Les activités récréatives et culturelles sont le fort des communautés sédentaires. Dans le département de Gaya, jeunes-filles et garçons ne jurent que par la ''toumba'' pour les chaudes soirées au village ou dans les Maisons de la Culture. Pratiquement, toutes les zones du département ont leur propre groupe musical de ''toumba''.
La ''toumba'', c'est l'instrument local de percussion par excellence. Le plus souvent, il est fabriqué localement à partir d'une caisse métallique recouverte de peau. Pour assurer une bonne orchestration, deux caisses des ''toumba'' sont montées en tandem sur une plate-forme. Plus la caisse est évasée plus l'instrument donne des sons dans les notes plus graves que celles des tambours ou les tam-tams traditionnels. En instrument principal ou d'accompagnement, la ''toumba'' donne un rythme puissant, dense, percutant et irrésistible pour les jeunes du Dendi. La proximité avec le Bénin y est certainement pour quelque chose dans l'adoption de la ''toumba'' comme instrument musical dans le Dendi. En effet, la ''toumba'' tout comme le ''konkomba'' sont des instruments utilisés massivement dans les sociétés Fan, Ashanti et Yoruba. A Gaya, ce sont les gens de Tanda qui ont donné à l'instrument et à cette danse toute sa noblesse en mettant sur pied, dans les années 80, un orchestre qui a eu un succès fou au point de déménager carrément dans la ville de Gaya. Après un moment d'éclipse, le groupe musical Toumba de Tanda connait une renaissance depuis sa prise en mains par le nouveau parolier et chef du groupe Ousmane Bourey dit Alpha Blondi.
Ce quadragénaire, natif de Tanda, à 20 km de Gaya, est une vedette que les organisateurs de spectacles et de cérémonies s'arrachent dans la ville de Gaya et ses environs. Il est souvent invité pour se produire à Dosso ou Niamey la capitale. Quand le groupe n'a pas d'engagement ailleurs, il se produit régulièrement dans le quartier animé de Koiratégui dans la ville de Gaya. Alpha blondi est devenu le surnom et le nom de scène de Ousmane Bourey, non pas en référence à la star du reggae ivoirien, mais par simple quiproquo. Avant de commencer sa carrière musicale, Ousmane Bourey avait quitté jeune son village pour continuer des études coraniques à Kaduna, au Nigeria. Revenu au village, l'imam du village, qui a constaté son excellent niveau en études coraniques, a tapoté la tête de Ousmane Bourey pour faire ce commentaire en langue Zarma : ''Ni ya alfa bollondi koy no'', c'est-à-dire ''toi, tu es un marabout qui a de la cervelle''. Une fois devenu musicien, ses fans ont transformé ce surnom en ''Alpha Blondi''.
Quand Alpha Blondi est sur la ''toumbatt, le spectacle se joue à guichets fermés. Même de loin ses fans veulent l'entendre entonner ses chansons à succès comme ''Marfa'', ''Mounassari'' ou ''Yan kwaya''. Parolier et compositeur, Alpha Blondi, loin d'imiter ou ''voler'' les chansons des autres, s'emploie toujours à faire ses propres créations. Son titre ''Marfa'' par exemple est le produit de sa propre recherche dans les faits et mythes de la société Dendi. Il s'agit de l'histoire d'un énorme boa qui a vécu dans les crevasses des collines de la zone de Tanda. Le boa sortait régulièrement pour s'attaquer aux gros animaux domestiques et chaque fois qu'il sévissait, la colère des villageois et l'hostilité à son égard grandissaient. Excédés, les villageois montèrent une expédition avec toutes sortes d'armes et gourdins pour en finir avec le monstre. Mais une fois devant le trou du boa, on ne trouva aucun téméraire pour y pénétrer et le faire sortir. On en était là quand un vieil homme arriva devant la foule et s'informa de ce rassemblement guerrier. Quand on lui expliqua le but, le sage homme dit que c'est là une entreprise vouée à l'échec, mais que lui a la solution. Il prit un caillou sur lequel il récita des versets sains et le jeta dans le trou. Sitôt fait, un grondement suivi de vibrations se fit entendre et l'immense serpent abandonna sa tanière sous les yeux ébahis et apeurés des guerriers. Le vieux sage expliqua à la foule que tant que le caillou s'y trouvera le boa ne peut pas rentrer dans sa tanière. Le monstre s'en alla ailleurs et le village et la campagne environnante recouvrirent leur quiétude. Dans ses autres chansons comme ''Yan kwaya'', il appelle la jeunesse à abandonner ou à ne jamais s'adonner à la tentation de la drogue qui n'est qu'un facteur de destruction d'une société. Il a encouragé également le civisme à travers sa chanson ''les Communes'', expliquant aux populations que sans l'engagement et la détermination de ses habitants, une commune ne peut pas être efficace. Bref, avec peu de moyens et un talent artistique certain, Ousmane Bourey dit Alpha Blondi est en train de reprendre, avec un style à lui, le flambeau de ses prédécesseurs à la tête du groupe Toumba de Tanda. Car avant lui, feu Saley Tanda avait admirablement tenu le groupe en ''faisant feu'' avec sa chanson ''Ma Irkoy nwarray société ma siyé da banda'', autremenent dit, ''Prions Dieu pour que notre société ne recule pas''. Puis Zakari, lui aussi de Tanda, lui a succédé à la tête du groupe avec la chanson phare ''Irkoy ma boryandi Niger laboga'' autrement ''Que Dieu bénisse le Niger''.
Mahaman Bako, envoyé spécial