence de plusieurs foyers de tensions dans les pays voisins, notamment les exactions d’Al-Qaïda en Algérie, les groupes extrémistes qui opèrent au Mali, et la terreur que sème Boko Haram dans le Bassin du lac Tchad (Tchad, Cameroun, Nigeria et Niger). Tous ces groupes armés qui tuent, pillent et sèment la désolation, justifient leurs actes par le fallacieux prétexte d’une ‘’guerre sainte’’ (le Jihad). En dépit du fait que le Niger ne soit le fief d’aucun de ces groupes maléfiques, leurs exactions affectent la sécurité et la paix de ce pays.

Face à la montée de cette forme de manipulation de la religion, qui se manifeste par la violence, étouffant du coup la paix et menaçant la sécurité nationale, les leaders religieux du Niger, de tous les courants de pensées, convergent sur la nécessité de lutter contre cette idéologie obscurantiste et de cultiver la tolérance religieuse au niveau des différentes communautés confessionnelles du pays.

Pays laïc, à grande majorité confessionnelle musulmane (99% de la population selon les chiffres officiels), le Niger est un pays réputé pour la coexistence pacifique des différentes communautés religieuses qui y vivent.

C’est ce que nous explique le Professeur Maïkoréma ZAKARI, historien à l’Institut de Recherches en Sciences Humaines (IRSH) de l’Université Abdou Moumouni de Niamey. ‘’Au Niger, l’Islam est connu (…) pour sa grande tolérance vis-à-vis des adeptes des autres cultes. Dès le départ, avec l’animisme, la cohabitation a été pacifique et, au fil du temps, celle-ci a fini par donner lieu à une situation dans laquelle chacun des deux cultes en présence perd de son originalité sans disparaître pour autant (…) Avec le christianisme également, globalement la cohabitation a été pacifique. Lorsque cette religion fait ses premiers pas au Niger, la population nigérienne était déjà majoritairement musulmane. En effet, lors de l’installation par des Protestants de la première station chrétienne à Zinder en 1924, il n’est signalé aucune hostilité de la part de la communauté musulmane déjà majoritaire à l’époque’’.

Cependant, selon cet historien spécialiste des questions religieuses, le pays a connu quelques rares affrontements inter et intra religieux. C’est notamment le cas ‘’ des querelles ayant opposé, au début des années 1950, à Maradi et dans une moindre mesure à Zinder, les «yankabaru» (essentiellement les adeptes de la Tijâniyya Ibrahimiyya qui, à l’instar de leur maître, Shaikh Ibrahim Niasse, avaient commencé à prier les bras croisés), aux «sadalu» qui prient les bras allongés le long du corps, l’islam nigérien n’a connu aucune intolérance intra religieuse. Il est vrai que, même si au Niger, contrairement au Nigeria voisin, on n’eut à déplorer aucune perte en vie humaine au cours des affrontements, la querelle yankabaru/sadalu n’en divisa pas moins la umma à Maradi et à Zinder’’.

Il y a aussi ‘’les faits malheureux intervenus les 16 et 17 janvier 2015 dans les villes d’Agadès, de Zinder, de Gouré, de Magaria et de Niamey, où des lieux de culte chrétiens ont été saccagés par des individus disant œuvrer pour la cause de l’islam (ce qui est un paradoxe en soi dans la mesure où de tels actes dérogent tout à fait des principes moraux de cette religion), on note aucun signe ou manifestation d’hostilité des musulmans vis-à-vis des adeptes des minorités religieuses’’ nous raconte l’historien.

Mais dans ces deux cas, l’intervention pacifique des autorités a abouti à un compromis et la tension s’est éteinte.

Ce qui est loin d’être le cas pour les ‘’terroristes’’ de Boko Haram et leurs semblables d’Aqmi, ainsi que les groupes terroristes qui opèrent dans le Nord-Mali.

‘’Ceux-là ne combattent pas une religion particulière, moins encore une secte donnée, mais s’éprennent à toutes les structures de l’Etat et tous ceux qui les acceptent et respectent, c’est pourquoi les combatte devient une préoccupation commune à toute la Nation et le rôle des guides religieux dans ce combat noble est prépondérant’’ comme le dit Mahamane Manzo, un journaliste nigérien.

‘’Le terrorisme est tout… sauf une mission divine’’

Les extrémistes qualifient leurs actes violents comme un service rendu à Allah. Ils parlent de ‘’Djihad’’.

Abdou Samade Yahaya, Directeur des Affaires Religieuses au Ministère nigérien de l’Intérieur, qualifie cette pratique de tromperie. Selon lui, en citant l’exemple de Boko Haram, ces extrémistes ‘’ ont pu enrôler des jeunes croyants mais qui ignorent tout de l’Islam. Il faut être en matière de l’Islam pour croire que Dieu ordonne de tuer gratuitement et inutilement ’’.

Dans le même ordre d’idées que lui, plusieurs Oulémas interrogés sur le lien entre l’Islam et les pratiques des groupes extrémistes armés, ont vivement condamné ces derniers et appellent les autorités à les combattre.

Selon Cheick Boureima Abdou Daouda, Prédicateur musulman et ancien Président de la Ligue des Oulémas et Prêcheurs du Sahel, l’Islam religion de ‘’Paix et d’amour’’, a devancé les toutes lois humaines dans la reconnaissance des droits et de la dignité des hommes depuis quinze siècles. ‘’C’est en Islam qu’on trouve en effet le système complet des sanctions portées à ceux qui menacent les droits et la sécurité de l’Homme’’ a-t-il soutenu lors d’une conférence qu’il a animée en décembre 2016 à la Maison de la Presse.

Et contrairement à l’idéologie et à la pratique des extrémistes, ‘’La vie est en effet un droit sacré en Islam et le meurtre est considéré comme l’atteinte la plus abominable à la vie humaine’’ a-t-il ajouté.

De même que pour Adamou Abdrahamane, Président du Bureau Exécutif National de l’Association des Etudiants Musulmans du Niger (AEMN), l’Islam et l’extrémisme sont deux mondes diamétralement opposés. Tout en condamnant les exactions de ces groupes radicaux, il soutient que ‘’l’Islam ne tolère aucune atteinte portée à la dignité humaine. Qu’une personne soit musulmane ou non, sa vie est sacrée et nul ne doit lui l’ôter sans raisons valables’’.

Selon lui, l’extrémisme violent n’est le propre de l’Islam, comme certains ont le plaisir de le dire. ‘’L’extrémisme qu’il soit violent ou non, n’est pas le propre d’une religion, d’une race ou d’une nation. L’histoire nous apprend que beaucoup de pays, beaucoup de communautés ont adopté cette attitude d’intolérance vis-à-vis d’autres communautés qui ne partagent pas les mêmes préoccupations qu’eux’’ a-t-il martelé.

Ce point de vue est également partagé par des leaders religieux chrétiens.

Sur cette question, leaders musulmans et chrétiens semblent regarder dans la même direction.

Antoine Chenu est un missionnaire catholique au Niger depuis 40 ans. Il estime que les extrémistes utilisent la religion pour arriver à d’autres fins.

‘’L’extrémisme religieux n’est qu’une façon d’imposer une idéologie, une doctrine. Et la meilleure manière de faire adhérer les gens est de leur faire croire que c’est une entreprise religieuse. Et là, leur sensibilité est touchée’’, a déclaré le religieux.

Cette position de Chenu est également partagée par son coreligionnaire, le père Mauro Armnino, missionnaire catholique et anthropologue italien, présent au Niger depuis 6 ans.

Il dira que la religion n’est qu’une couverture donnée par les groupes extrémistes pour mener des conquêtes politiques, économiques et sociales.

Bien qu’il n’existe pas d’association formelle des animistes au Niger, nous avons tenté de savoir ce que les animistes du Niger pensent de l’extrémisme violent.

Un animiste, répondant au nom de Bori Nahantchi, que nous avons rencontré dans un quartier périphérique de Niamey, soutient que l’extrémisme religieux est une véritable menace à la paix et de ce point de vue, même les ‘’divinités’’ vénérées dans sa communauté, leur interdisent la violence gratuite et inutile.

Outre les extrémistes eux-mêmes, les leaders religieux du Niger, malgré les différences de leurs cultes, sont unanimes que les violences perpétrées par les soit disant ‘’djihadistes’’ n’est pas un service rendu à Dieu et affichent leur hostilité contre cette idéologie obscurantiste.

L’extrémisme violent ; un danger public …

Ainsi, au niveau de leurs communautés confessionnelles respectives ou de façon mixte, les guides religieux entreprennent des initiatives pour contribuer à lutter contre l’extrémiste violent et parfois avec l’aide des autorités et les partenaires de l’Etat.

En effet, dès l’aube des exactions des groupes terroristes dans le Sahel, notamment Boko Hararm dans le Bassin du Lac Tchad, les groupes qui opèrent au Mali (MUJAO An-Sarandinn, MRLA…) Aqmi en Algérie, et les groupes rebelles en Libye, des Oulémas des pays de l’espace se sont réunis en association pour contrecarrer ces ‘’violences faites au nom d’Allah’’. Cette Association créée en 2010, dénommée ‘’Ligue des Oulémas et Prêcheurs des Pays du Sahel’’ regroupe 8 Etats : le Niger, le Nigeria, le Mali, le Tchad, le Burkina Faso, la Mauritanie, l’Algérie et la Libye. Le Sénégal, la Guinée et la Côte d’Ivoire sont admis en qualité d’observateurs.

Le credo de l’Association est ‘’Lutter contre le terrorisme et l’extrémisme par la parole de Dieu’’.

Selon des guides spirituels, puisque les terroristes utilisent à tort les versets coraniques pour enrôler des croyants dans leurs conquêtes maléfiques, il faut expliquer aux croyants le vrai sens du message du Coran ‘’qui est celui de la Paix et de l’amour’’.

Le Niger est représenté dans cette Association par des Oulémas dont l’ancien Président de ladite Association, Cheick Boureima Abdou Daouda. Les principales activités de cette structure sont, entre autres, la formation, les séminaires, les ateliers et les prêches.

Lutter contre le terrorisme par la parole sainte, c’est aussi la perspective dans laquelle s’’inscrit l’AEMN depuis quelques années.

L’association estudiantine s’est, depuis 2015, engagée dans une vaste campagne de sensibilisation de paix dite ‘’caravane médicale et de paix’’. La première édition a ciblé plusieurs villages de la zone du Département de Ouallam où des actions sociales et des sensibilisations sur la culture de la paix ont été menées au profit des populations victimes des attaques terroristes.

En aout 2016, ce sont plusieurs villages du Département de Birni (localités où les conflits entre agriculteurs et éleveurs sont fréquents) qui ont bénéficié des appuis de l’Association.

De leurs côtes, les associations chrétiennes du Niger sont aussi actives dans la culture de la paix et de la cohabitation pacifique entre les différentes communautés religieuses.

Antoine Chenu, œuvre depuis 40 au Niger, dans les dialogues inter religieux. Il est aujourd’hui membre de plusieurs commissions dialogues islamo-chrétiennes.

Selon lui, ‘’ avec l’appui des autorités étatiques, le dialogue inter religieux au Niger, est un grand exemple dans toute l’Afrique’’.

Le Père Mauro explique que la Communauté chrétienne au Niger, œuvre inlassablement dans la culture de la paix notamment à travers des actions sociales. Il cite l’exemple de celles menées par la ‘’Caritas’’ et l’enseignement de la paix dans les différentes écoles chrétiennes.

Les Autorités compétentes, à travers notamment le Ministère en charge de l’Intérieur, accompagnent les initiatives des religieux pour lutter efficacement contre le fléau.

Abdou Samade Yahaya, Directeur des Affaires Religieuses, nous apprend que son Département ministériel a créé des cadres de dialogues inters et intra religieux dans six (6) Régions du pays. Et bientôt, le Ministère va créer dans chacune des Régions qui n’en disposent pas (Agadez et Tillabéry).

Bientôt un cadre de dialogue pour toutes les religions…

Quand cela sera fait, le Ministère mettra une structure nationale pour que tous les chefs religieux de toutes les religions du Niger, puissent dialoguer, cultiver la paix et la coexistence pacifique et lutter contre l’extrémisme religieux.

Il faut dire que le rôle que jouent les guides religieux dans la lutte contre l’extrémisme violent est d’une importance capitale, car il permet de dissuader des combattants extrémistes ayant adhéré aux mouvements par conviction.

A titre d’exemple, il y a seulement quelques mois, les autorités ont accueilli 138 ex-combattants de la secte Boko Haram dans la Région de Diffa., dont environ 100 hommes, 15 femmes et le reste des enfants selon le Ministère en charge de l’Intérieur.

Face à la menace commune que constitue l’extrémisme religieux violent, les guides spirituels du Niger ont tu leurs différends confessionnels et s’engagent mutuellement à lutter contre cet ennemi sans foi, ni loi, et qui n’a pas de frontières géographiques.

Leurs actions sont encouragées et soutenues par les autorités nationales. Mais comme le dit le président de la République Issoufou Mahamadou, ‘’ le mal n’est pas encore vaincu. Il y a donc lieu d’intensifier les actions pour que le Niger puisse toujours briller de sa plus grande richesse qu’est la paix et la cohabitation pacifique des différentes communautés’’.

MSB/AMC/DMM/ANP/Avril 2017

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