Au cours de sa longue et brillante carrière politique, notre Honorable Président de l'Assemblée nationale, M. Hama Amadou, s'est beaucoup occupé de la justice: il a en particulier instrumentalisé ses instances, manipulant les juges tels des pions, concoctant les textes et les révisant selon les besoins du jour, envoyant nombre de ses concitoyens en prison, les journalistes mal-pensants restant parmi les plus prisés. Il a par ailleurs développé les infrastructures carcérales, avant d'en être lui-même pensionnaire.
M. Hama Amadou a aussi abondamment parlé de la Justice, sur différentes tribunes. Ses propres démêlés avec la Justice ont forgé ses convictions sur ce secteur. Mais celles-ci varient autant que l'homme: selon les circonstances. Les juges sont des gens ''bien'', indépendants lorsqu'ils rendent une décision favorable. Dans le cas contraire, ils sont aux ordres...
En fait, M. Hama fait confiance en la justice lorsqu'il en tire les ficelles. Ce qui n'est plus possible depuis quelque trois petites années. En effet, les principes de séparation des pouvoirs et de l'indépendance de la justice sont une réalité tangible au Niger, comme en témoignent tous les processus de traitement des affaires judiciaires.
Tous les magistrats le savent, ainsi que leurs collaborateurs. Cela a permis à des camarades de M. Hama, sur qui pesaient pourtant de graves soupçons de tentative de déstabilisation, de ne pas rester en prison. Cela a fait que des militants du régime en place croupissent dans des geôles de l'Etat. Cela a permis au Niger de surmonter toutes les épreuves qu'on a voulu en vain transformer en crises institutionnelles, par le biais des recours à la Cour Constitutionnelle, dont l'opposition actuelle a fait largement usage.
Depuis quelque temps donc, la Justice n'est pas du bon côté... de M. Hama. Et lui de crier au complot politique et au harcèlement judiciaire: son épouse est impliquée dans une affaire de trafic de bébés? C'est politique, et c'est lui qui est visé! Le libre jeu des alliances au sein de l'hémicycle? Même si sous tous les cieux du monde il est la manifestation des rapports de forces politiques, au Niger M. Hama y voit une machination visant à l'éjecter de son poste et une entrave à sa victoire annoncée en 2016. Notez bien, il est le seul à s'octroyer cette position, alors qu'il n'est ni chef de file de l'opposition ni celui qui était arrivé deuxième à l'élection de 2011.
La dernière histoire de M. Hama avec la Justice, vous la connaissez: après avoir écrit en début de semaine à la Cour constitutionnelle pour lui demander si la procédure soumise au bureau de l'Assemblée le concernant était régulière, il n'a nullement attendu la réponse de l'auguste institution. On apprend ainsi que depuis mercredi, notre président de l'Assemblée nationale s'est introduit clandestinement dans le Burkina Faso voisin, où il tente de se faire passer pour un réfugié politique.
Ils ne sont certes pas amis, mais M. Hama et la Justice sont des inséparables.