C’est en présence d’une immense foule en liesse que le président de la République du Niger, El Hadi Mahamadou Issoufou, a procédé, jeudi dernier, au lancement des travaux de construction de la dernière section de l’axe transafricain Alger-Lagos. Ce dernier tronçon de 225 km qui vient d’être officiellement mis en chantier reliera l’Algérie depuis sa frontière d’In Guezzan à la ville nigérienne d’Arlit. Il ouvrira un corridor marchand au Niger, qui pourra exporter à moindre coût les produits de son économie en utilisant le port d’Alger, distant d’à peine 1000 km de la capitale nigérienne.
De notre envoyé à Niamey (Niger)
C’est à une entreprise privée algérienne (EPBTH) basée à Ghardaïa, en partenariat avec une société nigérienne, qu’a été confiée, au terme d’un appel d’offres international très sélectif, la réalisation de ce premier lot de 125 km qui vient d’être officiellement mis en chantier. Selon des informations très crédibles recueillies à Niamey, il est très fort probable que l’appel à concurrence pour la réalisation du second lot de 100 km soit remporté par l’entreprise publique algérienne EVSM (ex-DNC) très expérimentée en matière de réalisation de routes sahariennes. Depuis sa création dans les années 80’, cette entreprise aurait en effet réalisé plus de 2000 km de routes revêtues dans le Sahara algérien, a-t-on appris de bonne source.
En cette phase de déclin de la rente pétrolière, il est de bon augure que ces pionniers partent à la conquête de marchés internationaux avec, évidemment, l’espoir qu’ils soient rapidement suivis par d’autres entrepreneurs algériens. La mise en chantier de cette section de la Transsaharienne reliant l’Algérie au Niger apporte la preuve, s’il en fallait une, que la route de l’unité africaine longue de 4500 km n’est pas du tout tombée en désuétude, comme certains auraient tendance à le croire mais, qu’au contraire, cette gigantesque infrastructure routière, dont le suivi a été confié à des hommes d’envergure, continue inlassablement à dérouler son tapis et à distiller ses bienfaits à de nombreux pays d’Afrique.
Outre les retombées en matière d’aménagement du territoire attendues de ces milliers de kilomètres de routes goudronnées reliant plusieurs pays d’Afrique (accroissement des villes, création de nouveaux centres urbains, constructions d’équipements sociaux etc.), la Transsaharienne vise à générer la prospérité économique et sociale en favorisant les courants d’affaires à travers tout le continent africain et même au-delà. Les échanges facilités par cette voie rapide et sécurisée sont de nature à dynamiser les économies locales, à promouvoir l’investissement et à rationaliser le commerce, en réduisant notamment la contrebande qui saigne les économies des pays africains, et tout particulièrement l’Algérie qui en paye sans doute le plus lourd tribut en raison de la porosité de ses très longues frontières.
Beaucoup reste toutefois à faire en matière d’encadrement législatif et réglementaire, mais aussi et surtout de mise en place d’institutions (agences bancaires, postes de douanes, services de secours et de sécurité, stations-service, motels, zones d’activités et autres) pour donner vie à cette route, à défaut desquels le trafic voyageurs et les échanges commerciaux continueront à être insuffisants mais, pire encore, à faire de la Transsaharienne un corridor au service exclusif des importateurs, plutôt qu’à l’avantage des producteurs africains en quête de débouchés extérieurs.
Les Etats parties prenantes de la Transsaharienne sont de ce fait interpellés pour prendre rapidement et collectivement les décisions requises pour huiler les rouages grippés de la Transsaharienne. Comme l’a du reste suggéré, à juste titre, le président de la Banque islamique de développement, il n’y a rien de mieux qu’un sommet des 6 chefs d’Etat des pays concernés par la Transsaharienne pour sortir de la situation de blocage qui prévaut actuellement. En prenant les décisions qui s’imposent, ce sommet peut à l’évidence impulser une nouvelle dynamique à cette gigantesque infrastructure routière en phase avancée de construction, l’objectif étant d’en faire un des principaux vecteurs de développement économique et social des pays qu’elle traverse.
Nordine Grim