Du stade d’impression au départ, la situation critique du pays est passée aujourd’hui à celui de constat largement partagé, constat qui s’en moquerait éperdument des chiffres statistiques produits par le gouvernement d’Ouhoumoudou Mahamadou. Eh oui, le Niger de Mohamed Bazoum va mal, très mal même ! Casser le thermomètre pour tenter de faire baisser la température ne mettra point fin à la fièvre, comme l’on dit souvent ! En effet, il serait difficile, dans un court article de presse, de disserter en profondeur sur la situation générale du pays. Pour faire court, l’état général actuel du pays illustre parfaitement les difficultés pour le Président Bazoum d’incarner une rupture véritable avec l’ancien ordre représenté par Issoufou Mahamadou et son clan politique, son ancien mentor politique ! Plus le temps passe, plus le rêve de voir refermer cet ancien ordre s’éloigne de l’horizon, ruinant ainsi la grande espérance populaire pour un Niger débarrassé de l’injustice, de la corruption et des passedroits. A défaut d’une alternance politique pacifique, pour laquelle, du reste, le président sortant, Issoufou Mahamadou, n’avait jamais oeuvré pour les raisons évidentes que l’on sait, beaucoup de Nigériens avaient osé, néanmoins, nourrir quelques minces et vains espoirs de voir la page d’Issoufou Mahamadou se clore à jamais, dans l’indifférence générale, dans l’anonymat total, de n’être qu’un simple accident de parcours de l’Histoire politique du Niger contemporain. C’était le Bazoum populaire du début du quinquennat, dont l’humilité et la simplicité montrées dans l’exercice du pouvoir suprême auront fini par lui attirer beaucoup de sympathie de la part des habitants de la capitale, généralement hostiles au Pnds-Tarayya. La sobriété de son cortège officiel contrastait fortement avec celui de son prédécesseur qui nuisait profondément à la liberté de mouvements des citoyens. On raconte, à cet égard, une anecdote relative au retour d’un de ses déplacements à l’extérieur, en retardant le départ de son cortège afin de ne pas bloquer la circulation aux citadins jeûneurs, à quelques instants de la rupture. C’était inédit et très classe. Cependant, du temps d’Issoufou Mahamadou, dans l’Administration publique, les abus commis dans le déploiement de ce cortège avaient fini, un moment, par être, pour certains esprits malins du service public un prétexte de s’absenter de leur lieu de travail, en se justifiant, le lendemain, d’avoir été bloqués durant des heures par le passage du PR. Qui, objectivement, au Niger, peut-il soutenir n’avoir jamais été victime de cette situation de fait ?
Voilà pourquoi cet allégement apporté au dispositif sécuritaire du cortège présidentiel avait été très bien accueilli par les habitants de Niamey qui pouvaient pousser un gros ouf de soulagement, pendant que les riverains de la Corniche de Kombo devaient, désormais, apprendre à vivre avec un voisin ‘’encombrant’’, manifestement !
Le président Mohamed Bazoum avait aussi marqué les esprits, au départ, par l’austérité déployée dans l’organisation matérielle et financière de ses déplacements à l’extérieur, en réduisant la délégation officielle qui l’accompagnait, épargnant ainsi aux finances publiques de frais de missions coûteux et inutiles. C’était également le Bazoum qui prenait le métro parisien pour se rendre à Bruxelles, seul, sans garde rapprochée visible et ostentatoire, acte salué, à l’époque, en Afrique et ailleurs. C’était aussi le président Bazoum qui recevait, en son Palais de la Présidence, les représentants des corps intermédiaires de l’Etat (Associations syndicales et ordres professionnels), afin d’échanger avec ceux-ci sur les difficultés rencontrées par leurs secteurs d’activités respectifs et les pistes de solutions consensuelles.
Aujourd’hui, hélas, ce Bazoum prometteur se sera volatilisé dans la nature, pour ne pas dire, tout simplement, qu’il se sera noyé dans les grandes eaux profondes à alligators que charrie ‘’l’issoufisme’’ ! En plus de deux ans d’exercice du pouvoir, il semble toujours dilettante politique, bonasse quelques fois et très souvent naïf, incapable d’impulser une dynamique à son action politique, toujours dans l’expectative mais jamais dans l’action, même pas dans la réaction. Aucun fil directeur ne semble commander la présidence actuelle de Bazoum, à cause sans doute de l’immobilisme congénital qui caractérise le régime dans son ensemble. Cette inertie est sans doute due à la difficulté pour Bazoum de se libérer des chaînes de la soumission à l’ordre ancien. Alors, plus le temps s’égrène inexorablement, plus les choses se préciseront dans leur objectivité ontologique pour en arriver à la conclusion regrettable que le président Bazoum n’est qu’un lieutenant en fonction pour garder un foyer politique qui s’alimente de la seule volonté d’un homme, à savoir Issoufou Mahamadou. D’ailleurs, en auraitil été autrement, lorsque l’on sait toute la dette de Bazoum à l’égard de son mentor politique ? Luimême, Bazoum, ne confessait-il pas, au cours d’un entretien dans ‘’Jeune Afrique’’, qu’il n’ambitionnait pas de se lancer à la conquête du pouvoir suprême, parce qu’il était issu d’une communauté nationale minoritaire dans le pays ? Contre son propre pessimisme, il avait été réconforté par Issoufou Mahamadou dans cette aventure. Issoufou Mahamadou avait réussi à imposer ce choix au parti, en y matant toutes velléités de rébellion, dussent-elles provenir de l’un ses plus grands et fidèles lieutenants politiques, à savoir Hassoumi Massaoudou. Ensuite, il créa toutes les conditions possibles pour faire accepter cette candidature controversée par les instances habilitées, à savoir la Cour Constitutionnelle. Enfin, il mit en place une Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) acquise à sa cause. A l’arrivée, c’est lui parvint à installer au pouvoir le dauphin qu’il se sera choisi, sans demander l’avis de personne au sein du parti. Et cela, Bazoum devrait le savoir plus que n’importe qui au Niger, et par conséquent, il devrait faire attention là où il mettrait le pied. Très vite, Mohame Bazoum a eut une belle remontée de bretelles de la part du ‘’Boss’’ qui n’aurait pas beaucoup apprécié certaines libertés prises par le dauphin, qui semblaient contredire l’héritage de l’ex-patron. Depuis lors, l’étau ne faisait que se resserrer autour de Bazoum pour le ramener au respect du vrai pacte conclu avec son prédécesseur, qui était de garder la ‘’Maison rose’’ intacte, sans y enlever ou y mettre quoi que ce soit. Et cela, Bazoum l’a bien compris, apparemment, et dès lors, tout est désormais rentré dans l’ordre. Et tant pis pour les rêveurs politiques qui prennent, souvent, leurs fantasmes pour la réalité, car la révolte de Bazoum contre Issoufou tant fantasmée n’est pas pour demain, apparemment. Ils devront encore patienter pour cela ou se résoudre à admettre une fois pour toutes que ‘’l’arbre ne saurait se séparer de son écorce’’, comme enseigne un proverbe populaire !