Luc Oursel, président du directoire d’AREVA, se rend à Niamey ce vendredi 7 mars, dans le contexte des difficiles négociations des conventions minières d’AREVA avec le Niger.
Alors que ces contrats devaient être signés au 31 décembre 2013, les discussions ont été prolongées jusqu’à fin février, puis de façon indéfinie, face au refus d’AREVA d’appliquer la législation minière en vigueur au Niger.
Ali Idrissa, coordinateur exécutif du ROTAB (Réseau des Organisations pour la Transparence et l’Analyse Budgétaire) au Niger, dénonce "les manœuvres dilatoires d’AREVA" : "Selon nos informations, l’entreprise aurait réussi à échapper aux dispositions de notre loi de 2006 pendant cette période de négociations : elle n’a donc pas d’intérêt à arriver rapidement à un accord puisqu’aujourd’hui, elle continue de bénéficier de ses privilèges fiscaux au Niger."
La loi minière de 2006 introduit un taux de redevance minière progressif et met fin à des exonérations sur les droits de douane et la TVA, dont les filiales d’AREVA au Niger profitaient jusqu’ici. La fin des exonérations sur la TVA pourrait par exemple rapporter de 10 à 15 millions d’euros par an au Niger.
Après le gouvernement français début février, Luc Oursel a reconnu la semaine dernière que les demandes du Niger d’augmenter ses recettes fiscales étaient "légitimes".
Pour Anne-Sophie Simpere, d’Oxfam France :
"Il n’y a pas de raison que Luc Oursel n’accepte pas qu’AREVA paie ses impôts au Niger, y compris la TVA. Les activités minières du groupe semblent rentables, et ses filiales, qui exploitent l’uranium nigérien depuis plus de 40 ans, ont globalement augmenté leur production ces dernières années. Aujourd’hui, même l’OCDE s’interroge sur l’intérêt des exonérations fiscales accordées aux investisseurs étrangers, tandis que le FMI recommande au Niger d’y mettre fin afin d’augmenter ses revenus et de financer son développement."
"AREVA est une entreprise détenue majoritairement par l’Etat français qui devrait se montrer exemplaire en la matière. Négocier des allègements fiscaux auprès de l’un des Etats les plus pauvres du monde est tout à fait incohérent avec les politiques de développement du gouvernement et avec son engagement de ‘renouveau du partenariat économique avec l’Afrique’".
Le Niger fait actuellement face à un niveau élevé d’insécurité alimentaire et de malnutrition et doit gérer l’arrivée des réfugiés issus de pays voisins en crise, obligeant le Premier Ministre à faire appel à l’aide internationale.
"Le Niger doit pouvoir financer une partie de ses besoins avec les revenus de l’uranium. Chaque million compte. Le gouvernement du Niger doit tenir bon dans ces négociations. AREVA ne peut pas rester au Niger sans respecter la loi", conclut Ali Idrissa.