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7ème République : Renaissance acte II, deux ans des doutes et d’errements
Publié le mercredi 11 avril 2018   |  Le Monde d'Aujourd'hui


Cérémonie
© AFP par BOUREIMA HAMA
Cérémonie d`investiture du Président du Niger, SEM Issoufou MAHAMADOU
Samedi 02 Avril 2016. Niamey. Le président Mahamadou Issoufou, a été investi pour un deuxième mandat en présence de plusieurs présidents africains.


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Voici deux ans que la Renaissance, après son hold-up trottine, avançant aux pas haletants et hésitants, ne commandant plus sa boussole devenue rebelle. Et elle erre, malheureuse, comme frappée par la malédiction du parjure. Le président de la République, saisissait cette occasion, pour parler aux Nigériens à travers une interview par laquelle il profitait pour réagir à des questions brûlantes de l’heure, dit son opinion et elle laisse les Nigériens sur leur soif. Il n’a pas convaincu. Comme toujours, les Nigériens sont restés sur leur soif : Issoufou Mahamadou n’a pas de solutions à leurs problèmes. Pire, il n’est pas disposé à les écouter ce d’autant plus que ces problèmes n’existent pas, ou en tout cas, qu’ils seraient des problèmes que pose « une minorité ». Répondant à des questions arrangées pour lui permettre de donner sa position sur des préoccupations de l’heure, il a été évasif dans ses réponses, peu précis et bien loin de qu’attendent l’ensemble des Nigériens.

Les Nigériens ne peuvent attendre aucun arbitrage de sa part, lui qui est censé être au-dessus de la mêlée. En effet, répondant à la question du journaliste qui lui demandait son opinion sur le débat autour de la loi de finances, objet de controverses dans le pays, il dit seulement, au nom de la démocratie comprendre ce débat, mais ne voit pas de quoi fouetter un chat parce que la loi serait, à l’entendre, voulue et votée par une majorité et rien, peut-on aussi le comprendre, ne peut empêcher sa mise en œuvre même douloureuse, et surtout pas parce qu’une « minorité » qui n’aurait pas droit de cité, viendrait à la contester. Les murs sont fermés et dès lors, le champ est ouvert à la confrontation. Et les Nigériens auront dès lors compris que le choix de la lutte s’impose à eux. Les Nigériens, parce qu’ils auraient fait le choix de tels dirigeants, sont dans une situation de rapport de forces qu’on leur impose.

Face à cette attitude, le discours du président Issoufou ne peut être audible et surtout dans un pays aussi divisé. Quand on fait preuve d’une telle inflexibilité, peut-on en même temps donner du crédit à sa parole selon laquelle, une « main serait toujours tendue » ? Comme on le voit, il y a trop de contradictions dans cette façon de gouverner. Contradiction et incohérence que l’on retrouve d’ailleurs dans ce que dit le président et ce que rapporte l’OJT si fière des réalisations pharaoniques de leur système. Alors que le président parle dans son interview de quelques 216.000 emplois permanents et non permanents, l’OJT si excessive, parle, elle, de quelques mirifiques 700.000 emplois. Où se situe la vérité ? La Renaissance aime les chiffres trop longs… Tant pis s’ils ne devaient pas être véridiques !

Pourtant, le président, même isolé dans sa tour d’ivoire, ne peut pas dire qu’il ne voit pas ce qui se passe dans le pays, toute cette agitation sociale et politique qui s’amplifie et se durcit. Faut-il jusqu’à l’explosion, montrer à ses partenaires, que tout ce qu’il veut, parce qu’il serait élu à hauteur de 92% et poussière, peut être appliqué sans problème ? Une telle intransigeance, en démocratie, peut-elle se justifier ? Il y a quelque chose qui ressemble à du fatalisme œdipien. Et le président Issoufou persiste et signe que la loi incriminée répond bien aux aspirations du peuple. Mais alors pourquoi depuis décembre ce peuple crie-t-il ? Faut-il comprendre qu’une minorité n’a pas d’égard et ne mérite pas qu’on l’écoute ? D’ailleurs, ne devait-il pas ouvrir les yeux, pour comprendre qu’il ne s’agit pas d’une minorité ? Ce sont toutes les régions du pays qui manifestent et cela ne peut pas être qu’une minorité. Mais, nous savons qu’il y a à défendre les 92%, à montrer que ce n’est pas que de l’artifice. Et dans l’entêtement, la lutte citoyenne gagne du terrain, se radicalise même.

Quand le régime traque et matraque, arrête et emprisonne, déporte et intimide, il dit ne pas voir là aucun signe de raidissement, de dérive, ajoutant qu’ils ont « besoin d’un État démocratique ». Mais peut-on construire un État démocratique dans le bâillonnement ? C’est une autre contradiction…

Par rapport à la présence militaire étrangère, il dit que les installations sont conformes à la loi, sans être précis davantage car il aurait fallu dire les instruments juridiques dont on s’est servi pour rendre possibles ces installations. Or, en l’espèce, rien ne peut être brandi car jamais l’assemblée nationale n’a discuté de ce choix solitaire de l’Exécutif qui a cru que parce qu’il gouverne, il peut tout décider pour le peuple, sans avoir, même pour des choix délicats, à consulter ses représentants qui peuvent pourtant lui servir de chambre d’enregistrement. La réponse du Chef suprême des armées, ne peut ni convaincre, ni rassurer, encore moins, clore un débat qui s’enflamme car pour les Ulémas, cette question, plus qu’une autre, est beaucoup plus grave, sinon plus que celle de la loi de finances qui semble plus préoccuper les Nigériens.

Répondant à la crise universitaire, il a là encore des mots vagues qui posent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent. Il parlera d’une certaine autorité à restaurer, mais sans donner d’amples explications. En tout cas les étudiants pourront comprendre que le signe de l’apaisement, ne peut venir de ce côté-là. L’autorité à laquelle il fait allusion, n’est-ce pas cette fermeté pour appuyer les autorités universitaires dans cette cabale contre les dirigeants syndicaux qu’on voudrait à tout prix anéantir ? Faut-il comprendre que le SNECS n’est que le bras armé d’un Exécutif qui veut se débarrasser de syndicalistes devenus encombrants parce qu’incontrôlables ? Pour avoir manqué de faire preuve de prévenance, le Père de la Nation, risque là aussi de laisser une crise se tasser pour conduire, si l’on n’y prend pas garde, tout en se complexifiant, à une situation ingérable. On aura compris dans sa manière de répondre à toutes ces questions brûlantes de l’heure que le magistrat suprême, reste quand même assez dubitatif, vivant intérieurement, l’anxiété des dérives auxquelles peuvent conduire l’extrémisme pour laquelle ils ont opté pour gérer les problèmes nigériens. L’observateur avisé aura compris que ce n’est pas le même homme qu’il découvre, habituellement si fier de ses exploits et de ses certitudes. L’homme est désormais habité par des doutes, peut-être même par des peurs. Gouverner, c’est l’enfer…

C’est plutôt en parlant de la ZLEC dont il avait conduit le chantier qu’il a plus de fierté. Il en est d’autant plus heureux qu’il dira que les pays l’ont signé et ratifié, oubliant de préciser que la zone de libre-échange continentale, ne fait pourtant pas l’unanimité. En effet, la première économie africaine, à savoir celle du Nigéria, a même boudé le sommet car le Président Bohari ne s’y est pas rendu et tous les spécialistes s’accordent à dire que c’est déjà une grosse épine dans le pied de la ZLEC. Il y a également le Benin de Patrice Talon qui ne l’a pas signé. Si le deuxième est réticent et douteux, le premier lui, a simplement voulu se faire un dirigeant responsable, qui refuse d’aller ailleurs prendre des choses pour la consommation du pays, sans s’assurer que son peuple peut l’accepter. Aussi, a-t-il choisi d’écouter son peuple et notamment ses industriels, qui n’apprécieraient pas pour des raisons diverses la fameuse ZLEC. Il n’est d’ailleurs pas exclu que d’autres pays, plus tard se ravisent pour revenir sur leur choix, quand ils auront vu ce que cacherait la zone économique en construction qui n’est pour le moment qu’à l’étape de vœu pieux. De même, comment peut-on y croire quand à l’intérieur des entités moindres comme la CEDEAO et CEMAC par exemple, la libre circulation des biens et des personnes qu’on proclame à tout vent n’est toujours pas une réalité tangible, les États, étant toujours attaché à leur souveraineté et à leurs petits calculs ? Ce n’est donc pas à cette dimension que les choses vont être plus faciles.

C’est l’émission Afrique Presse de rfi-tv5 qui dira d’ailleurs qu’on est loin des satisfactions car pour donner forme à la zone de libre échange, il reste beaucoup à faire notamment à avoir des infrastructures qui font défaut et dont les choix risquent de diviser davantage. Il ne faut pas oublier que la zone remet en question la compétitivité des économies et les pays peu industrialisés, comme le nôtre, n’auront pas à profiter beaucoup de cet espace. Aussi, dans des pays comme les nôtres où le coût de l’électricité pèsera beaucoup dans la production, il est certain que l’économie, ne peut que vivre les contrecoups d’une réglementation qui leur sont défavorables.

Comme on le voit, on est bien loin du satisfecit qui semble emballer le président nigérien, heureux du rôle qu’il a joué dans l’aboutissement de la messe de Kigali. Il reste encore du chemin à parcourir même s’il faut se féliciter du petit pas franchi. Dans la mise en œuvre, sans doute qu’on fera face à plus de contradictions que d’harmonie. Mais l’on sait que pour le président nigérien, obnubilé par l’ambition d’une stature internationale, il réussit ainsi, à convaincre au plan mondial, les partenaires, de ce qu’il serait incontournable. Or, avant de conquérir un autre, c’est d’abord l’assentiment de son peuple qu’il aurait fallu chercher. Pendant que dans le pays, une image se ruine, on cherche vainement à la soigner ailleurs pour d’autres pour lesquels on ne gouverne pas.

Quand le régime se sera rendu compte de ses égarements, ce sera peut-être tard. Engouffré dans le pétrin de ses vanités….

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