Lors d'un point de presse tenu ce jeudi, Madame Seidou Zeinabou A. Douka, Directrice Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique, a dévoilé les résultats détaillés des opérations de contrôle effectuées sur les paiements des pensions des fonctionnaires retraités pour les mois de juillet et août 2024.
La mission d'assainissement du fichier des pensionnés, visant à garantir la transparence et le contrôle de l'enveloppe budgétaire dédiée, a permis de détecter de nombreuses irrégularités, notamment des doublons, des pensionnés absents ou décédés, ainsi que des cartes bancaires désactivées. Ces anomalies, représentant 3 113 cas en situation irrégulière, engendrent un manque à gagner mensuel de 540 999 533 FCFA pour l'État, soulignant l'urgence d'un assainissement en profondeur.
Lors de cette rencontre, Madame Douka a salué l’importance de ces travaux pour garantir la régularité des paiements des pensions et assurer la gestion rigoureuse des fonds publics. Elle a souligné que ces contrôles s'inscrivent dans le cadre des réformes du système de retraite entamées depuis 2012, avec une attention particulière portée sur la mise en œuvre des nouvelles modalités de paiement, dont la mensualisation introduite en 2023.
Ces travaux ont été réalisés par un comité Ad hoc mis en place spécifiquement pour examiner les dossiers de pension, afin de corriger des anomalies et de renforcer la transparence dans la gestion des finances publiques. Les résultats des récentes vérifications effectuées par le Comité Ad ’hoc soulignent la nécessité d'une gestion plus rigoureuse des fonds publics et d'une transparence accrue dans le traitement des pensions des fonctionnaires retraités.
Des réformes importantes dans la gestion des pensions
Depuis 2012, le Niger a entrepris une série de réformes majeures dans la gestion des pensions des fonctionnaires de l'État. Ces réformes ont été consacrées par plusieurs textes législatifs, dont la loi n°2012-069 du 31 décembre 2012, et plus récemment la loi n°2020-020 bis du 03 juin 2020, ainsi que le décret n°2022-745 du 29 septembre 2022 qui régit le régime des retraites des fonctionnaires. Ce cadre législatif a permis la mise en place d'une procédure de paiement mensuel des pensions, qui a toutefois révélé plusieurs difficultés d'exécution, notamment une augmentation inexpliquée de la masse des pensions.
Le phénomène de l’explosion des dépenses liées aux pensions des retraités a pris de l'ampleur à partir de 2023, avec la mise en œuvre du paiement mensuel. En effet, en 2022, avec le paiement trimestriel, l'État dépensait environ 7,7 milliards de FCFA pour les pensions sur une période de trois mois. En 2023, ce montant est passé à 12,8 milliards de FCFA, et en 2024, l'État continue de décaisser environ 11,4 milliards de FCFA pour les pensions sur une période de trois mois, malgré l'absence de nouveaux retraités suite au rehaussement de l'âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans.
Afin de comprendre cette augmentation, le comité Ad hoc a procédé à une série de contrôles minutieux, incluant une relecture des textes régissant les pensions, ainsi qu'une vérification approfondie des pièces justificatives et un contrôle physique des pensionnés.
Les Résultats du contrôle
Le Comité Ad 'hoc, mis en place pour auditer et vérifier les dossiers des retraités, a mené deux types d'opérations de contrôle : l'examen des pièces justificatives et un contrôle physique des pensionnés. Ces démarches ont permis de relever plusieurs anomalies ayant un impact direct sur la masse des pensions.
L'une des principales conclusions du contrôle est un manquement lié à l'application du décret n° 2008-201/PRN/MFP/T/ME/F du 26 juin 2008. Une mauvaise interprétation de ce texte a causé un manque à gagner mensuel de 301 893 333 FCFA, soit un total de 5,43 milliards de FCFA pour la période de janvier 2023 à juin 2024.
Le contrôle des pièces justificatives a également permis de détecter 11 cas de doublons, où un même retraité percevait plusieurs pensions, entraînant une fraude de 20 641 200 FCFA. De plus, 585 pensionnés ont vu leurs cartes bancaires rechargeables désactivées en raison de leur non-conformité, entraînant une économie de 79 871 800 FCFA.
L'opération spéciale de paiement par « billetage » des pensions pour août 2024 a révélé des irrégularités concernant les décédés et les absents. En effet, 172 pensionnés décédés ont continué de percevoir leurs pensions, représentant une fraude de 10 465 500 FCFA. En outre, 2 517 pensionnés ne se sont pas présentés lors des contrôles physiques, entraînant une incidence financière de 138 593 200 FCFA.
L'impact sur les finances publiques : 540 millions de F CFA par mois
Au total, les opérations de contrôle ont permis de détecter une irrégularité cumulée s'élevant à 540 999 533 F CFA par mois. 3 113 cas de pensionnés en situation irrégulière ont été détectés, ce qui représente une incidence financière de 540 999 533 FCFA par mois. Ce chiffre reflète l'ampleur de la tâche et l'importance de la mise en œuvre des réformes pour garantir une gestion plus transparente et plus efficace des ressources publiques. « Ce travail d’expertise a permis d’obtenir les effectifs réels des fonctionnaires à la retraite, mais également de garantir une gestion plus rigoureuse des deniers publics », a précisé la Directrice Générale. Ces résultats ont permis à la DGT/CP d’assainir le fichier des pensionnés et de suspendre les paiements pour ces cas irréguliers lors des prochaines échéances.
Madame Douka a précisé que ces mesures d’assainissement sont essentielles pour maintenir la régularité des paiements et préserver l’intégrité du système de retraites. Grâce à ces efforts, une économie substantielle a été réalisée, et l’Etat pourra mieux gérer ses dépenses liées aux pensions.
Une approche transparente et rigoureuse
Pour garantir l'efficacité de ces réformes, la DGT/CP met en place des mesures complémentaires pour éviter que de telles irrégularités ne se reproduisent à l'avenir. Cela inclut la mise à jour régulière des fichiers des pensionnés, des contrôles de régularité plus fréquents, ainsi que la sensibilisation des agents publics à l'importance de respecter les procédures administratives et comptables.
Les efforts du gouvernement, sous l’impulsion de la Direction Générale du Trésor, sont clairement orientés vers une gestion plus transparente et plus respectueuse des normes budgétaires. Cependant, cette démarche de contrôle, bien que nécessaire, ne peut pas suffire à elle seule. Elle doit être accompagnée par une politique proactive de réforme et de modernisation du système des retraites pour éviter toute dérive future et garantir la pérennité du régime.
Le travail accompli par la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique, en collaboration avec le Comité Ad ’hoc, représente une avancée importante dans la gestion des finances publiques et la révision du système des pensions des fonctionnaires. Les résultats des vérifications de juillet et août 2024 montrent des irrégularités préoccupantes, mais également une volonté claire de rétablir l’ordre et la transparence dans ce secteur vital pour le pays.
Les réformes doivent être poursuivies pour garantir que les ressources publiques sont gérées de manière plus efficace et que les véritables bénéficiaires des pensions des fonctionnaires puissent recevoir leur dû de façon juste et équitable.
Tout en saluant les avancées obtenues, Madame Seidou Zeinabou A. Douka a conclu en insistant sur la nécessité de poursuivre les réformes en cours pour une gestion optimisée des pensions, dans un esprit de transparence et d’efficacité au service de la nation.