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Le Sahel N° du 14/6/2017

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Entretien avec le Colonel Mahamadou Abou Tarka, Président de la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix
Publié le vendredi 16 juin 2017   |  Le Sahel


Le
© Autre presse par DR
Le Colonel Mahamadou Abou Tarka, président de la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix


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Chapeau A Diffa, Il y a une satisfaction générale par rapport aux résultats atteints par le programme SECURISER. Mais les efforts doivent se poursuivre. D'ores et déjà, nous travaillons avec l'Union Européenne et l'Agence Française de Développement (AFD) sur la prochaine génération de projets à développer au profit des populations de Diffa.
«A Diffa, les forces armées ont empêché Boko Haram d'avoir un sanctuaire et le programme SECURISER a posé les jalons d'une stabilité durable», estime le Président de la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix
Pouvez-vous nous présenter la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix, sa mission et ses objectifs?
La Haute Autorité à la Consolidation de la Paix (HACP) est une institution nationale, rattachée à la Présidence de la République. Elle est animée par des cadres civils et militaires. Elle est chargée de la prévention des conflits et de la mitigation des impacts de ces conflits quand ils se déclarent. Elle travaille également à permettre aux Forces Armées d'évoluer dans un contexte favorable avec le soutien des populations. C'est ce qu'on appelle l'approche globale dans les conflits. Cette approche nous permet de répondre aux crises avec une vision globale. Car, dans une crise, il y a généralement plusieurs dimensions ou facteurs : économiques, sociaux, facteurs liés à la gouvernance, aux croyances....Tenant compte de ces aspects, même face à des crises telles que, celle que cause Boko Haram, nous considérons que la réponse ne doit pas être seulement militaire. La Haute Autorité à la Consolidation de la Paix fait donc de la gestion de crise de manière non létale, en utilisant d'autres instruments, tels que : la création d'opportunités économiques, la sensibilisation, la formation, l'écoute et l'accompagnement des communautés.
Le Président de la République S.E.M ISSOUFOU Mahamadou a l'habitude de dire que la sécurité et le développement sont liés. C'est en effet cette vision que nous mettons en pratique sur le terrain. Nous le faisons avec des partenaires comme l'Union Européenne. Pourquoi l''Union Européenne ? Parce que l'UE a une certaine vision et expérience dans ce domaine. Premièrement elle dispose d'un outil institutionnel, l'Instrument de Stabilité (IDS) qui avait servi à la stabilisation des pays de l'Europe de l'Est au moment de leur passage à l'économie de marché. Deuxièmement, l'UE a développé une stratégie de sécurité et de développement pour les pays du Sahel qui pose le diagnostic que la crise au Sahel ne réside pas seulement dans l'irruption du terrorisme et des rebellions armées, mais que ces phénomènes sont la conséquence d'une crise plus structurelle avec une forte détermination économique. Le même diagnostic a été fait de notre coté puisque comme vous le savez le Gouvernement a adopté une stratégie de sécurité et de développement des zones sahélo-sahariennes au Niger. Les deux politiques ont la même démarche : pour combattre l'insécurité, il faut déployer les Forces Armées. Mais comme les Forces Armées ne se battent pas contre un ennemi conventionnel, mais contre des bandes promptes à se cacher dans la population, ennemi la nuit et civil le jour, il faut obtenir le soutien de la population. D'ou la nécessité de prêter attention aux demandes de ces mêmes populations, la nécessité aussi d'encadrer les populations. Et, pour être crédible, il faut satisfaire les demandes par des actions de développement.
Toutefois, dans un contexte de crise, les actions de développement doivent être à impact rapide, pour freiner la crise et limiter ses conséquences. C'est là tout l'intérêt de l'Instrument de Développement de l'UE. C'est un mécanisme flexible, permettant de lancer rapidement un projet et d'en récolter les fruits à temps pour agir sur la crise. C'est le concept de l'IDS devenu l'Instrument Contribuant à la Stabilité et à la Paix (IcSP). C'est ce que nous avons fait à Diffa. C'est un instrument qui nous permet d'intervenir dans des zones de crise de manière rapide. La mise en œuvre des projets est rapide et au bout de 18 mois nous sommes en mesure de produire des résultats tangibles, comme dans le cadre du programme SECURISER.

Justement vous avez mis en œuvre ce programme SECURISER. Que vise t-il?
Le Programme SECURISER a pour objectif d'appuyer les communautés de la région de Diffa à résister au choc sécuritaire né des attaques de Boko Haram et à limiter leurs conséquences sur la vie socio-économie. Le programme SECURISER a été conçu autour de trois composantes, que sont : les activités génératrices de revenus (AGR), les travaux à haute intensité de main d'œuvre (HIMO) et les actions de sensibilisation, formation et de renforcement des capacités. En terme d'investissements, c'est un peu plus de huit (8) milliards de Francs CFA qui ont été injectés dans le tissu socio-économique de la région de Diffa.

Quelles sont concrètement les activités réalisées dans le cadre du programme SECURISER?
Le programme SECURISER a mené plusieurs types d'activités. Sur le volet AGR, nous avons créé des opportunités économiques pour les populations, et particulièrement pour les jeunes. Nous les aidons ainsi à monter des petits commerces, des micros entreprises (ateliers, maraîchage...), en leur fournissant un capital de démarrage et/ou du matériel. C'est ainsi que 992 AGR ont été financées sur l'ensemble de la région. En termes de travaux HIMO de nombreux aménagements de cuvettes oasiennes et de chenaux ont été réalisés, ainsi que des salles de classes et j'en passe, ceci, en un temps record. Car la rapidité est ce qui distingue notre démarche des actions classiques de développement qui s'éternisent et lorsqu'elles ont finalement lieu, la situation sécuritaire s'est souvent tellement dégradée qu'elles n'ont plus aucun impact.
Sur le volet activités HIMO, il y a un double avantage : la population est impliquée, et en même temps des emplois locaux sont créés pendant plusieurs mois. C'est ainsi que, nous avons réalisé dans le cadre du programme SECURISER des aménagements hydro agricoles et des activités de fixation de dunes dans les 12 communes de la région de Diffa. Ces actions ont touché près de 3.500 jeunes.
La fixation des dunes procure un autre avantage, en ce sens, qu'elle permet de restaurer l'environnement et de favoriser le reboisement de la région de Diffa (où les moyens d'existence durable sont aussi menacés par l'avancée du désert). Dans la même optique, le programme SECURISER a aussi mis en œuvre un projet de promotion de l'utilisation du gaz domestique. Ce projet a également produit des impacts positifs au niveau de la population et sur l'environnement. Nous avons signé un partenariat avec SONIHY (une entreprise de distribution de gaz). Nous avons ainsi installé cinq (5) stations de distribution de gaz de 10 tonnes chacun. Nous avons sponsorisé la vente des bouteilles. Dans un premier temps, nous donnons aux ménages cibles un réchaud et une bouteille de gaz gratuite. Après, pour le renouvèlement, les bénéficiaires achètent le gaz avec leurs propres moyens, son prix étant très modéré. Grace à ce projet, aujourd'hui 30% de la population de Diffa utilise le gaz.
La troisième composante, du programme SECURISER, elle, s'adresse particulièrement à la jeunesse. Il y a beaucoup de jeunes qui n'ont jamais été à l'école. Il faut donc les former. Alors, nous avons construit un Centre de formation aux métiers et un Centre d'éducation alternative dans chacune des douze (12) communes de la région de Diffa. Dans ces centres, les jeunes apprennent divers métiers (mécanique auto, réparation de téléphone cellulaire, menuiserie métallique, couture, cuisine...). Ce qui leur permet de s'auto-employer et d'être autonomes.
Pour un bon suivi de la mise en œuvre de ces actions, nous avons aussi renforcé les capacités des communes d'intervention du programme SECURISER. Nous avons appuyé également la Police nationale pour sécuriser les frontières de la région de Diffa notamment à travers la construction et l'équipement de postes de contrôle frontaliers.
Toujours dans l'optique de stabiliser la région et de garantir sa cohésion sociale, le programme SECURISER a soutenu les écoles coraniques et renforcer les capacités des institutions en charge des affaires religieuses.
Dans la mise en œuvre du programme SECURISER, les jeunes semblent avoir une place prépondérante. Qu'est-ce qui explique cela ?
Les jeunes sont non seulement les vecteurs mais également les principales victimes de l'insécurité. D'ailleurs, ce sont les jeunes que Boko Haram recrute mais ce sont eux également que l'armée recrute pour les envoyer contre Boko Haram. Donc, les jeunes meurent de chaque côté. Parmi les jeunes de la région de Diffa, nombreux sont déscolarisés ou mal scolarisés et n'arrivent pas à avoir de l'emploi. Et, sans un accompagnement conséquent de ces jeunes, la situation dans la région Diffa sera toujours explosive.
C'est pour cela que nous portons une attention particulièrement à l'autonomisation des jeunes de la région de Diffa.

Après avoir vécu depuis 2014 des périodes de grande insécurité liée aux attaques terroristes de Boko Haram, la région de Diffa retrouve peu à peu sa sérénité d'antan. Comment appréciez-vous la contribution du programme SECURISER dans la stabilisation de la région de Diffa?
Durant le mois de mai 2017, nous avons eu une réunion avec le Ministre de l'intérieur. Il disait que, la région de diffa est la plus sécurisée du Niger, au vu des statistiques des incidents arrivés au cours des dernières semaines. Bien évidement, pour parvenir à cette sérénité, il y'a d'abord la grande action que les forces armées ont mené pour protéger les populations et pour empêcher Boko Haram d'avoir un sanctuaire. Mais il y a aussi la contribution non négligeable des actions du programme SECURISER.
Comment envisagez-vous la pérennisation des acquis du programme SECURISER et sa mise à l'échelle?
La pérennisation des impacts du programme SECURISER est un enjeu important pour nous. Nous envisageons évidemment de continuer ces interventions. Mais nous avons beaucoup sensibilisé les communes, le Conseil régional et les cadres techniques régionaux pour pérenniser les actions en les intégrant dans d'autres projets de développement à caractère structurant qui ne manqueront pas de suivre. Comme vous le savez, avec Mme la Ministre du Plan, nous préparons un grand programme de sortie de crise dans la région de Diffa qui ne laissera aucun secteur économique de Diffa sans y apporter une reponse adéquate.
Pour ce qui concerne la mise à l'échelle des activités du programme SECURISER, d'ores et déjà, nous travaillons avec l'Union Européenne sur la prochaine génération de projets. Par exemple, nous souhaiterions continuer le projet de distribution gaz domestique, avec comme objectif de couvrir l'ensemble de la population de la région de Diffa. Aussi, avec l'Agence Française de Développement (AFD) nous envisageons le lancement ensemble d'un projet – à impact rapide, je le souligne - dédié à la jeunesse de Diffa. Ce projet va permettre de soutenir davantage l'insertion socioprofessionnelle des jeunes de la région.
Avec toutes ces réalisations et ces perspectives quel est le feedback que vous avez des acteurs du terrain?
Nous avons tenu fin mai 2017 à Diffa, le dernier comité de pilotage du programme SECURISER, avec le Gouverneur, le Président du Conseil régional et toutes les autorités régionales. Il y a une satisfaction générale par rapport aux résultats atteints par le programme SECURISER.

Par IMPACT COM.MEDIA pour le compte de HACP

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