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Delta du Niger : Shell condamnée pour les fuites de pétrole en 2008 et 2009
Publié le mardi 24 juin 2014   |  blogs.mediapart.fr


Le
© Autre presse par DR
Le Delta du Niger


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..du nouveau concernant les actions juridiques intentées contre l'entreprise pétrolière Shell suite aux fuites de pétrole de 2008 et 2009 (sachant que les "fuites" de pétrole dans le delta du Niger persistent depuis 50 ans dans un silence mondial assourdissant....voir les articles déjà publiés sur cette édition)...



"La Haute Cour de Justice de Londres a rendu son verdict dans le procès historique Shell contre Bodo. La multinationale a été déclarée légalement responsable pour les fuites de pétrole ayant dévasté le Delta du Niger en 2008 puis en 2009."



"C’est la première fois que la maison mère de la compagnie pétrolière était attaquée en justice sur le sol anglais, et elle est aujourd’hui condamnée par une première décision de justice. Shell s’est toujours défendue en attribuant la faute aux voleurs de pétrole venus siphonner les pipelines, et qui ont déclenché les fuites. Mais la loi indique clairement que la société était responsable de ses installations, et devait les protéger contre ce genre d’attaques, par le biais de moyens de surveillance adaptés et de gardes sur site. Cela n’a jamais été fait. Et si des vols venaient à être tout de même commis, comme ce fut vraisemblablement le cas, Shell avait le devoir de prévenir les autorités compétentes et de réparer les dégâts. Là encore, la multinationale n’a pas levé le petit doigt.

Résultat : eaux et terres sont pollués pour trente ans, dans une région où plus de 60% des habitants dépendent de leur milieu naturel pour vivre. Selon un rapport publié par les Nations Unies, il s’agit de la plus grosse catastrophe pétrolière et écologique de tous les temps. Coût de l’opération de nettoyage : environ 1 milliard d’euros. Reste à savoir qui payera la facture. Verdict définitif en mai 2015."

amnesty



"3 questions à Jacques Viers, membre de la Commission acteurs économiques et droits humains à Amnesty International France.



Quelle est votre réaction quant à la condamnation de Shell ?



C’est une décision très importante que l’on attendait depuis longtemps. Elle signifie une reconnaissance de la responsabilité de Shell, y compris pour les vols de pétrole car il avait la garde de ses pipelines et ne l’a pas assurée. Mais même pour ces vols, Shell ment dans la majorité des cas comme l’indique notre rapport. Je pense que la compagnie va payer très cher et que cela peut même remettre en cause sa pérennité.



Quelles sont aujourd’hui les conséquences de ce désastre écologique pour la communauté Bodo ?



Rien n’a été fait depuis 2008. Les habitants ne peuvent ni pêcher, ni cultiver leurs terres car tout est pollué. Le taux de pollution au benzène est jusqu’à 900 fois supérieur à la normale ! Cette catastrophe sanitaire n’a pas encore développé toutes ses conséquences, notamment en terme de cancers. Encore plus alarmant, il semblerait que les fuites aient été sous-estimées, et que l’on assiste à une pollution digne d’un Exxon Valdez tous les ans depuis cinquante ans. Les fichiers Wikileaks en ont fourni la preuve.



Pensez-vous que cette jurisprudence va impacter de futurs procès ?



On espère bien sur que cela ouvre la voie à d’autres condamnations, mais on est encore dans une situation de coupure entre maisons mères et filiales, qui fait qu’on ne peut remonter que difficilement au siège social. Le droit anglais le permet et le cabinet d’avocat des plaignants a été très actif, mais en France ça ne serait pas possible. C’est pour cela que nous soutenons le projet de loi « Devoir de vigilance des entreprises multinationales » présenté en novembre dernier par 3 députés, et soutenu par tous les groupes de gauche. On espère que malgré les blocages sous la pression des lobbies dans les différents gouvernements, la loi va passer. Il faut une mise en œuvre pratique au niveau des Etats des principes des droits humains édictés par l’ONU (notamment les principes de RUGGIE). Le France s’y était engagée, et François Hollande avait renouvelé cette promesse pendant la campagne. Pour l’heure, on attend des résultats."



Anissa Duport-Levanti

Journaliste - article publié sur opinion-internationale.com (cliquer ici)





* Lire également le communiqué de presse de Amnesty International - 20 juin 2014 :



"Nigeria. Shell pourrait recevoir d'autres demandes de réparation après un jugement historique en matière d'environnement"



Un jugement historique prononcé par la justice britannique annonce que Shell sera finalement tenu de rendre des comptes pour la pollution aux hydrocarbures qui a causé des ravages dans le delta du Niger, a déclaré Amnesty International.

« La décision de vendredi 20 juin est un avertissement à l'adresse de Shell », a déclaré Audrey Gaughran, directrice du programme Thématiques mondiales d'Amnesty International.

« Le message du tribunal est clair - si vous ne prenez pas les mesures qui s'imposent pour protéger vos oléoducs contre le sabotage, vous pourriez être tenus responsables pour les dégâts causés. »

Dans la décision prononcée par le juge Robert Akenhead, le tribunal des technologies et de la construction de Londres a estimé que sans aller jusqu'à demander à la police ou à l'armée de défendre ses oléoducs, Shell avait le devoir de prendre des dispositions raisonnables pour les protéger. Cela inclurait des mesures telles que l'installation de systèmes de détection des fuites, d'équipements de surveillance et de matériel antivol.

Le jugement autorise les requérants nigérians à demander réparation dans les cas où les fuites d'hydrocarbures ont résulté d'un acte de sabotage ou d'un vol - à condition que ceux-ci soient dus à une « négligence de la part du titulaire [du permis] ou de ses agents, personnels d'entretien ou ouvriers, concernant la protection, la maintenance ou la réparation de toute structure ou tout article nécessaire aux activités de l'entreprise ».

Et pourtant, à peine quelques minutes après le jugement, Shell a publié un communiqué de presse contenant notamment les propos suivants : « un juge anglais se prononce en faveur de la filiale nigériane de Shell. »

« La version des faits donnée par Shell dans cette affaire continue à défier la raison », a déclaré Audrey Gaughran.

« Sa réaction est celle d'une entreprise prête à tout pour éviter d'avoir à rendre des comptes pour des années d'échec. »

Shell a systématiquement refusé de donner des précisions sur l'ancienneté ou l'état de son oléoduc. Depuis des années, Shell affirme que la pollution massive aux hydrocarbures liée à ses opérations est due au vol de pétrole et à d'autres activités illégales. La compagnie n'a cependant pris quasiment aucune véritable mesure pour prévenir ce vol et sécuriser ses oléoducs.

Dans son rapport de 2013 intitulé Bad Information: Oil Spill Investigations in the Niger Delta, Amnesty International a montré qu'une grande partie des déclarations de Shell sur la pollution aux hydrocarbures dans la région étaient « profondément suspectes et souvent fausses ».

Des infrastructures vulnérables ont été laissées à la merci des vandales et des voleurs. Autre fait alarmant, certains éléments ayant émergé l'an dernier donnent à penser que même les prestataires de Shell ont pu prendre part au vol de pétrole.

La décision prononcée vendredi 20 juin est un tournant important dans le combat qui dure depuis des décennies pour obtenir justice dans le delta du Niger, où la pollution associée aux opérations de Shell a eu un effet dévastateur.

Elle a été rendue dans le cadre d'une procédure civile engagée par des habitants de la ville de Bodo, dans le delta du Niger. Cette population a subi deux énormes déversements en 2008 et 2009, après qu'un vieil oléoduc de Shell a connu des fuites.

« Depuis plus de cinq ans, les habitants de Bodo vivent tous les jours avec les conséquences dévastatrices de ces épanchements », a déclaré Joe Westby, chargé de campagne pour la responsabilisation des entreprises à Amnesty International, s'exprimant depuis le tribunal.

« Le jugement de vendredi 20 juin est une avancée importante dans la quête de justice de cette population qui a connu de nombreuses privations. »

Amnesty International se mobilise depuis 2009 pour que Shell reconnaisse les dégâts environnementaux causés par ses activités, qui ont détruit des sources de revenus et mis en danger la santé de milliers de personnes vivant à proximité des installations pétrolières de cette entreprise dans le delta du Niger.

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