Modification de la loi sur la cybercriminalité au Niger : RSF alerte sur les risques pour les journalistesLa récente modification de la loi sur la cybercriminalité au Niger, signée par le général Abdourahamane Tiani, suscite de vives inquiétudes parmi les défenseurs de la liberté de la presse. Reporters sans frontières (RSF) a tiré la sonnette d'alarme, soulignant que cette législation pourrait être utilisée pour emprisonner et censurer les journalistes en ligne. L'organisation appelle à l'abrogation immédiate de cette ordonnance.
Le 7 juin, le général Tiani, au pouvoir depuis le coup d’État de juillet 2023, a modifié trois articles de la loi de 2019 sur la répression de la cybercriminalité. Ces modifications rétablissent les peines d’emprisonnement pour des infractions telles que la “diffamation”, les “injures” et la “diffusion de données de nature à troubler l’ordre public ou à porter atteinte à la dignité humaine” lorsque ces actes sont commis en ligne. Ces peines avaient été supprimées en 2022.
Cette nouvelle ordonnance marque un retour en arrière inquiétant pour la liberté de la presse au Niger, où les peines privatives de liberté pour les délits de presse avaient été abolies avec l'adoption du Code de la presse en 2010. Désormais, un journaliste pourra être traité comme un simple citoyen dès lors que ses propos sont publiés en ligne, ce qui donne aux autorités judiciaires une marge de manœuvre considérable pour poursuivre les journalistes critiques.
Particulièrement préoccupant, l’article 31, modifié par l'ordonnance, stipule que la diffusion de données de nature à troubler l’ordre public ou à porter atteinte à la dignité humaine sera punie “même lorsque les données produites et diffusées sont avérées”. Cela signifie qu'un article journalistique, même véridique, pourrait être incriminé sous cette disposition.
Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF, a dénoncé ces mesures. "Alors que la liberté de la presse est déjà mise à rude épreuve au Niger, les autorités militaires ont décidé d'accentuer leur pression sur les journalistes en rétablissant les peines d'emprisonnement et de lourdes amendes pour des délits liés à la cybercriminalité, couvrant un grand nombre de charges pouvant être utilisées contre les professionnels de l’information. Ces dispositions liberticides confirment un grave recul de la liberté de la presse et illustrent jusqu'où la junte est disposée à aller dans l’instrumentalisation du droit pour réprimer les médias. RSF appelle à l’abrogation de cette ordonnance liberticide."