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Interview de M. Marou Amadou, ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Porte-Parole du gouvernement : «Nous avons la chance d’avoir un homme d’Etat qui a ces trois qualités : une vision, une conviction et une détermination »
Publié le lundi 8 avril 2013   |  Le Sahel


M.
© Autre presse par DR
M. Marou Amadou, Ministre de la justice, garde des sceaux, Porte-parole du Gouvernement


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Monsieur le ministre, le 1er gouvernement de la 7ème République est en train de boucler sa deuxième année au pouvoir. S'il vous était donné de dresser un bilan de vos activités à la tête du Ministère de la Justice, que diriez-vous ?

Notre rôle en tant que ministre de la Justice, et sur la base des orientations politiques du Président de la République, contenues dans son programme de la Renaissance, se situe à plusieurs niveaux. Dans le Programme de la Renaissance, le Président s'insurgeait contre l'instrumentalisation de la Justice et le règne de l'impunité au Niger.

Il insistait sur la vulgarisation du droit. Cela veut dire qu'on a là deux objectifs : promouvoir l'accès à la Justice, en ce qu'il signifie la possibilité de se faire entendre par un tribunal indépendant et impartial et qui puisse trancher votre cause dans les meilleurs délais. Et il fallait que les citoyens connaissent mieux la loi pour cerner le sort de leur cause en justice. Et pour que ces deux objectifs servent la cause de la Justice, il faut une justice qui fonctionne. Qui dit fonctionnement de la justice, dit à la fois des ressources humaines, intègres et compétentes. Et dans le même sillon, les droits humains ne sont pas promus ni protégés, lorsque les conditions de détention carcérale dans un pays ne sont pas les meilleures du monde possible.
Voilà les orientations. Arrivé au Ministère le 21 avril 2011, nous avons d'abord réalisé une profonde restructuration du Ministère de la Justice. Nous avons structuré le Ministère ; nous avons créé les directions nécessaires à la poursuite de ces objectifs là ; nous avons souvent séparé certaines structures pour plus d'efficacité. C'est ainsi que nous avons subdivisé l'Inspection Générale des Services Judiciaires en deux blocs : l'Inspection Générale des services judiciaires qui conduira les enquêtes administratives au niveau des tribunaux, et le Service du Contrôleur Général des Etablissements pénitentiaires chargé de contrôler de manière régulière les maisons d'arrêt. Une des orientations les plus importantes, c'est de lutter contre l'instrumentalisation de la justice et bannir l'impunité.

Très tôt, dans le même mois de notre arrivée au Ministère de la Justice, nous avons décidé, de manière audacieuse, de la mise en place du «Bureau Information, Réclamation, Lutte Contre la Corruption et le Trafic d'influence en milieu judiciaire », doté d'une ligne téléphonique gratuite, que n'importe qui peut utiliser pour dénoncer les travers de notre Justice. C'est à la limite, une révolution. Beaucoup de gens se sont opposées à cette idée. Mais la volonté politique très forte du Président de la République a fait que cet instrument a existé et continue d'exister, et a sérieusement atteint tous les objectifs que nous lui avons assignés. Pour éviter que la Justice soit instrumentalisée par les acteurs de la Justice eux-mêmes, des inspections régulières sont conduites au niveau des services concernés.
Chaque fois que nous avons des soupçons, nous avons dépêché des inspections. Et les rapports ont toujours eu leurs suites ; et les personnes mises en cause déplacées. C'est une manière pour nous de lutter contre l'impunité. Sur ce point, c'est sérieusement bien engagé. La précipitation peut aussi s'assimiler à une instrumentalisation. Il y a des dossiers de délinquance économique et financière sur lesquels nous sommes attendus. L'ensemble de ces dossiers existent et suivent leur traitement. Mais avec souvent une lenteur déconcertante ; et qui ne se justifie plus à partir du moment où la volonté politique aidant, des moyens importants ont été alloués aux services judiciaires pour fonctionner mieux et fonctionner avec beaucoup de célérité.
En effet, quand nous étions arrivés au gouvernement, le budget de la Justice était de 6 milliards de Fcfa. Et le Président de la République, par son arbitrage l'a multiplié par trois. En 2012, nous avons atteint le sommet jamais égalé de 19 milliards de Fcfa en un an. Cela veut dire que politiquement, nous avons fait tout ce qui est de notre pouvoir pour que la Justice joue pleinement son rôle. Ceci procède de l'orientation première du Programme de la Renaissance, qui est d'avoir des Institutions fortes et crédibles. Et les institutions fortes sont des institutions dont les textes statutaires sont bons, les ressources humaines intègres et compétentes et les moyens financiers et matériels adéquats. Par rapport aux réformes législatives et à la vulgarisation du droit, nous avons créé une institution très importante soutenue par les partenaires du gouvernement.
Il s'agit de l'Agence Nationale pour l'Assistance Juridique et Judiciaire. Son rôle est de faciliter l'accès au droit et à la Justice. Cette agence aura les moyens nécessaires pour affecter des avocats au service des personnes qui peuvent perdre leurs biens, ou leur honneur, parce qu'elles n'ont pas les moyens de se défendre, et parce qu'elles ignorent la loi. Une des missions des institutions fortes qui nous est confiée est de mettre en place les institutions relevant de notre département ministériel. Et vous pouvez être sûrs que ce n'est pas un processus facile : adopter une loi organique, élire ou faire désigner les responsables de ces institutions etc. Et pourtant ce travail est en passe d'être terminé. Nous avons en effet pu faire adopter des lois organiques relatives à la Cour Constitutionnelle, à la Cour des Comptes, à la Cour de Cassation, au Conseil d'Etat, à la Commission Nationale des Droits Humains.

Nous avons aussi proposé et obtenu l'accord du Président de la République pour innover de manière audacieuse, et ouvrir la Justice à la critique populaire en organisant du 26 au 30 novembre dernier, les états généraux de la justice. On peut dire que d'autres pays les ont organisés. Mais sans doute, ils n'ont jamais été organisés de la manière dont ils l'ont été au Niger ; de manière ouverte et démocratique. Et les participants n'ont pas été choisis à la volée, et ces états généraux n'ont pas regroupé que les acteurs de la justice. Ce sont les citoyens de toutes les couches socioprofessionnelles, et les participants internationaux qui ont pris part à ces assises.
M. le ministre, vous avez fait le tour des prisons et des maisons d'arrêt de notre pays. Il y a un problème évident de surpeuplement au niveau de certaines prisons.
Qu'avez-vous fait en deux ans pour pallier cet encombrement ?

Au moment où je vous parle, nous avons deux maisons d'arrêt surpeuplées : Niamey qui a 966 détenus contre une capacité de 350 places; et Maradi qui a plus de 400 détenus contre une capacité d'accueil de 250 prisonniers. Qu'est-ce que nous faisons ? A Niamey, le seuil des 1000 détenus ayant été dépassé, nous avons décidé de transférer tous les détenus qui peuvent être transférés au niveau de Kollo et dans les autres maisons d'arrêt. On a pris des engagements très importants dans la Déclaration de Politique Générale du Premier ministre, Chef de gouvernement. Il est établi que nous ne pouvons plus nous contenter de solutions mitigées. Il nous faut une maison d'arrêt conforme aux standard et normes. Nous avons fait cette promesse aux détenus lors de notre visite.

A chaque fête nationale, nous avons accordé des remises de peines ; et je vous annonce que ce 7 avril à venir ne fera pas exception. Nous allons même innover puisque c'est une demande pressante des maisons d'arrêt que nous avons visitées dernièrement. Nous avons toujours fait l'exception de la remise gracieuse pour les récidivistes. Ils nous ont dit qu'ils ont compris et ont prié que le Président de la République leur donne une chance. Nous avons dit que nous soumettrons cette idée au Président de la République pour qu'il leur donne cette chance là. Le Conseil des Droits de l'Homme, à sa 17ème session, a dit du Niger qu'il était un modèle de bonnes pratiques en matière de respect et de protection des droits humains à l'occasion de l'Examen Périodique Universel.

Justement, qu'est-ce que vous avez fait en deux ans dans le cadre de la promotion des droits de l'Homme au Niger?

Tant que vous n'agissez pas contre le droit, vous respectez les droits de l'Homme et vous contribuez à leur promotion. Les droits de l'Homme, concernent tous les secteurs ; c'est tout ce que l'on fait pour garantir le droit à l'alimentation ; c'est tout ce que l'on fait pour ne pas briser les journalistes honnêtes et intègres ; c'est tout ce qu'on fait pour ne pas déranger les militants des droits de l'Homme dans leurs actions au quotidien. Les droits de l'Homme, c'est le droit à la sécurité. Les droits de l'Homme, c'est le droit à la santé, à l'eau potable ; c'est tout ce que nous faisons pour réduire la mortalité infantile et maternelle ; c'est tout ce que nous faisons pour augmenter l'espérance de vie dans notre pays. Les droits de l'Homme, c'est l'accès à un Tribunal indépendant et impartial ; c'est lutter contre la corruption et le détournement des deniers publics, et promouvoir les droits de l'homme.
Nous sommes un gouvernement démocratique, respectueux des droits de l'Homme et qui les promet au plus haut point. Evidemment, beaucoup de ces droits coûtent cher. C'est le cas des droits économiques et sociaux. A notre corps défendant, nous n'avons pas les milliards qu'il faut pour réussir tout de suite la scolarisation universelle ; nous n'avons pas les milliards nécessaires pour assurer comme nous le voulons des consultations gratuites pour tout le monde, des médicaments pour tout le monde. Cependant, nous faisons des efforts jamais égalés pour promouvoir l'ensemble des droits humains sur l'ensemble du territoire national. Dans le domaine des droits de l'Homme, vous savez que les gouvernements sont tenus à un dialogue permanent avec les institutions internationales. Vous savez que chaque instrument international relatif aux droits de l'Homme a son organisme international avec lequel les gouvernements doivent dialoguer.
Et nous réussissons à purger les héritages que nous avons eus en matière de rapports périodiques qu'il faut transmettre à ces institutions là. Et depuis que nous sommes là, nous avons pu conclure l'Examen Périodique Universel avec succès ; et nous sommes en train de trouver les moyens nécessaires pour mettre en œuvre ses recommandations. Nous avons fait adopter le rapport relatif à la convention de lutte contre la discrimination raciale ; nous avons obtenu la révision du document de base commun, qui est relatif à l'ensemble des instruments internationaux. Vous avez été témoin de ce que, récemment, nous avons pu avec nos partenaires, notamment l'IDDH, éditer un manuel des droits de l'Homme à l'usage des Magistrats. Non seulement nous arrivons à assumer nos responsabilités de dialogue avec les organes des traités, mais nous arrivons aussi à faire des ateliers de formation dans le domaine des droits humains avec le soutien du PNUD, de l'OIM, etc. Le ministère a récemment lancé des projets de sensibilisation dans ce domaine avec la société civile.

Pour finir, M. le ministre, est-ce que vous avez un message particulier à l'endroit du Président de la République qui fête dimanche prochain ses deux années au pouvoir?

Je lui souhaite longue vie. Je lui souhaite beaucoup de patience. Je souhaite que Dieu lui donne la force de tenir ses engagements vis-à-vis du Niger. Le contexte est difficile, la rupture prendra son temps, mais nous sommes convaincus que c'est l'homme qu'il faut aujourd'hui pour le Niger, pour réussir cette transformation profonde de notre société. Nous sommes convaincus qu'en cinq ans de mandat, le Niger va évoluer de son triste record de dernier en matière d'Indice de Développement Humain en dépit de toutes les pesanteurs structurelles. En effet, avec le Président de la République, ce qu'on a de très important en tant que Nigériens, ce sont des orientations, une vision politique, un programme politique et une conviction. Et c'est ce qu'il faut pour un peuple pour sortir de son trou.

Et je crois que nous avons la chance d'avoir un homme d'Etat qui a ces trois qualités : une vision, une conviction et une détermination. Je pense qu'en cinq ans, si nous arrivons à réaliser l'ensemble de ces engagements contenus dans le Programme de Renaissance, et en tous ses huit points, nous sommes convaincus que le sort des Nigériens, ainsi que la situation et la place du Niger dans le concert des Nations vont évoluer de manière significative.

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