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Créer et soutenir les activités génératrices de revenus en vue d’atténuer les tragédies suscitées par la migration : Intensifier les efforts visant à réduire la mobilité des potentiels candidats à l’exode
Publié le lundi 8 mai 2017   |  Niger Diaspora


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© Autre presse par DR
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La région d’Agadez, au Niger, demeure l’épicentre du phénomène migratoire en Afrique. En effet, chaque année, quelque cent mille (100 000) migrants subsahariens transitent dans cette zone, le plus souvent en direction de l'Europe. Cependant, le Niger est aussi le pays d'origine des migrants vers les pays du Maghreb, dont la Libye. C’est dans ce contexte qu’intervient le Réseau d'Appui à la Sécurité Alimentaire et au Développement Coopératif (AID 10336/BND/NER), financé par l’Agence Italienne pour la Coopération et le Développement, via l’ONG Bambini Nel Deserto en collaboration avec l'ONG Terre Solidali.

Les activités de ces ONG sont par ailleurs exécutées par le Groupement d’Appui à la Gestion Durable des ressources Naturelles et à la Lutte contre la pauvreté (GAGE/Azihar), AcSSA/Afrique Verte Niger et RESEDA. Ainsi, le projet en question intervient au niveau des régions d’Agadez et de Tillabéry et dans la Commune 5 de Niamey, et dans toutes ces régions, il enregistre la participation active des partenaires locaux.

Les bénéficiaires directs du projet sont au nombre de 250 environ. Parmi eux, il y a une centaine de femmes qui sont basées à Agadez et rassemblées au sein de groupements féminins qui excellent chacun dans une activité bien déterminée. C’est ainsi que quatre de ces groupements exercent respectivement dans la production de savon et de gommage, la fabrication de parfum et d’encens, la teinture, la transformation de céréales et de légumes, tandis que deux autres s’adonnent à la couture.

A ces six (6) groupements d’Agadez, s’ajoute un autre groupement basé à Makalondi, région de Torodi, et qui exerce aussi dans la transformation des céréales et des légumes.

En outre, le projet appuie six (6) jardins à exploitation familiale à travers des installations de réseaux californiens alimentés par des pompes à panneaux solaires. L’objectif, d’une manière générale, est de donner espoir aux potentiels migrants, ainsi qu’aux migrants refoulés de la Libye après la guerre, en les fixant dans leur pays d'origine. Il faut noter que beaucoup parmi les femmes bénéficiaires des actions du projet avaient perdu leurs maris et leurs enfants lors des évènements qui ont abouti à la chute du Guide Libyen, Mouamar Kadhafi, au courant de l’année 2012.

En effet, c’est au cours de l’année 2012 que l'ONG Bambini Nel Deserto, chef de file du projet, a lancé des actions pour donner des alternatives à la migration, à travers des formations en Activités Génératrices de Revenus, particulièrement à l’intention de certaines femmes refoulées qui s’étaient réunies en groupements, et aussi d’hommes maraichers, qui pouvaient constituer des candidats à l’émigration.

Des formations pour soutenir et rentabiliser les activités génératrices de revenus
Au regard du succès des expériences précédentes, le projet a jugé utile de consolider les acquis des différents groupements à travers des formations de renforcement des capacités.

‘’Nous sommes réunies ici pour une formation en gestion. Cette formation permettra aux participantes de redynamiser leurs groupements et de rentabiliser davantage leurs activités’’, disait la formatrice en gestion de groupements féminins, Mme Hélène Agnelli, lors d’une session qu’elle a tenue en mars dernier à Niamey, et qui a réuni les présidentes et les trésorières des 5 groupements féminins d'Agadez.

En cette occasion, Mme Hélène Agnelli avait relevé que l’objectif de la formation en gestion n’était nullement de faire de ces femmes des comptables et des gestionnaires, mais plutôt de les aider à développer des outils d’analyse de leurs activités pour mieux planifier et analyser les coûts annexes qui ne sont pas toujours intégrés dans les coûts de revient. La majeure difficulté, a-t-elle dit, se trouve surtout au niveau de l’écoulement des produits. Toutefois, souligne-t-elle, il demeure important de continuer à les accompagner et à les suivre dans leur progression, d’autant plus que, malgré les difficultés de la vie depuis leur retour de Libye en 2012, ces femmes ont atteint une grande autonomie grâce à leurs activités. ‘’Elles arrivent à s’en sortir. Ce n’est pas parfait. On peut développer mieux. Mais elles rebondissent’’, affirme Mme Hélène Agnelli.

Une des bénéficiaires, Mme Aïchatou Mati Sani, membre du Groupement ‘’Mata Masu Hikima’’ situé au centre-ville d’Agadez, qui s’adonne à la teinture, rappelle de prime abord son séjour d’une durée de douze (12) ans en Libye. Elle enchaine en soulignant que présentement elle gagne suffisamment de quoi subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille.

‘’Je ne pense plus à retourner en Libye. Je me rends compte que quel que soit ce que nous gagnons ailleurs, c’est incomparable à ce que nous gagnions au Niger, auprès de nos familles. Sans l’intervention de ce projet, nous serions certainement tentées de retourner encore en exode’’, soutient Mme Aïchatou Mati Sani, qui explique que son groupement compte dix-huit (18) femmes. Ayant au préalable bénéficié d’une formation en teinture, et d’un kit de démarrage des activités, elles ont acquis par la suite d’autres formations dont une en gestion. Une formation qui leur a permis d’accroitre leurs connaissances sur des notions comme le prêt et le crédit dans l’optique d’amplifier leurs activités.

‘’Avec les revenus de la teinture, j’ai eu pu faire des économies pendant une année, et cela m’a permis d’acheter un moulin et de m’adonner à une deuxième activité génératrice de revenus. A mon tour, je forme d’autres femmes’’, renchérit Mme Aïchatou Mati Sani, tout en nous faisant une démonstration de son savoir-faire en teinture.

Une autre bénéficiaire, Mme Adama Effartail, a pour sa part bénéficié, avec dix-neuf autres femmes, d’une formation en production de parfum et d’encens. Elle avait passé trois années en Libye avant de regagner le Niger lors des évènements du printemps Libyen. ‘’Avant, nous ignorons le processus de fabrication des parfums liquides et de l’encens. Maintenant notre groupement dénommé ‘’Tafarchite’’ maitrise ce travail qui permet à certaines d’entre nous de payer les études de leurs enfants orphelins de père. En ce sens la meilleure aide est pour nous l’apprentissage d’un métier, voire une activité génératrice de revenu» dit Mme AdamaEffartail.

Augmenter la production agro-alimentaire et développer une économie maraichère
Toujours dans l’optique d’instauration du processus d’une économie sectorielle permettant de retenir les femmes auprès de leurs familles à Agadez, le projet s’est attelé à créer les conditions d’augmentation de la production agro-alimentaire, tout en accentuant les revenus familiaux. Il s’agit en outre de réduire la vulnérabilité de maraichers locaux et de leurs familles, soit plusieurs dizaines de personnes, en les soutenant à travers des appuis à leurs activités de maraichage. A ce niveau, la démarche, consiste à employer les énergies renouvelables et des techniques soutenables pour une agriculture de forte épargne énergétique et pour une dispersion limitée des ressources hydriques.

‘’Au niveau des six jardins, nous avons installé une pompe solaire logée dans un puits pour alimenter un réservoir, et en suite un réseau californien d’irrigation qui envoi l'eau aux planches de cultures’’, expliquent l’ingénieur M. Cristian Concollatodel de l'ONG Bambini del Deserto, et l'agronome M. Stefano Bechis, de l'ONG Terre Solidali, lors d’une visite de terrain effectuée en fin mars dernier. Ils avaient, à cette occasion, relevé le disfonctionnement de certaines installations dû à une défaillance due à la manutention des équipements et à l’ensablement des pompes lors d’inondations des cauris, ou encore à la déviation de l’électricité produite par les panneaux photovoltaïques à d’autres fins. Malgré ces quelques défaillances, l'expérience a été de succès, et il est attendu des responsables du projet l'intensification des initiatives visant à responsabiliser davantage les bénéficiaires.

Un des exploitants de ces jardins familiaux du nom de M. Aboubacar Oumboulou, 53 ans, père de huit (8) enfants, qui vit depuis des décennies de l’exploitation du jardin familial, se rappelle de l’époque où l’irrigation se faisait à l’aide de la force motrice des chameaux. Au fil du temps, les maraichers ont transité vers l’irrigation par motopompes qui, a-t-il relevé, a un coût très élevé, à cause du l’utilisation de l’essence.

Malgré tout, le système utilisé par le projet engendre moins de pertes et de gaspillage en eau, ajoute notre interlocuteur qui se réjouit du fait que les bénéfices engrangés après la vente de leurs productions, leur permettent de subvenir à leurs besoins alimentaires et sanitaires. ‘’Ces revenus nous permettent aussi d’inscrire nos enfants à l’école. Actuellement, je m’occupe aussi des enfants de mon petit frère en exode. En ce qui me concerne, mon or est ma terre. Nous souhaitons que d’autres familles puissent bénéficier, comme nous, de ce genre d’infrastructures’’, indique M. Aboubacar Oumboulou.

Un autre exploitant de jardins familiaux à Agadez nous assure qu’il n’a aucun coût à débourser pour l’irrigation de ses planches, alors qu’auparavant, il déboursait un minimum de 2500 FCFA par jour en frais d’essence. Actuellement, il arrose quelque 140 plants par jour à l’aide du système californien et a eu une production de 33 sacs d’oignons de 50 kilos chacun en une saison. Selon les saisons, cet agriculteur produit de la tomate, des carottes et des haricots verts.

Dans le même volet, et concernant cette fois le site maraîcher de Makalondi, le projet a appuyé le groupement Bouayaba à valoriser l'utilisation du système de pompage photovoltaïque, avec deux (2) types de système de distribution d’eau. Ce système, réalisé dans le cadre du Programme Européen Energies Durables dans les régions d’Agadez et de Tillabéri, réalisé par l'ONG Terre Solidali, est constitué de six (6) panneaux de 200 volts chacun. Ces panneaux fournissent l’énergie à une pompe se trouvant dans un puits, et qui à son tour, puise l’eau pour l’envoyer soit à un système de distribution de goutte à goutte, soit aux niveaux de 5 bassins se trouvant sur le terrain de 2500m2 exploité par 33 femmes. ‘’Nous nous avons besoin d’une plus grande quantité d’eau en vue d’amplifier notre production. Nous sollicitons également davantage de matériel aratoire’’, renchérit Mme Kampoi Yamboido Lompo, présidente du groupement Bouayaba de Makalondi.

Accompagner les groupements féminins dans le processus de transformation et de vente des produits agro-alimentaires
A travers les activités du projet Réseau d'Appui, un support technique ainsi que du matériel ont été fournis aux bénéficiers de 2 ateliers de transformation et de conservation des produits agro-alimentaires installées à Agadez et Makalondi, ainsi qu'à l'atelier basé à Niamey qui produit du combustible appelé "pellets" et des aliments pour le bétail. Ces trois (3) ateliers ont aussi été réalisés dans le cadre du Programme Européen Energies Durables.

Le système de transformation est essentiellement basé sur un séchoir à ventilation forcée; il fonctionne grâce à des ventilateurs alimentés par des panneaux photovoltaïques, qui poussent l’air à l’intérieur des séchoirs. Ce séchoir, qui mesure un (1) mètre de largeur et deux (2) mètres de longueur, soutenu par quatre (4) pieds, a gagné le 3ème prix lors d’une compétition internationale lancée en 2004 à Tunis, par la Banque Africaine de Développement (BAD). En 2014 quelque 400 exemplaires ont été reproduits au Niger par le RESEDA, alors qu’en 2017, on enregistre déjà la commande d’une soixantaine d’unités. Ils sont généralement commandés par des ONG engagées dans des projets de développement. Ils servent à sécher les farines, les couscous et les produits maraîchers. Une des contraintes est que durant la période pluvieuse, les produits ne peuvent pas être séchés convenablement.

Mme Gaïchatou Yahaya, présidente du groupement féminin ‘’Tchidnass’’ d’Agadez, un des groupements féminins utilisateurs de ces séchoirs, souligne qu’étant au nombre de 24, elles peuvent par exemple traiter par semaine, 268 à 407kg de mil. Pour le Sorgho, elles traitent 107 à 327 kg par semaine.

Les femmes de ces groupements travaillent du lundi au vendredi, de 8h du matin, et parfois jusqu’à la tombée de la nuit.
Quant aux difficultés, elles sont inhérentes à l’insuffisance l’espace de rangement du matériel quand il y a des intempéries et au manque de matériel d’entretien des machines.

‘’La demande de nos produits sur le marché et au niveau de notre boutique est plus grande que le stock que nous pouvons constituer. Je lance un appel aux femmes pour qu’elles viennent travailler. Apprendre un métier permet de vivre libres et indépendantes, sans rien demander à personne. En travaillant, nous gardons notre fierté, nous n’avons pas besoin d’aller en exode’’, martèle Mme Gaïchatou Yahaya, lors d’un entretien que nous avons eu au niveau de l’atelier de transformation du groupement.

Le groupement de ‘’Yempagou’’ de Makalondi s’attèle lui aussi à la transformation et à la vente des produits agro-alimentaires. ‘’Malgré nos quatre points de vente, nous avons quelques problèmes d’écoulement de nos produits. Pour le ‘’dégué’’, nous arrivons à vendre quelque 40 kilos par semaine, alors qu’environ 3 sacs de maïs et 1 sac de mil de 100 kilos chacun sont travaillés par semaine.

La boule de mil que nous produisons est particulièrement exportée vers le Ghana, même si le marché demeure là aussi un peu timide. Malgré tout, nos trains de vie se sont sensiblement améliorés, car nous arrivons à subvenir aisément à nos besoins. D’autre part, nous nous retrouvons pour travailler entre consœurs, tandis qu’avant, chacune était de son côté. Nous travaillons tous les jours de la semaine, de 8h à 13h. Nos maris ne se plaignent pas, car ils bénéficient eux aussi des retombées de nos activités’’, nous affirme l’animatrice du groupement, Mme Yonli Banyoua Catherine, avec laquelle nous nous sommes également entretenu en fin mars dernier.

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Il ressort de nos constats sur le terrain que les membres des différents bénéficiaires du projet ont subi une amélioration sensible de leur niveau de vie et disposent de belles perspectives devant elles. Quant aux difficultés liées au travail en groupe, on remarque qu’elles sont généralement surmontées.

Cependant, il reste à les sensibiliser sur l’importance de réinvestir les bénéfices afin de développer leurs activités, car actuellement, ils sont astreints d’attendre et d’espérer d’autres investissements de la part des bailleurs. Toujours dans cette logique, ils comptent toujours sur la bienveillance du bailleur de fonds pour procéder aux réparations en cas de panne, alors qu’ils peuvent, au préalable, dégager et mettre à l’abri une certaine somme à cet effet. Par ailleurs, pour le groupement des femmes productrices de savon à Agadez, la disponibilité de la matière première demeure une contrainte.

D’un autre point de vue, l’écoulement demeure toujours une problématique. A ce niveau, ils peuvent organiser des séances de dégustation dans des lieux publics tels que les marchés, les écoles, les lieux de cérémonie, etc. A ce niveau donc, il y a nécessité de projeter des formations basiques en marketing.

Pour conclure, on peut citer le Président de la République, Chef de l’Etat, SEM. Issoufou Mahamadou, qui affirmait lors de son allocution au sommet de La valette sur la migration: ‘’Il importe de ne pas se méprendre. La migration irrégulière aura de beaux jours encore tant que nous ne parviendrons pas à intensifier les efforts visant à promouvoir la mobilité et la migration légales, à engager une réforme de la gouvernance économique mondiale axée sur un équilibre des termes de l'échange, un libre accès aux marchés des pays développés et un accroissement de l'investissement privé direct’’.

En effet, pour retenir les populations locales dans leurs milieux, il est nécessaire et urgent que le Gouvernement et les Partenaires Techniques et Financiers accentuent les politiques devant aider les populations à mieux comprendre l’importance de rester chez soi, pour protéger, exploiter et faire fructifier leur environnement et leur cadre de vie. En un mot, le travail sur ces populations assistées doit être axé sur la reconversion des mœurs et des mentalités. Car ce que ces populations vont chercher ailleurs, se trouve là, à leurs pieds.

Samira Sabou
Envoyée Spéciale à Agadez et à Makalondi

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