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Violences antichrétiennes au Niger, une religieuse témoigne
Publié le samedi 31 janvier 2015   |  la-croix.com


Niger
© Autre presse par DR
Niger : 300 chrétiens sous protection policière à Zinder


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Sœur Josée-Myriam était religieuse assomptionniste à Zinder, au Niger. Vendredi 16 janvier, avec quatre autres sœurs et trente paroissiens, elle a dû se cacher pendant que des manifestants anti-Charlie Hebdo saccageaient leur maison, leur église et leur école.
Depuis le Burkina Faso, où elle a pu s’enfuir avec ses consœurs, elle a accepté de raconter à La Croix cette terrible épreuve.

Pour les cinq sœurs de Zinder, tout a commencé le jeudi 15 janvier. « Vers 10 heures, nous avons vu que des tracts circulaient dans la ville, raconte sœur Josée-Myriam. Ils disaient qu’on avait profané l’image de Mohammed à travers Charlie Hebdo, et que tous devaient marcher le lendemain pour montrer leur fureur et défendre l’image de leur prophète. »

Les religieuses contactent alors le curé de la paroisse, pour lui montrer ces tracts. Celui-ci décide de solliciter les autorités de la ville : le gouverneur, le maire, la gendarmerie et le commissariat. « Il leur a adressé une lettre pour demander qu’on protège nos personnes, nos œuvres et l’église. Ils nous ont rassurés en garantissant qu’ils prendraient toutes les précautions pour qu’on ne puisse pas s’attaquer à nous ». Mais l’ambiance est devenue de plus en plus inquiétante. « Le soir, après la messe de 19 heures, des amis ont commencé à nous appeler pour nous dire qu’il valait mieux quitter notre maison, parce que ce qui allait se passer n’était pas si simple que ça », se rappelle sœur Josée-Myriam.

« LES MÉCRÉANTS, LES CHRÉTIENS, AUJOURD’HUI NOUS ALLONS VOUS TUER »
Le lendemain, la situation a dégénéré dès 8 heures du matin. « Des enfants de l’école primaire ont commencé à nous jeter des pierres en nous disant ’les mécréants, les chrétiens, aujourd’hui nous allons vous tuer’, et ils ont posé un bidon d’essence à côté de l’église. »

Après la messe, toute la communauté s’est réfugiée dans la salle paroissiale, et le curé est retourné auprès du gouverneur pour l’alerter. Celui-ci a promis au prêtre de se rendre en personne à la paroisse à 11 heures. « Mais à 11 heures, comme il n’était pas arrivé, le curé est reparti le voir, pour lui dire que toute la journée nous avions vu des motos circuler, avec des banderoles qui disaient ’Allah Akhbar’ et que nous ne savions pas ce que cela voulait dire. »

N’ayant pas obtenu davantage de réaction du gouverneur, le curé prend alors les choses en main. « Vers 11 h 30, il nous a dit d’emmener tous les véhicules dans la clôture, car l’église, la maison des sœurs, la salle paroissiale et l’école sont dans la même clôture. Et vers 12 h 45, il nous a demandé de venir nous réfugier. Nous étions 34 personnes. Vers 13 h 45, il nous a mis dans une cachette, et il est resté dehors pour voir ce qui se passait », rapporte sœur Josée-Myriam.

« DÈS QUE LA PRIÈRE A ÉTÉ FINIE, ILS SE SONT JETÉS SUR L’ÉCOLE »
C’est peu de temps après, à la fin de la prière musulmane du vendredi, que la situation a explosé. « Dès que la prière a été finie, ils se sont jetés sur l’école. Ils ont tout pillé et tout brûlé. Puis ils se sont jetés aussi sur la maison paroissiale. De la même façon à l’église, ils ont brûlé, pillé, profané les statues... Et ils ont fini par la maison des sœurs. »

Les religieuses et paroissiens restent enfermés, témoins impuissants du saccage de leurs bâtiments. « Nous étions là, on entendait tout le bruit, se souvient sœur Josée-Myriam. Et quand ils ont fini de tout brûler, ils ont dit ’Où sont-ils ? Nous allons les chercher, nous allons les tuer.’ Ils ont brûlé les voitures, et la fumée des voitures rentrait dans notre cachette. ça nous empêchait de respirer. Ils ont essayé d’enfoncer la porte de notre cachette. Deux personnes la retenaient de l’intérieur, une sœur et une dame laïque, jusqu’à ce que la voiture en face de la porte explose, et là, ils ont fui. Ils ont continué à nous chercher ailleurs en jetant des pierres. »

Le calvaire va durer plus de trois heures. « On appelait au secours. Une autre sœur a reçu un appel de l’archevêque de Niamey qui lui demandait ce qu’il se passait. Elle a répondu : « nous sommes en danger ».

« DIEU A FAIT UNE MERVEILLE : NOUS SOMMES SORTIS INDEMNES »
L’archevêque contacte alors les autorités de Niamey, pour leur demander d’alerter celles de Zinder, qui n’avaient envoyé que quelques policiers, très vite débordés par les manifestants. « Vers 15 heures, ils ont envoyé les militaires pour nous secourir. Et ils ont mis très longtemps à les disperser, car c’est seulement à 16 h 30 qu’ils nous ont dit de sortir. »

Pour la religieuse, l’issue de cette terrible journée tient du miracle. « Nous sommes sortis avec tous nos corps noirs de fumée. Dieu a fait une merveille : nous sommes sortis indemnes, personne n’était brûlé, ni asphyxié. Nous étions sans défense mais Lui était là. Dans la cachette, le plus jeune avait 2 ans, et la plus âgée avait 75 ans. Et quand nous sommes sortis, nous avons rendu grâce à Dieu, on a chanté... Et puis on nous a envoyé des ambulances, et on nous a emmenés à la caserne. »
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