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NIAMEY : La manifestation pacifique de la société civile vire à l’émeute
Publié le dimanche 29 octobre 2017   |  Actu Niger


NIAMEY
© Autre presse par DR
NIAMEY : La manifestation pacifique de la société civile vire à l’émeute


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Des heurts ont éclaté ce dimanche à Niamey entre la police et des manifestants à la suite de la marche suivie de meeting qu’organisait la société civile pour dénoncer les dispositions du projet de loi de finances actuellement en discussion au niveau du Parlement.

A l’appel d’une coalition d’associations de la société civile et d’organisations de défense de droits des consommateurs, des milliers de manifestants ont pris d’assaut la place Toumo, en plein centre de la capitale nigérienne, où devrait se tenir le meeting. La manifestation annoncée comme « pacifique » par ses initiateurs a pourtant été autorisée par les autorités municipales qui ont néanmoins enjoint aux organisateurs de modifier leur itinéraire en raison entre autres de la situation sécuritaire. Les organisateurs comptaient dans un premier temps se rendre de la place Toumo à la Place de concertation, devant l’hémicycle, ou devrait se tenir le meeting à l’issue duquel un mémorandum sera remis au président de l’Assemblée nationale.

C’est donc en dépit de cause que les organisateurs se sont finalement résolus à organiser leur meeting à la Place Toumo. Ce matin pourtant et alors que la foule commençait à s’amasser au lieu de la manifestation qui a débuté dans le calme, certains protestataires se sont en mis en devoir de marcher vers le Parlement situé à quelques encablures. Le refus de certains organisateurs de céder a été mal perçu par certains manifestants enragés, en majorité des jeunes mais pas seulement, qui ont entrepris d’atteindre la Place de concertation. La police a alors usé du gaz lacrymogènes pour les contenir ce qui a fait dégénérer la situation à partir notamment du rond-point des armées (6e). Des heurts ont par la suite éclatés dans plusieurs quartiers de la ville, les manifestants ont bloqués plusieurs carrefours avec des pneus brulés et des jets de pierre. Des biens publics et privés ont également été saccagés par des protestataires déterminés face à la police.

Des acteurs de la société civile notamment Nouhou Arzika, une des icônes du mouvement de contestation ainsi que le président de ACTICE Abass Abdoul Aziz, ont été violemment pris à partie, d’abord au départ de la manif puis ensuite au niveau de la place de concertation où certains manifestants ont réussi à s’infiltrer. Le gros de la troupe a été stoppé par un imposant dispositif sécuritaire aux alentours de l’hémicycle mais c’était au prix de violentes échauffourées qui se sont étendues aux quartiers environnements avec des spectacles ahurissants de course poursuite entre agents de l’ordre et manifestants.Débordements, infiltration ou préméditation ?

En début de soirée, le calme semble revenir dans la ville même si la situation reste encore tendue et surtout confuse. Les organisateurs notamment le président du MPCR Nouhou Arzika ont tenu à dégager toute la responsabilité de la société civile sur les débordements constatés en dehors du lieu du meeting.

A en croire un des organisateurs, il se pourrait qu’il y ait eu « infiltration de la part de certains opposants qui veulent profiter de la situation». « Mais en aucun cas, il n y a pas eu de connivence entre notre agenda et celui des partis politiques de l’opposition ou du pouvoir » tient-il aussitôt à ajouter.

Au niveau du pouvoir et particulièrement du parti présidentiel, le PNDS Tarraya, on souligne que « les faits ont démontré que cette marche n’était en rien une marche citoyenne et les émeutes ont été bien préparées en amont comme en témoignent les pneus déjà prêts à être brûler et la présence de certains manifestants déjà préparés à faire face à la police ».

« C’est tout simplement de la manipulation et même si elle a été infiltrée, la société civile a joué le jeu de l’opposition qui veut souffler sur les braises du mécontentement populaire engendré par une campagne savamment orchestrée contre le gouvernement à travers des interprétations tendancieuses de la loi des finances » nous a détaillé un cadre de la majorité contacté à Niamey.

Du coté d’autres organisateurs, on déplore certes les débordements constatés mais on réfute toute « récupération politique de la manifestation ». C’est à la limite si on reconnait au sein de la société civile que l’opposition a certes plus à gagner dans la dégradation du contexte social et politique et pourrait de ce fait, se servir de cette situation confuse comme d’une brèche. D’autant que ce n’est pas la première fois que le gouvernement accuse l’opposition de profiter des manifestations sociales pour « tenter de semer le chaos » comme c’était le cas en janvier 2015 lors des violentes manifestations anti-Charlie hebdo, avance une source gouvernementale.

« Il ne faut pas exagérer les faits quand même, il y a eu des débordements certes mais il aurait été impossible d’anticiper et de gérer cette colère des manifestants qui sont sortis massivement exprimer leurs ras-le-bol contre les dispositions antisociales de la loi des finances ainsi que la gouvernance du régime actuelle dans son ensemble » met en avant cet autre acteur de la société civile.Raz-le bol généralisé

La manifestation était en principe destinée à dénoncer certaines mesures du projet de la loi de finances qui risqueraient d’engendrer un surcoût de la vie alors que la conjoncture est déjà difficile et que le pouvoir rechigne lui à réduire son train de vie préférant augmenter les impôts et taxes pour équilibrer son budget. Toutefois, certains manifestants ont tenu à exprimer leur ras-le-bol sur la gouvernance actuelle avec des séries de présomptions de détournements de biens publics et d’enrichissement illicites régulièrement rapportées par la presse et impliquant plusieurs personnalités du régime. Avec les retards accusés dans le paiement des salaires pour certains catégories d’agent de l’Etat et une conjoncture économique difficile avec des caisses de l’Etat au rouge comme le reconnaissent désormais certains alliés du parti au pouvoir, le contexte social se dégrade de plus en plus. A cela s’ajoute un contexte politique lui-aussi assez délétère.

Du coup la manifestation pacifique s’est transformée en « marche de la colère ». Au milieu des slogans « Non à la Loi des finances 2018 », « Non à la mauvaise gouvernance », on pouvait aussi lire sur d’autres pancartes brandies par les manifestants « Non à la présence des bases militaires étrangères au Niger !» ou « AREVA dehors ! ».

La société civile a réussi le pari de la mobilisation qui était l’un des véritables enjeux de la manifestation. Même si on est loin de la marche dite historique du 15 mars 2005, ils étaient des milliers de manifestant à répondre à l’appel de la société civile. En l’absence de système de comptage qui fait faoi, tant au niveau des organisateurs que de la police, il est difficile d’avancer un chiffre sur le nombre de manifestants.

A l’heure où nous mettons en ligne, un calme précaire semble revenir dans les principales rues de la capitale. Sur les lieux des affrontements, des pneus continuent à se consumer et les traces de la violence de certains manifestants ainsi que de la répression des forces de l’ordre sont encor visibles.

Aucune source n’a encore confirmé des cas de blessés ou d’arrestation au cours de la manifestation même si la violence des heurts pouvait présager le pire. Des interpellations pourraient d’ailleurs suivre. Des biens privés ont été saccagés même si la responsabilité pourrait difficilement être imputable aux organisateurs qui ont été visiblement débordés par la foule et l’ampleur du mécontentement populaire. Vers un bras de fer…, comme en 2005 ?

Il reste à attendre la réaction des autorités qui s’attendaient d’ailleurs à un tel scénario. Le pouvoir de Mahamadou Issoufou privilégiera-t-il l’épreuve de force à laquelle certains au sein du régime s’y préparent déjà ou au contraire va-t-il recourir aussi à la démonstration de force à travers une contre-manifestation comme en 2005 avant de devoir par la suite céder en amendant plusieurs dispositions de la loi des finances lors des discussions au Parlement ?

C’est en effet de la suite des évènements et surtout du rapport de force que dépendront l’accalmie et le retour de la cohésion sociale. Lors de la présentation du projet il y a quelques jours, le ministre Hassoumi Massaoudou s’est montré ferme : le gouvernement n’envisage pas de reculer face à la pression « des non-élus ». Et la société civile n’entend pas faire marche arrière : prochain rendez-vous le 11 novembre avec une autre manifestation déjà prévue à Niamey et sur toute l’étendue du territoire national.

A.Y.Barma

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