Un sommet se tient ce 9 juillet, un mois après l’annonce de la fin de Barkhane. Au menu, la redéfinition de la collaboration militaire. La voix des sociétés civiles, qui appellent à une révision des priorités, doit aussi être entendue.
La fin de l’opération Barkhane, annoncée par le président Emmanuel Macron le 10 juin 2021, acte un état de fait : une approche centrée sur le volet sécuritaire – qui ne prend pas suffisamment en compte l’aspect multidimensionnel de la crise – est une impasse au Sahel. Il n’y a jamais eu autant de victimes parmi les civils qu’en 2020, selon l’ONG Armed Conflict Location and Event Data Project (Acled), avec plus de 2 400 personnes tuées dans les attaques menées par des groupes armés et dans le cadre d’opérations antiterroristes au Niger, au Mali et au Burkina Faso. C’est ce décalage entre la militarisation de la région et la détérioration inexorable du contexte sécuritaire qui pose question. Et si l’annonce du chef de l’État français était l’occasion de repenser collectivement les politiques de stabilisation ?
Réorientation des priorités
Le bilan contestable de Barkhane (et de l’ensemble des dispositifs de coopération l’accompagnant) se caractérise par une insuffisante prise en considération du tissu social et des causes profondes des conflits. Aujourd’hui, de nombreuses organisations de la société civile regroupées au sein de la Coalition citoyenne pour le Sahel, dont Search for Common Ground fait partie, appellent à une réorientation radicale des priorités. Notamment en plaçant au cœur de la stratégie des réponses à trouver la protection des civils, la crise de gouvernance, le dialogue avec l’ensemble des parties prenantes et la lutte contre l’impunité.
Le rayon d’action des groupes armés affiliés au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Gsim) et à l’État islamique au grand Sahara (Eigs), initialement circonscrit au nord du Mali, s’étend désormais au sud-ouest du Niger et au nord-est du Burkina Faso, produisant un effet de contagion jusqu’aux frontières des États du golfe de Guinée. Au-delà de ce constat, l’objectif de « neutralisation » des chefs de l’Eigs et du Gsim n’est pas en phase avec les préoccupations sécuritaires des populations exposées aux conflits. Celles-ci craignent autant les exactions des forces armées nationales que celles des milices locales dans certaines zones contestées. Les violences ont également pris une tournure communautaire préoccupante avec l’émergence de groupes dits d’autodéfense qui polarisent les tensions et exacerbent un certain nombre de conflits préexistants à la crise.
Répondre aux préoccupations des populations
De façon inquiétante, l’importance des exactions des forces armées nationales montre les limites des politiques de coopération, menées depuis de nombreuses années, dans le domaine de la défense et de la sécurité. Il convient de s’interroger sur l’efficacité d’une stratégie qui passe avant tout par le renforcement du personnel et du matériel, mais sans impact significatif sur le terrain. Des approches complémentaires, visant à améliorer la confiance entre les communautés et les forces de défense et de sécurité au niveau local, ont montré des résultats probants, tels que la réduction des abus commis par les forces armées, l’amélioration du sentiment de sureté chez les populations et l’adoption de mesures sécuritaires élaborées conjointement avec les autorités.... suite de l'article sur RFI