Depuis l’investiture du président de la République S.E Bazoum MOHAMED le 02 Avril 2021, la promotion d’une gouvernance vertueuse à travers une lutte implacable contre la corruption, l’impunité, la promotion de l’intégrité, et de la redevabilité occupe tous les espaces publics. La volonté politique se fait de plus en plus déterminée et les citoyens en général commencent à croire à une croisade ferme contre la délinquance à col blanc. Mais, pour y arriver nous devons nous repentir et un repentir sincère car nous avons aussi une part de responsabilité dans cette déchéance morale.
Tout le monde, grands et petits, riches et démunis, chacun se dit préoccupé par le développement de la corruption. Une phrase récurrente traduit toutes ces inquiétudes: « C’est grave, cette histoire de corruption ! »
Il est en effet accepté que la corruption est nocive tant sur le plan économique, sociale, moral et religieux et qu’elle doit être combattue avec efficacité et constance. Seulement, sommes-nous réellement engagés pour une lutte contre la corruption et les infractions assimilées ? Nous croyons que la réponse est oui, cessons alors de nous couvrir de vernis. Renonçons à cette société de vernis !
Nous tenons au vernis, à l’emballage. A tous les niveaux et sur tous les plans. Sur le plan moral, par exemple, nous sommes nombreux à vitupérer contre les détourneurs de deniers publics. Nous sommes légion à fermer nos narines au passage de ses délinquants et à hurler que le régime est pourri, corrompu, voleur et népotiste.Mais, au fond de l’enveloppe, en grattant le vernis, nous nous découvrons rasant les murs des couloirs, hantant les bureaux de ces pourris et de ces corrompus pour solliciter une faveur indue ou un billet de banque… ou tout simplement pour demander de couvrir un détournement ou d’enrayer une action en justice contre un parent, un ami ou un complice. Une fois satisfaits, nous revêtons l’emballage, nous ressortons, brillant de tout notre vernis, pour dénoncer les pourris et les corrompus qui pillent et tuent le Niger. A l’analyse de la situation de notre pays, il faut s’interroger sur notre comportement général.
En effet, tout le monde crie au vol, au pillage, aux détournements impunis et aux méfaits de la politique des feuilles. Mais le régime corrompu jouit-il seul des fruits de la corruption, des vols et des détournements? Le pouvoir choisit-il tout seul d’être népotiste, d’être corrupteur de consciences ? Envoie-t-il la police ou la gendarmerie remettre les dons, aides et enveloppes ? Chacun de nous présente un emballage propre, un vernis de qualité. Nous constituons une société de théâtre et de cirque.
De cette situation, nous tirons une seule leçon par rapport aux inquiétudes exprimées par les uns et les autres devant le développement fulgurant de la corruption. Une leçon de taille qui vaut pour chacun de nous. Et, pour mieux la saisir il faut considérer le phénomène dans tous ses aspects. La corruption n’est pas tombée du ciel, tout d’un coup. Nous avons assisté à son développement. Nous avons encouragé, tous autant que nous sommes, sa croissance par notre silence, notre indifférence ou notre participation. Et nous avons trouvé, au départ, des excuses, ou plus exactement une excuse suprême : « la corruption est partout ». Nous sommes aujourd’hui victimes de nos comparaisons. Dans la vie des individus et des peuples, les échecs viennent souvent des comparaisons. Quelle que soit la situation d’un homme, il doit éviter de se satisfaire dans la comparaison.Pour gagner alors le salut de ce pays, quittons notre emballage, abandonnons l’enveloppe, ayons le courage de nous dire : nous sommes tous complices dans ce vernis.
Par Amadou Hassane DIALLO, Directeur Exécutif National de l’ONG TRI Niger