Dans un entretien qu’il a accordé aux médias nationaux et qui a été diffusé dans la soirée du samedi 3 août 2023, le Président algérien a réaffirmé la position de son pays, voisin du Niger et puissance militaire continentale, à la situation politique qui prévaut au Niger avec la prise de pouvoir par les militaires du CNSP et les menaces d’intervention militaire de la Cédéao pour restaurer l’ordre constitutionnel. Dans cet entretien, Abdelmadjid Tebboune, a certes réitéré l’impératif de « rétablir la légitimité constitutionnelle au Niger » mais il a aussi clairement fait savoir « son rejet total et catégorique de toute intervention militaire ». Des positions que les autorités algériennes ont déjà clairement notifié à l’UE et surtout à la Cédéao, qui ont tenté de rallier Alger à leur cause. Pour l’Algérie, en effet, toute intervention militaire au Niger constituerait « une menace directe » pour leur pays.
Dans son entrevue périodique avec des représentants de médias nationaux, diffusée samedi soir sur les chaines de télévision et stations de radio nationales, le Président de la République a indiqué que « l’Algérie est pour le retour à la légitimité constitutionnelle au Niger, tout comme elle est prête à aider les Nigériens dans la mesure du possible, s’ils en expriment le besoin, pour resserrer leurs rangs ». Selon l’Agence de presse officielle (APS), le chef de l’Etat a aussi affirmé « son rejet total et catégorique de toute intervention militaire dans ce pays ». Dans ce cadre, rapporte la même source, il a mis en garde contre toute intervention militaire qui ne ferait qu'exacerber la situation, à l'image de ce qui s’est passé en Libye et en Syrie, où « des problèmes persistent et les situations sont de plus en plus complexes ».
Selon le Président Tebboune, « l’intervention militaire n'a jamais réglé aucun problème et les choses ne se règlent que par la logique ». Il a en ce sens mis de nouveau en garde contre toute action qui ne ferait qu’ « enflammer la région du Sahel tout entière ».
L’Algérie est un pays voisin du Niger avec qui le pays partage près d’un millier de kilomètres de frontières, ce qui fait que toute dégradation de la situation sécuritaire dans son voisin du sur pourrait menacée la partie sud du pays. Toutefois, le Chef de l’Etat algérien a tenu à rassurer que « l'Algérie est capable de faire face à cette situation grave, forte de son Armée puissante, qui est aux aguets de quiconque s'approcherait de ses frontières ».
Sur la situation politique au Niger, Abdelmadjid Tebboune a rappelé le principe de non ingérence dans les affaires intérieures des autres pays, adopté par l'Algérie. Il a toutefois martelé « qu'il n'y aura aucune solution sans nous [l'Algérie]. Nous sommes les premiers concernés ».
L’Algérie donne la priorité à la voie politique et diplomatique
Il convient de rappeler qu’au lendemain des évènements du 26 juillet 2023, l’Algérie avait déjà exprimé sa condamnation de principe de la rupture de l’ordre constitutionnel. Suite aux sanctions décidées par certaines institutions et partenaires notamment l’UE et surtout la Cédéao, les autorités algériennes ont été à nouveau sollicitées pour appuyer leur mise en œuvre dont celle de la Cédéao relative à l’usage de la force pour restaurer la légalité constitutionnel en cas de refus de la junte militaire de rétablir le Président déchu Bazoum Mohamed dans ses fonctions. Ce à quoi l’Algérie s’oppose mettant en avant plusieurs arguments stratégiques.
En ce sens, rien qu’hier samedi, le Haut représentant de l'Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, Josep Borrell, s’est entretenu au téléphone avec le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger, M. Ahmed Attaf. Selon un communiqué publié par les services du ministère alégrien, l'entretien téléphonique a porté sur « les développements inquiétants en République du Niger ». Et selon la même source, à cette occasion, Josep Borrell a informé M. Attaf, « des mesures décidées par l'UE contre les auteurs du coup d'état au Niger ». D’après le communiqué, les deux responsables ont souligné « la nécessité d'œuvrer de concert afin d'exercer des pressions politiques et diplomatiques pour assurer le retour à l'ordre constitutionnel en République du Niger à travers le rétablissement de M. Mohamed Bazoum dans son poste de Président légitimement élu de ce pays ». De son coté, a précisé le document, le ministre Ahmed Attaf a réaffirmé « la conviction de l'Algérie quant à la nécessité de prioriser le processus politique et diplomatique, au vu des répercussions de l'option du recours à la force sur la situation qui risque de s'aggraver davantage aux niveaux local et régional ».
En milieu de semaine, c’est un émissaire du Président Ahmed Bola Tinubu du Nigeria et de la Cédéao qui a été dépêché à Alger pour plaider la cause de l’organisation auprès des autorités algériennes.
L’émissaire Baba Gana Kingibe a également été reçu, au nom du Président Tebboune, par le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger, M. Ahmed Attaf, a qui il a remis un message écrit et adressé au président de la République algérienne par son homologue nigérian, Bola Ahmed Tinubu, en sa qualité de président en exercice de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao). Au cours de cette visite qui s'inscrit dans le cadre de « l'échange de vues et la concertation autour des développements de la situation en République du Niger », M. Attaf a réaffirmé, dans ce sens, « la position de l'Algérie qui rejette le coup d'Etat militaire contre le président légitimement élu dans ce pays frère et voisin, et appelle à son retour à son poste constitutionnel, en sa qualité de président de la République du Niger ». Selon également le communiqué publié par les services du ministère et rapporté par l’APS, le ministre des Affaires étrangères a souligné « la nécessité d'activer toutes les voies et moyens diplomatiques et pacifiques, pour éviter le choix du recours à la force qui ne ferait qu'exacerber la situation pour le Niger et la région toute entière ».