Son Excellence Adani ILLO, est l’Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire de la République du Niger auprès de l’Union Européenne. Diplomate de carrière, M. Adani ILLO a occupé plusieurs postes de responsabilité au titre du Ministère nigérien des Affaires Etrangères, de la Coopération et des Nigériens à l’Extérieur.
Il a entre autres été au Département central : Directeur Europe, Secrétaire Général du Ministère, Conseiller Diplomatique, Membre du Comité Spécial chargé de la négociation de l’Accord de paix avec la rébellion et à l’extérieur : Premier Conseiller à l’Ambassade du Niger à Washington DC, à Bruxelles, Représentant Permanent adjoint auprès de L’Unesco, Ambassadeur du Niger en Suisse, couvrant l’Autriche et le Liechtenstein.
Son Excellence Adani Illo a également été le représentant du Niger auprès d’une quinzaine d’Organisations internationales siégeant à Genève ou à Vienne dont entre autres l’OMS, l’OMC, le BIT, le HCR, l’ONUDI, l’AIEA, l’OMM, l’OIM, l’UIT, l’OMPI, le CICR, etc.
Dans l’entretien qu’il nous a accordé, l’Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire de la République du Niger auprès de l’Union Européenne, nous fait un tour d’horizon de l’état de la coopération qu’entretien le Niger avec l’Union Européenne, le Royaume de Belgique, le royaume des Pays Bas, le Grand-Duché du Luxembourg, l’Islande et la Grèce. Il a également abordé avec nous, la question de la diaspora nigérienne en Belgique et celle présente dans les autres pays cités plus haut. Lisez plutôt.
Nigerdiaspora : Quelle est l’étendue de votre mission à Bruxelles et auprès de l’Union Européenne ?
SEM Adani Illo : Merci Monsieur Guédé pour l’occasion que Nigerdiaspora m’offre de parler des relations entre le Niger et les pays et institutions de ma juridiction d’accréditation à Bruxelles.
Au plan multilatéral mon mandat couvre l’Union Européenne (UE) principalement, l’Organisation Mondiale des Douanes (OMD) et les institutions de La Haye à savoir L’Organisation Internationale pour l’Interdiction des Armes Chimiques (OIAC) la Cour Internationale de Justice (CIJ) et la Cour Pénale Internationale(CPI).
Au plan bilatéral je suis accrédité auprès du Royaume de Belgique, le Royaume des Pays Bas, le Grand -Duché de Luxembourg, la République d’Islande et la République Hellénique (Grèce).
A cela s’ajoute nos prérogatives au titre des questions consulaires compte tenu de l’importance de la diaspora nigérienne en Belgique et Hollande.
Quelles sont les objectifs prioritaires de votre mandat ?
Mes objectifs s’orientent autour des trois piliers cardinaux de mon mandat, évoqués tantôt.
D’abord, vous savez que Bruxelles est le siège de l’UE qui est le premier partenaire économique du Niger. C’est un partenaire stratégique qui s’est affirmé à l’occasion de la table ronde sur le financement du programme de développement économique et sociale(PDES) du Niger 2012-2017et qui se confirme dans le cadre de la programmation du Programme indicatif national (PIN) Niger/UE. Vu l’importance de ces deux instruments dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de renaissance du Président de la République le cahier des charges de l’Ambassade s’avère à la fois substantiel et urgent dans son exécution .En effet, nous sommes dans le processus de finalisation du document stratégique qui va définir nos relations pour les sept années à venir (2014 - 202O) avec l’Union Européenne.
A cet égard, la mission de l’Ambassade c’est de mener des consultations au plan programmatique et de renforcer la capacité de mobilisation des financements vers le Niger en s’appuyant sur la crédibilité de notre gouvernance politique et économique nationale.
C’est en l’occurrence pourquoi les effets de l’action diplomatique sont intimement liés à la gouvernance nationale.
Quels en sont les axes de coopération, avec l’Union Européenne ?
De manière précise les grands axes d’intervention de l’UE au Niger dans le cadre du 11è FED 2014- 2015 sont :
• La sécurité alimentaire et la résilience en appui au programme 3N ;
• l’appui aux secteurs sociaux (Santé et Education) ;
• la sécurité, la gouvernance et le maintien de la paix ;
• les infrastructures nécessaires au désenclavement des régions affectées par l’insécurité et le risque de conflits ;
En plus de ces quatre piliers, il est prévu une enveloppe conséquente pour l’appui direct aux ONG et aux organisations de la Société civile.
C’est dans ce contexte que la dernière visite du Président Issoufou a donné une impulsion décisive aux négociations et permis l’augmentation de 10% l’enveloppe financière du PIN ; ce qui porte le montant total des engagements de l’UE à 596 millions d’euros.
Il est à noter que le Niger est l’un des très rares pays à bénéficier de 4 secteurs de concentration, la norme UE étant de 3 secteurs par pays ACP.
Vous venez de présenter vos lettres de créances au niveau européen. Quelles préoccupations communes avez-vous pu partager avec Herman Van Rompuy ?
Nous avons essentiellement eu à partager deux préoccupations communes. La première touche à l’évolution de notre partenariat dans le cadre de l’accord de Cotonou ACP-UE ;
La deuxième a trait au souci du Président de la République de mettre la stratégie de sécurité et de développement dans le sahel de l’UE en ligne avec notre stratégie nationale de développement et de sécurité (SDS-Niger) ; cela, compte tenu de nos obligations nationales et régionales en la matière.
Comme vous le savez, le leadership avéré du Président Issoufou et notre position stratégique dans la région font que le Niger est considéré comme le verrou du Sahel, ce qui fait qu’aujourd’hui, de l’avis même de SEM Herman van Rompuy, le Niger est incontournable concernant toutes les solutions à apporter au niveau de la région du Sahel.
Et concernant la coopération bilatérale ?
Au plan des relations bilatérales, comme vous le savez, l’Ambassade du Niger à Bruxelles couvre les pays du Benelux, l’Islande et la Grèce.
De ce point de vue, elle a la responsabilité d’entretenir les liens d’amitié et renforcer le partenariat public, privé et non gouvernemental qui existe entre les entités nigériennes et celles desdits pays.
Excellence, pour approfondir, un peu pouvez-vous nous dire l’état de la coopération Niger-Belgique ?
En ce qui concerne la Belgique, nous sommes dans la phase où nous faisons le bilan du programme de coopération passé et nous sommes en train de définir le futur Programme indicatif de coopération (PIC 2014-2018).
Vous savez certainement que la Belgique est un partenaire historique pour le Niger, un partenaire de tous temps, qui ne nous a jamais abandonné, même pendant les moments des pires turbulences politiques qu’a connu notre pays.
Donc, il y a beaucoup de choses à consolider dans ce sens, à la fois du point de vue du partenariat public que de la promotion des investissements privés et des interventions des ONG ;
La Belgique intervient dans deux secteurs essentiels au Niger à savoir la santé (humaine et animale) et le développement rural auquel s’ajoute la formation de nos cadres civiles et militaires ainsi que l’appui aux municipalités et collectivités décentralisées.
Les prochaines assises en 2014 du cadre de coopération nous permettrons d’élargir et d’accroitre l’efficacité de l’aide belge fortement concentrée dans la région de Dosso et d’aligner les interventions dans le cadre du PDES et du Programme 3N(Les Nigériens Nourrissent les Nigériens)
Qu’en est-il de la coopération entre le Niger, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Grèce et l’Islande ?
Avec les Pays-Bas, IL s’agit de rétablir le partenariat privilégié qui existait entre les deux pays avant 1999 , année à partir de laquelle le Niger a été retiré de la liste des pays cibles de concentration de l’aide néerlandaise à la suite du coup d’état. Les axes à privilégier sont ceux de l’irrigation, des cultures maraichères et particulièrement de la production et de la conservation de l’oignon.
Les Pays-Bas se sont développés autour de la maîtrise de l’eau et nous pouvons bénéficier d’un partenariat bénéfique dans le domaine de l’infrastructure et de l’équipement capital dans la mise en œuvre du programme 3N.
Dans le même ordre d’idée, nous pouvons, partager les expériences, vous savez par exemple que pour l’oignon, les Pays-Bas est un grand producteur, le Niger aussi. Nous sommes pratiquement deux concurrents dans certaines régions mondiales.
Les Pays-Bas ont un oignon qui est plus gros, tandis que le Niger dispose de la meilleure qualité avec le « violet de Galmi» qui a un meilleur gout et plus de piment que toutes les autres variétés existantes au monde.
Est-ce à dire que la diplomatie mène à tout ?
La diplomatie doit avoir pour ressort les intérêts bien compris de l’Etat.
Et le Luxembourg, la Grèce, l’Islande?
Avec le Luxembourg, le Niger entretient un partenariat privilégié et spécifique en ce qu’il se réalise exclusivement sous forme de subventions (de dons).Notre pays est l’un des 9 seuls pays au monde de concentration de l’aide luxembourgeoise. Outre l’appui à l’artisanat qui constituait un programme phare du Grand-Duché, la coopération luxembourgeoise est active au Niger dans les domaines de l’éducation de base et la formation professionnelle (où ils sont chef de file) et l’agriculture (notamment 3N et dispositif de sécurité alimentaire) avec des actions concentrées dans la région de Dosso. Les perspectives sont celles de l’extension de ce partenariat dans les régions de Diffa et de Zinder.
S’agissant de la Grèce et, l’Islande et des autres organisations internationales, vous me permettrez-moi ne pas évoquer la question de nos relations, pas avant d’avoir présenté mes lettres de créance, pour des raisons de déontologie diplomatique.
La troisième dimension de mon mandat a trait à la diaspora nigérienne dans les pays du Benelux.
Justement Excellence, après votre brillante médiation, suivie de la supervision de l'élection du président de l’Association des nigériens de Belgique, quelle est votre analyse de la situation ?
Cela a été pour moi un honneur d’avoir contribué à faire en sorte que l’élection du bureau de l’Association des ressortissants nigériens de Belgique (ARNIBEL) se passe de manière pacifique et transparente. C’est également un honneur d’avoir contribué à l’avènement d’un bureau qui soit l’émanation du vote de sa base.
Après cet épisode tumultueux je pense que l’heure est venue de s’attaquer aux raisons fondamentales pour lesquelles les nigériens en Belgique ont élu ce bureau. De mon point de vue, ils y prédominent deux aspirations principales qui peuvent paraitre dichotomiques mais qui, en réalité, concourent au même résultat.
La première, c’est d’assurer une bonne intégration des nigériens résidents en Belgique. C’est cela qui permettra de créer les conditions pour que notre communauté s’épanouisse davantage ici, et qu’elle puisse exploiter en toute légalité les opportunités de travail qui s’offrent dans le pays de résidence.
Nous sommes en 2014, à l’ère de la mondialisation l’élément intégration est important et préalable à la prospérité de la diaspora, contrairement à l’idée qu’on se faisait, il y a encore quelques décennies.
Le deuxième élément est de faire en sorte que cette communauté en Belgique puisse apporter son appui plein et entier à l’essor national, qu’elle apporte sa contribution à la mise en œuvre la politique de développement du Niger. Ces deux buts peuvent paraître antinomiques, contradictoires mais ils ne le sont pas. Regardez l’expérience de certaines diasporas dans le monde. Celles qui ont réussies, sont celles qui sont arrivées à poursuivre ces deux objectifs concomitamment.
La qualification par le Président Issoufou Mahamadou de la diaspora comme neuvième région du Niger procède de cette vision ; le projet de texte de loi dit sur « la double nationalité » procède de cette analyse ; il vise à permettre à notre diaspora de jouir de la plénitude de ses droits citoyens là où elle se trouve.
Alors, comment pensez-vous accompagner la diaspora nigérienne de Belgique ?
Des mesures sont-elles prévues, si oui lesquelles ?
Mon ambition, c’est de contribuer à placer la communauté nigérienne du Benelux en « pole-position » pour l’élection des représentants des nigériens à l’extérieur qui siègeront à l’Assemblée Nationale lors de la prochaine législature. Et pour cela il faut la structurer autour d’objectifs citoyens communs. Le potentiel existe ici il faut l’activer autour d’un plan d’actions fédérateur ambitieux.
C’est fort de cette conviction que je considère que notre diaspora du Benelux a vocation à défendre la « loi sur la double nationalité » car si ce texte ne passe pas, nos ressortissants d’ici, dans leur majorité, ne pourront pas exercer leur droit de vote à l’occasion des prochains scrutins; ils ne seront pas éligibles non plus.
Dans la situation actuelle, avec l’adoption du texte permettant l’élection des députés des nigériens de l’ l’extérieur, les nigériens qui sont en Afrique (Côte d’ivoire, Nigeria, Ghana, Togo etc. …) sont ipso facto qualifiés pour exercer leurs droits de citoyens ; tandis que la plupart de nos ressortissants du Benelux, eux, ont besoin du deuxième texte pour exercer la plénitude de leurs droits de citoyens nigériens.
C’est pourquoi je les invite à se mobiliser pour une cause qui est la leur.
Et les mesures ?
Deux essentiellement, au cours de cette année :
L’Ambassade va lancer, dès le printemps, l’opération de recensement des ressortissants nigériens dans les pays du Benelux ; opération couplée avec la délivrance des cartes consulaires.
Et nous allons incessamment mettre en place une cellule conjointe pour aider nos ressortissants à monter des projets et partant promouvoir l’entrepreunariat au sein de la diaspora.
Votre dernier mot Excellence ?
Mon dernier mot s’adresse à la diaspora nigérienne dans les pays du Benelux. Mon souhait serait que la diaspora nigérienne en Belgique et aux Pays-Bas soit citée en exemple du point de vue de sa cohésion, de son dynamisme et qu’elle soit véritablement le fleuron de la « neuvième région» du Niger. Voilà mon voeux.