Après une première tentative avortée le 3 août dernier, une délégation d’émissaires de la Cédéao est arrivée samedi après-midi à Niamey où elle s’est entretenue avec le Président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), le général Abdourahamane Tiani ainsi que l’ancien chef de l’Etat Bazoum Mohamed. Au menu, poser les jalons d’une médiation de sortie de crise à la situation politique que traverse le pays depuis le 26 juillet dernier. Dans un message à la nation qu’il a prononcé par la suite, le patron de la junte militaire a annoncé la disponibilité de la junte au dialogue ainsi que la convocation d’un dialogue inclusif pour décider de la suite de la transition.
Conduite par l’ancien chef d’Etat du Nigéria, le général Abdulsalami Abubakar, la délégation qui était composée du Président de la Commission de la CEDEAO, Omar Alieu Touray, et du sultan de Sokoto Muhammadu Sa’adu Abubakar, a été accueillie à l’aéroport international Diori Hamani de Niamey par le Premier ministre de Transition, Ali Mahaman Lamine Zeine ainsi que des membres du CNSP et du gouvernement de transition.
Elle a été par la suite reçue par le Président de la junte militaire, le général de Brigade Abdourahamane Tiani au Palais de la présidence, avec qui elle a eu une séance de travail avant d’être reçue par la suite, à la résidence présidentielle par l’ancien chef de l’Etat Bazoum Mohamed, avec qui elle a également eu des échanges.
Aucune déclaration officielle n’a été faite à la fin de la visite par le médiateur de la Cédéao, Abdulsalami Abubakar, ainsi que les membres de la délégation qui l’accompagnent. L’ancien chef de l’Etat nigérian s’est borné à déclarer à la presse qu’il rendra compte des échanges qu’il a eu avec les autorités nigériennes, aux dirigeants de l’organisation communautaire.
Il convient de rappeler que c’est le premier contact officiel entre les émissaires de la Cédéao et le président de la junte militaire qui a pris le pouvoir le 26 juillet dernier. Le 3 août dernier, la même délégation était à Niamey mais elle n'avait pu rencontrer ni le nouvel homme fort du Niger, le général Abdourahamane Tiani, ni le président renversé Bazoum Mohamed.
Depuis, et en dépit des sanctions et des menaces de recourir à la force par les dirigeants de la Cédéao, des négociations ont été menées en coulisses par des leaders religieux du Niger et surtout du Nigéria, pour enclencher une médiation de sortie à la crise qui prévaut au Niger.
Des appels ont également été lancés par des personnalités et d’institutions du monde entier sur la situation de l’ancien président qui est retenu depuis le coup d’Etat par les militaires au sein de la résidence présidentielle, avec sa femme et son fils.
Dialogue inclusif sur la transition
La rencontre entre les nouvelles autorités de Niamey et la délégation des médiateurs de la Cédéao intervient au lendemain d’une réunion stratégique, à Accra, au Ghana, du Comité des chefs d’Etat-major des pays membres afin de planifier une opération militaire au Niger en vue de restaurer l’ordre constitutionnel au Niger en cas d’échec de la diplomatie. Une rencontre qui s’inscrit dans le cadre des décisions prises par les Chefs d’Etat de l’organisation communautaire lors de leur sommet extraordinaire du 10 août 2023 à Abuja, au Nigeria.
Dans un message à la nation qu’il a adressé dans la soirée du samedi 19 août, le général Abdourahamane Tiani, qui a dénoncé les sanctions de la Cédéao, a déclaré que « toute intervention militaire sera considérée comme une occupation ».
« Nous ferons tout ce qui est nécessaire et répondrons à toute attaque contre nous. Nous avons le soutien du peuple et de nombreux pays voisins », a indiqué le nouvel homme fort du Niger qui a souligné que l’ambition du CNSP n’est pas « de confisquer le pouvoir ». Il a réaffirmé la disponibilité de la junte à tout dialogue « pour autant qu'il tienne compte des orientations voulues par le peuple nigérien fier et résilient ».
« À la vérité, la prise de pouvoir par les forces de défense et de sécurité, aussitôt fermement soutenue par nos vaillantes populations s'inscrit dans un contexte de rejet du modèle sécuritaire et de mauvaise gouvernance faites d'injustice, de corruption mise en œuvre par des régimes qui se prétendent démocratiques, mais qui en réalité dévoient et discréditent la démocratie », a aussi martelé l’ancien patron de la garde présidentielle du Niger qui, dans son allocution télévisée, a annoncé la convocation prochaine d’un « dialogue inclusif » qui va déterminer les grandes orientations d’une transition dont la durée ne saurait excéder trois (3) ans.