A l’instar de la communauté internationale, le Niger a célébré le 11 octobre dernier, la Journée Internationale de la Fille (JIF). Pour l’édition 2020, la célébration de la JIF a été placée sous le thème : «ma voix, l’égalité pour notre avenir», un véritable appel à l’action et un plaidoyer public sur l’importance d’un accompagnement des jeunes filles à être des actrices de changement dans leurs communautés. Cette année, c’est la ville de Dosso qui a accueilli lundi dernier les activités entrant dans le cadre de la célébration nationale de cette journée qui a mis les adolescentes à l’honneur afin de les inciter à réinventer un monde façonné par leurs visions et leurs solutions particulièrement dans un contexte marqué par la pandémie du COVID 19.
On ne le dira jamais assez : la femme est la mère de l’humanité et pour peu qu’on leur en donne l’opportunité, les filles peuvent devenir de véritables actrices de changements dans leurs communautés respectives. Longtemps laissées en marge, elles ne cessent de prendre de plus en plus conscience de leurs responsabilités et de s’affirmer pour le bien commun et l’intérêt général. L’exemple le plus récent au Niger, pays où les femmes et les jeunes constituent les franges les plus importantes de la population, c’est celui de Dr Fadji Maina, première scientifique nigérienne à travailler à la prestigieuse agence spaciale américaine (NASA). Un exemple parmi tant d’autres, ici ou ailleurs, qui constitue une parfaite illustration du fait que les femmes commencent à changer le monde, pour peu qu’on leur en donne les moyens et qu’on leur offre les opportunités. C’est pour cette raison d’ailleurs que cette année, la Journée Internationale de la Fille (JIF), célébrée chaque 11 octobre, a été placée sous le thème : «Ma voix, l’égalité pour notre avenir». L’objectif est de faire un véritable plaidoyer public sur l’importance d’un accompagnement de ces jeunes à être des acteurs de changement dans leur communauté.
Au Niger, c’est la ville de Dosso, 140 kms au sud de Niamey, qui a abrité la cérémonie officielle de célébration sous l’égide du ministère de la Promotion de la Femme de la Protection de l’Enfant, de Plan International Niger et de l’UNICEF. La cérémonie s’est déroulée en présence du Secrétaire général du ministère de la Promotion de la Femme de la Protection de l’Enfant, M. Abdoulkarim Hachimou, du Representant de Plan International au Niger, des autorités administratives, régionales, communales et coutumières, des représentants des partenaires techniques et financiers ainsi que ceux des organisations de la société civile et de nombreux invités parmi lesquels des filles venues honorer cette journée qui leur est dédiée.
Plusieurs allocutions ont marqué la cérémonie de célébration riche en couleurs et en activités, qui s’est déroulée dans la salle de réunion du Gouvernorat de la région de Dosso. Dans leurs mots de bienvenue, le maire de la commune de Dosso, M. Isssoufou Idrissa, et le secrétaire du Gouvernorat, M. Assoumana Amadou, se sont tour à tour félicités du choix portés sur la légendaire et hospitalière « Cité des Djermakoyes » pour cette célébration plus que symbolique de la JIF 2020. Au nom des partenaires, le représentant de Plan International au Niger a également prononcé quelques mots sur la Journée ainsi que ses enjeux. Par la suite, des jeunes filles et des garçons ont présenté un sketch qui a été bien apprécié par l’assistance et qui a mis brillamment en exergue le rôle que doivent jouer les jeunes filles dans le monde de demain.
Pour chaque fille, des opportunités
Dans l’allocution visio-projetée qu’elle a prononcée, la Représentante de l’Unicef au Niger a tenu d’abord à situer le contexte dans lequel intervient l’édition 2020 de la célébration de la JIF avec la pandémie du COVID-19. « Cette année, alors que nous sommes aux prises avec la pandémie de Covid 19, nous profiterons de cet événement placé sous le thème « ma voix, l’égalité pour notre avenir pour réinventer un monde meilleur inspiré par les adolescentes qui partagent leurs histoires et leurs solutions », a annoncé Mme Ilaria Carnevalli, pour qui, « c’est l’opportunité certaine pour les filles quelque soit le statut social, quel soit scolarisé ou non de faire entendre leurs voix, partager leurs préoccupations mais aussi leurs rêves et leurs aspirations ». La nouvelle Représentante de l’UNCEF au Niger a rappelé ensuite que comme chaque année et chaque jour, à l’occasion de la Journée Internationale de la Fille le 11 octobre, l’Unicef et ses partenaires au Niger travaillent de concert avec les filles pour concevoir et lancer une campagne annuelle sur les inégalités auxquelles elles se heurtent et sur leurs revendications sur l’égalité des chances. « Permettez-moi de saisir cette occasion pour vous présenter deux jeunes adolescentes du Niger qui ont fait partie d’une aventure inédite et incroyable et qui sont aujourd’hui parmi nous », a poursuivi Mme Carnevalli qui a nommé Melle Esta Sanoussi, élève en classe de 4eme au CES Ginga de Maradi et Mle Rahila Amadou Idé, élève en classe de Seconde C au CEG Gaweye de Niamey. « Ces héroïnes armées de leur téléphone et d’une connexion internet ont enregistré leur vie pendant 5 semaines, lors d’une pandémie mondiale pour partager avec le monde entier ce que c’est d’être une jeune fille de 15 ans au Niger et pendant une pandémie. Pendant l’enregistrement, nous avons pu voir et entendre de leurs propres voix, ce qui signifie ne pas pouvoir aller à l’école, ne pas pouvoir jouer avec leurs amis et affronter un incertain avenir. Elles sont notre inspiration pour être ici aujourd’hui. On parle souvent de taux élevé de mariage des enfants, les problèmes liés à la scolarisation des filles où encore d’autres violations des droits de l’enfant au Niger et dans le monde. Ce sont des réalités que nous ne pouvons pas ignorer. Mais arrivé ici, moins de 2 mois, j’ai aussi eu l’occasion de faire des rencontres extraordinaires et constater d’autres récits sur les infos et les jeunes filles du Niger », a témoigné la Représentante de l’UNICEF qui a saisi l’occasion pour également mentionner l’incroyable talent de Dr Fadji Zouna Maina, 29 ans et première scientifique nigérienne a intégré la très prestigieuse NASA aux États-Unis. « Elle a réalisé un rêve d’enfant tout en devenant un symbole nationale. Une réussite qui fait d’elle, un modèle dans son pays. Cela explique que tout est possible si nous garantissons les conditions propices au développement des filles. Mais elle n’est pas la seule comme en témoigne le cas de Latifa Hassane, jeune fille de 23 ans, la lauréate du concours national E-Takara et qui a été et élue Miss Africa 2018 », a poursuivi toute admirative, Mme Ilaria Carnevalli, qui a également abordé le rôle et les responsabilités des filles nigériennes pour agir en faveur d’un changement à impacts positifs dans leur communauté.
« Les filles, le Niger a besoin de vous, fortes, courageuses, indépendantes et heureuses. Aujourd’hui, les mouvements dirigés par les filles s’attaquent à des problématiques telles que le changement climatique, le mariage des enfants, l’injustice, les mutilations génitales féminines, l’accès à l’éducation, l’accès à la santé sexuelle et récréative, les inégalités en matière de compétences d’apprentissage, la santé mentale. Les filles ont besoin de pouvoir s’identifier à des modèles notamment par les billets d’images positive des filles et des femmes dans les médias, dans la publicité exempte de stéréotypes néfastes à la condition féminine, aux origines ethniques et au handicap afin de permettre au filles de s’exprimer, de faire prendre en compte leurs opinions dans les décisions qui les concernent. Nous devons tous nous efforcer de développer des programmes, des initiatives et des approches. Nous devons aussi lutter contre les stéréotypes, contre les normes sociales et les pratiques néfastes pour permettre aux filles de disposer des mêmes possibilités que les garçons et bien sûr nous devons lutter contre toute forme de violence basée sur le genre. Nous saluons vraiment les efforts déjà engagés par le gouvernement en faveur de la scolarisation des filles, l’institutionnalisation des comités de protection de l’enfant qui sont des actions qui contribuent à mettre fin au mariage des enfants. Nous saisissons cette occasion pour renouveler l’engagement de l’UNICEF à accompagner les efforts du gouvernement, des communautés, des familles, des filles et des garçons pour que tous ensemble, nous puissions travailler à un avenir, un monde où chaque fille peut réaliser ses rêves. Pour chaque fille, des opportunités ». Mme Ilaria Carnevalli, Représentante résidente de l’UNICEF au Niger.
La cérémonie s’est poursuivie avec la projection des vidéos tournées avec leurs propres Smartphones par les des deux jeunes filles, Esta Sanoussi de Maradi et Rahila Amadou Idé de Niamey, et qui ont été un poignant témoignage de leurs occupations en temps de Covid-19. «Cette journée est une occasion pour montrer aux jeunes filles qu’elles doivent être sûres d’elles, qu’elles ne doivent pas tout laissé entre les mains des hommes et qu’elles doivent surtout se consacrer aux études. Il ne faut pas laisser les postes de décision et de direction seulement aux hommes. Les filles peuvent aussi faire de grandes études et accéder à tous les postes de responsabilité. Je demande aux filles de se battre, de faire du mieux qu’elles peuvent pour obtenir leurs diplômes et avoir des postes de responsabilité afin d’apporter leur aide au développement de notre pays», a plaidé Rahilatou Amadou, élève en classe de seconde C au CES Gaweye de Niamey, une des filles qui a tourné la vidéo de témoignage.
Par la suite, le Secrétaire général du ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de la femme a prononcé le discours officiel de lancement des activités de célébration de la JIF 2020. Dan son allocution, M. Abdoulkarim Hachimou , a rappelé les actions majeures initiées par les autorités nationales en vue de promouvoir les droits des femmes en général et celui des jeunes filles en particulier, avant de réitérer l’engagement du gouvernement à poursuivre ces efforts conformément à la dynamique internationale et avec l’appui des principaux partenaires qu’il a d’ailleurs tenu à remercier notamment l’UNICEF pour son soutien multiforme.
Les adolescentes à l’honneur
Au cours de la célébration de la JIF 2020, les jeunes filles ont prononcé une Déclaration de plaidoyer et d’engagement qui a été par la suite remise au représentant du gouvernement, M. Abdoulkarim Hachimou, le SG du Ministère de la promotion de la Femme et de la Protection de l’Enfant. Elles ont particulièrement mis l’accent sur les violences en ligne qui visent les femmes et surtout les jeunes filles. Un phénomène qui prend de plus en plus de l’ampleur et qui vient se greffer aux violences sur le genre qui sont le quotidien des femmes nigériennes et sur lesquels il va falloir agir.
« Nous sommes conscientes de notre droit à la liberté d’expression, de notre droit d’être entendu, et le moment est venu pour être aux commandes de nos vies. Les violences en ligne ou dans la réalité nous empêchent de mener les mouvements vers l’égalité des genres. Nous voulons que l’espace des réseaux sociaux soit un espace sûr. Nous demandons à nos familles et à nos communautés de suivre une approche « tolérance zéro » en matière de violences en ligne envers les jeunes femmes et les jeunes filles. Nous demandons aux opérateurs de téléphonie mobile de créer un mécanisme solide et fonctionnel de signalisation des cas d’abus et de harcèlement en ligne. Enfin, le gouvernement doit veiller à la mise en place, à l’application et au respect de ce mécanisme de signalement des violences en ligne.» Extrait de la déclaration des jeunes filles à l’occasion de la JIF 2020 à Dosso.
Il convient de rappeler que l’objectif principal de cette célébration était de faire un plaidoyer public sur l’importance d’un accompagnement de ces jeunes à être des acteurs de changement dans leur communauté. Et le choix du thème a été bien réfléchi. «Le choix de ce thème n’est pas fortuit car aujourd’hui vingt cinq (25) ans après, le Programme d’action de Beijing demeure un puissant élément de base pour évaluer les progrès en matière d’égalité entre genre. Il réclame un monde où chaque fille et chaque femme peut profiter de tous ses droits, comme mener une vie débarrassée de toute violence, aller à l’école et terminer sa scolarité, choisir quand et avec qui se marier et bénéficier de revenus identiques pour un même travail», a mis en avant le document remis à la presse à l’occasion de la JIF 2020. Le thème «Ma voix, l’égalité pour notre avenir», a été choisi pour inciter les adolescentes à se mobiliser elles mêmes en vue de défendre leurs droits en faveur d’un changement social. Le but est de faire entendre les voix de toutes les filles et de montrer leur vision pour un avenir meilleur. Ainsi donc, l’accent a été mis sur les adolescentes en tant qu’acteurs du changement, réinventant un monde façonné par leurs visions et solutions particulièrement dans un contexte de la pandémie COVID-19.