C’est la toute dernière fois que je m’adresse à vous, en tant que Président de la République. Permettez-moi de vous exprimer toute ma reconnaissance pour m’avoir donné l’occasion de vous servir tout au long de ces dix dernières années. Ce fut pour moi un immense honneur. Depuis 1960, soit depuis plus de soixante ans, je suis le neuvième à avoir eu cet honneur. Je mesure donc la chance que la vie m’a offerte, en me permettant de réaliser un vœu que je caressai depuis ma plus tendre enfance : être Président de la République. Au départ, le petit écolier que j’étais, exprimait ce vœu sans savoir pourquoi, ou tout au plus, peut-être pour devenir quelqu’un d’important. Ce n’est que plus tard que j’ai su que c’était la position la plus élevée qu’un citoyen puisse occuper pour servir son pays. Mon expérience confirme l’importance, pour un homme, d’avoir un but dans sa vie, de préférence très tôt, et d’y travailler sans relâche. Je souhaite que les jeunes, garçons et filles, qui m’écoutent retiennent cette première leçon.
MES CHERS CONCITOYENS,
Les circonstances de la vie m’ont mis en contact avec d’autres compatriotes qui avaient, aussi, cette seule ambition. Ces camarades pour lesquels j’éprouve une immense fierté, avec lesquels je partage les mêmes valeurs, ont fait, avec peu, des choses extraordinaires. Toujours unis, ils ont construit, dans l’adversité, un parti puissant, le plus puissant de toute notre histoire démocratique de ses trente dernières années. Après vingt ans d’opposition, ils ont conquis ensemble le pouvoir d’Etat qu’ils exercent maintenant depuis dix ans et qu’ils vont continuer d’exercer pendant les cinq prochaines années conformément à la volonté populaire exprimée dans les urnes le 21 Février dernier. De cette expérience se dégage une autre leçon : la politique se fait autour des valeurs et non sur des bases identitaires. Nous ne nous sommes pas trompés en nous engageant sur cette voie. L’élection du Président Bazoum et le déclin des partis identitaires le prouvent. Je demande aux jeunes de méditer cette deuxième leçon.
MES CHERS CONCITOYENS,
L’élection du Président Bazoum constitue un pas important vers la modernisation politique. Désormais, tout Nigérien, quelle que soit son origine ethnique, peut espérer être Président de la République. Cet espoir est une contribution importante à la consolidation des institutions démocratiques et républicaines, un des axes du programme de renaissance et au renforcement de l’unité nationale. Je me réjouis de ce que cette consolidation se reflète dans l’accroissement de la capacité de l’État à lever l’impôt et à mobiliser les ressources externes. Je me réjouis de ce que cette consolidation se reflète dans la résilience de nos institutions face aux tentatives successives de déstabilisation. En effet, en dix ans, nous avons dû faire face à quatre tentatives de coup d’Etat dont la dernière, en date, est intervenue dans la nuit du 30 au 31 Mars 2021, il y a à peine 48 heures. C’est, à n’en point douter, une tentative désespérée de reprendre, par les armes, le pouvoir des mains de ceux qui l’ont conquis dans les urnes. C’est le lieu de féliciter la garde présidentielle dont l’engagement, le loyalisme et le professionnalisme ont permis de mettre en échec ce projet funeste. C’est aussi l’occasion de saluer et de féliciter l’écrasante majorité des éléments des forces de défense et de sécurité pour leur comportement républicain. Cette écrasante majorité a compris qu’« il y a deux choses saintes : le drapeau qui représente l’honneur militaire et la loi qui représente l’honneur national…..Le plus grand des attentats c’est le drapeau levé contre la loi ». Malheureusement, il existe en leur sein une minorité compacte de putschistes qui lèvent le drapeau contre la loi, qui prétendent faire un arbitrage au-dessus du peuple souverain, qui ignorent de manière délibérée que, une fois le chemin choisi par l’État et la Nation, le devoir militaire est tracé une fois pour toute. Ces criminels et leurs commanditaires intérieurs et extérieurs seront recherchés, identifiés et punis conformément à la loi. En dépit des efforts de consolidation des institutions démocratiques réalisés pendant la décennie, les démons du putschisme ne sont pas morts. Que la démocratie soit réversible dans notre pays est une autre leçon qu’il faut tirer de ces évènements.
MES CHERS CONCITOYENS,
Depuis dix ans, j’ai eu à vous présenter, chaque année, le bilan de la mise en œuvre du Programme de Renaissance. Le Gouvernement vient d’en adopter le bilan décennal, bilan récemment rendu public par le Premier Ministre, à travers une conférence de presse. Rappelez-vous, ce programme a été élaboré dans la perspective d’un contexte de stabilité favorable au développement économique et social de notre pays. Cependant, lors de sa mise en œuvre, aux défis déjà existants (institutionnel, climatique, démographique, instabilité des prix des matières premières) sont venus s’ajouter de nouveaux défis au niveau sécuritaire et sanitaire avec la covid-19. En dépit de ces défis, les promesses faites au peuple nigérien ont été tenues. En effet, avec un taux de croissance moyen annuel d’environ 6%, l’économie de notre pays a été, sur la période, une des plus dynamiques. Cette croissance a été inclusive et a concerné tous les secteurs. Elle a permis de réduire la pauvreté, surtout en milieu rural, et d’amorcer la transformation du pays. Les ressources intérieures et extérieures mobilisées ont permis non seulement d’assurer la sécurité du pays face au terrorisme et au crime organisé et de consolider les institutions démocratiques, mais aussi d’investir dans les infrastructures routières, énergétiques, de télécommunication, urbaines, dans l’initiative 3N, dans le développement du capital humain (éducation, santé, eau) et dans la création d’emplois notamment pour les jeunes. Je me réjouis donc d’avoir honoré mes promesses. Mais cela n’aura pas été possible sans votre mobilisation. Grâce à votre soutien, votre engagement et votre résilience, le Gouvernement a pu mobiliser les recettes, améliorer l’efficacité de la dépense publique et amorcer le processus de transformation du pays. Cela n’aura pas été non plus possible sans le soutien de nos partenaires techniques et financiers que je remercie en votre nom. L’effort de transformation est du reste reconnu sur le plan international à travers notamment le prix Mo Ibrahim qui m’a été attribué par la Fondation Mo Ibrahim. En dépit de nombreuses réalisations faites pendant cette décennie, beaucoup reste à faire. Le chantier de construction d’une nation est un processus dynamique de longue haleine, un processus sans fin. Voilà pourquoi il a besoin de la solidarité des générations, chacune s’efforçant de remplir sa mission, de poser sa pierre en vue de l’édification de la maison commune. Je pense que la nôtre a rempli sa mission et je souhaite bonne chance aux générations à venir. Pour ces générations, une des leçons que me dicte mon expérience est que de tous les défis auxquels notre pays est confronté, le défi institutionnel est le plus décisif à surmonter. C’est le nœud gordien de tous les défis. Nous devons poursuivre l’effort de construction d’institutions fortes et stables. Elles seules permettront à l’ordre et la liberté de se garantir et à l’unité nationale de se renforcer. Ni dictature, ni anarchie mais des institutions démocratiques fortes. Le jour où nous les aurons mises en place de manière irréversible, notre pays sera sauvé et pourra, avec assurance, poursuivre sa marche vers l’émergence caractérisée par un régime politique stable, une croissance économique forte, une transition démographique achevée et une classe moyenne nombreuse. Les résultats obtenus dans la mise en œuvre du programme de renaissance, notamment la réalisation de la première alternance démocratique de notre histoire, depuis 60 ans, constituent un pas important dans cette direction.
MES CHERS CONCITYENS,
Je passe donc le témoin, demain 2 Avril 2021. Ce jour est un des meilleurs de ma vie. Du reste, en 2011, au lendemain de mon élection comme Président la République, beaucoup d’amis m’ont dit que ce n’était pas le moment de me féliciter. Ils m’ont promis de le faire à la fin en souhaitant que celle-ci soit bonne. Je constate, aujourd’hui, qu’ils tiennent cette promesse. Ce jour est un des meilleurs de ma vie parce que, cerise sur le gâteau, vous avez désigné, pour me succéder, mon camarade, mon frère et ami, le Président Mohamed Bazoum. Je considère son élection comme une approbation, par la majorité d’entre vous, des résultats obtenus dans la mise en œuvre du programme de renaissance actes 1et 2. Je considère aussi que cette majorité a porté son choix sur lui parce qu’elle approuve son programme, le Programme de Renaissance acte 3, « consolider et avancer », un programme qui porte la promesse de la poursuite des transformations dans lesquelles le pays est engagé. Au-delà de cette majorité qui l’a porté au pouvoir, je vous demande tous de vous joindre à lui, de le soutenir et d’écrire avec lui de nouvelles et belles pages de l’histoire de ce pays qui nous est si cher : le Niger.
Au revoir mes chers concitoyens. Que Dieu vous garde et vous bénisse. Que Dieu garde et bénisse le Niger.