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Le malaise du président Bazoum à l’approche de sa deuxième année de mandat

Publié le lundi 6 mars 2023  |  nigerdiaspora.net
Cérémonie
© Présidence par DR
Cérémonie officielle d’ouverture de la 9ème Session du Forum Régional Africain sur le Développement Durable (FRADD).
Mardi matin 28 février 2023 : Le Chef de l’Etat, SEM Mohamed Bazoum a présidé la cérémonie officielle d’ouverture de la 9ème Session du Forum Régional Africain sur le Développement Durable (FRADD).
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Dans un mois, plaise à Dieu, le président Mohamed Bazoum aura bouclé deux années de présidence du Niger ! C’est presque un mi mandat de cinq ans. En termes plus prosaïques, c’est la moitié du parcours à faire pour l’élu dans l’accomplissement de son programme politique sur la base duquel il avait sollicité et obtenu le suffrage du peuple. C’est dire que c’est, là, sans doute, un moment-charnière de cette présidence qui n’aura pas pris encore toute la place qui lui revenait de droit. Cela, pour la raison toute simple et évidente que cette présidence semble fondée sur un malentendu, un quiproquo sibyllin, entre continuité et rupture avec la gestion antérieure, celle du régime de la renaissance Acte I et II d’un certain Issoufou Mahamadou. En effet, quoi que l’on en ait dit et pensé, le choix de la candidature de Mohamed Bazoum était davantage une oeuvre de l’ex-président de la République, contraint de quitter le pouvoir, car au terme de ses deux mandats constitutionnels.

Issoufou Mahamadou savait pertinemment que l’option d’un troisième mandat était périlleuse dans ce Niger contemporain, le ‘’Tazartché’’ d’un certain Mamadou Tandja étant encore dans le rétroviseur. Alors, que faire ? Sans doute, assurer les arrières, après la calamiteuse gestion ayant caractérisé ses deux quinquennats passés à la tête du pays ! A la place d’une alternance politique crédible qui aurait paru risquée pour sa tranquillité future, l’homme de Dandadji avait opté pour une succession en douceur, mieux une gestion d’affaires comme l’on dirait dans la théorie des quasi-contrats. Même à l’intérieur du Parti Nigérien pour le Socialisme et la Démocratie (PNDSTarayya), il n’avait voulu prendre aucun risque en portant son dévolu sur Mohamed Bazoum qui était loin de faire l’unanimité, à l’époque, au sein de l’appareil du parti, malgré son statut de président de cette formation politique.

C’était un choix bien pensé, mieux, calculé, comptant, probablement, sur la naïveté apparente de l’homme de Tesker dont il connaissait le sens de la fidélité en politique et en amitié. Il était alors convaincu que seul Mohamed Bazoum pouvait lui garantir une issue meilleure, une retraite paisible et une mainmise permanente sur la gestion future du pays, du fait sans doute de l’immense dette de son successeur à son égard.

En considération de tout cela, Issoufou avait bâti sa succession politique sur cette garantie sécuritaire que pouvait représenter l’élection à la présidence de la République du Niger. Aujourd’hui, près de deux ans après sa prestation de serment, le Président Bazoum peine toujours à trouver ses marques, à imprimer son style sur la gouvernance politique nationale. En effet, écartelé entre son obligation morale de protéger les arrières de son prédécesseur et son serment coranique de gouverner le Niger dans la justice et l’équité, le locataire actuel de la Présidence souffre le martyr politique de faire du surplace, un pas en avant, deux pas en arrière. Il avait promis aux nigériens de mener un combat farouche contre la corruption et la mauvaise gouvernance dans le pays. Mais, à l’épreuve du pouvoir, force est de constater que ce chantier prioritaire tarde encore à se matérialiser, du fait sans doute de la non rupture du cordon ombilical avec l’ordre politique antérieur qu’il s’agissait, pourtant, de revisiter pour redresser les innombrables torts causés aux finances publiques entre 2011 et 2021. Voilà, en réalité, toute la source du dilemme politique actuel, mieux de la contrariété qui semble plomber le présent mandat présidentiel, cette indicible impression de vouloir ménager, à la fois, la chèvre et le chou.

Le malentendu serait, peut-être, parti du fait que dans l’entendement d’Issoufou Mahamadou, le règne de Bazoum ne devrait signifier, ni plus, ni moins qu’une continuité d’avec ce qui avait précédé, comme le laissait entendre, d’ailleurs, le slogan de campagne du candidat Bazoum, «Consolider et avancer». Cela devrait signifier, en termes plus clairs, que le quinquennat actuel ne serait que, en quelque sorte, un ‘’troisième mandat’’ d’Issoufou Mahamadou, à défaut d’un vrai troisième mandat présidentiel devenu impossible du point de vue constitutionnel. Or, visiblement, le président Bazoum ne semblerait pas avoir bien compris le message ultime de son prédécesseur qui n’attendrait pas de lui autre chose que de continuer à couvrir toute la gestion politique antérieure, jugée ‘’irréprochable’’ par les partisans du ‘’Guri système’’. Et c’est à ce niveau que les choses coincent, «que le vieux n’arrive pas à mourir pour que le neuf puisse naître», pour paraphraser le grand philosophe italien du début du 20e siècle, Gramsci. C’est certainement de cette contradiction aporétique que proviendrait tout le spleen actuel du Président Bazoum qui risquerait de boucler son deuxième anniversaire de présidence bredouille, sans bilan réel, à part quelques voyages devenus un peu des occasions pour lui d’échapper à la solitude d’un pouvoir désincarné. Devenu ainsi l’otage du système politique contre lequel il désirerait ferrailler dans le cadre de l’assainissement et de la moralisation de la vie publique nationale qu’il entendrait engager et intensifier, il patauge, aujourd’hui, et perd de plus en plus le Nord en décidant de rester, volontiers, prisonnier d’une simple ‘’obligation naturelle’’. C’est pourquoi de nombreux observateurs de la vie politique nigérienne restent éternellement sceptiques et mesurés par rapport à la volonté du président Bazoum de remplir pleinement sa mission à la tête du pays. Les périls sécuritaires grandissants, les difficultés économiques se complexifiant de jour en jour, tandis que la paupérisation gagnant les classes moyennes, le Niger du président Bazoum inquiète et interroge aujourd’hui. Aujourd’hui, l’on a beau aimer le Président Mohamed Bazoum, lui trouver des excuses dans la situation actuelle du pays, l’on ne saurait, en revanche, lui enlever toutes responsabilités dans le chaos national actuel, à cause sans doute de ses hésitations, atermoiements et autres improvisations actuels qui l’empêcheraient de donner plus de relief à sa présidence. Alors, volontairement, il aurait choisi de souffrir, de se meurtrir inutilement pour tenter de mener une oeuvre impossible à réaliser concrètement, sur le terrain. Il ferait ainsi pitié pour ce rôle ingrat qu’il devrait assumer afin de rester tranquille avec sa conscience. Cela s’appelle du masochisme à l’état pur, une pulsion suicidaire à laquelle sont en proie certains individus atteints de troubles de la personnalité. Or, la politique, la vraie, ne s’encombre guère souvent de ce genre de scrupules moraux, molasses même, mais suppose, bien de fois, d’emprunter la voie du cynisme, du sadisme, inhérente à l’essence même du pouvoir dans toutes ses manifestations humaines. Hélas, pour le président Bazoum Mohamed qui devrait grandir, s’il aspirait, réellement, à la grandeur ! Faute de quoi, il aurait été un simple régent en lieu et place d’un Président de la République !

Aliou Badara
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