Les rideaux sont tombés, vendredi 29 juillet à Niamey, sur les Réunions statutaires pour l'année 2022 de l'Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) avec la tenue de la 68e session du Comité des ministres qui a été marquée par le passage de témoin entre le Sénégal et le Niger à la Présidence du Comité, l'admission du Rwanda comme 19e Etat membre ainsi que l'adoption d'un nouveau Plan de services d'équipements (PSE) pour la période 2023-2027. D'importantes décisions ont également été prises au cours de cette session qui s'est tenue sous le signe de la reprise après la difficile période de la crise de la Covid-19 qui a particulièrement affecté le secteur aérien et donc les activités de l'Agence avec la suspension des vols. Des vents favorables sur lesquels entend surfer l'ASECNA pour renforcer son positionnement sur le marché africain du transport aérien d'autant qu'en plus de la reprise des vols, une hausse du trafic aérien sur le continent est attendue dans les prochaines années.
C'est avec un optimisme prononcé et sous le signe de la reprise que s'est tenue en présentiel, le vendredi 29 juillet 2022 au Centre international de conférence Mahatma Ghandi de Niamey, la 68e Session du Comité des ministres de l'ASECNA, la première du genre post Covid-19. La cérémonie d'ouverture du Comité s'est déroulée sous la présidence du Premier ministre du Niger, SEM. Ouhoumoudou Mahamadou, en présence des Présidents d'institutions de la République, des membres du gouvernements, des ministres des pays membres, des administrateurs, du président du conseil d'administration (PCA) de l'ASECNA, Jean Lamy, du Directeur général de l'ASECNA, M. Mohamed Moussa, ainsi que des députés nationaux, des ambassadeurs et représentants des organisations régionales et internationales, des autorités régionales et municipales de la vile de Niamey, des experts de l'aviation civile et de nombreux invités.
Plusieurs allocutions ont marqué cette cérémonie en grande pompe dont celle de bienvenue du ministre nigérien des Transports, M. Alma Malam Oumarou, qui a tenu à remercier l'ensemble des participants pour leur présence à cet évènement avec un hommage particulier au Chef du gouvernement. " Votre présence à nos cotés, traduit éloquemment votre détermination à mettre en œuvre conformément à votre Déclaration de politique générale et au Programme de la Renaissance acte 3 de SEM. Bazoum Mohamed, Président de la République et Chef de l'Etat ", a-t-il adressé au Premier ministre avant de rappeler que " l'ambition de ce programme est de faire du secteur des transports en général et de l'aviation civile en particulier, dans la sécurité, un moteur prépondérant de croissance économique et d'intégration tant au plan national que régional et international ". A ce propos, a poursuivi le ministre Alma Oumarou, " l'ASECNA est un modèle réussi d'intégration qui fait la fierté de ses membres et l'admiration de tous les régulateurs internationaux de par le professionnalisme et rigueur managériale de son Directeur général, notre compatriote M. Mohamed Moussa, que je félicite et encourage vivement ".
Le ministre nigérien des Transports n'a pas manqué de rendre également un hommage mérité au Comité des ministres et à son Président sortant, le ministre Alioune Sarr du Sénégal ainsi qu'au Conseil d'administration présidé par le français M. Jean Lamy, " pour leurs clairvoyantes et permanentes orientations qui ont permis à l'ASECNA de jouer un rôle majeur dans la perspective du Ciel unique africain ".
En dépit de la zone de turbulences engendrée par la pandémie de la Covid-19...
Le Président sortant du Comité des ministres, le ministre sénégalais des transports a ensuite pris la parole pour d'abord se réjouir de la tenue de cette 68e réunion en présentiel à Niamey après celle de 2021 de Dakar qui s'est déroulée en vision conférence du fait de la Covid-19. " C'est le lieu pour moi de saluer les immenses efforts consentis par nos Etats, pour un retour à une situation qui nous permet de tenir notre session dans les conditions normales, quoique empreintes encore de mesures de protection sanitaires ", a déclaré Alioune Sarr, qui a ensuite dressé un bilan des activités majeurs qui ont jalonné la vie de l'Agence au cours de la présidence du Sénégal.
Le ministre sénégalais des transports n'a pas manqué en ce sens de rappeler que ces instances statutaires de l'ASECNA se tiennent cette année au moment où l'aviation civile mondiale sort à peine d'une " zone de fortes turbulences " marquée par les effets dévastateurs de la pandémie de coronavirus sur le transport aérien. Une situation qui a eu un impact négatif sur tous les acteurs de la chaine du transport aérien, y compris les fournisseurs de services de navigation aérienne. A ce titre, a indiqué le ministre Sarr, l'ASECNA s'est retrouvée dans une situation de baisse drastique de ses ressources financières qui, a-t-il rappelé, proviennent essentiellement des redevances qu'elle perçoit pour services rendus aux compagnies aériennes qui opèrent dans l'espace aérien sous sa direction. " Face à cette situation inédite, l'Agence a fait preuve de résilience mais surtout d'esprit d'adaptation pour juguler les effets néfastes de la pandémie. Pour cela, la Direction générale a initié une série de mesures qui ont permis de rationnaliser au maximum les dépenses de fonctionnement et de se focaliser sur les investissements concourants directement à la sécurité de la navigation aérienne" a poursuivi le Président sortant du Comité des ministres pour qui, " cette capacité d'anticipation et l'engagement sans faille du personnel ont mis l'Agence à l'abri de difficultés financières, dont les conséquences auraient pu être dramatiques au regard de l'importance des missions à elles assignées par nos Etats ". C'est pourquoi, au nom des ministres membres du Comité, il a tenu à féliciter le Directeur général M. Mohamed Moussa, soutenu par le Conseil d'administration, pour toutes les dispositions prises pour permettre à l'Agence de traverser cette zone de turbulences sans incidence majeure sur la qualité des prestations de l'ASECNA, tout en préservant les emplois.
...un bilan satisfaisant durant le mandat du Sénégal
Evoquant le bilan des actions réalisées notamment la révision des statuts, le ministre sénégalais des transports a souligné la poursuite sur le plan opérationnel du déploiement des technologies les plus innovantes pour faire de son espace aérien l'un des plus sûrs du monde. Il a en ce sens mis en exergue la mise en œuvre du guidage radar dans tous les aéroports à la charge de l'Agence qui leur permet désormais de disposer des mêmes outils de visualisation et de gestion de n'importe quel aéroport international situé dans les pays à la pointe de la technologie et qui va permettre de procurer aux avions un gain de temps, une économie significative sur la consommation de carburant, une réduction d'émission du CO2 et une fluidité du trafic dans un volume d'espace aérien donné. Selon les explications du Président du Comité des ministres, la mise en œuvre de cette technologie va servir de base au déploiement du Système de renforcement satellitaire (SBAS) de l'ASECNA, un système qui fournira un service d'intégrité permettant une utilisation sûre des signaux GPS pour la navigation aérienne pendant toutes les phases de vol. Au total, a poursuivi le ministre Sarr, cette technologie permettra de renforcer la sécurité dans les espaces ASECNA, d'accroitre la capacité de l'espace, d'écourter les temps de vol des avions et de faciliter les opérations de recherche en cas de besoin. " Tous ces projets majeurs, symbole de la volonté de l'ASECNA de se positionner comme le leader des fournisseurs de service de navigation aérienne en Afrique dans les prochaines années, découlent de la vision de Ciel Unique pour l'Afrique adoptée par le Comité des ministres en 2010 à Ouagadougou, ce vaste et ambitieux projet dénommé CUPA, qui permettra de disposer en tous points, d'un haut niveau de performances et de sécurité ", a mis en exergue le ministre des transports du Sénégal.
Le Président sortant du Comité a aussi indiqué qu'au cours de l'année écoulée, en plus de l'ouverture de l'Agence à d'autres espaces qui s'illustre avec la demande d'adhésion du Rwanda, l'ASECNA a également amélioré ses performances de sécurité confirmant ainsi une tendance amorcée ces dernières années. " Ces performances sont le résultat de choix d'investissement judicieux, de la qualité du personnel technique et d'une bonne politique du personnel et de la sécurité " a indiqué M. Alioune Sarr qui a aussi relevé que sur le plan de la gouvernance, et en dépit d'un contexte difficile, " l'ASECNA a sû améliorer ses outils de gestion avec comme résultat, une plus grande efficacité dans la facturation et le recouvrement des créances, mais aussi, le renforcement des outils de contrôle interne et une mobilisation du personnel autour de son outil de production ".
" Au moment où l'ASECNA entame sa seconde révolution technologique avec la mise en œuvre de la navigation par satellite, je voudrais réaffirmer l'attachement de mon pays à ce bel outil d'intégration régionale et de solidarité ", a déclaré le ministre des Transports du Sénégal pour qui, " l'ASECNA est un véritable levier pour nos économies car elle soutient le transport aérien qui contribue fortement au développement économique de nos Etats ".
Défis et perspectives post Covid-19
En procédant à l'ouverture officielle des travaux, le Premier ministre du Niger n'a pas manqué également de rappeler que le commerce aérien mondial a été perturbé depuis 2020 par les effets néfastes de la Covid-19 qui a fortement réduit la mobilité humaine et la circulation des marchandises. " Cette pandémie a ainsi provoqué une chute drastique du trafic aérien mondial et précipité les compagnies aériennes, les gestionnaires d'aéroports, les acteurs de la chaine de services de navigation aérienne ainsi que l'industrie de l'aviation dans de grandes difficultés financières", a indiqué SEM. Ouhoumoudou Mahamadou qui a, par la même occasion, ajouté que " les conséquences ont été lourdes pour certaines compagnies aériennes entrainant la perte d'emplois dans le secteur de l'aviation et de grandes perturbations dans le fonctionnement de certaines entreprises du secteur".
Fort heureusement, a poursuivi le chef du gouvernement, depuis quelques mois le trafic a repris et connait une forte progression, à tel point que les spécialistes estiment que la reprise pos-Covid dans le transport aérien devrait être plus favorable. En effet, a-t-il indiqué, si les projections les plus optimistes prévoyaient l'atteinte du niveau de trafic antérieur à la période Covid à l'horizon 2025, au regard de la configuration du secteur, ce niveau pourrait être atteint dès 2023. " Cette reprise inattendue du trafic pose d'ores et déjà des difficultés dans le secteur de l'aéronautique avec notamment un déficit de personnel technique navigant " a alerté le Premier ministre du Niger pour qui, également, " ce vent d'optimisme qui souffle sur le secteur aérien cache aussi la problématique de la rivalité entre les compagnies aériennes du nord et celles du Sud, une bataille économique qui se mène aussi sur le continent africain dont le trafic connaitra une forte croissance dans les prochaines années ".
Pour le Chef du gouvernement, " l'Afrique ne doit pas être en marge de cette compétition pour tirer profit du dynamisme du secteur du transport aérien ". C'est ainsi, a-t-il ajouté, que plusieurs initiatives ont été prises par les Chefs d'Etat en vu de soutenir le développement économique du continent notamment dans le domaine du transport aérien avec, entres autres, le lancement le 28 janvier 2018 à Addis-Abeba, du Marché Unique du Transport Aérien en Afrique (MUTAA) ou l'accélération ces dernières années de la mise en œuvre de la Déclaration de Yamoussokro de 1999 sur la libéralisation du ciel africain. Les Etats ont également mis en place des stratégies nationales comme c'est le cas au Niger où, a indiqué SEM. Ouhoumoudou Mahamadou, avec l'appui de l'ASECNA, " des politiques hardies ont été initiées pour assurer la formation des ressources humaines de qualité, adapter une législation nationale aux normes et pratiques recommandées par l'OACI et moderniser les infrastructures aéroportuaires ".
"L'accroissement prévisible du trafic aérien sur le continent, et du nombre d'avions dans le ciel africain, imposera à l'ASECNA, d'importants investissements pour renforcer les équipements dans ses centres opérationnels, l'appui aux Etats pour consolider leurs structures nationales de gestion et de contrôle de l'aviation civile ainsi que de l'augmentation ou le relèvement de l'offre de formation des cadres ", a estimé le Premier ministre nigérien qui s'est félicité des progrès enregistrés par l'Agence en 60 ans d'existence. En ce sens, il a indiqué que "les défis sont énormes" tout faisant part de sa conviction de l'ASECNA à anticiper les avancées technologiques pour maintenir ses équipements au niveau des standards de l'OACI. "Ayant la charge de la gestion du secteur des transports dans vos pays respectifs, je n'ai nullement besoin de vous rappeler l'importance stratégique du transport aérien de nos pays" a-t-il adressé aux ministres membres du Comité avant de leur rappeler qu'ils ont "la lourde responsabilité de créer les conditions qui garantissent de manière pérenne, la bonne marche de l'ASECNA, en particulier, en veillant à donner à la Direction générale, les orientations appropriées pour le renforcement de ce bel outil d'intégration et de coopération régionale".
La cérémonie d'ouverture de la Session du Comité des ministres a été aussi marqué par le passage de témoin à la Présidence entre le Sénégal et le Niger qui, conformément aux textes de l'Agence, va assurer un mandat de douze (12) mois. Aussi, le Burkina et le Tchad ont profité de l'occasion pour procéder à la signature d'un accord dans le domaine du transport aérien.
Les travaux du Comité des ministres ont duré presque toute la journée et ont porté sur plusieurs points préparés lors de la réunion de la 149e session du Conseil d'administration ainsi que celles des commissions spécialisées qui se sont tenus du 25 au 27 juillet toujours dans la capitale nigérienne.
A l'issue de leurs travaux, le comité a adopté un certain nombre de décisions dont, entre autres, l’entérinement de l’adhésion, à compter du 1er janvier 2024, du Rwanda à l’ASECNA suite à sa demande, la révision des statuts ainsi que l’adoption du nouveau plan de services et d’équipements (PSE) pour la période 2023-2027 dont le montant total est de 264.182.000.000 de francs CFA.
Il faut noter qu'en marge des travaux, les ministres présents à la rencontre de Niamey ont été reçus en audience par le Président de la République SEM. Bazoum Mohamed à qui ils ont, selon le ministre des Transports Alma Oumarou, fait le point des travaux, des avancées ainsi que des attentes au niveau des différents Etats. Lors de la conférence de presse de fin des travaux qui s'est tenue peu après la lecture du communiqué final, le Directeur général de l’ASECNA, est revenu plus en détails sur la crise qu'a traversé l'Agence avec la pandémie de la Covid-19, les mesures prises pour y faire face ainsi que les défis et perspectives qui se profilent avec la reprise déjà amorcée. " L'ASECNA a certes traversé une véritable zone de turbulence qui a été tellement violente que l’organisation aurait pu faire faillite, si c’était une entreprise, avec au mois d’Avril 2020, une perte d’environ 83% du trafic aérien et environ 70% de nos recettes", a fait savoir M. Mohamed Moussa, qui a ensuite indiqué que face à cette nouvelle situation, " le conseil d’administration a dû se réunir en urgence sur la base d’un plan que le DG a présenté pour affronter cette situation dans les meilleures conditions possibles avec également un bon dialogue qui a été organisé avec les travailleurs". C'est ainsi que le budget de l’ASECNA qui était autour de 239 milliards de CFA a chuté à 130 milliards et fort heureusement, " les travailleurs ont accepté la réduction de leurs rémunérations à travers des négociations et l’agence a pu surmonter la crise ". Aujourd'hui, a-t-il poursuivi, " il y a une reprise progressive et nous pensons qu’à l’horizon fin 2024, nous pouvons retrouver notre niveau du dynamisme financier en particulier pour que l’ASECNA puisse repartir avec ses ambitions d’équiper tous ses Etats membres des moyens appropriés pour assurer la sécurité aérienne ".