Au Niger, les actions de reboisement constituent les plus importantes actions menées pendant et après les sécheresses des années 70 pour réhabiliter et améliorer l'environnement. Ainsi, les premiers projets forestiers ont surtout privilégié le développement des bois de villages, les ceintures vertes et l'enrichissement des terres de cultures. Le développement des reboisements forestiers s'est surtout accompli au cours des années 80 grâce notamment à une politique très audacieuse mise en œuvre dans le sillage du mémorable ''Engagement de Maradi'', en mai 1984.
Cette politique de reboisement qui se traduisait par la mobilisation des jeunes de la ''Samaryia'' à travers une campagne dénommée ''Opération Sahel vert'', a trouvé son couronnement à l'issue du débat national sur la désertification tenu à Maradi au mois de mai 1984, et qui a été sanctionné par ''L'engagement de Maradi''. Il s'agit d'un véritable plan d'actions de lutte contre la désertification à court, moyen et long termes. Par «L'engagement de Maradi», qui est la résultante d'une analyse profonde du phénomène de désertification, ses dimensions et les conséquences graves qu'il engendre, le Niger a jugé de la nécessité de rechercher les solutions les plus hardies et d'appliquer les stratégies appropriées.
Déjà, dans le Message à la Nation qu'il a prononcé à l'occasion de la célébration de la fête du 3 août 1983, le Président Seyni Kountché, lançait une phrase qui en disait long sur son engagement à relever le défi de la lutte contre la désertification au Niger. «Je vous annonce que l'année 1984 sera consacrée année du reboisement national. Nul doute que nous pourrons, à force de volonté, reverdir le Sahel et sauver notre Niger éternel», disait-il. Et à chacune de ses multiples interventions, le Chef de l'Etat n'avait raté l'occasion de lancer un véritable cri d'alarme sur l'allure effrayante de l'avancée du désert, invitant ainsi les Nigériens sur la nécessité de se mobiliser sur tous les fronts pour des opérations de reboisement dans tous les coins du pays. Ces mots ne sont guère restés lettres mortes.
Et pour appuyer cette volonté politique de freiner l'avancée du désert, plusieurs mesures ont été prises en faveur du reboisement sur le plan institutionnel. C'est ainsi qu'en juin 1982, on assista à la création d'un département ministériel chargé des problèmes de reboisement, de la réorganisation des services chargés des activités forestières et fauniques. S'ajoute également la création d'une commission nationale de reboisement qui avait pour mission de proposer au gouvernement toutes mesures visant la promotion de l'environnement et de l'utilisation rationnelle des ressources forestières, de l'institutionnalisation de la semaine de l'Arbre et du reboisement massif au mois d'août 1984 par la jeunesse nationale et internationale mobilisée sur les sites de «l'Opération Sahel vert».
Pour les stratégies à adopter à l'issue du débat de Maradi dont les objectifs visés sont la sécurité alimentaire, la satisfaction des besoins énergétiques, la protection, la restauration et l'amélioration de l'environnement, il s'agira surtout de : sensibiliser et mobiliser les populations en vue de leur participation volontaire et responsable aux actions de lutte contre la désertification; coordonner et intégrer l'effort de développement national dans la définition de la mise en œuvre des programmes de lutte contre la désertification à l'échelon national, régional et local; promouvoir la recherche scientifique et technologique dans l'identification des solutions aux problèmes de lutte contre la désertification et la promotion de l'environnement; dégager les ressources humaines suffisantes afin de disposer d'un encadrement efficace; améliorer la connaissance des écosystèmes et systèmes de production, du processus de désertification, des ressources énergétiques et des potentialités hydrauliques.
Aussi, joignant l'acte à la parole, dès le lendemain du débat de Maradi, le gouvernement adopta une série d'actions de reboisement. Dans cette même optique, les autorités ont décidé de la mise en route «impérative et annuelle» d'opérations de délimitation de plantations d'arbres à raison de cinq hectares par poste administratif, dix hectares par arrondissement et quinze hectares par département. Il a été également décidé de la délimitation, au niveau de chaque village du Niger, d'un espace réservé à la plantation d'arbres et qui sera dénommé «bois de Samariya», à l'instar des champs collectifs.
Mieux, à l'issue du Conseil des ministres du jeudi 31 mai 1984, le gouvernement a pris une mesure imposant la plantation d'arbres au niveau de tous les aménagements hydro-agricoles, ainsi que sur les points d'eau. « Au niveau de chaque ville, village, les populations planteront et entretiendront des arbres dans les concessions, les rues, les écoles, les dispensaires, les mosquées et les lieux publics d'une manière générale», a décidé le Conseil des ministres. D'autre part, il a été pris une mesure rigoureuse portant sur l'interdiction de l'abattage des arbres dans le cadre de la préparation des champs ou des lotissements, sous peine de sanctions sévères.
Toutes ces mesures viennent ainsi renforcer les actions déjà entreprises dans le cadre du programme national de reboisement pour l'année 1984, et les opérations prévues dans les différents plans de développement des collectivités.
Pour gagner ce pari, le gouvernement a misé sur le financement en faveur du volet environnement. C'est ainsi que des projets de reboisement d'un coût global de 623.085.908 francs CFA ont été élaborés, rien que pour l'exercice 1984. Ces projets visent la plantation de 2.001.365 plants sur 5.146,75 hectares. Ces projets portent surtout la création des haies vives et brise-vent autour des centres de perfectionnement technique (CPT), des aménagements hydro-agricoles et dans les champs, la protection des forages contre l'ensablement, la recherche des espèces forestières adaptées aux zones arides pour remplacer les espèces disparues ou en voie de l'être, la création autour des grandes villes d'un cordon de reboisement destiné à protéger les villes contre les vents de sable et les vents desséchants. On crée ainsi un micro-climat plus agréable auquel s'ajoute une possibilité d'exploitation rationnelle des arbres pour garantir la production du bois de chauffe. Au titre du reboisement 1984, les collectivités doivent produire et planter 890.000 plants sur 2.264,5 hectares soit un coût global de 54.551.669 francs.
Il importe de souligner qu'avant ces actions marquant l'année de reboisement national, l'Etat avait engagé depuis 1976 déjà, plus d'un milliard de francs programmé au titre du programme triennal pour la réalisation de 11 projets forestiers. A la fin du plan, 8 projets ont été réalisés dont 200 ha de gao à Maradi, Zinder et Dosso, la vulgarisation de la gomme arabique, la plantation des haies vives, le reboisement de 260 ha à Niamey et Dosso, la production des plants à Tara, le reboisement de l'Irhazer, 150 ha de gao à Balléyara et la protection d'un centre de multiplication des semences.
Cette volonté de lutte contre les phénomènes de la désertification s'est accentuée au cours du plan quinquennal qui a prévu la réalisation de plusieurs projets totalisant quatre milliards de francs CFA. Quant au volume des investissements programmés pour la réalisation du plan intérimaire de consolidation des acquis, il se chiffre à plus de sept (7) milliards, somme destinée aux actions de reboisement, d'aménagement des forêts et faune, de développement de la recherche ainsi qu'à l'équipement des services.