Le mercredi 13 février dernier, Gaya la capitale du Dendi a été secouée par des échauffourées entre la police et des jeunes conducteurs de taxis motos appelés communément « Kabou-kabou ». A l’origine de cette effervescence collective, l’application des mesures réglementant la mise en circulation de ces taxis motos qui se comptent par milliers dans cette ville.
Gaya ville cosmopolite débouchant sur deux frontières, est une localité où ce métier de taxis motos est encré dans les moeurs socioéconomiques de la population au point où il est devenu l’activité principale dominante de la jeunesse dont 90% s’y adonnent. Mais le pourrissement de cette situation est né du bicéphalisme et des querelles intestines que connaît le bureau des Kabou-kabou divisé en deux groupes rivaux. Rejetant la mesure que le montant de chaque dédouanement de moto passe par le bureau légal des Kabou-kabou qui transmettra à la douane, le chef de file de ce groupe en dissidence avait tout simplement été interpellé par la police. Voila comment les choses ont tourné en actes de vandalisme perpétrés sur des biens publics et privés.
C’est ainsi qu’une librairie avait été saccagée, une caisse de micro finance à moitié démolie et un véhicule de la police de Gaya endommagé. Livrés à une vive excitation, les vandales ont assiégé le commissariat de police de Gaya durant toute l’après midi du mercredi jusqu’à une heure tardive de la nuit, en menaçant de tout brûler. Grâce à l’intervention très responsable et courageuse du chef de canton de Gaya, la tension a pu être circonscrite jusqu’au lendemain matin c’est à dire le jeudi 14 février 2013, où les hostilités ont encore repris avec cette fois-ci une folle allure de soulèvement amplifiée par l’implication inattendue de certaines couches de la population. Toutes les grandes artères de la ville avaient été bloquées par des barricades et des pneus brûlés.
Très préoccupé par la tournure des événements, le gouverneur de la région accompagné du directeur régional de la police nationale Dosso, a effectué le déplacement sur Gaya où il a rencontré les différents acteurs. Concluantes ou pas, les négociations avaient un tant soit peu permis de ramener un semblant de calme qui a prévalu jusqu’à son retour à Dosso. Ainsi tout serait rentré dans l’ordre ce vendredi 15 février, si des éléments de cette même police en poste au pont Gaya-Malanville n’avaient pas commis l’erreur très malvenue d’interpeller une dizaine de conducteurs de Kabou-kabou pendant que la tension était encore perceptible dans toutes les rues. Atteignant vite sa vitesse de croisière, ce climat d’effervescence collective a poussé les manifestants à prendre directement pour cible le poste de police de Gaya.
Appuyés par les éléments de la garde nationale venus à la rescousse, policiers et gardes ont dû lutter toute la matinée du vendredi pour échapper à un lynchage public presque imminent. Face à une foule déchaînée et déterminée à leur faire la peau, certains n’ont pas hésité à faire usage de balles réelles lâchées probablement au jugé. C’est ainsi qu’un malheureux lycéen, fils d’un menuisier, assis devant l’atelier de son père reçoit une balle en plein front. Le nommé Zakari Issoufou conducteur de Kaboukabou qui était sur les lieux est aussi touché par une balle lui broyant pratiquement le bras. Quant à la troisième victime, elle serait un jardinier atteint à la jambe. Evacués au CHR de Dosso, le malheureux lycéen a rendu l’âme à quelques 40 km avant d’arriver à Dosso.
Devant l’ampleur de cette triste situation, le directeur général de la police nationale, le contrôleur de police Issoufou Yacouba s’était rendu précipitamment à Gaya le samedi 16 février où aussitôt sur place, il s’était attelé à faire régner la quiétude. Grâce donc à ses qualités de meneur d’hommes qu’on lui reconnaît, il a pu éteindre cette flamme qui aurait pu embraser toute la ville. Pour véritablement parler du pourrissement de cette affaire, il faut souligner qu’en dehors des agissements irrespectueux voir irresponsables reconnus aux conducteurs de Kabou-kabou, des sources racontent que cette fois-ci, les éléments de la police de Gaya ont beaucoup contribué à attiser ce feu par des attitudes provocatrices à l’endroit des populations qu’ils défiaient dans la rue.
La même source fait cas de rapports depuis toujours peu tendres entre les populations et certains policiers notamment le premier responsable qui ne serait pas en odeur de sainteté avec les conducteurs de Kabou- kabou. L’un dans l’autre, il est à noter qu’au niveau local, en dehors de la chefferie traditionnelle, toutes les autorités ont failli à leur devoir de bien gérer cette crise de façon à ce qu’elle ne finisse pas dans un bain de sang. Il est vrai que certains n’ont pas apprécié le retour immédiat du gouverneur à Dosso qui attendait une mission ministérielle le lendemain, mais sachez que le préfet du département quant à lui a jugé opportun d’aller à Tounouga chef lieu de commune rurale, pour présider un conseil communal pendant que le désordre régnait de plus bel dans la ville de Gaya.
Mais le pire dans leur quotidien est qu’au premier cas d’accident, ils prennent la poudre d’escampette, laissant la victime dans son agonie, soit en emportant la moto ou en la laissant selon l’opportunité de fuir. A Dosso, cette situation perdure depuis Août 2008 date de mise en circulation de ces motos sans qu’une solution définitive soit encore trouvée par les autorités communales qui ont montré leur limite après maintes tentatives de formaliser et discipliner le domaine. L’on se rappelle encore d’une de leur descente à la police où suite à une situation similaire à celle de Gaya, ils avaient menacé d’incendier le commissariat. A l’origine de nombreux cas d’accidents de la route, auteurs présumés de plusieurs situations liées à l’insécurité, les Kabou-kabou constituent une véritable source de préoccupation pour les populations qui sont les quotidiennes victimes.
Il appartient alors aux autorités au plus haut niveau de prendre toutes les dispositions qui s’imposent pour remettre chacun à sa place. Cela permettra sans nul doute de prévenir ce genre d’événement malheureux. Mais à Dosso depuis un certain temps, l’espoir renaît avec l’élection d’un nouveau bureau dont le président est perçu comme un homme de grande culture avec un niveau d’instruction acceptable, mais aussi beaucoup plus responsable que son prédécesseur.