L’achat de l’avion présidentiel a fait couler beaucoup d’encre. Et pourtant, beaucoup de choses restent encore à dire sur cette sale affaire qui concerne directement le président de la République en personne. Comme dans l’affaire dite de « Minutes de discussion de Paris », lorsqu’il s’agit de coups fourrés à plusieurs milliards, il utilise directement son directeur de Cabinet. En décembre 2013, alors que l’Assemblée nationale discutait des modalités de prévision des crédits devant servir à l’achat de l’avion, les choses sérieuses se passent en vérité loin, très loin de la Place de la concertation. Déjà, le 16 juillet 2013, le ministre-directeur de Cabinet du président de la République, Saidou Sidibé, représentant celui-ci, a signé avec Robert Peerlest pour le compte de Windstar capital corporation, une lettre d’intention à ce propos. Par cette lettre d’intention dont le Monde d’Aujourd’hui s’est procuré copie, les deux parties s’engagent, l’une à vendre, l’autre à acheter « l’appareil Boing BBJ, numéro de série 28976, numéro de matricule VP-BRM, avec deux moteurs GE CFM56 – 7B27/BE, numéros de séries 874457 et 875463 ainsi qu’un modèle APU Honeywell 131-9B, numéro de série P-5195, avec l’ensemble de ses équipements électroniques et accessoires, y compris notamment quatre réservoirs à fuel installés par PATS ». Le 29 juillet 2013 est la date à laquelle les deux parties sont convenues de signer le contrat d’achat.
On suppose que l’agenda ainsi déroulé a été scrupuleusement respecté. Conclusion, au moment où il fait introduire le projet de loi de finances dans lequel sont insérés les crédits nécessaires à l’achat de l’avion présidentiel, le Président Issoufou a déjà conclu un accord avec le vendeur qui n’est pas, contrairement à ce que soutient Mohamed Moussa, la maison Boeing. Le fait est grave pour ne pas être souligné. La lettre d’intention fixe les conditions auxquelles la vente doit être faite. Ainsi, Saidou Sidibé a engagé l’État du Niger au respect de conditions douloureuses pour un pays sahélien confront dans les mêmes moments à des questions alimentaires d’une rare acuité. Le prix de l’avion a été fixé à 39 millions de dollars, soit 19 500 000 000 (dix-neuf milliards cinq cent millions) en raison de 500F le dollar. Ce montant doit être payé en deux tranches versées dans un compte séquestre détenu par un tiers désigné par le vendeur et accepté par l’acheteur. Une première tranche de 2 000 000 de dollars, soit un milliard (1 000 000 000 fcfa) représente la caution dont le versement a mis fin à la commercialisation de l’avion par le vendeur et le réserve à partir de cet instant à l’acheteur. Attention, cette réservation n’est valable que pour un court un délai. La date fixée est le 15 août 2013, soit deux semaines pour que Sidibé et son mentor se déterminent. Tout est visiblement mis en place pour ne pas laisser l’oiseau s’envoler. Et si l’oiseau tient à grappiller quelques grains perdus de vue, ça arrange les affaires des deux parties. Il est prévu que la deuxième tranche, soit 18 500 000 000 FCFA, soit payée à la date ou autour de la date de transfert de propriété de l’avion, du vendeur à l’acheteur.
Malgré l’inscription budgétaire de 21 milliards et tous les mensonges servis au peuple nigérien, l’avion présidentiel a été acheté à crédit
On comprend bien aujourd’hui pourquoi les affidés de Mahamadou Issoufou disent ne plus vouloir parler de ce sujet pour laisser le soin à un juge de vider ce dossier qui est loin d’être clos. Contrairement à toutes les arguties développées par les députés de la majorité, particulièrement Assoumana Malam Issa, Ghousmane et les autres, rien n’est clean et le Président Issoufou pour lequel ils veulent servir d’écran protecteur, est touché de plein fouet. Pourquoi a-t-il cru bon d’écarter le ministre des Finances, Gille Baillet ? Où se trouve l’orthodoxie tant clamée ? L’achat de l'avion été rendu possible grâce aux bons offices d’Afribdrige Capital FZ LLE de Dubai qui s’est proposée « d’arranger le financement nécessaire pour l’acquisition de l’avion et d’arranger et de coordonner également l’inspection, la maintenance, l’achat des pièces détachées, la formation du personnel et les autres services devant rendre l’avion prêt pour une utilisation dès la réalisation de l’acquisition ». En cumulant le prix de l’achat et ceux des divers services générés par une telle transaction, on aboutit à la somme de 20 887 500 000 FCFA. Alors qu’on a fait croire aux Nigériens que l’avion a été acheté sur fonds propres de l’État du Niger, la lettre d’intention spécifie clairement que « l’acheteur contribuera pour un montant de 22 millions de dollars de ses propres fonds, soit 11 milliards de FCFA, au coût total de la transaction. Le reste sera couvert par le financement qui sera arrangé par Afribridge. Il est prévu que ce financement consistera en un prêt de deux ans au taux d’intérêt de 6% par an, avec des garanties comprenant une garantie souveraine et une prise de sûreté sur l’avion ». Par delà le mensonge fait au peuple nigérien sur les véritables contours de cette sale affaire, il faut bien s’interroger sur la destination réelle des crédits inscrits dans les différentes lois de finances, depuis trois ans selon le député Ghousmane, La réalité est là, sans commentaire. L’AVION PRÉSIDENTIEL A ÉTÉ ACHETÉ À CRÉDIT.
Le Fmi et la Banque mondiale qui s’agitent sur le cas du Mali, en ont pour leur compte. Depuis plus de trois ans, on soupçonne le gouvernement de Mahamadou Issoufou de détournement massif de fonds publics en inscrivant régulièrement des crédits pour ensuite contracter des prêts pour la réalisation des projets désignés. La preuve est désormais là, dans toute sa laideur.
Le Niger croule, les Nigériens s’appauvrissent davantage alors que l’État n’a jamais disposé d’autant de ressources que sous Mahamadou Issoufou
Les scandales financiers s’accumulent, le Niger croule sous le poids immense de préjudices indescriptibles mais le Président Issoufou et ses collaborateurs n’en ont cure. Pourtant, l’État n’a jamais eu autant de ressources que sous Mahamadou Issoufou. L’insécurité alimentaire ? Tant pis pour ceux qui ont nécessairement besoin de grains pour vivre. Le Niger est dernier depuis trois ans en matière d’indice de développement humain ? C’est dans l’imagination de ceux qui sont contre le pouvoir en place. Les Nigériens s’appauvrissent dangereusement alors que les oligarques du régime, pauvres comme des coolies de Singapour il y a à peine trois ans, sont devenus riches comme Crésus. Jamais dans l’histoire politique du Niger, des gouvernants n’ont autant menti au peuple. Jamais la corruption n’a atteint de tels sommets, devenant pratiquement un moyen légal pour s’adjuger des victoires politiques qu’on n’aurait pas autrement. Jamais l’affairisme n’a atteint une telle propension, les marchés publics empruntant des voies tortueuses dignes de la mafia sicilienne : Jamais un président de la République ne s’est montré aussi détaché des préoccupations de ses concitoyens, prenant l’avion pour aller se promener dans des réunions où sa présence importe peu tandis que des milliers de Nigériens attendent, dans l’anxiété, de savoir s’ils vont pouvoir effectuer le pèlerinage aux lieux saints de l’Islam. Tout est affaire pour gagner de l’argent, y compris le hadj pour le quel on attribue curieusement en définitive 8 000 pèlerins à une agence qui ne satisfait pas aux exigences édictées par les autorités saoudiennes. Qui en est réellement le responsable puisqu’on sait que le commissaire est hors de cause dans cette affaire ?
Il est prévu que ce financement consistera en un prêt de deux ans au taux d’intérêt de 6% par an
Renseignement pris, l’agence bénéficiaire du fameux quota de 8000 pèlerins appartient au fils de la Présidente de la Cour constitutionnelle. Allez y savoir ! Pourtant, pour éviter les foudres de quelques magistrats qui, manifestement, cherchent tout, sauf à protéger les intérêts du Niger, il faut fermer les yeux sur ce qui ressemble fort bien à du trafic d’influence. Le fils de la Présidente de la redoutable Cour constitutionnelle à qui, comme par hasard, on donne 8000 pèlerins à convoyer à la Mecque sur les 12 000 enregistrés cette année. Une belle moisson qui risque de ne pas tomber dans l’escarcelle du rejeton de feu Abdoulaye Diori. Bref, le Niger de Mahamadou Issoufou est un vaste champ d’affaires où tous les coups sont permis pour se faire de l’argent. Ce ne sont pas les faits qui vont nous démentir puisque, outre le scandale des 1700 passeports délivrés à des ressortissants d’un pays voisin et qui n’a ému aucun des responsables en charge des passeports – des perroquets en l’espèce – la livraison de l’avion présidentiel a été l’occasion pour les Nigériens d’avoir l’ultime confirmation qu’ils ont à faire à un vaste système de pillage jamais égalé.
En décembre 2013, les députés - du moins ceux de l’opposition - s’éreintaient à comprendre le jeu de passepasse digne des plus grands prestidigitateurs auquel le gouvernement de Mahamadou Issoufou se livrait pour dissimuler cette sale affaire, Aux commandes, le vieux Gilles Baillet que rien au monde, surtout pas son itinéraire, ne prédestinait à ce rôle de couverture et de protection de délits évidents.
Il explique avec force détails que la démarche du gouvernement est totalement transparente et qu’elle est strictement conforme aux procédures financières consacrées. Lorsqu’on connait un tant soit peu l’homme avant qu’il ne soit happé dans ce système mafieux qui s’apparente à une hydre, on ne peut que le croire. Erreur monumentale! Comme tous ceux à qui la société commet la maladresse de donner le Bon dieu sans confession, Gilles a appris à …, présentant les choses les plus calamiteuses pour le Niger dans un emballage assez attrayant pour ne pas les rejeter. Dans cette sale histoire d’avion présidentiel, il a bénéficié du soutien ferme de députés de la majorité qui, soit de mauvaise foi, soit par ignorance des vrais contours de l’affaire, se sont jetés dans la bataille pour prouver, sans arguments toutefois, que les agissements et les discours de l’opposition ne s‘expliquent que par un désir exagéré de précipiter la chute du pouvoir en place. Une belle tactique qui, si elle les exonère par rapport à l’esprit de solidarité, en fait des complices volontaires et/ou involontaires des préjudices causés au Niger et à son peuple. Dans ce bruit entretenu pour tirer le Président Issoufou hors d’affaire, on a vu récemment de gros bonnets de la trempe de Mohamed Moussa se vêtir de leurs costumes d’ancien travailleur de l’ASECNA venir tranquillement à la télévision démontrer la fausseté des accusations portées contre le pouvoir en place avec des arguments tirés par les cheveux. En vérité, tous ceux qui s’égosillent à défendre la régularité de la procédure d’achat de l’avion présidentiel doivent dorénavant se tenir à carreaux. Le roi est nu, ils n’ont plus rien à dire.
Affaire à suivre