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Comment Bazoum peut-il sortir de la troisième Renaissance insulaire d’Issoufou ?

Publié le dimanche 11 septembre 2022  |  nigerdiasporat
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© Autre presse par DR
Message à la Nation du Président de la République, Chef de l’Etat, SEM. Mohamed Bazoum, à l’occasion du 62ème anniversaire de l’Indépendance du Niger
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Gouverner est un art difficile. Il faut être humble pour gérer les hommes, pour donner corps à leurs aspirations. Mais le pouvoir est beau et laid à la fois. Dans ses lueurs, l’on est souvent emporté par son vertigo, ébloui par ses dorures et sa brillance. C’est pourquoi il n’est pas permis à tous d’être fairplay et d’avoir de la magnanimité pour accepter de partir, d’abandonner le pouvoir, dans la dignité et la grandeur. Chez nous, les hommes n’ont pas toujours cette élévation d’esprit pour se placer au-dessus de tout.

C’est donc au Niger qu’on peut voir toutes les drôleries politiques, des avatars de démocraties amputées, souvent faites de constructions bâtardes, oligarchiques d’une république mise aux goût d’un seul homme et de ses vanités, de ses désidérata hautains, de ses extravagances qu’un culte de la personnalité porté par un socialisme «frelaté », contrefait, peut cyniquement bâtir dans une société où, à certains égards, les hommes, las de luttes, ont perdu le goût du combat pour ne plus savoir défendre leurs libertés confisquées et la République dévoyée. Jamais une démocratie n’a été autant malmenée, louvoyée au point de perdre son essence, et de perdre tout ce qui peut la rendre viable et vraie. Cela a commencé, faut-il le rappeler, depuis la transition de Salou Djibo qui croyait avoir trouvé des amis politiques qui peuvent lui permettre, après sa plongée politique à la suite de son coup d’Etat, de donner un continuum à sa carrière politique commençante. Mal lui en a pris, car la suite, il la vivra dans sa chair, trahi par des hommes abreuvés aux sources de Machiavel et qui ne peuvent que se servir de ses naïvetés et de son immaturité politiques, trompé aussi par des parents qui avaient, par des rancunes personnelles, des comptes à régler pour le conduire dans la voie qui sera sa perte. Et voilà que, attendant le retour de l’ascenseur, il se fit rouler dans la farine quand, un des siens, sans doute marqué par l’ingratitude de ceux à qui il aida à faire la faveur de prendre le pouvoir, non sans remord, finit par succomber à ses déceptions, et que l’autre, plus tard, rattrapé par le destin cruel, sans qu’il ne trouve personne pour parler de lui aujourd’hui, est suspecté de fomenter une atteinte à la sûreté de l’Etat-sans que personne n’y croie trop-et depuis des long mois d’isolement, il gît dans une prison provinciale, loin de la vie. Peut-être injustement.

Et depuis que le pseudo-socialiste Issoufou est arrivé au pouvoir, les Nigériens découvrent sa vraie nature politique, peutêtre humaine aussi. Les ors du pouvoir, pour un homme qui est bourré de vanité, l’ont détourné des valeurs auxquelles dans son activisme politique il donnait l’illusion de croire et qu’en d’autres temps il prétendait défendre. Pour se succéder à luimême, il était prêt à tout brutaliser, à s’éloigner des principes élémentaires, rabaissant le débat politique à ce que l’on a connu à travers cette histoire sordide que rien ne peut justifier si ce n’est des méchancetés politiques, pour accuser des familles qu’il sacrifiait pour attendre un homme qui gêne trop et contre lequel, à la suite de milles et une fouilles vaines sur plus de trente années de gestion, il ne put trouver le moindre indice compromettant. C’est ainsi que son système inventa cette sale affaire pour l’y confondre et trouver le moyen de l’éloigner du débat politique, conscient qu’il reste le seul adversaire coriace qu’il peut redouter dans une bataille électorale normale, loyale.

Puis, en 2021, à la fin de son dernier mandat, il fit le choix, sans doute pour un agenda dont il peut être seul à connaitre les secrets, pour préférer Bazoum Mohamed à d’autres candidats potentiels dans son propre parti.

Son candidat, ainsi qu’il le voulait, fut déclaré élu et, vite, il organisa la passation de témoin, mais sans s’éloigner pour autant du pouvoir lorsque, symboliquement, par la géographie qui l’en approche, il prend ses quartiers à quelques distances des lieux qu’il quittait, mais vidés de tout, apprenait-on, à l’époque jusqu’à la fourchette, perché aux flans de la colline pour surveiller « l’Ami ». Son ombre pesante sur le nouveau pouvoir est désormais évidente quand on sait que nombre d’hommes qui sont de son sérail pourraient avoir été imposés à Bazoum Mohamed comme collaborateurs-espions pour lui rendre compte, imaginent des analystes avertis, de ce que l’homme pourrait tenter de faire pour trahir un pacte qu’il pourrait croire avoir scellé avec celui à qui il fit, non sans calcul, le bonheur d’être président du Niger. Il semble ne plus faire confiance et peut-être parce que le nouveau magistrat suprême pourrait vouloir d’une part garantir l’équité et la justice sous-tendues plus par ses convictions socialistes, de paix et de justice notamment, quand dès sa prise de pouvoir il fit la promesse de s’attaquer sans faiblesse à l’impunité, et d’autre part, promouvoir une gouvernance vertueuse, respectueuse d’un certain nombre de valeurs sacrosaintes dans toute république normale. Et depuis que cette volonté d’assainir la vie publique est exprimée quelque part des gens ont commencé à paniquer pour accuser le président de commercer avec des opposants pour trahir les « camarades ». Mais qui faudra-t-il ne pas trahir : les camardes, le parti ou le Niger ? Un drame cornélien qui n’en est pas lorsqu’on est patriote convaincu. On savait que, depuis que le 2 avril 2021, lors de son discours d’investiture qui fait date, il annonça, que désormais, « plus personne ne sera d’aucun secours pour un autre et que chacun devra répondre de ses actes », l’homme ne rassure plus dans certains milieux du parti qui se constituaient déjà en opposition interne à sa gouvernance quand la vraie opposition, presque ramollie, ne tient aucun discours qui puisse l’inquiéter. On comprend que certains, agacés par le comportement de son successeur, parlent de troisième mandat déguisé, téléporté au moyen d’astuces qui font rire le monde entier. Il est indéniable que par un tel comportement infantilisant, outrageant, Bazoum, a beau être compréhensif, pour ménager son homme, pour ne pas le brutaliser, pour protéger une vieille amitié, il reste que Zaki ne lui donne pas d’autres choix, lorsque, par la responsabilité que le destin lui donne aujourd’hui à la tête de l’Etat, il ne peut que prendre ses responsabilités, et toutes ses responsabilités pour assumer pleinement ses fonctions de président de la République. On ne gouverne pas pour un parti a fortiori pour un homme mais pour un peuple, pour une nation. N’est-ce parce qu’il a cru qu’il serait le meilleur de tous qu’il le choisit pour lui succéder et diriger le pays ? Mais, alors, pourquoi fondé sur une telle conviction, peut-il le gêner tant, jouant à cette doublure inconvenante dans une démocratie qui ne peut s’accommoder de gémellarité au sommet de l’Etat, comme deux hommes, normaux, ne peuvent, de bonne foi, partager la même dulcinée, fut-elle une gourgandine ?

La dernière mise en scène qui a sidéré les Nigériens et dont on parle partout est ce voyage privé et cet accueil ostentatoire qu’il se fait offrir par les siens, dans ce qui pourrait être sa « patrie » pour aimer tant se distinguer au travers de ce que nous appelons la «régionalité» quand ses fonctions même anciennes, pour toujours, le contraignent à l’élévation, pour plus porter par ses gestes et ses paroles, au lieu du clan, la nation et la République. Certains observateurs peuvent ne pas se tromper de voir dans les propos de l’ancien gouverneur, une menace à peine voilée contre Bazoum qui ne ferait pas tellement ce que voudrait Zaki et le cercle qu’il y a autour de lui. Cette confusion des rôles ne peut pourtant pas continuer quand on sait que dans une démocratie l’on n’élit qu’un seul homme, jamais deux, pour qu’un autre vienne jouer à l’embouteillage, à l’encombrement. Il y a, quoique puissent croire ceux qui essaient de l’intimider, lui faisant le chantage qu’il n’existe comme président que par les siens et peut-être aussi, par une région où ils partaient faire la dernière démonstration avec des officiels qui peuvent, courtisans laudateurs, porter attributs de l’Etat dans un tel événement pour faire croire que l’homme, aujourd’hui, serait important au point de se donner ces zèles, à défier presque un président en exercice.

Mais comment sortir de cette île dans laquelle l’isole Issoufou pour espérer avoir les moyens de le contrôler ?

Peut-être qu’il est déjà très avancé dans cette première démarche de son émancipation politique qui passe par une recomposition du paysage politique, ainsi que le fit Félix Tshisekedi qui réussit intelligemment à se défaire de l’attelage trop asservissant d’un Kabila qui a cru pouvoir se servir de lui pour continuer à avoir une emprise sur le pouvoir et faire de lui juste un figurant. Il peut alors commercer avec d’autres partis pour constituer un front qui mettrait en marge et en minorité ceux qui, aujourd’hui autour de lui, pensent le tenir en respect par des voix trafiquées dans leurs terroirs pour lui faire croire que d’eux seuls peut dépendre son élection dans le pays. C’est pourquoi certains de ce milieu peuvent, en une époque, se plaindre que lui n’aurait pas de fief dont il peut se revendiquer pour se prévaloir d’être un candidat légitime pour leur parti. Tout le monde le sait-et Bazoum luimême sans doute-qu’il y a des partis responsables et des leaders charismatiques et ambitieux pour le pays avec lesquels il est possible de travailler pour sortir le pays de cette situation que l’élite nationale n’aura aucune raison de laisser pourrir ad vitam aeternam. Il s’agit de l’intérêt supérieur du Niger et il y a des hommes et des femmes dans le pays sur lesquels on peut compter pour sauver le Niger des griffes d’une race de prédateurs tant des deniers que des libertés qu’il faut, alors qu’il est temps, arrêter avant de frôler l’irréparable. Faut-il soupçonner, ainsi que les gémissements de certains milieux du pouvoir le laissent penser, que la marche d’une réconciliation qui vise à faire la paix avec certains milieux politiques que l’ancien régime, pour son hégémonie, stigmatisait et bannissait, serait actée déjà pour voir certains s’agiter et s’effrayer d’être abandonnés sur les bords de la route et répondre de leur gestion calamiteuse ?

Après avoir noué des partenariats solides, avec des camps politiques plus sérieux, l’unique solution politique, résiderait dans une dissolution de l’Assemblée Nationale que rien d’ailleurs, dans sa configuration actuelle, ne saurait justifier. Du reste, l’Opposition elle-même, au cas où elle gagnait les élections, envisageait cette solution. Tout le monde sait que si tant est que le PNDS pouvait à lui tout seul avoir tant de députés au parlement, rien ne peut justifier qu’il ne puisse pas passer, seul, à la présidentielle, dès le premier tour. Dissoudre l’assemblée pourrait donc être le seul moyen, la seule alternative de se libérer des chantages pour lesquels le camp d’Issoufou manigançait les résultats qui donnaient à son parti la majorité controversée que l’on sait à l’Assemblée Nationale. Cette solution existe et elle est jouable pour la quiétude du pays quand on sait que si l’on ne casse pas vite les ailes à ces hommes trop fiers d’eux-mêmes, troublant l’ordre public par leurs démesures et leurs extravagances, ils finiront par pousser le Niger si fragile encore à des turbulences inutiles. De nouvelles élections plus propres et inclusives peuvent aider à donner de la lisibilité à l’architecture de l’échiquier politique et mettre en place une coalition plus solide et plus responsable pour reconstruire le pays.

Le Niger, rappelons-le, est une République et ne saurait être le bien privé d’aucune congrégation, le jardin hérité d’individus qui peuvent croire qu’il serait devenu le leur pour prétendre en disposer à leur guise, le préparant à une oligarchie rampante que l’on voyait venir depuis des années. Dès lors, pour Mohamed Bazoum qui aspire à rentrer dans l’histoire par la grande porte et en sortir par la même, il y a à ne plus confondre l’amitié à l’Etat, les intérêts partisans aux intérêts supérieurs de la nation, la seule cause que son rôle l’appelle à défendre désormais. Il a sans doute lu Antigone de Jean Anouilh où Créon, face à l’entêtement de sa nièce, Antigone, qui est aussi sa belle-fille qui se refuse à respecter ses directives, et donc la loi, n’eut plus d’Etat d’âme à appliquer contre elle, pour faire triompher la raison d’Etat, la sanction prévue contre tout contrevenant qui donnerait une sépulture à l’un des deux frères d’Antigone qui s’entretuaient pour le trône de Thèbes. Comme quoi la loi est d’abord faite aux enfants des rois !

L’homme, du reste, est philosophe, il connait les rigueurs de la politique qui ne donnent souvent que des choix difficiles selon ce qu’on voudrait pour soimême : exister ou ne pas exister.

Bazoum ne peut pas tenir dans ce climat pendant quatre années supplémentaires : lui seul a les armes pour trancher le débat, dénouer une crise qui ne peut durer plus longtemps. Mais en a-t-il les moyens ? Les prochains jours pourront nous en édifier.

Il y a des moments où, dans une vie, l’on n’hésite pas à lever du poing. Ça s’appelle de la responsabilité !

Mairiga
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