Depuis Paris, où il réside après son départ précipité du Niger, Hama Amadou a accepté d’être notre invité. L’entretien qu’il nous a accordé est d’une grande richesse humaine et politique. Hama nous parle de tout : du présumé trafic ou supposition d’enfant qui a vu l’incarcération de son épouse, de la farouche volonté du Président Issoufou MAHAMADOU d’en finir avec lui, dans la perspective de l’élection présidentielle de 2016, de la réforme de la justice et de la défense des libertés individuelles et collective, de la montée en filigrane de d’une économie de type criminelle….
Niger Voice : Vous êtes sur Niger Voice. Aujourd’hui nous avons, en interview exclusive, une personnalité politique nigérienne, Son Excellence Monsieur Hama Amadou. Chers auditeurs, merci pour la fidélité. Ensemble, nous allons traverser l’océan pour retrouver notre invité qui nous attend en France, plus précisément à Paris, Monsieur Hama AMADOU, bonsoir.
Hama HAMADOU : Bonsoir.
Niger Voice : Monsieur Hama AMADOU vous aviez commencé votre carrière, dans la fonction publique nigérienne, très jeune. En 1971, vous n’aviez que 21 ans, avec toutes les bénédictions qui ont été réunies, la chance, la discipline, et surtout l’intelligence, vous avez gravi les échelons de façon extraordinaire. Voyons. De 1971 à 1991, vous futes deux fois Préfet Adjoint, Secrétaire Général de Préfecture, Sous Préfet d’Arrondissement, Directeur Général de la radiodiffusion et de la télévision du Niger (ORTN), deux fois Directeur de cabinet, d’abord sous le Président Seyni KOUNTCHE, ensuite sous le Président Ali SAIBOU, ministre ….
Vous fûtes élu le premier Secrétaire Général du Mouvement National pour la Société Nationale de Développement, l’ancien parti-Etat lors de son congrès extraordinaire en mars 1991. Justement en 1991, le vent de la démocratie souffla sur le Niger avec la tenue de la Conférence nationale souveraine, de juillet à novembre 1991. Et là, on ne cesse pas de le dire, c’est grâce à votre engagement et à votre courage politique que le MNSD doit sa survie en tant que formation politique.
En Février 1993, vous fûtes élu pour la première fois Député national au titre de la communauté urbaine de Niamey, au compte de votre formation politique, le MNSD NASSARA. Ensuite, le 21 Février 1995, vous fûtes nommé, pour la première fois, Premier ministre, sous la 3ème République, avec le président Mahamane Ousmane. Le 3 janvier 2000, sous la 5ème République du Président TANDJA Mamadou de nouveau vous fûtes nomme Premier ministre.
Récemment à la veille des élections de 2011 vous créez votre formation politique, dénommé le MODEN FA LUMANA AFRICA. A la suite de ces élections, votre formation politique est arrivée en troisième position, ce qui vous a d’office permis d’être élu au poste de Président de l’Assemblée Nationale du Niger. A ce titre, vous devenez ainsi la deuxième personnalité au sommet de l’état. Vous avez eu un parcours plein de succès politiques et plein d’expérience dans la gestion de l’Etat. C’est ce qui fait qu’on ne peut pas parler de la démocratie nigérienne sans parler de vous.
A votre avis, Monsieur Hama AMADOU, comment va la démocratie nigérienne ?
Hama AMADOU : Sous la 7ème République, l’impression très nette se dégage que la démocratie est encore une fois en difficulté en raison des pratiques anticonstitutionnelles, anti républicaines, et une tendance très nette qu’on peut porter atteinte aux libertés individuelles et politiques à travers l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire. Et je crois que, malgré tout, la démocratie nigérienne ira en se renforçant dans la mesure où en toute circonstance, il y a des forces politiques qui se lèvent pour la défendre.
Nous l’avons fait à maintes reprises et je pense que nous continuerons à le faire. Pour ma part, j’ai toujours été dans le combat pour la préservation de la démocratie et j’ai toujours veillé à ce que les principes soient respectés, que je sois au pouvoir ou dans l’opposition. Dans tous les cas, je me suis toujours efforcé de respecter le principe car sans aucun principe, aucun système ne peut avancer, un homme ne peut avoir ni morale, ni vision d’intérêt général.
Niger Voice : Oui, justement, Monsieur Hama AMADOU, abordons « l’affaire dite du trafic d’enfants du Nigéria » qui vous concerne personnellement. Ce que nous avons remarqué, c’est qu’il y a trop de confusion autour de cette affaire. Un ministre d’Etat en pleine fonction est arrêté et mis en prison. Mais du fond de cette prison, il a été porté à la tête d’un parti politique qui ne lui appartient même pas. Plusieurs autres personnes, dont votre femme, sont arrêtées. De quoi s’agit-il, en fait ?
Hama AMADOU : Il s’agit des stratégies que le parti au pouvoir essaie de mettre en œuvre pour écarter des élections de 2016 tous les adversaires sérieux, dont votre serviteur. Alors, après avoir tenté depuis Août 2013 toutes sortes de méthodes visant à m’éliminer du jeu politique et ayant échoué, parce que, malgré leur volonté de nuire, ils ont quand même été contrariés par un certain nombre de principes démocratiques dont le comportement très honorable d’un très grand nombre de députés nigériens. Alors, ils ont inventé cette histoire de Traffic de bébés. Quels sont leurs arguments ? Ma femme aurait accouché dans une clinique au Nigéria. En fait, ils ont juste suivi un documentaire sur France 24 qui a traité de ce sujet au Nigéria. Ils sont donc allés au Nigéria chercher des informations éparses à travers la police qui a fait un rapport plus ou moins brumeux. Et sur cette base, ils ont décidé que c’est le meilleur moyen de m’éliminer de la scène politique et ils ont incriminé ma femme. Seulement, vous noterez que le Procureur de la République, lui-même, le jour où il a pris la parole, a dit qu’il dispose d’indices. Et où sont ses indices ? Les indices, c’est d’être allé accoucher au Nigéria et d’en être revenu par voiture et non par avion ; alors même que tout le monde sait qu’un bébé qui vient de naître ne peut pas prendre l’avion parce que les directives internationales de l’OACI l’interdisent. Ils disent ensuite que les gens sont passés par Cotonou où ils sont allés dans une clinique. Et ce sont là, les éléments constitutifs d’un trafic d’enfants. Vous noterez que jamais, ils n’ont évoqué l’arrestation des responsables de fabrication d’enfant ou de vente de bébés au Nigéria. Jamais vous n’avez entendu le Nigéria, l’Etat fédéral du Nigéria s’impliquer dans cette affaire. Et jamais vous n’avez entendu un officiel de ce pays en faire un problème. Mais au Niger où l’affaire ne s’est pas déroulée, pour éliminer le Président de l’Assemblée Nationale, on a inventé cette histoire de bébé. Les gens doivent comprendre que c’est uniquement dans une perspective des élections de 2016 que Issoufou MAHAMADOU a inventé cette histoire pour me nuire avec l’intention de me juger et de veiller à ce que je sois condamné pour être disqualifié aux élections de 2016. En dehors, il n’y a absolument rien du tout. L’homme a ses intentions, il a son programme mais les intentions et le programme de Dieu sont au dessus de lui et de tout son programme.
Niger Voice : Parlons toujours de la justice. Vous avez tout de suite fait cas du Procureur de la République. Quand on écoute votre discours tenu au cours du congrès de votre parti le 7 Décembre 2014, vous avez parlé de la séparation des pouvoirs et vous proposiez même de nommer le Procureur de la République par le Conseil Supérieur de la magistrature. Dites nous en plus ?
Hama AMADOU : Vous savez le principe de la Constitution du Niger, est basé sur la séparation des pouvoirs : le pouvoir législatif, le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif. Cette séparation a été déjà développée en théorie par Montesquieu qui a suggéré que pour une meilleure harmonie, et pour éviter l’arbitraire et la tyrannie que le pouvoir puisse arrêter le pouvoir.
Quand un des seuls pouvoirs dispose de trop de pouvoir, il finit inévitablement par nuire à la liberté individuelle et collective. Donc, on met en place un système où les pouvoirs sont indépendants les uns des autres. Pour fonctionner sur une base selon laquelle ses pouvoirs sont pensés et mis en place et non sur la base des relations de domination d’un pouvoir sur l’autre.
Mais, tout le monde sait qu’en Afrique le pouvoir en place a tendance à s’accaparer de tout le pouvoir et réduire le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire en des formes de croupions. Ici, le pouvoir exécutif fait ce qu’il veut au-delà même de ce qui est convenable et souvent en violation des dispositions de la Constitution.
Par rapport au pouvoir judiciaire, la manière dont le système est conçu au Niger fait qu’on dit que les « juges assis » sont indépendants. Mais il y a la justice debout, c'est-à-dire les Procureurs de la République qui sont en quelque sorte les avocats, comme les autres avocats, mais les avocats de la société qui eux sont nommés par le ministre de la justice dépendent du gouvernement. A ce titre, ils ont des pouvoirs pour diriger la police judiciaire. De cette façon, ils sont dépendants du pouvoir exécutif avec le contrôle d’une force qui leur permet de mettre en exécution des décisions qu’ils veulent à l’intérieur de l’appareil judiciaire. Ils ont trop de pouvoir. J’ai pensé que, pour préserver la liberté du citoyen, pour préserver le principe de la présomption d’innocence, il faire bouger les lignes, parce que chacun est supposé innocent jusqu’à preuve du contraire. Au Niger, c’est l’innocent qui est considérée comme coupable jusqu’au moment où on trouve qu’il est innocent. On a inversé les règles et cela c’est le procureur de la République à travers le gouvernement qui le fait. Maintenant, si nous faisons en sorte, que le Procureur ne soit plus nommé par le ministre de la justice mais, au même titre que les autres juges, par le Conseil Supérieur de la Magistrature, ils prennent plus d’indépendance par rapport au ministre de la justice. De surcroit, j’ai dit qu’un Procureur de la République ne doit pas dépasser trois ans en poste, temps pendant lequel il est inamovible. De cette manière, ils deviennent indépendants et ils deviennent simplement des avocats pour défendre la société, à côté des juges qui jugent les conflits entre les citoyens entre l’Etat, la société et les individus qui violent les règles de la République. De cette manière, vous voyez que la justice est globalement indépendante, le pouvoir exécutif n’a plus les moyens d’utiliser ses gens pour essayer de travestir la réalité ou d’imposer leurs règles. Il s’agit de faire en sorte que la carrière du juge, des Procureurs de la République, ne dépendent plus du pouvoir exécutif mais dépendent du Conseil Supérieur de la Magistrature qui, d’ailleurs également doit devenir indépendant parce qu’on doit arriver au moment où le Président de la République ne peut plus présider le Conseil Supérieur de la Magistrature.
Si vous prenez le cas des USA, les Attorneys, comme on les appelle, tous sont élus, ils ne sont pas nommés. Et à partir de ce moment, ils font ce que veut la société et non ce que veut le pouvoir exécutif. C’est un peu dans cette direction qu’il faut aller.
J’ai aussi proposé que les juges soient des spécialistes. Le juge qui traite de la justice commerciale, la justice pénale et la justice économique, doivent avoir des formations pointues en ces matières. Il faut faire en sorte que personne ne juge, à lui seul un dossier. Il faudrait avoir deux ou trois juges qui jugent une affaire et non pas un seul, pour mettre un terme à la corruption.
Niger Voice : Monsieur Hama AMADOU, vous avez aussi parlé de la police judiciaire. Vous disiez dans votre discours que la police judiciaire doit être exclusivement sous l’autorité des magistrats. Dites nous en plus.
Hama AMADOU : Actuellement la police judiciaire dans le principe dépend du Procureur de la République. Mais il dépend actuellement du ministre de l’intérieur qui a la carrière de la police judiciaire entre ses mains. Quand le Procureur donne un ordre et que le ministre en donne, d’après vous quel sera l’ordre qui va être exécuté ? Et le ministre de l’intérieur, peut utiliser la police pour fabriquer du faux sur n’importe quel citoyen.
Niger Voice : Ce n’est pas tout. Vous pensez, toujours dans le domaine de la justice, qu’il y a la nécessité d’une reformation des lois afin que les citoyens ne soient plus victimes de certains abus.
Hama AMADOU : Je vous donne un exemple. Aujourd’hui, si on vous arrête, on croit que vous avez fait une faute, mais on n’a aucune assurance que vous avez commis cette faute-là. Le Procureur vous arrête. Il peut directement vous mettre en prison ou il vous envoie chez un juge d’instruction qui peut lui aussi directement vous mettre en prison. On peut vous garder en prison pendant un an sans que quiconque ne puisse demander quoi que ce soit. Il en sera ainsi jusqu’à ce que le juge croie qu’il a fini de chercher et que vous êtes innocent. Sur le coup, vous avez fait gratuitement un an de prison. Pour moi, il faut faire en sorte que le juge ou le Procureur n’ait plus la possibilité de prendre un citoyen et de le jeter en prison pour un rien. Aux USA par exemple, avant d’arrêter quelqu’un on fait une enquête complémentaire. Et quand l’enquête aboutit, on des preuves de la culpabilité, on arrête la personne. Au Niger, c’est le contraire. On vous arrête d’abord et on cherche les preuves après. Celle loi-là n’est pas bonne, il faut la changer. Et de l’autre côté, le juge, entre le moment où il conduit l’instruction d’un dossier et le moment où ce dossier passe en jugement, il peut se passer trois, quatre voire cinq ans. Ce n’est pas normal. Ces aspects de notre système judiciaire doivent être revus et corrigés en conséquence. C’est pourquoi, je dis que les lois dans notre pays doivent être reformées ; il faut limiter le pouvoir du juge en lui enlevant sa capacité à prendre quelqu’un et à la jeter en prison. Il faut des garanties très fortes pour que le citoyen soit assuré qu’il a une certaine sécurité judiciaire.
Niger Voice : Dans votre discours auquel nous faisons toujours référence, vous avez aussi évoqué le comportement du gouvernement nigérien vis-à-vis des djihadistes et vous pensez que la situation peut être pleine de risques pour le peuple nigérien. Dites-nous en plus.
Hama AMADOU : Bien sûr. En Afrique de l’Ouest, au niveau de la CEDEAO, vous avez 15 Etats. Ces quinze Etats sont menacés de la même manière par le terrorisme islamique. Le Mali lui-même qui est occupé, est ce que vous écoutez ses dirigeants tenir des propos extrémistes, va-t-en-guerre contre les djihadistes ? Au cours des rencontres internationales, c’est toujours Issoufou Mahamadou qui prend la parole pour avoir des propos très durs et va-t-en-guerre. On peut participer à une coalition, jouer son rôle avec efficacité sans faire le fanfaron. Plus vous êtes discret, plus vous agissez conformément aux engagements que vous avez pris et plus vous êtes dans la masse, parce que vous n’êtes pas suffisamment fort pour vous défendre tout seul, pour attirer uniquement le danger sur vous et votre pays. Aujourd’hui, c’est ce qu’il fait et c’est que son ministre de l’intérieur fait ; c’est ce que son ministre des affaires étrangères fait. Chaque fois qu’ils ouvrent la bouche, ils ont des propos extrémistes. Le ministre de l’intérieur Massaoudou est allé jusqu’à dire qu’il faut attaquer la Libye, un pays voisin, un pays dans lequel le désordre est total vous appelez à ce que l’on l’attaque. Les djihadistes ont leurs bases là-bas et qu’en dites-vous ? Avant qu’on ne les attaque, eux ils vont vous attaquer. C’est pour cette raison que je dis que le Niger a besoin d’être dans un cadre de solidarité internationale pour défendre la paix nationale et internationale, mais il n’a pas besoin de faire du bruit pour se distinguer et attirer la foudre des islamistes sur lui.
Niger Voice: Et comment peut se manifester ce danger pour le peuple nigérien ?
Hama AMADOU : Actuellement, quand le MUJAO attaque le Niger, est ce que c’est Issoufou MAHAMADOU qu’ils attaquent ? C’est la population qu’ils tuent à chaque fois : des militaires, des gendarmes, des gares et des villageois. Vous avez entendu qu’un membre du gouvernement s’est blessé dans l’affaire ?
Niger Voice : Nous allons maintenant aborder l’économie. Dans votre discours qui nous sert de référence, vous avez dit que l’économie du Niger est en train d’évoluer vers une économie criminelle. Vos explications ?
Hama AMADOU : Ca veut dire que quand vous regardez ce qui se passe maintenant, il est clair qu’il y a dans le système de TARAYA des gens qui sont dans le trafic de la drogue et des armes. En ce qui concerne la gestion du pétrole de l’Etat, c’est une mafia qui s’en occupe. L’impact sur le budget du Niger est nul mais il y a des individus qui en profitent grandement. Vous avez de l’argent qui circule en haut de manière incroyable, mais en bas, tout le monde vous dit qu’il n’y a pas d’argent, on est pauvre, tout le monde se plaint. Le système de l’économie criminelle, c’est justement de rester toujours en haut entre les mains des clans, dont les activités sont souvent louches et c’est dangereux pour le pays. Et c’est cette situation qui prévaut actuellement au Niger. La grande masse souffre et quelques privilégiés se paient des hôtels de luxe et vivent dans l’opulence et laisse tout le monde croupir dans la misère et la pauvreté. C’est une réalité aujourd’hui. Et je pense que l’économie du Niger est entrain d’évoluer vers une économie de type criminel.
Niger Voice : Vous avez dit toujours dans votre discours qu’il faut s’instruire de l’exemple malien. Pourquoi cette comparaison ?
Hama AMADOU : A l’époque de l’arrivée des djihadistes au Mali vous savez comment le gouvernement de ce pays se comportait à leur égard. La drogue, les armes circulaient et se vendaient. Le système du gouvernement a fini par être gangrené par cette main mise des mafias. Le résultat final, c’est quoi ? C’est que le Mali a failli perdre son existence ; en fait, c’est cette économie criminelle dans laquelle le régime était impliqué qui en était la base. Je dis qu’il faut regarder cet exemple et éviter de recommencer les mêmes pratiques.
Niger Voice : Vous avez choisi de quitter le Niger. Est-ce une stratégie de défense contre un pouvoir, comme vous l’avez dit, qui cherche coûte que coûte, à vous anéantir. Dites-nous en plus.
Hama AMADOU : Lorsque je suis parti du Niger, le gouvernement s’est empressé de publier un communiqué pour dire que je suis un lâche, que j’ai abandonné ma famille. Ils ont oublié que nous faisons de la politique. Je sais que je suis innocent et un très grand nombre de nigériens savent très bien que je n’ai rien à me reprocher. Ils savent aussi que l’objectif de ceux qui ont monté le dossier est de m’éliminer politiquement, sinon physiquement du Niger. Un homme politique avisé ne donne pas satisfaction à son adversaire, sous le prétexte qu’il lui faut être courageux. Le courage, ce n’est pas en termes de témérité qu’il faut l’analyser. Le courage, c’est la capacité de faire face à n’importe quelle situation et de se mettre dans des conditions où l’on mène le combat jusqu’à son terme et que l’on ait les chances de gagner. Ce n’est pas se soumettre à l’adversaire ; ce n’est pas se résigner à son sort, ce n’est pas faire de la fanfaronnade et vouloir provoquer un système plus fort que vous. Quel est le nigérien dont l’Etat n’est pas plus fort que lui ? Qu’on me le dise. Qu’on me demande d’être courageux en luttant contre l’Etat du Niger avec lequel j’ai des problèmes politiques, des hommes politiques qui utilisent l’Etat du Niger pour la guerre, est une vue de l’esprit. En bon guerrier, je constate le rapport des forces, je prends du recul, je m’organise pour créer les conditions de gagner cette bataille. Pour moi, il est important que dans le problème politique qui m’oppose au gouvernement et à Issoufou MAHAMADOU que je crée les conditions pour qu’ils ne gagnent pas. Et je ferais tout pour qu’ils ne gagnent pas quelle que soit la position qu’ils envisagent contre moi.
Niger Voice : Vous avez annoncé votre candidature à l’élection présidentielle de 2016. A quand le retour au Niger ?
Hama AMADOU : Lorsque les conditions seront favorables pour que mon retour au Niger crée les conditions d’une victoire de l’opposition aux élections. Et le moment viendra.
Niger Voice : Parmi tous les présidents qui se sont succédés au Niger, de Diori à Issoufou MAHAMAOU, en passant par les généraux Seyni KOUNTCHE, Ali SAIBOU, Ibrahim Baré MAINASSARA, Salou DJIBO, WANKE, qui pourrait être un modèle pour vous si vous étes élu Président de la République ?
Hama AMADOU : Je ne connais pas le Président DIORI. J’étais très jeune quand il était au pouvoir. Quand j’ai commencé à travailler, il était au pouvoir mais je n’avais pas de sentiments politiques quand il faisait son temps ; donc il ne peut être un modèle pour moi. Mais il a été un président internationalement reconnu en tant qu’homme de qualité. Par contre, le président Seyni KOUNTCHE, lui je le connais ; je suis resté avec lui, j’ai été son Directeur de cabinet, et jusqu’à sa mort. Ce qui m’a permis de savoir comment il agit et de comprendre comment il analyse les problèmes de l’Etat et les solutions qu’il préconise dans telle ou telle situation. J’ai vécu avec le président Ali SAIBOU de la même manière, tout comme j’ai travaillé avec le président TANDJA. Ce sont des gens que je connais bien. Mais pour moi, comme pour le président TANDJA, Seyni KOUNTCHE reste notre modèle commun. Sur le plan moral, sur le plan de l’intégrité, sur le plan de l’amour du pays, indiscutablement, c’est un homme qui avait des qualités et des principes. On tentera de lui ressembler, mais je sais que c’est un homme d’une grande trempe que Dieu nous a enlevé.
Niger Voice : Votre message à l’endroit de la diaspora nigérienne ici aux USA, au Canada, en Afrique, en Asie, en Europe…
Hama AMADOU : Je vais lui dire simplement que quelque soit l’endroit où ils vivent, les nigériens ne doivent pas oublier qu’ils sont d’abord des nigériens et qu’ils le veuillent ou non, les conditions d’existence de leur pays d’origine va impacter sur leur vie quel que soit l’endroit où ils se trouvent. Je voudrais que la diaspora nigérienne prenne conscience qu’elle peut aider le Niger, dans leurs activités, dans leurs spécialités et dans tout ce qu’ils peuvent faire. Ils doivent même pendant qu’ils sont aux USA ou ailleurs, penser à faire des réalisations, à investir au Niger.
Je voudrais en tout cas vous féliciter personnellement pour votre belle initiative. Il est très important que des nigériens aux USA, éduqués aux USA n’oublient pas le Niger, qu’ils sachent qu’ils on un pays en dehors des USA.
Interview réalisée par Mohamed SEIDOU au service de Niger Voice