Selon nos informations, la justice est aux trousses de l’ancien Chef de l’Etat nigérien, Tandja Mamadou, afin de voir clair sur sa « révélation » concernant l’affaire des 400 milliards de Fcfa, qu’il a soulevée lors de sa rencontre avec ses proches. Le procureur de la République a été saisi de cette affaire vers la fin du mois de décembre 2013, et a instruit pour sa part la gendarmerie pour mener une enquête minutieuse et sans complaisance avec comme instruction, la production, chaque semaine, d’un rapport sur l’évolution du dossier.
Cette information intervient au moment où nous apprenions qu’une autre affaire, non des moindres, vieille de 23 ans environ, serait sur le point de rebondir dans les toutes prochaines semaines et qui pourrait mettre Tandja à mal. Il s’agit de « l’affaire de Tchintabaraden ». A en croire nos sources, certaines personnes, inspirées par l’inculpation récente par le parquet de Cologne, en Allemagne, d’un homme de 88 ans, accusé de meurtre et complicité de meurtre lors du massacre d'Oradour-sur-Glane (France) au cours duquel 642 personnes ont été tuées en juin 1944 et du cas de l’ancien président Hissene Habré, auraient actionné des enfants des victimes du massacre de Tchintabaraden vivant au Niger et dans certains pays, pour qu’ils portent plainte auprès des tribunaux nigériens et internationaux contre Tandja Mamadou.
C’est dire que l’année 2014 ne sera de tout repos pour l’ancien président, lui que son statut a sauvé dans l’affaire SONIDEP et bien d’autres dossiers scabreux, et qui fut spécialiste de démolition des Institutions de l’Etat (Assemblé Nationale, Cour constitutionnelle de la 5ème République, etc.). Cette fois-ci, quelle sera alors l’attitude du président Issoufou envers Tandja qui le traîne aujourd’hui dans la boue, lui qui l’avait pourtant libéré le 10 mai 2011? La question est là.
De l’affaire des 400 milliards
A en croire nos sources, c’est pour voir clair et mettre fin à toutes les spéculations et donner une suite favorable au souhait de l’opinion publique dans cette affaire née de la « révélation » de Tandja et du discrédit qu’elle jette sur ses successeurs et sur le Niger, que le président Issoufou a instruit les services compétents pour enquêter sur les dires de Tandja. « Personne ne sera épargnée », nous a fait croire une source proche du dossier et « il faudrait que Tandja apporte la preuve de ce qu’il a avancé ».
D’ailleurs, le tout nouveau président du PNDS a affirmé, lors d’une conférence de presse animée à Zinder, que « la justice a décidé d’ouvrir une instruction judicaire. Par conséquent, le président Tandja va être entendu par la justice afin qu’il apporte les preuves de ses déclarations ». C’est dans ce but que le procureur de la république a instruit la gendarmerie qui serait déjà à pied d’œuvre, avec pour mission de rendre compte au jour le jour par des rapports circonstanciés et à qui de droit, de l’évolution du dossier.
D’abord que soit entendu Tandja ou toute autre personne qui a un rapport avec ledit dossier. Anciens ministres des finances comme anciens responsables des institutions financières de l’Etat et de la BCEAO, tous seront également entendus. Le procureur veut savoir à qui Tandja a confié cet argent, quand et où ? Ce qui est évident, le jour du coup d’Etat, comme dans pareilles circonstances, un trésor de guerre aurait été emporté par la soldatesque du 18 février 2010, qui a fait irruption au Palais présidentiel pour déloger Tandja. Il se susurre également que des lingots d’or seraient livrés régulièrement avant le coup d’Etat par une société à des membres de l’entourage de l’ancien dirigeant.
Tandja à travers ses dires a été très affirmatif dans cet enregistrement avec un doigt accusateur sur la junte militaire. C’est dire qu’il sera obligé de donner des preuves suffisantes de la disparition de cette somme d’argent et des 400 milliards, quand on sait qu’il n’y a aucune trace, ni au trésor, ni à la BCEAO comme l’attestent plusieurs documents.
Si Tandja a affabulé, alors, la machine judicaire le broiera parce que cette fois-ci, il sera pris en flagrant délit. Selon les dispositions de la loi N°94-003 du 3 février 1994, le Président de la République qui n’est plus en fonction peut être poursuivi en cas de flagrant délit sans que ne soit levée l’immunité dont il continue de jouir. Et même s’il s’échappe à ce dossier, celui du massacre de Tchintabaraden l’attend sur le plan national et international.
De l’affaire du massacre de Tchintabaraden
C’est une autre vieille affaire qui viendrait s’ajouter au dossier des 400 milliards précité, et qui remonte aux années quatre-vingt-dix avant même qu’il ne soit à la tête du pays, mais auquel son nom a largement été associé. A l’époque, Tandja, alors officier des forces armées nigériennes, et cadre de commandement dans la région, aux dires de certaines sources, aurait instruit pour que soit arrêté un patriarche touareg de la région, celui qui fut torturé jusqu’à la mort par l’officier de police Kémil avant que l’ordre soit donné à l’officier Maliki Boureima pour mener une opération punitive qui déboucha à un massacre à Tchintabaraden.
L’affaire a fait grand bruit à la Conférence Nationale Souveraine, mais aujourd’hui, du fait du positionnement de certains acteurs, les langues commencent à se délier, et nous apprenions qu’un cercle des enfants des victimes du massacre, vivant au Niger et dans certains pays à l’étranger, inspirés par la justice internationale sur les crimes contre l’humanité, et appuyés par certaines personnes qui veulent en découdre avec Tandja, et d’autres organismes, ont décidé d’engager cette procédure pour que justice leur soit rendue, avec en toile de fond, Tandja Mamadou, dans leur viseur.
A la question de savoir pourquoi maintenant ? Nos sources précisent que les initiateurs de cette action seraient galvanisés par la récente inculpation en Allemagne, d’un ancien officier SS, âgé de 88 ans, membre du régiment Der Führer de la division blindée SS Das Reich, qui aurait en 1944, avec son régiment, massacré 642 personnes dont des femmes et enfants à Oradour-sur-Glane en France.
C’est dire que la justice internationale ne badine pas avec les crimes contre l’humanité même si c’est soixante dix ans après. En outre, les victimes du massacre de Tchintabaraden mettent dans leur panier, le cas de l’ancien président tchadien, Hissene Habré, poursuivi par la justice internationale pour crime contre l’Humanité.
Au regard de ce qui précède, on assistera donc à plusieurs rebondissements dans des affaires où le président Tandja serait impliqué. Rappelons que Tandja avait été incarcéré par la junte militaire qui a pris le pouvoir le 18 février 2010. Il n’avait eu son salut que grâce à la bataille menée par son brillant avocat et du fait de son statut qui lui ont permis d’être sauvé par la Cour de Justice de la CEDEAO et la Rencontre africaine pour la défense des Droits de l’Homme (RADHO). Pour ces deux affaires, Tandja réussira-t-il à passer entre les mailles des filets de la justice? La question mérite d’être posée, surtout si on jette un coup d’œil dans ses relations avec Issoufou Mamadou.
En effet, lors d’une interview accordée en juillet 2011 à nos confrères de Jeune Afrique, juste après la libération de l’ancien président, intervenue le 10 mai 2011, relativement à l’émission par Tandja d’un mandat d’arrêt international pour blanchiment d’argent contre lui, Mahamadou Issoufou déclarait «qu’il faut jeter la rancune à la rivière. D’ailleurs, je n’ai pas cherché à m’opposer à sa libération. J’aurais pu me pourvoir en cassation, j’ai préféré tourner la page. L’énergie que je pourrais mettre à le persécuter, il vaut mieux que je la mette à construire.
C’est ma philosophie. » Après la persécution de Tandja contre le régime d’Issoufou, ce dernier sera-t-il dans le même esprit ? La question est là. Et comme dirait l’autre, Tandja l’aura cherché.