Il y a vraisemblablement erreur ou manipulation. Le capitaine Sidikou Aboubacar n’en revient pas encore. Sa famille et ses innombrables amis non plus. Convoqué devant le juge pour apporter sa part de témoignage dans la rocambolesque évasion du terroriste Chérif Chebani, le capitaine fut surpris de se voir coller un mandat dépôt.
Vite pensé, vite fait, on le transféra à la maison d’arrêt de Say où il continue à chercher en vain l’explication de son incarcération. Régisseur de la maison d’arrêt de Kollo, il avait eu, jusqu’à son procès en assises, la charge d’assurer la détention du redoutable terroriste. Après son procès et la condamnation qui s’en est suivie, Chebani est curieusement conduit, non pas à Kollo mais à la prison civile de Niamey. Sans aucun papier de justice. Ni même une information préalable au régisseur de Say. Quelque part, l’on a décidé, sans qu’aucune décision de justice le sous-tende, que Chebani, l’homme qui a froidement abattu un officier américain et qui n’a pas hésité à tuer quatre autres touristes saoudiens pour les dépouiller de leurs biens dans le nord Tillabéry, ne retournera pas à Kollo. Pourquoi ? La réponse se trouve peut-être dans la suite de l’histoire et son issue fatale. Le capitaine Sidikou ? Il n’a fait que constater le transfèrement de ce détenu. Il a beau demandé des explications sur cette façon de faire peu orthodoxe, il ne rencontrera qu’un épais mur de silence. Il s’est adressé d’abord à son collègue régisseur de Niamey, rien qu’un vague « Il restera à Niamey car il a fait appel de la décision de la Cour ». Il s’est tourné vers ses supérieurs hiérarchiques en la matière, en l’occurrence dans le circuit judiciaire, là également il a buté contre un épais brouillard incompréhensible. Enfin, lors de la visite du ministre de la Justice, Garde des sceaux, il a pensé avoir trouvé l’opportunité et l’oreille indiquée pour vider définitivement cette sombre affaire. Il en profitera pour exposer les faits au ministre Marou mais en vain. Son propos était manifestement hors sujet. En tout cas, toujours rien que le mur de silence et l’épais brouillard qui l’entoure. Et puis …plus rien jusqu’à ce jour fatidique où Chebani s’est lassé de ce jeu de rôles ennuyeux et a décidé de mettre fin au folklore. Dans le sang. Passons l’éponge sur les frasques de la vie de prison, que dis-je, de la vie de château que menait Chébani puisqu’il occupait, presque en permanence, le bureau du régisseur de la prison civile de Niamey pour tous ses besoins, sans exclusive. Imaginez tout ce que vous voudrez, ça va rentrer dans le panier de Chebani. Aujourd’hui incarcéré pour un motif inexplicable, le capitaine Sidikou est en train de payer pour une faute qu’il n’a jamais commise. Non seulement il ne gère pas le prisonnier au moment de son évasion, mais il ignore lui-même totalement les raisons et les motivations pour lesquelles quelqu’un ou des gens ont décidé de changer de prison pour Chebani. Mieux, il s’est correctement acquitté de son devoir d’alerter qui de droit par rapport à cette situation incongrue. Du ministre de la Justice au régisseur de la prison civile de Niamey, en passant par d’autres grands commis de la justice, tous sont informés sur la situation de Chebani. Soyons quand même sérieux, même lorsqu’on veut trouver des boucs émissaires, c’est tout de même flagrant et scandaleux de s’en prendre à un homme que rien ne compromet dans cette affaire. C’est ça qu’on appelle chercher des poux sur le crâne d’un chauve.