Bamako - La Mission de l’ONU au Mali (Minusma) a annoncé vendredi avoir perdu au moins neuf soldats nigériens dans l’attaque la plus meurtrière contre ses troupes depuis son déploiement en 2013 dans le nord de ce pays toujours instable malgré une intervention armée internationale.
"Ce (vendredi) matin, un convoi des Casques bleus de la Minusma du contingent nigérien a été la cible d’une attaque directe alors qu’il se déplaçait vers Indelimane, sur l’axe Ménaka-Ansongo", dans la région de Gao (nord-est), a déclaré la mission onusienne dans un communiqué, qui ne fournit aucune indication sur les assaillants.
"Un bilan provisoire fait état de 9 morts", a-t-elle indiqué, soulignant qu’il s’agit "de l’attaque la plus meurtrière perpétrée contre la Mission de l’ONU au Mali" déployée depuis juillet 2013.
A New York, le porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric, a précisé que le convoi comportait un camion-citerne, ce qui peut expliquer l’ampleur du bilan.
Le président nigérien Mahamadou Issoufou a assuré qu’en dépit de l’attaque, les forces de sécurité de son pays n’allaient "pas reculer" au Mali dans "le combat contre le terrorisme".
"Elles doivent continuer à apporter leur contribution au sein de la Minusma", a dit M. Issoufou à l’antenne d’une télévision locale nigérienne, s’exprimant depuis Tahoua (ouest du Niger).
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon s’est déclaré "scandalisé" par ces évènements, les qualifiant de "grave violation des lois internationales".
La Mission de l’Union africaine au Mali et au Sahel (Misahel) a exprimé sa "consternation" en dénonçant des "actes ignobles". La Grande-Bretagne les a jugés "injustifiables", tandis que la France a appelé à ne pas laisser leurs auteurs impunis.
A l’initiative de Paris, le Conseil de sécurité a unanimement condamné l’attaque, affirmant qu’il s’agit d’un "crime de guerre au regard des lois internationales".
Selon une source militaire nigérienne jointe à Niamey, l’attaque, visant "une patrouille de ravitaillement d’un contingent de l’armée nigérienne", a été lancée "par des hommes circulant à moto".
- Résurgence des jihadistes -
D’après un officier nigérien de la Minusma, il s’agit d’une "embuscade tendue par les islamistes du Mujao" (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest).
Le Mujao, lié à Al-Qaïda, fait partie des groupes jihadistes qui ont contrôlé le nord du Mali pendant près d’un an, entre 2012 et 2013. Ils en ont ensuite été chassés, pour la plupart, par une intervention militaire internationale lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France et toujours en cours.
Une source militaire malienne à Gao a indiqué qu’auparavant, "les terroristes avaient menacé de commettre des attaques, des attentats à l’approche de la Tabaski" (la fête musulmane de l’Aïd el-Kébir qui sera célébrée samedi ou dimanche au Mali).
La semaine dernière, l’ONU s’était inquiétée de la résurgence
"incontestable" des jihadistes dans le nord du Mali, où plusieurs Casques
bleus ont été tués - au moins 30 - depuis juillet 2013, dont dix Tchadiens
dans une série d’attaques en septembre.
"Entre le 27 mai et le 15 septembre, les locaux et le personnel de la Mission ont au total fait l’objet de 27 attaques (15 attentats à l’engin
explosif improvisé ou explosion de mines et 12 tirs de roquettes ou obus de
mortier)", a indiqué M. Ban dans son dernier rapport sur la situation au Mali
daté du 22 septembre.
D’après ce rapport de M. Ban, au 1er septembre, la Minusma comptait près de 9.300 membres de forces militaires et de police (dont 1.211 Tchadiens et 868 Nigériens), essentiellement déployés dans les régions du nord.
Les Casques bleus ont quatre bases principales et des camps de plus petite taille dans diverses localités dans le nord mais font "régulièrement de longues patrouilles dans les zones rurales", selon l’ONU.
L’armée malienne, en pleine restructuration, n’a pas les moyens d’assurer la sécurité dans ces régions.
La Minusma envisage d’étendre sa présence sur le terrain, mais a notamment besoin pour ce faire de "progrès (...) dans les négociations de paix d’Alger", a déclaré Ban Ki-moon dans son rapport.
Bamako et six mouvements armés du nord malien, qui ont signé en juillet à Alger une feuille de route des négociations pour ramener la paix, sont engagés dans un deuxième round de discussions depuis début septembre mais aucune avancée notable n’a été enregistrée.