Quatre députés de la majorité présidentielle - Assoumana Mallam Issa, Tanimoune Oumarou, Abdoulmoumouni Gousmane et Ibrahima Souleymane - ont voulu en savoir un peu plus sur l'évolution des relations Niger/Areva, le démarrage des négociations, les points inscrits à l'ordre du jour, l'état d'avancement des négociations et les principaux obstacles.
Devant les parlementaires, le ministre interpellé a apporté des éléments de réponse sur les différents aspects évoqués. « Nous sommes très proches d'un accord satisfaisant et nous l'espérons aussi pour le partenaire», a dit le ministre des Mines, Omar Hamidou Tchiana, en ajoutant que les deux parties ont progressé sur les sept sujets en débat. Il n'a pas cependant apporté de précision sur la date de la fin des négociations, mais a promis que la signature de nouvelles conventions pour les dix prochaines années sera rendue publique.
Le Niger et le groupe français du nucléaire Areva sont entrés en négociation pour le renouvellement des conventions d'exploitation des mines d'uranium de la Somaïr (Société des mines de l'Aïr) et de la Cominak (Compagnie minière d'Akouta), dans l'extrême nord du pays, depuis près de trois mois. Les deux parties qui étaient sensées parvenir à un accord en février dernier, ne se sont pas entendues sur l'application de la loi minière 2006. « Les négociations ont été longues, difficiles, souvent âpres, chacun défendant ses intérêts », a reconnu le ministre Tchiana. Il souligne que la partie nigérienne a été soudée et à la hauteur.
Selon lui, les négociations sur les conventions minières ne sont pas techniquement compliquées. « La difficulté découle de l'interprétation juridique faite par les sociétés du règlement communautaire qui leur accordait une stabilité fiscale et qui les soustrait de facto à la loi 2006. Ce qui, naturellement n'est pas l'avis du gouvernement », explique-t-il.
L'application de la loi minière de 2006, point de discorde
Au Niger, après plus de 40 ans, les recettes cumulées de la production de l'uranium sont de l'ordre de 660 milliards FCFA, (un milliard d'euros), soit une moyenne annuelle de 15 milliards F CFA. « D'où le sentiment que nous avons un partenariat déséquilibré », a dit le ministre des Mines. Un constat qui a amené les autorités nigériennes à chercher et proposer des voies et moyens pour accroitre la valeur retenue et la valeur ajoutée de ce secteur.
« Nous avons voulu qu'à la fin de validité de cette convention, que les dispositions fiscales du règlement communautaire et de la loi minière de 2006, gelée pendant 40 ans s'imposent aux sociétés (Somaïr et Cominak) qui auraient dû anticiper et prendre en compte ces données », a-t-il indiqué.
De son côté, le groupe Areva avance la chute des prix de l'uranium sur le marché mondial pour se soustraire à l'application de la nouvelle loi minière. « Mais qu'il soit entendu, les effets doivent être équitablement partagés », a martelé le ministre des Mines, lors de son interpellation à l'Assemblée nationale. Il a rassuré les parlementaires que, pour le gouvernement, le respect de la loi 2006 ne souffrira d'aucune ambiguïté.
A noter que le ministre français du Développement, tout comme le président du directoire d'Areva ont récemment qualifié de « légitime », la demande du Niger d'accroitre ses recettes.
Mobilisation forte de la société civile
Une cinquantaine d'organisations de la société civile, réunies autour du Collectif des structures de la société civile pour la défense des intérêts du Niger s'était mobilisée, devant le parlement, pour faire entendre sa voix. Ces organisations souhaitent amener les deux parties à ne pas se soustraire à l'application de la loi minière de 2006. « L'application de la loi minière de 2006 n'est pas négociable », a déclaré Ali Idrissa, coordonateur du Réseau des organisations pour la transparence et l'analyse budgétaire.
En effet, depuis le début des négociations entre le Niger et Areva, le sujet a eu un écho auprès de l'opinion publique suite à une forte mobilisation de la société civile. Plusieurs manifestations sont régulièrement organisées à Niamey, la capitale et à Agadez, région minière pour la sauvegarde des intérêts du Niger dans le cadre des négociations avec la société Areva et pour l'application du code minier 2006.
Dans un document remis récemment au ministre de Mines, la société civile recommande que les nouveaux contrats de la Somaïr et de la Cominak engagent les deux parties à appliquer strictement la loi minière 2006, à prendre réellement en compte les intérêts des populations riveraines des sites et à prendre également en compte les intérêts des générations présentes et futures.
Le Niger est 5ème producteur mondial d'uranium et dispose de réserves conséquentes de 300 000 tonnes d'uranium métal. Mais le pays reste encore l'un des plus pauvres de la planète.