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« Le Niger n’est pas surendetté et son risque de surendettement est modéré…» : M. Mamadou Diop, Ministre des Finances du Niger

Publié le lundi 16 novembre 2020  |  actuniger.com
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© aNiamey.com par MC
Le Gouverneur de la BCEAO, Tiémoko Meyliet KONÉ, reçoit en audience le Directeur Général Adjoint du FMI, Mitsuhiro FURUSAWA
Dakar, le 19 septembre 2016 - Le Directeur Général Adjoint du Fonds Monétaire International (FMI), Monsieur Mitsuhiro FURUSAWA, a été reçu en audience par le Gouverneur de la Banque Centrale des États de l`Afrique de l`Ouest (BCEAO), Monsieur Tiémoko Meyliet KONÉ. Les échanges ont porté sur l`évolution des économies de l`UEMOA et sur les relations entre la BCEAO et le FMI. Photo : M. Mamadou DIOP, Vice-Gouverneur de la BCEAO
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Suite à une série de publications et des sorties médiatiques de certains leaders d’opinions sur le niveau d’endettement de l’Etat du Niger, il nous a paru nécessaire de donner la parole à la personne la plus indiquée, le Ministre des Finances, Monsieur Mamadou Diop, pour nous enquérir réellement de la situation et apporter des éléments de réponses aux inquiétudes que suscitent le sujet.

Comme tous les pays au monde, le Niger recourt à l’endettement pour financer son développement et le pays est loin, très loin d’être surendetté, comme certains s’échinent à le faire croire, assure-t-il.



L’endettement du pays est devenu un débat récurent. On entend et on lit régulièrement, surtout ces derniers temps, des acteurs politiques, des hommes des médias et ceux de la société civile reprocher au gouvernement de trop endetter le Niger. Qu’en est-il réellement ?

Tout d’abord, je voudrais dire que je suis attentif aux réactions de nos compatriotes et surtout heureux de savoir qu’ils suivent de près nos efforts de gestion des finances publiques.

L’encours de la dette publique du Niger à fin juin 2020 est évalué à 3.328,7 milliards de FCFA, soit 42,5% du PIB (Produit Intérieur Brut). Il est composé de 2.238,5 milliards de FCFA de dette extérieure, soit 67,2% de la dette totale, et de 1.090,2 milliards de FCFA de dette intérieure, soit 28,6% de l’encours. La dette extérieure représente 32,8% du PIB et la dette intérieure, 13,9% du PIB. Le taux d’intérêt moyen pondéré du portefeuille est de 2,9%, dont 1,7% pour la dette extérieure et 5,4% pour la dette intérieure.

Ceci étant, il m’incombe de rappeler que l’évolution du profil d’endettement s’apprécie en fonction de certaines variables macroéconomiques. Il est nécessaire de noter que le Niger est, à l’instar des autres pays de l’UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine), soumis au respect des critères de convergence, indicateurs quantitatifs, et est sous-programme avec le FMI à travers certains critères et indicateurs qualitatifs.

S’agissant de l’UEMOA, le critère prévoit un taux d’endettement (l’encours de la dette rapporté au PIB) inférieur à 70% du PIB. Pour cet indicateur, le Niger occupe la deuxième meilleure place pour le taux le plus bas de l’espace communautaire.

Quant aux indicateurs de viabilité du FMI, lesquels prennent en charge les conditions financières des instruments de dette (maturité, différé et les charges) et les variables macroéconomiques pertinentes, le Niger affiche un risque modéré de surendettement. Tous les indicateurs de la dette publique ressortent en dessous de leurs seuils.

En tout état de cause, le Niger n’enregistre aucun arriéré de paiement aussi bien sur les instruments de la dette intérieure que sur les échéances de la dette extérieure. Ce qui rassure davantage nos partenaires financiers.

En résumé, on peut dire que la dette du Niger est viable (puisque le pays a la capacité de remboursement), que le Niger n’est pas surendetté (si on rapporte le niveau d’endettement au PIB et si on fait une comparaison avec les autres pays de l’espace UEMOA avec lesquels nous partageons les mêmes critères de convergence) et enfin que le risque de surendettement est modéré (si on se réfère aux critères qualitatifs du FMI).

Justement, ceux qui accusent le gouvernement d’endetter le pays disent se référer à un rapport des institutions de Bretton Woods qui aurait tiré la sonnette d’alarme sur le niveau trop élevé de l’endettement du pays. Est-ce exact ?

Je ne sais pas dans quel rapport ils ont eu à lire cela, parce que je n’ai pas connaissance d’une quelconque inquiétude exprimée par les institutions de Bretton Woods concernant la dette du Niger, que ce soit le niveau ou le rythme d’endettement.

Je tiens à préciser que pour plus de contrôle sur les finances publiques et la gestion de la dette publique, le gouvernement conduit depuis quelques années des reformes, avec l’accompagnement du FMI et de la Banque Mondiale.

Les réformes du cadre de gestion de la dette publique du Niger portent, d’une part, sur la consolidation du dispositif institutionnel et, d’autre part, sur une reconfiguration des instruments.

S’agissant du premier point, le dispositif institutionnel de gestion de la dette publique au Niger est principalement régi par le Décret N°2015-311/CAB/PM du 18 juin 2015, portant modalités de suivi de la politique d’endettement de l’Etat et de négociation des aides budgétaires. Il est organisé autour d’un Comité Interministériel et d’un Comité Technique, qui sont appuyés par un Secrétariat Permanent. Tous les démembrements de ce cadre institutionnel fonctionnent bien et permettent la prise de décisions et les conclusions des sessions font l’objet de communication en Conseil des Ministres.

Il vous souviendra également que la gestion de la dette a connu un tournant décisif en 2019 avec le rattachement de la Direction de la Dette Publique à la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique pour se conformer aux meilleurs standards en matière d’orthodoxie financière et tout particulièrement de la gestion de la dette. Cette réforme a permis d’envisager des systèmes d’information plus modernes afin de minimiser les risques relatifs à la gestion de la dette, de centraliser les différentes fonctions (front, middle, back offices) de gestion de la dette et de tendre vers la publication des rapports périodiques et les bulletins statistiques conformément au Manuel statistique du FMI.

Quant au second point, le Niger a connu sa première notation financière en 2018. Ce qui lui a permis de lever des fonds sur le marché international en janvier 2020. Cette opération a contribué à améliorer la qualité de son portefeuille à travers un reprofilage de la dette, en vue de mieux gérer le risque de refinancement, allonger la maturité des titres et élargir la base des investisseurs. Cette opération a également réduit la fréquence du Niger sur le marché financier régional des titres à court terme, les bons du trésor. Ainsi, à fin septembre 2020, le Niger est le pays ayant le plus faible recours à l’endettement sur le marché sous-régional des titres publics.

Voilà ce que dit le Fond Monétaire International (FMI) relativement à la dette du Niger :

« Viabilité de la dette, capacité à rembourser et évaluation des sauvegardes

La dette publique reste viable et d’après l’analyse de viabilité de la dette (AVD), le risque de surendettement est ‘’modéré’’… La dette contractée ou garantie par l’Etat (CGE) du Niger est relativement faible en valeur nominale (42% du PIB) et en valeur actuelle (VA) (34% du PIB) à la fin de 2019, et proche de la moyenne des pays de l’UEMOA et d’Afrique subsaharienne par rapport aux recettes fiscales nationales. »

Certains font référence à la position économique du Niger, qui est l’un des pays les plus pauvres du monde, pour s’étonner du fait qu’il puisse se permettre de s’endetter. Qu’en dites-vous ?

La règle d’or en la matière est que l’endettement soit soutenable, c’est-à-dire qu’on n’emprunte pas plus qu’on ne peut rembourser. Il convient aussi d’investir les montants empruntés dans des projets porteurs de développement économique.

A cet égard, il faut indiquer qu’en plus des institutions de Bretton Woods, il existe d’autres organismes qui surveillent le niveau et le processus d’endettement des Etats. Les créanciers des Etats se réfèrent presque systématiquement à ces organismes pour s’assurer qu’un pays qui va sur le marché pour emprunter est solvable.

Donc rassurez-vous, c’est la crédibilité de notre pays au niveau international qui explique la confiance des bailleurs de fonds à son égard.

On parle de mauvaise et de bonne dette. Comment établit-on cette différence et où classer les dettes actuelles du Niger ?

Pour le gestionnaire de la dette, les conditions financières du prêt et sa soutenabilité déterminent la qualité de la dette, bonne ou mauvaise.

Pour l’Etat du Niger, la stratégie consiste en la mise en œuvre d’une politique d’endettement prudente qui permet le financement des plans d’investissement tout en assurant la viabilité de la dette. Dans ce contexte, le Gouvernement continue à limiter les garanties de l’Etat et à évaluer soigneusement l’impact de tout nouvel emprunt sur la viabilité de la dette. Les projets d’investissement seront financés en priorité avec des ressources concessionnelles (taux d’intérêt peu élevé et délai de remboursement plus long).

Le Gouvernement reste engagé à respecter les plafonds arrêtés par type de prêts conformément au plan d’endettement à moyen terme 2018-2021, tout en privilégiant le recours aux ressources concessionnelles. Dans les cas où les ressources concessionnelles ne seraient pas suffisantes pour financer les projets à haut rendement, la possibilité de modification afin d’y inclure des prêts non-concessionnels existe, en cohérence avec la viabilité de la dette.

Le portefeuille de la dette du Niger, contrairement aux idées répandues, a servi dans sa quasi-totalité à financer des projets d’infrastructures structurants pour l’économie de notre pays (routes, usines de production d’énergie et d’eau, etc.) et à engager des réformes visant à augmenter la productivité des branches de notre économie (agriculture, élevage, commerce) et à renforcer le stock d’infrastructures de base (ouvrages hydrauliques, hôpitaux, centres universitaires, etc.).

Pour l’année 2020, la gestion de la dette est marquée par la mise en œuvre des mesures d’allègement (moratoires et annulations) convenues avec les partenaires techniques et financiers multilatéraux et bilatéraux en raison de la crise de la COVID-19.
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