L’opération de retrait des soldats américains du Niger se terminera d’ici mi-septembre et le processus se fera dans « le respect mutuel et la transparence », ont annoncé, dans un communiqué conjoint signé ce dimanche 19 mai 2024, les représentants du Ministère nigérien de la Défense et leurs homologues du Département américain. L’annonce fait suite aux négociations entamées entre Niamey et Washington suite à la dénonciation par les autorités militaires nigériennes, mi-mars dernier, de l’accord militaire de 2012 entre les deux pays.
Dans le communiqué conjoint signé ce dimanche 19 mai 2024 par le ministre d’Etat en charge de la Défense, le Général de corps d’Armée Salifou MODY, pour la partie nigérienne et pour la partie américaine par le Sous-secrétaire à la Défense pour les Opérations spéciales et les Conflits de faible intensité, M. Christopher MAIER, il est indiqué que les représentants du Ministère de la Défense Nationale de la République du Niger et du Département de la Défense des États-Unis se sont réunis, du 15 au 19 mai 2024, à Niamey, en République du Niger, dans le cadre d'une Commission Mixte de Désengagement, « pour coordonner le retrait en bon ordre et en toute sécurité des forces américaines du Niger ». Selon le communiqué, « ces discussions entre militaires ont été conduites en toute transparence et avec un parfait respect mutuel entre les deux Parties ». Et de préciser que la délégation du Ministère de la Défense nationale du Niger a été conduite par le Chef d'Etat-major de l'Armée de Terre, le Colonel-Major Mamane Sani Kiaou alors que la délégation du Département de la Défense des États-Unis a été conduite par le Sous-secrétaire à la Défense pour les Opérations spéciales et les Conflits de Faible Intensité, M. Christopher Maier, ainsi que par le Directeur du Développement des Forces conjointes au sein de l'Etat-major Interarmées, le Général de Corps d'Armée aérienne Dagvin Anderson.
« Le Ministère de la Défense Nationale du Niger et le Département de la Défense des États-Unis ont trouvé un accord de désengagement pour effectuer le retrait des forces américaines, qui a déjà commencé. Il est ainsi convenu que ce désengagement se terminera au plus tard le 15 septembre 2024. Les deux délégations ont confirmé les garanties de protection et de sécurité aux forces américaines durant leur retrait. Les délégations ont également établi des procédures pour faciliter l'entrée et la sortie du personnel américain, y compris les autorisations de survol et d'atterrissage pour les vols militaires »
Dans le document, le Ministère de la Défense Nationale du Niger et le Département de la Défense des États-Unis ont tenu à rappeler, « les sacrifices communs des forces nigériennes et américaines dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et se félicitent des efforts mutuels consentis dans la montée en puissance des forces armées nigériennes ». Les deux parties se sont également engagées à «poursuivre la coopération dans les domaines d'intérêts communs ». En ce sens, est-il souligné dans le communiqué conjoint, « le retrait des forces américaines du Niger n'entache en rien la poursuite des relations entre les Etats- Unis et le Niger dans le domaine du développement ». Aussi, « le Niger et les Etats-Unis s'engagent à un dialogue diplomatique continu pour définir l'avenir de leurs relations bilatérales », lit-on en conclusion dans le communiqué.
Après les soldats français, les soldats américains vont quitter le Niger
Ainsi donc, après les soldats français de la Force barkhane fin décembre dernier, c’est au tour des troupes américaines stationnés au Niger de plier bagages conformément à la décision des nouvelles autorités militaires du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP). On se rappelle que dans un communiqué publié le 16 mars dernier par leur porte-parole, le colonel-major Amadou Abdourahamane Djibo, les autorités de transition affirmant prendre en compte « les aspirations et les intérêts de son peuple » avaient décidé « en toute responsabilité de dénoncer avec effet immédiat l’accord relatif au statut du personnel militaire des Etats-Unis et des employés civils du département américain de la Défense sur le territoire du Niger ». Selon les autorités de transition, la présence militaire américaine est « illégale » et « viole toutes les règles constitutionnelles et démocratiques » estimant que l’accord « injuste » a été « imposé unilatéralement » par les Etats-Unis au Niger, via une « simple note verbale », le 6 juillet 2012. La décision est intervenue après une visite « mouvementée » de trois jours d’une délégation américaine menée par la secrétaire d’Etat adjointe aux Affaires africaines, Molly Phee. Une visite au cours de laquelle les échanges avec la partie américaine n’ont pas été du goût des autorités de Niamey à en croire la décision qui a suivie ainsi que les déclarations faites par la suite par les officiels nigériens dans plusieurs médias et à l’occasion de sorties publiques.
Les Etats-Unis comptent quelque 1.100 soldats stationnés au Niger dans le cadre de la lutte contre le terrorisme notamment sur la base de drones d’Agadez, dans le nord du pays. Au lendemain du coup d’Etat du 26 juillet 2023 qui a renversé l’ancien président Mohamed Bazoum, Washington avait suspendu provisoirement sa coopération avec le Niger avant par la suite de se raviser et de reconnaitre les nouvelles autorités militaires. En décembre, les Etats-Unis se sont même dit à reprendre cette coopération, certes sous conditions. Ils ont en ce sens mené un intense lobbying au niveau de la Cédéao pour la levée des sanctions imposées au Niger et l’ouverture des négociations avec Niamey pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel dans le pays. Cependant, les autorités militaires de transition n’ont pas vraiment apprécié les injonctions de l’Oncle Sam sur la conduite de la transition ainsi que certaines orientations stratégiques prises par le nouveau régime militaire notamment son rapprochement avec Moscou et Téhéran. « Une attitude condescendante » décriée par Niamey et qui a été la goutte d’eau de trop qui a accéléré le divorce avec Washington même si les deux pays ont fait part de leur engagement à poser les jalons d’une nouvelle coopération qui tient compte des intérêts de chaque Etat. Il importe de souligner que malgré ce divorce sur le plan militaire, les Etats-Unis ont décidé de maintenir leur coopération en matière humanitaire et de développement avec notamment la poursuite et le renforcement de plusieurs programmes et projets financés par l’USAID au profit des populations.