Paris - L'ex-otage français Serge Lazarevic, libéré mardi après plus de trois ans de captivité au Sahel, a estimé samedi que ses ravisseurs l'avaient capturé pour obtenir une rançon et affirmé avoir été torturé, dans le journal de 20 heures de France 2 et dans un document publié
ensuite par la chaîne.
Interrogé sur les motivations de ses ravisseurs, il a répondu : "je pense que c'étaient des hommes qui attendaient une rançon - la religion, je ne sais pas...".
M. Lazarevic témoignait pour la première fois sur ses conditions de captivité, après son retour en France mercredi. A la question de savoir ce qui avait déclenché sa libération, il a répondu : "oui je crois que c'est de l'argent, les gens qui prennent des gens en otages c'est pour de l'argent, c'est financier".
Alors que le ministre malien de la Justice Mohamed Ali Bathily a reconnu vendredi que quatre prisonniers avaient été libérés en échange de M. Lazarevic, l'ex-otage a indiqué : "je n'y ai même pas réfléchi, j'essaie de ne plus penser à ça, parce que ça me tire vers le bas".
Selon un document écrit publié plus tard sur le site de France Télévisions, il a expliqué à un journaliste de la chaîne qu'au début de sa détention, alors aux côtés d'un autre otage français, Philippe Verdon (exécuté début 2013), les deux hommes avaient été "battus, torturés".
"Très souvent, ils nous frappaient avec des câbles métalliques", a-t-il précisé, estimant que ce traitement était dû, pour partie, à la perception de ses geôliers, qui considéraient que M. Lazarevic était un "barbouze" ou un "mercenaire".
Il a réfuté ces qualificatifs : "je suis ouvrier du bâtiment, j'ai travaillé aussi dans la sécurité et comme maître d'oeuvre (...) Ce sont mes seules fonctions (...) J'étais là-bas pour une cimenterie qui devait être mise en place", a-t-il dit.
Il a décrit ses geôliers comme "très jeunes". "L'un d'entre eux m'a dit qu'il avait 14 ans. Ce sont de pauvres gens à qui on donne des armes et de l'argent".
Pendant sa détention, où il a passé une partie du temps enchaîné, ses geôliers lui ont très peu parlé, a-t-il indiqué. "Je n'étais plus un être humain, je ne sais plus qui j'étais", a-t-il précisé. "Il n'y a plus de temps, il n'y a plus de repères...".
"J'ai retrouvé le temps le jour où j'ai été libéré", a-t-il dit. "Je ne pensais même pas que les gens étaient autant mobilisés pour ma libération".
"Ça ne m'a jamais, mais jamais, traversé l'esprit de baisser les bras", a dit sa fille Diane, également sur le plateau du 20 heures.
Pour tenir, M. Lazarevic a expliqué avoir fait jusqu'à quatre heures d'activités physiques quotidiennes lorsqu'il n'était pas entravé.
Néanmoins, nourri essentiellement de pain durant sa captivité, ce quinquagénaire massif a reconnu s'être senti "très faible" lors de l'enregistrement de la dernière vidéo diffusée par ses ravisseurs, en novembre.
"Je me suis dit, ça va lâcher", a raconté celui qui a perdu plusieurs dizaines de kilos en détention.
M. Lazarevic a dit avoir appris à son retour le décès de Philippe Verdon, kidnappé en même temps que lui et retrouvé mort d'une balle dans la tête. Il a précisé avoir partagé avec lui environ quinze mois de captivité.
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