La Cour de cassation de Niamey a levé, le jeudi 26 juin dernier, l’immunité dont jouissait l’ex-président Mamadou Tandja, qui devra être entendu sur une affaire de quatre cents milliards FCFA qu’il dit avoir laissé avant son débarquement du pouvoir par les mili- taires en février 2010.
En effet, dans un enregistrement sonore réalisé à son domicile au cours d’une conversation qu’il avait eue avec une délégation du MNSD de Tahoua, l’exprésident de la république avait laissé entendre qu’il avait laissé 400 milliards de nos francs au Trésor public au moment de sa chute. Ainsi, Tandja Mamadou, qui avait dirigé le Niger durant dix ans et quelques mois, pourra désormais être entendu dans une affaire de disparition de 400 milliards FCFA des caisses de l’Etat, selon une source judiciaire. «La Cour de cassation a levé jeudi l’immunité de l’ancien président Mamadou Tandja afin de permettre à la Justice de l’entendre sur sa déclaration où il faisait état de quelque 400 milliards de FCFA qu’il aurait laissés avant de quitter le pouvoir», a annoncé une source proche du dossier.
Le porte-parole du Mouvement National pour la Société de Développement (MNSD), le parti de M. Tandja, Issoufou Tamboura Issoufou, a confirmé cette information judiciaire, évoquant «une banale affaire de 400 milliards FCFA». Pour rappel : c’est lors d’une rencontre en septembre 2013 avec une centaine de militants de son parti, M. Tandja avait déclaré avoir laissé «environ 400 milliards de FCFA « avant d’être chassé du pouvoir. Début février 2014, l’ex-président expliquait devant la presse qu’environ trois quarts de cette somme, soit 300 milliards de FCFA, réunis par de «riches partenaires» du Niger et destinés à la construction d’un «barrage hydro-agricole» étaient «toujours stockés à la Banque Islamique de Développement» (BID) à Djeddah en Arabie Saoudite.
Les «quelque 100 autres milliards de FCFA» étaient destinés à l’achat de vivres et de matériels agricoles, avait il indiqué lors de ce point de presse pathétique. Mamadou Tandja a également réclamé un audit sur la gestion du pays par la junte militaire qui l’a renversé en 2010. «Il est impératif de faire cet audit. Il faut le faire afin que le peuple sache ce que je lui ai laissé avant d’être renversé par les militaires», a-t-il lancé en langue haoussa. Sur cette affaire, même l’avocat du président déchu, Me Souleye Oumarou, est resté perplexe. ‘’Ou Tandja Mamadou dit que cette somme était disponible, mais qu’elle a disparu. Et logiquement, on doit chercher ceux qui l’ont détournée.
Ou, à défaut, si son témoignage révèle que cette somme-là est imaginaire, naturellement, le tribunal du Niger va le poursuivre en Justice pour faux témoignage, ou en tout cas, pour dénonciation calomnieuse’’, a laissé entendre l’avocat de Tandja, Me Souleye. Avec M.Tandja, une quarantaine de personnalités, dont le chef de la transition, le général Djibo Salou, iront également devant la Justice pour faire la lumière sur cette affaire. Le montant avancé par Mamadou Tandja est considérable pour un pays comme le Niger et les sous- entendements politiques de cette annonce sont si importants que les autorités de la 7ème République, qui ont fait de la bonne gouvernance économique et politique leur cheval de bataille, que ces dernières ne peuvent passer sous silence de telles déclarations.
L’impact que peut avoir ces révélations avait donc poussé le gouvernement à annoncer fin janvier l’ouverture d’une enquête sur la disparition potentielle de ces fonds. Ainsi, l’ancien président de la république n’en a donc pas fini avec la Justice, lui qui avait déjà été poursuivi par le CSRD sur le terrain du droit commun, partageant ce triste record avec l’ex-président du Panama, Noriega. Comme quoi, dit un adage populaire, si vous ne savez point parler, sachez au moins vous taire !